Poésies inédites (Marceline Desbordes-Valmore)/Laly Galine seule

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Poésies inédites, Texte établi par Gustave RevilliodJules Fick (p. 241-243).


LALY GALINE SEULE.


Jardin de ma fenêtre,
Ma seule terre à moi,
Avril t’a fait renaître…
N’est-il bon que pour toi ?
Tes fleurs moins chancelantes
Se reparlent tout bas,
Et moi, je sais deux plantes
Qu’il ne réunit pas !

Combien de jours de fête
Ont regardé mes pleurs
Sans relever ma tête
Pensive sur tes fleurs !
Mais celui qui fait l’heure
Compte mon temps amer ;
Il voit dans ma demeure
Comme il voit dans la mer.


Ce soir une hirondelle
Qui revenait des cieux
A frôlé de son aile
Tes bouquets gracieux.
Ta fraîche palissade
A tremblé sous son cœur :
Vient-elle en ambassade
De la part du bonheur ?

Sans lune et sans étoile
Quand la nuit teint les flots
J’allume sous ton voile
Ma lampe aux matelots ;
Afin que l’humble flamme
Qui s’épuise ardemment
Comme un peu de mon âme
Attire mon amant.

Mais du port, si le phare
Mourait avant le jour,
Au marin qui s’égare
Montre au loin mon séjour.
Dis-lui qu’à ma fenêtre,
Toujours comme aujourd’hui,

Les fleurs qu’il a fait naître
S’illuminent pour lui.

Dans la nuit implorée
Qui le ramènera,
Vers ma vitre éclairée
Son âme montera.
Fais qu’après ma neuvaine,
Au bout d’un an perdu,
Ma lampe le ramène
À mes bras suspendu.


Rochefort.


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