Aller au contenu

Quand les violons sont partis/Solitaire dans un jardin…

La bibliothèque libre.
Quand les violons sont partisLibrairie Léon Vanier ; A. Messein, SuccrPoésies complètes d’Édouard Dubus (p. 8-9).

II

Pour Jean Court.

Solitaire dans un jardin des Hespérides,
Parmi les fleurs pâles, aux senteurs ingénues,
Qui n’ont jamais vibré sous les soleils torrides,
Elle va, le regard éperdu vers les nues.

Son âme, une eau limpide et calme de fontaine :
Sous le grand nonchaloir des ramures funèbres,
Reflète indolemment la rêverie hautaine
De lys épanouis dans les demi-ténèbres.

Une angélique Main, qui lui montre la Voie,
Seule dans sa pensée eut la gloire d’écrire,
Et le ciel, d’une paix divine, lui renvoie
L’écho perpétuel de son chaste sourire.


Pourtant, des soirs, au fond de ses veines circule
Une langueur cruelle en sa douceur première,
Quand ses cheveux, d’un or mourant de crépuscule,
L’enveloppent de leur caresse de lumière.

Son printemps ne sait pas les rafales brutales
Qui, pour toujours, dans la poussière des allées
Profaneront le pur désastre des pétales,
Mais elle songe à des colombes en allées ;

Et, moins Vierge aux conseils de la brise qui passe,
Elle pressent que vers les forêts et les brandes,
Loin des murs élevés en terreur de l’espace,
Son désir fou prendra l’essor, les ailes grandes.