Quelques réflexions sur la mécanique/Une première leçon de Dynamique

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UNE
PREMIÈRE LEÇON DE DYNAMIQUE.


1. Étudions d’abord le mouvement d’une portion de matière assez petite pour qu’on puisse la regarder, sans erreur sensible, comme réduite à un point ; c’est ce que nous appellerons un point matériel. Cette étude ne peut être entreprise sans faire certaines hypothèses et sans admettre certains principes qu’il est impossible de vérifier directement et dont seulement des conséquences plus ou moins lointaines sont réellement susceptibles d’être contrôlées par l’expérience. Sans entrer ici dans aucun détail historique, qu’il me suffise de citer Galilée, Descartes, Huygens et Newton, comme les créateurs, à des titres divers, de la science du mouvement.

Principe de l’inertie. — Il comprend deux parties :

1o Quand un point matériel est en repos dans l’espace, il reste en repos si aucune action extérieure ne s’exerce sur lui ;

2o Quand un point matériel est en mouvement dans l’espace, son mouvement est rectiligne et uniforme si aucune action extérieure ne s’exerce sur lui.

Il résulte de là que, si le mouvement d’un point matériel n’est pas rectiligne et uniforme, certaines actions extérieures s’exercent sur lui, et ceci est en quelque sorte une définition. On donne le nom de forces à ces actions que l’on regarde comme produisant ou modifiant le mouvement d’un point matériel.

2. Avant de passer à un second principe, nous allons poser d’abord la notion de champ de forces constantes. Une portion déterminée de l’espace sera dite un champ de forces si un point matériel abandonné à lui-même en un point arbitraire de ce champ ne reste pas en repos. Le champ de forces sera dit constant, si un point matériel, abandonné en un point quelconque sans vitesse initiale et à un instant quelconque, décrit toujours la même trajectoire (transportée seulement parallèlement à elle-même) et de la même manière. La pesanteur offre, dans le vide et pour un espace assez petit, un exemple de champ constant.

Cette notion acquise, nous posons maintenant le second principe, dans l’énoncé duquel il ne s’agit que de champ de forces constantes.

Si un point matériel se trouve à la fois dans plusieurs champs de forces constantes, le mouvement que prend le point à partir d’un certain instant s’obtient en composant cinématiquement le mouvement rectiligne et uniforme dû à la vitesse initiale et les mouvements que produirait chacun des champs s’il agissait seul sur le point matériel partant du repos.

Ainsi, supposons qu’un point matériel occupe à un moment la position A avec une vitesse et qu’il se trouve à la fois dans deux champs de forces constantes. Soit B la position qu’occuperait au bout du temps le point matériel soumis seulement au premier champ et abandonné en A sans vitesse ; soit de même B′ la position correspondant au second champ dans les mêmes conditions ; soit enfin B″ l’extrémité du segment obtenu en portant une longueur sur la direction de la vitesse . On obtiendra la position véritable du mobile au temps en faisant la somme géométrique des trois vecteurs AB, AB′ et AB″.

On voit que chaque champ agit, en quelque sorte, comme s’il était seul et si le point n’avait pas eu une vitesse initiale  ; aussi le principe précédent peut-il être appelé le principe de l’indépendance de l’effet des forces et du mouvement antérieurement acquis. Mais dans l’application du principe, sous la forme que nous venons de lui donner, il est essentiel de se rappeler qu’il s’agit seulement de champ de forces constantes.

3. Supposons en particulier qu’il n’y ait qu’un seul champ. On devra composer le déplacement dû à la vitesse acquise avec le déplacement résultant de l’action du champ sur le point placé en A et partant du repos. Soit Γ la trajectoire du point matériel placé en A au temps sans vitesse initiale, trajectoire qui sera parcourue suivant une certaine loi. On peut se représenter le mouvement de la manière suivante :

Imaginons que la courbe Γ se déplace d’un mouvement de translation uniforme avec la vitesse , pendant que notre mobile se déplace sur la courbe suivant la loi convenable ; on aura ainsi la trajectoire véritable.

Pour le cas simple qui précède, on peut imaginer facilement des vérifications expérimentales du principe. Dans un wagon animé d’un mouvement de translation uniforme, un point pesant abandonné sans vitesse relative rencontre le plancher du wagon toujours au même point, quelle que soit la vitesse du mouvement de translation. Il doit bien en être ainsi, d’après le second principe, puisque la trajectoire relative du point tombant par rapport au wagon est la trajectoire du point quand le wagon reste au repos.

