Poésies religieuses et politiques/Notre Seigneur identifié avec son clergé
NOTRE SEIGNEUR IDENTIFIÉ AVEC SON CLERGÉ.
Les envoyés du Christ sont, je le sais, les prêtres,
Ils ont l’emploi divin d’enseigner, de prêcher ;
De lier et de délier ma conscience, en maîtres,
Toutes les fois que j’ai le malheur de pêcher.
Je les aime ; je les écoute.
C’est là ma disposition.
Les prêtres sont la clef de voûte
Du ciel : de la Rédemption.
Je cherche Jésus-Christ : je l’aime.
Puisque, mon cœur peut le trouver
Dans ses prêtres : ma joie extrême
Est d’aller à lui, sans me laisser entraver.
Tout ce que le Sauveur dit des pouvoirs du prêtre
Est la vérité même : et je ne puis la nier.
La foi m’élevera peut-être
Un jour, quoique je sois aujourd’hui le dernier.
Je crois au Rédempteur, je crois en sa parole.
Moi, je suis ignorant : je m’en rapporte à lui.
Je médite : et je tiens ma raison dans son rôle.
L’erreur est mon plus grand ennui.
Avant les joies de l’Évangile.
Le monde a dû faire pitié.
Alors qu’Euripide et Virgile
Étaient les rois de l’amitié.
Le genre humain était barbare.
Il vivait dans la dureté.
L’amitié certaine était rare
Comme la franche liberté.
L’Évangile a paru comme paraît la lune,
Au milieu de la nuit.
Le Christ a pris du temps à faire sa fortune.
Mais à douze ans, déjà, son nom faisait du bruit.
Sa parole est cent fois plus belle,
Mille fois plus grande que celle
D’Alexandre le Grand ou du premier César.
Ses accents sont suivis d’une gloire immortelle.
Ils sont plus beaux que ceux du Czar.
Jésus-Christ parle mieux que les Grecs, lorsque Sparte
Immolait ses soldats, en les glorifiant.
Il est plus ravissant encor que Bonaparte.
Quand sa voix et son glaive allumaient l’Orient.
Ses discours sont plus beaux que ceux de Démosthènes
Lorsqu’il faisait la lutte à Philippe-le-Roi.
Et que sa voix prenait d’enthousiasme Athènes,
En envoyant au cœur des ennemis, l’effroi.
Ses pensers sont naturels et sublimes
Et plus parfaits que ceux de Cicéron,
Lorsque son éloquence interdisait les crimes,
Les infidélités, les forfaits de Verron,[1]
Son génie est plus admirable
Que celui de Brougham, de Pitt et d’O’Connell.
Il est vif : il est adorable :
C’est l’esprit inspiré du Fils de l’Éternel.
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Ô Jésus ! vous avez reçu de votre Mère,
D’incomparables dons, les dons les plus heureux.
Vous avez éclipsé le chef-d’œuvre d’Homère.
Aristote et Socrate ont des livres fameux :
L’une des merveilles du monde
Les sept sages anciens, illustres fondateurs
Ont fait preuve, il est vrai, de sagesse profonde ;
Ils se sont mis avant tous les législateurs.
Ils ont fondé des villes
Et des peuples puissants.
Leurs institutions politiques, civiles
Ont rendu leurs pays, célèbres, florissants.
Mais j’ai beau m’appliquer à leur philosophie.
Je ne trouve en eux rien qui puisse me sauver.
Votre Évangile, Ô Christ, est sur quoi je me fie.
Vos lois, si je les suis, peuvent me relever.
Tous vos écrits sont bons : ils ont bien plus de grâce
Que ceux de Tite-Live ; ils sont plus attrayants
Que les Pages d’Ovide et les odes d’Horace
Ils sont toujours vrais et, quelquefois, effrayants.
Vous avez l’esprit gai du Vigneron qui verse,
À tout moment, du vin dans sa coupe, à pleins bords.
Le siècle est orageux : votre esprit le traverse
Avec plus de grandeur qu’Henri cinq de Chambord.
Vous êtes plus affable en même temps plus grave
Qu’au milieu de sa cour, Louis quatorze le grand,
Vous planez au-dessus des triomphes d’Octave,
Ô Jésus ! Je ne vois que vous de conquérant.
C’est vous qui commandez aux empereurs, aux princes
Vous les encouragez : parfois vous les fouettez.
Tous les empires sont à vos yeux des provinces,
Les royaumes ne sont pour vous que des cités.
Vous êtes l’héritier de tous les diadèmes,
Les rois avec tous leurs honneurs
Et leurs autorités suprêmes
Sont vos lieutenants-gouverneurs,
Et les prêtres sont vos Ministres,
Ce sont eux qui me font savoir
Que les joies du mal sont morbides et sinistres
Qu’elles mettent dans l'âme un nuage très noir.
Vos Ministres ont soin de mon corps, de mon âme,
L’observation de vos lois
Conservent à mon cœur son premier feu : la flamme
De la vie, en laissant à mon esprit ses droits.
Vous avez copié notre belle existence
Sur vos penchants divins, sur vos affections.
Vous manqueriez de consistance,
Si vous nous défendiez nos inclinations.
Mais ce n’est pas ce que vous faites.
Vous aimez que l’homme ait toute sa liberté.
Vous aimez qu’il se fasse et des joies et des fêtes,
Mais dans la régularité.
Vos lois veulent que ses actes
Arrivent mesurément,
En proportions exactes
De ses forces sagement.
- ↑ Je prends la liberté de traduire le nom de Verres — Verron.