Progrès du phylloxéra

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PROGRÈS DU PHYLLOXÉRA
DANS LES QUATRE DÉPARTEMENTS : DE LA DRÔME, DE VAUCLUSE, DU GARD ET DE L’HÉRAULT.

Dans une tournée que j’ai faite à la fin de novembre dans ces quatre départements, j’ai constaté les faits suivants à l’égard du Phylloxéra : les insecticides si nombreux et si divers qu’on a employés sur plusieurs points n’ont, nulle part, donné des résultats satisfaisants. — Des vignes attaquées, même depuis plusieurs années, par le Phylloxéra, peuvent être, sinon guéries, du moins protégées contre les progrès du fléau, à l’aide d’engrais énergiques. Lorsqu’une vigne, phylloxérée est grassement fumée on la voit, quelques mois plus tard, prendre de la force et, quoique malade, elle donne encore des produits. Nous croyons qu’avec des fumures souvent renouvelées, faites après la récolte, et avec une culture aussi améliorante que possible, on peut toujours, surtout dans les sols naturellement un peu fertiles, obtenir encore des produits rémunérateurs.

Nous avons observé partout, sans aucune exception, le fait suivant : les Phylloxéras sont toujours en raison directe de la sécheresse du sol, du défaut d’humidité. Souvent, au pied de coteaux dominés par des vignes profondément phylloxérées, on rencontre des vignobles en plaine, plantés dans un sol humide, qui sont complètement sains.

Pour tous ceux qui ont pu visiter les vignobles traités par la submersion d’automne ou d’hiver, il ne peut rester aucune espèce de doute sur l’efficacité de ce moyen essentiellement pratique et radical pour guérir les vignes phylloxérées. Il y a certainement lieu de s’étonner que la submersion ait, jusqu’ici, rencontré tant d’objections et tant d’hostilités, alors que le moyen est si simple et si pratique. Par l’utilisation intelligente des cours d’eau, par la création du canal d’irrigation du Rhône, le procédé de la submersion peut être étendu sur une surface très-considérable, qui s’étend à près de 100 000 hectares de vignes dans les quatre départements de la Drôme, de Vaucluse, du Gard et de l’Hérault. Si cette pratique de la submersion était adoptée, non-seulement elle aurait pour effet de guérir les vignes directement traitées, mais encore il en résulterait une modification dans le climat qui réagirait d’une manière très-heureuse sur les vignobles situés dans les endroits inaccessibles à la submersion.

En résumé, on perd un temps précieux à découvrir des insecticides qui seront toujours impuissant ; la destruction du Phylloxéra est moins un problème chimique qu’un problème mécanique. La submersion résout ce problème d’une manière complète pour près des 2/3 des vignes phylloxérées, et on ajourne son emploi sous le prétexte qu’elle ne peut s’appliquer partout. C’est ici le cas de répéter le proverbe que « souvent le mieux est l’ennemi du bien[1]. »
Aristide Dumont.

  1. Journal de l’agriculture.