4. Le second principe nous permet de trouver la nature du mouvement d’un point matériel dans un champ de forces constantes. On a vu en Cinématique que, si un point a un mouvement relatif par rapport à un système animé d’un mouvement de translation, l’accélération absolue du point est la somme géométrique de l’accélération relative et de l’accélération d’entraînement. Appliquons ce résultat à notre problème actuel, où le mouvement de translation de la courbe Γ est uniforme ; l’accélération absolue du mobile à l’instant sera égale à son accélération relative sur la courbe Γ. Faisons, en particulier,  ; l’accélération absolue du point au temps sera égale à l’accélération qu’a au départ le point matériel partant du repos et soumis au champ considéré. Elle a donc une valeur constante, et nous arrivons ainsi à ce résultat très important que le mouvement d’un point matériel dans un champ de forces constantes est un mouvement dont l’accélération est constante. On aura donc

,,.

Si le point part du repos et est placé à l’origine, on déduit de là immédiatement

,,.

La trajectoire sera rectiligne ; en la prenant comme axe des , on aura

 ;

et nous avons finalement

.

Le mouvement est uniformément accéléré et d’accélération . La direction de la droite, trajectoire du point, sera la direction du champ de forces.

5. Le point matériel A restant toujours le même, les différents champs de forces se distingueront les uns des autres par leur direction et l’accélération du mouvement. Nous prendrons, comme mesure des forces agissant sur le point déterminé A dans chacun de ces champs, des quantités proportionnelles aux accélérations,

,,…,

et si l’on appelle , , … ces forces, on aura par définition

,

et elles auront, par définition, pour direction les directions de ces accélérations.

Nous pouvons facilement trouver le champ résultant de la superposition de deux champs de forces constantes. Supposons qu’un point, partant du repos, soit placé simultanément dans deux champs de forces constantes. Quel mouvement prendra-t-il ? Supposons que représente la direction du premier champ, et la direction du second champ. Si le premier champ agissait seul, on aurait par rapport aux deux axes et la trajectoire

,,

et, si le second champ était seul actif,

,.

Donc, quand les deux champs agissent simultanément, on a, d’après le second principe

,.

Le mouvement est donc encore uniformément accéléré, et l’accélération est la somme géométrique des deux accélérations et , d’où se déduit de suite la règle du parallélogramme des forces.

6. La définition dynamique de la force dans un champ constant, que nous venons de donner en ayant égard au mouvement produit, n’est pas celle qui s’est présentée la première au point de vue historique. L’idée de force provient de la notion de l’effort que nous faisons quand nous supportons un fardeau, ou que nous tirons sur une corde fixée par exemple à un clou. Si nous pouvions évaluer avec précision l’effort fait pour supporter différents poids, nous pourrions nous servir de cet effort pour mesurer les forces. Mais un effort est aussi une cause de déformation ; appliqué à un corps solide, il en change la figure. Soit considéré un ressort parfaitement élastique, et montrons comment il va pouvoir servir à mesurer les forces au point de vue statique. Plaçons-nous dans le champ de la pesanteur à Paris, et prenons une matière déterminée bien homogène, du platine par exemple. En suspendant au ressort, dont on a orienté l’axe moyen dans le sens de la verticale, des quantités croissantes de platine, nous avons des déformations variables ; or prenons comme unité de force l’action statique sur le ressort d’un volume déterminé de platine. Nous admettons tout naturellement que, pour un volume double, l’action statique sur le ressort est double, et ainsi de suite. Nous avons ainsi un instrument (dynamomètre) qui se trouve gradué et avec lequel nous pouvons évaluer les actions statiques. Or reprenons notre point matériel A de tout à l’heure, et considérons un champ de forces constantes ; avec le ressort, dont on place l’axe moyen dans le sens du champ, et en fixant à son extrémité le point A, nous pouvons évaluer l’action statique sur le point A. Nous avons donc, pour différents champs, différentes actions statiques ; d’où une seconde définition, qui est statique, de la force agissant sur le point A dans chacun des champs. Nous regardons comme un résultat expérimental que les nombres représentant les forces envisagées au point de vue dynamique et au point de vue statique sont proportionnels. C’est là un résultat capital.

