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Poésies (Desbordes-Valmore, 1822)/Clémentine

La bibliothèque libre.
Théophile Grandin (p. 176-177).

CLÉMENTINE.

IMITATION DE RICHARDSON.

Distraite et malheureuse,
Sur un bouquet de fleurs
Une fille rêveuse
Laissait tomber des pleurs ;
Un timide sourire
Dans ses pleurs se glissa ;
Mais un triste délire
À son tour l’effaça.

« Au sein de Clémentine,
» Brûlé d’un fol amour
» Douce fleur d’Églantine,
» Tu n’as brillé qu’un jour.
» Ta courte destinée
» Vient m’annoncer mon sort :
» Un seul jour dans l’année,
» Pour l’Amour et la Mort.

» Vers la froide Angleterre
» Quand le bonheur fuira,

» Toutes deux sur la terre
» On nous retrouvera ;
» Symbole de souffrance,
» Et gage de pardon,
» Meurs avec l’imprudence
» Qui troubla ma raison.

» Adieu, mère chérie !
» Le ciel a vu vos pleurs ;
» Je suis calme et guérie,
» Couronnez-moi de fleurs.
» Des anges en prière
» J’entends les chants pieux ;
» Leur voix pure et légère
» M’appelle dans les cieux. »

Du monastère antique
C’étaient les saints concerts :
L’orgue mélancolique
Gémissait dans les airs.
À la mort résignée,
La vierge y vint un jour…
L’Ange de l’hyménée
La rendit à l’Amour.