Poésies (Rimbaud)/éd. Vanier, 1895/Vénus anadyomène

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Poésies complètes, Texte établi par avec préface de Paul Verlaine et notes de l’éditeur, L. Vanier (p. 49).


VÉNUS ANADYOMÈNE


Comme d’un cercueil vert en fer-blanc, une tête
De femme à cheveux bruns fortement pommadés
D’une vieille baignoire émerge, lente et bête,
Montrant des déficits assez mal ravaudés ;

Puis le col gras et gris, les larges omoplates
Qui saillent ; le dos court qui rentre et qui ressort.
— La graisse sous la peau paraît en feuilles plates ;
Et les rondeurs des reins semblent prendre l’essor…

L’échine est un peu rouge, et le tout sent un goût
Horrible étrangement, — on remarque surtout
Des singularités qu’il faut voir à la loupe…

Les reins portent deux mots gravés : Clara Vénus ;
— Et tout ce corps remue et tend sa large croupe
Belle hideusement d’un ulcère à l’anus.


27 juillet 1870.