7. Nous n’avons jusqu’ici considéré qu’un seul point matériel A. Pour tout autre point matériel, on peut refaire les mêmes expériences : il s’agit de comparer les points matériels les uns aux autres. Il n’y aurait aucune difficulté si la matière se présentait à nous sous une forme unique ; on pourrait parler, comme le faisait Newton dans la définition de la masse, de la quantité de matière. Mais on sait que la matière se présente à nous sous un certain nombre de formes irréductibles les unes aux autres, au moins dans l’état actuel de la Science. Or l’expérience apprend, ce qui va être pour nous absolument fondamental, que dans un même champ l’accélération du mouvement produit, quel que soit le point matériel, est la même. C’est ce qu’on exprime, pour le champ de la pesanteur, en disant que tous les corps tombent avec la même vitesse dans le vide, ce qui veut dire qu’un morceau de fer et un morceau de cuivre, par exemple, prennent dans le vide un mouvement uniformément accéléré dont l’accélération est la même.

Ceci posé, plaçons-nous dans un champ déterminé d’ailleurs quelconque, et suspendons différents points matériels à l’extrémité de notre ressort gradué. Nous dirons que ces points ont des masses égales, s’ils donnent au ressort la même flexion. Il est aisé de voir que, si deux points matériels amènent la même flexion dans un certain champ, ils amèneront une même flexion, quoique différente de la première, dans tout autre champ ; en effet, les flexions indiquent des forces que nous avons vues être proportionnelles aux accélérations, et, puisque les accélérations sont les mêmes dans un même champ pour tous les points matériels, si la flexion est la même pour deux points dans un certain champ, elle sera la même dans tout autre champ. De la définition de deux masses égales résulte la définition d’une masse double, triple, … d’une autre. Une masse sera double, par exemple, d’une autre, si elle donne dans tout champ une déformation correspondant à une action statique double. Nous sommes donc ainsi conduit à attribuer aux différents points matériels M, M′ … des coefficients , que nous appellerons les masses de ces points ; c’est, pour le moment, un système de nombres proportionnels.

8. Il résulte, de tout ce qui précède, que, dans un même champ, les forces agissant sur deux masses inégales sont proportionnelles à ces masses. D’autre part, les forces agissant dans différents champs sur un même point sont proportionnelles aux accélérations des mouvements produits. On en conclut que, dans deux champs d’accélérations et et pour deux points de masses et , les forces et sont proportionnelles aux produits et . Nous avons donc

.

On peut, pour un point déterminé M′, prendre  ; on aura alors pour tout autre point

,

c’est-à-dire que le nombre mesurant la force est égal au produit du nombre mesurant la masse par le nombre mesurant l’accélération.

Si l’on prend en particulier le champ de la pesanteur dans un lieu déterminé, à Paris par exemple, la force du champ sur un point de masse peut être prise égale au poids de cette masse ; on écrira donc

,

désignant l’accélération de la pesanteur à Paris ( 9m,81 évalué en mètres).

9. Pour avoir des évaluations numériques de forces ou de masses, il faut avoir fait choix d’un système d’unités. Un tel système peut être pris arbitrairement, pourvu que le nombre mesurant la force soit égal au produit du nombre mesurant la masse par le nombre mesurant l’accélération. On prend généralement comme unité de temps la seconde de temps moyen. En Mécanique appliquée, le mètre est le plus souvent pris pour unité de longueur et l’unité de force est le kilogramme-force, c’est-à-dire le poids à Paris d’une masse étalon de platine déposée aux Archives. Dans ces conditions, il est facile de trouver ce que sera la masse unité ; puisque

,

ce sera la masse d’un point matériel qui pèse à Paris 9kg,81.

En Physique générale, on a préféré un autre système. L’inconvénient du système précédent est que l’unité de force (kilogramme-force) est une quantité dont la définition exige l’indication d’un lieu déterminé. La masse d’un corps, qualité physique inhérente à ce corps, se trouve alors représentée par des nombres différents suivant que le kilogramme-force se trouve rapporté à un lieu ou à un autre de la terre.

Le système usité en Physique est le système dit C. G. S. L’unité de longueur est la longueur du centimètre. L’unité de masse est la masse du gramme, c’est-à-dire la masse de la millième partie de l’étalon de platine qui représente le kilogramme. D’après la formule

,

on voit que l’on aura , si , et . L’unité de force, c’est-à-dire la force représentée par un, est la force agissant sur la masse d’un gramme dans un champ dont l’accélération est égale à un centimètre. Cette unité de force s’appelle une dyne. Il est facile de trouver le rapport entre la dyne et le poids du gramme à Paris. On a, d’après la formule fondamentale

Poids du gramme à Paris = 981 dynes(puisque ).

