Politesse canadienne/27

La bibliothèque libre.
Imprimerie l’Union (p. 81-86).


VISITES


Il y a plusieurs sortes de visites ; les unes sont obligatoires, les autres de convenances ; puis il y a les visites intimes ou d’amitié.

Les visites de cérémonie sont une des charges de l’étiquette ; elles se font à des personnages éminents, à qui on doit de la reconnaissance, ou de qui on craint d’être oublié. Ce sont encore, celles que se font entre eux, et leurs femmes entre elles, les personnages de même condition ou de même profession, au jour de l’an, à l’arrivée, au départ, etc.

On dit que les visites de cérémonie les plus courtes sont les meilleures. Si votre présence a eu le don de plaire, tant mieux ; on restera sous le charme de votre courte apparition. Si cette visite était pour vous un devoir, sans être un plaisir, ou encore qu’elle ne fût pas appréciée, ce dont il est toujours facile de s’apercevoir, vous serez plus tôt libérés de part et d’autre. En tous cas, une visite de cérémonie ne devrait guère durer plus de quinze minutes ; si on insistait fortement pour vous retenir, il ne faudrait pas rester plus de dix minutes encore.

Les visites de cérémonie doivent être rendues dans la huitaine. Si l’accomplissement de ce devoir social était différé involontairement, il faudrait s’en excuser à qui de droit, en exprimant ses regrets. Un supérieur, ou sa femme, négligeant de donner des explications satisfaisantes après ce délai, non seulement manquerait de politesse, mais pourrait laisser croire qu’il ne tient pas à entretenir de relations.

Les visites obligatoires se rapprochent beaucoup des visites de cérémonie. Elles se rendent à ceux qui nous ont rendu quelque service ; elles deviennent alors un devoir de reconnaissance.

Les visites de convenances se font à des intervalles assez éloignés : elles entretiennent les relations sans créer d’intimité.

Les visites de circonstances se font à l’occasion d’un mariage, d’un baptême, d’une nomination honorifique, d’un évènement heureux. Ce sont alors des visites de félicitations.

Les visites de digestion se font aux personnes chez qui on a été reçu à dîner ou en soirée, dans les huit jours qui suivent cette réception.

Les visites de noces sont celles que les jeunes mariés, au retour de leur voyage de noces, doivent faire à ceux qui leur ont envoyé un cadeau ; à ceux qui ont assisté à la bénédiction nuptiale, ou ont exprimé leurs regrets de ne pouvoir le faire. Le mari seul doit la visite aux messieurs célibataires.

Une personne s’occupant d’œuvres de bienfaisance est dans la nécessité de faire de nombreuses visites dans l’intérêt de l’œuvre patronnée ; elle a besoin du concours généreux et dévoué de ses amis et connaissances. Ces visites s’appellent visites de sollicitations.

Quand le malheur frappe nos parents ou nos amis, les visites que nous leur devons, en ces occasions, se nomment visites de sympathie ou de condoléances ; elles doivent se faire dans la première quinzaine qui suit le triste évènement.

Chaque visite exige une tenue irréprochable et conforme à la circonstance qui la motive ; la physionomie doit également se trouver en rapport avec le but de la visite. Il faut savoir se réjouir avec ceux qui sont dans la joie, et pleurer avec ceux qui pleurent. On dit, assez souvent : « Si vous êtes dans l’abondance et dans la joie, dix amis se trouveront à vos côtés pour partager ; mais, si vous pleurez… vous pleurez tout seul !… » Qu’aucun des nôtres, parent ou ami, ne puisse, par notre manque de sympathie, affirmer la vérité de ces paroles.

Si vous faites une visite de deuil, votre toilette sera plutôt sévère et de couleur sombre.

Les visites intimes ou d’amitié, n’ont pas d’heures déterminées ; elles peuvent se faire le matin et dans le costume de travail ; elles échappent à toutes les règles.

Les visites de congé se font aux connaissances avant de partir en voyage. Si on ne les trouve pas chez elles, on dépose à la porte une carte cornée, avec les lettres P. P. C., (pour prendre congé.)

Les visites de retour se font à la rentrée.

Dès que vous apprenez la maladie grave d’une personne amie, vous devez la visiter, ou, tout au moins, prendre de ses nouvelles. Il serait non seulement impoli, mais encore imprudent d’insister pour être admis près d’un malade, quand la consigne médicale s’y oppose. Il est des cas où la guérison n’est attachée qu’à cette condition d’un calme absolu. Vous prenez alors souvent de ses nouvelles, puis vous le visitez quand il est en état de vous recevoir.

Auprès des infirmes les visites peuvent être plus longues, à moins qu’elles ne les fatiguent. L’affection, d’agréables distractions, font grand bien aux malades ; l’isolement, l’abandon, font parfois plus de mal que le mal ! Le cœur souffre… et le cœur, c’est le siège de la vie !…

Votre bon cœur vous inspirera encore, sans doute, un autre genre de visites, qui vous sera une source de consolations. Il vous conduira vers les déshérités du sort, les misérables, les nécessiteux. Combien vous serez émus en pénétrant dans ces pauvres logis, où l’on manque du nécessaire, où l’on souffre du froid, de la faim, tandis que vous avez de tout en abondance !

Pas besoin d’être riche pour visiter les pauvres ; il suffit d’avoir un bon cœur. Vous allez les voir pour les soulager, les consoler !…

Ayez toujours une mise simple pour vous présenter chez eux. Que votre passage y laisse non-seulement le bienfait, mais la joie, le rayonnement de votre bonté compatissante. Ce n’est pas seulement avec de l’argent que l’on s’attache les cœurs. Oh ! non ! Si vous avez de la fortune, très bien : montrez-vous généreux ; c’est votre devoir, et cela porte bonheur. Il ne s’agit cependant pas toujours de puiser dans sa bourse pour faire du bien : puisez surtout dans votre cœur ; payez de votre personne, et vous serez étonnés de tout ce que vous pourrez faire pour les Pauvres du Bon Dieu !

Soyez indulgents pour les pauvres, quels qu’ils soient. Songez que la charité a toujours son mérite devant Dieu et que « la manière de donner vaut mieux souvent que ce que l’on donne. »

Les visites du jour de l’an sont et demeurent obligatoires. Elles consistent surtout dans l’échange des vœux et souhaits pour le bonheur et le succès de la nouvelle année.