Donc la dyne vaut à peu près un milligramme à Paris.

10. Nous n’avons considéré jusqu’ici que des champs de forces constantes. Quand un point n’est pas animé d’un mouvement à accélération constante, que pouvons-nous regarder comme étant la force agissant sur lui ? Soient la position du mobile de masse au temps sur sa trajectoire et sa vitesse à cet instant ; soit de plus sa position au temps . Nous allons chercher quelle force constante devrait agir sur le point placé en au temps avec la vitesse pour qu’il se trouve en au temps . Rappelons-nous une des définitions de l’accélération : si l’on porte sur la tangente en dans le sens du mouvement une longueur égale à , le vecteur a pour limite l’accélération. Or, si nous considérons une force constante agissant sur le point partant du repos, le point décrira pendant le temps un segment de droite dans la direction de la force, et en appelant l’accélération correspondant au champ constant, on aura

ou ;

la force sera égale à et la direction du champ sera celle de . D’autre part, d’après le second principe, on obtiendra la position du point au temps , en transportant le segment parallèlement à lui-même de manière que vienne en  ; on en conclut de suite que est égal et parallèle à . Si nous considérons maintenant le mouvement réel du point comme la limite d’une succession de mouvements discontinus analogues à celui que nous venons d’envisager pendant le temps très petit , nous serons tout naturellement conduit à regarder comme représentant la force au temps la limite de la force . En désignant donc par l’accélération de au temps , et en désignant par la force, on aura l’égalité géométrique fondamentale

.

Le vecteur qui représente la force ne diffère donc du vecteur qui représente l’accélération que par le facteur positif . En désignant par les composantes de la force, on aura, d’après l’égalité précédente

(1) ,,.

11. Il peut sembler au premier abord que les égalités précédentes définissent tout simplement , et l’on peut se demander quel intérêt elles présentent. Elles ne seront en effet utiles pour renseigner sur le mouvement du point et permettre de prédire ce mouvement, que si l’on connaît autrement que par ces égalités mêmes . Indiquons immédiatement quelques exemples simples pour fixer les idées sur ce point capital.

Voici d’abord un premier cas où l’identité par nous admise, entre les points de vue statique et dynamique, montre l’importance des formules précédentes. Supposons que nous ayons affaire à un champ de force où la force puisse être mesurée statiquement à un instant quelconque et se trouve être seulement une fonction des coordonnées du point . Nous pourrons alors dans (1) regarder comme des fonctions connues de et l’intégration du système (1), pour une position initiale donnée, nous donnera le mouvement du point correspondant à ces données initiales. Ainsi, pour prendre un exemple très simple, soit un point placé à l’extrémité d’un ressort. Le point se trouve à l’origine sur l’axe , quand le ressort est à l’état naturel. On tend le ressort ; l’expérience montre que la force à appliquer au point pour le maintenir en équilibre est proportionnelle au déplacement, c’est-à-dire que la force exercée par le ressort sur un point est représentée par

().

On a donc l’équation différentielle

dont l’intégration fait connaître le mouvement du point.

En posant , on aura l’équation

,

dont l’intégrale générale est

et étant des constantes arbitraires. Supposons que le point soit abandonné au temps sans vitesse initiale à la distance de l’origine. On devra avoir

,pour,

ce qui détermine immédiatement les constantes et

,,

et l’équation du mouvement est

.

12. Il peut arriver que puissent être déterminées dans d’autres conditions en fonction de , et . Supposons que l’on ait un champ dans lequel on ait observé des mouvements particuliers, et que les valeurs de déduites des équations (1) puissent, pour ces mouvements particuliers, être mises sous la forme de fonctions déterminées de . On pourra admettre qu’il en est ainsi pour tous les mouvements se produisant dans le champ, et alors l’intégration des équations (1) donnera le mouvement dans tous les cas possibles. Nous verrons bientôt que, en partant du mouvement des planètes satisfaisant aux lois de Képler, c’est-à-dire de certains mouvements particuliers, Newton a été conduit à la loi de la gravitation universelle ; c’est là un exemple de la circonstance qui vient d’être indiquée d’une manière générale.

13. D’autres circonstances peuvent encore se présenter. On est conduit quelquefois à regarder dans les équations (1) les composantes de la force comme fonctions non seulement de mais aussi de . Il est clair que, dans ce cas, ce ne seront pas des expériences statiques préliminaires qui pourront nous faire connaître . Ce ne pourront être, comme au paragraphe précédent, que des observations dynamiques. Un exemple en est fourni par l’étude du mouvement d’un projectile dans l’air. Il y a résistance de l’air sur laquelle nous ne savons rien a priori. Je suppose qu’un grand nombre d’expériences aient été faites ; la photographie instantanée permet de savoir dans quelles conditions le point parcourt sa trajectoire. On peut donc regarder comme connues la vitesse et l’accélération à chaque instant ; de là se déduisent, par les équations (1) elles-mêmes, les valeurs de en dehors de la pesanteur et par conséquent la résistance de l’air. On constate alors que, dans certaines conditions de grandeurs de la vitesse, cette résistance est une certaine fonction de la vitesse. Le résultat acquis dans ces expériences déterminées est regardé (entre les mêmes limites de grandeur des vitesses) comme général, et le mouvement de tout point peut être obtenu par l’intégration du système (1), dans lequel on a remplacé par des expressions connues de la vitesse.

14. Des cas de nature différente de ceux que nous venons d’examiner se rencontrent dans la Dynamique du point matériel. Le point peut être assujetti à certaines liaisons, à rester par exemple sur une surface. Par le fait de cette liaison, une certaine force se trouve agir sur le point ; ce sera encore à l’expérience à faire connaître certaines propriétés de cette force de liaison, de façon que le système des trois équations (1) achève de la déterminer en même temps qu’elles permettent de déterminer le mouvement du point sur la surface.

Ces divers exemples suffisent pour donner une première idée de la véritable signification des équations (1). On la comprendra mieux encore par l’étude des divers problèmes que nous allons bientôt traiter.

15. Nous terminerons en donnant quelques définitions relatives au travail d’une force. L’ascension d’un poids exige un certain travail ; celui-ci, économiquement, est proportionnel au produit du poids à soulever par la hauteur  ; nous prendrons donc pour expression du travail le produit . On prend, en Mécanique appliquée, comme unité de travail le kilogrammètre : c’est le travail correspondant à l’élévation d’un kilogramme à Paris à la hauteur d’un mètre. Si est évalué en kilogrammes et en mètres, le produit représentera des kilogrammètres. Quelles que soient les machines employées, quel que soit le genre de travail qu’elles accomplissent, ce travail peut toujours être assimilé à celui d’un poids soulevé à une certaine hauteur et peut, par conséquent, être évalué en kilogrammètres.

Dans le système C.G.S., l’unité de travail s’appelle l’erg. L’erg est le travail accompli par une dyne, le chemin parcouru étant un centimètre. On obtient l’expression d’un travail en ergs en multipliant la force exprimée en dynes par le chemin parcouru exprimé en centimètres. Exprimons en ergs le kilogrammètre. Le gramme-force vaut 981 dynes ; donc le kilogramme-force vaut 981 000 dynes. Par suite

le kilogrammètre = 981 000 × 100 ergs = 98 100 000 ergs,

ce qui peut encore s’écrire

9,81×107 ergs.

On voit donc que l’erg est une très petite fraction du kilogrammètre ; aussi n’emploie-t-on pas en Physique, comme unité pratique de travail, l’erg qui est trop petit, mais l’erg multiplié par 107 ; cette unité pratique s’appelle un joule.

D’après l’égalité précédente, un joule est égal à un kilogrammètre divisé par 9,81 ; c’est donc environ un dixième du kilogrammètre.

La notion de travail ne suffit pas, à elle seule, pour faire connaître d’une manière complète les propriétés d’une machine, car la question de temps n’y joue aucun rôle. On appelle puissance mécanique la quantité de travail pendant une seconde. L’industrie a adopté pour unité de puissance le cheval-vapeur. Le cheval-vapeur correspond à un travail de 75kgm par seconde. En Physique et dans les industries électriques, l’unité pratique de puissance mécanique correspond au travail de un joule par seconde ; on l’appelle un watt. Le kilowatt, qui vaut mille watts, est très usité. Exprimons un cheval-vapeur en kilowatts ; un cheval-vapeur correspondant à 75kgm correspond à

75 × 9,81 joules ;

il est donc égal à

75 × 9,81 watts,

c’est-à-dire à

0,075 × 9,81 kilowatts.

On peut dire que le cheval-vapeur vaut à peu près 3/4 de kilowatt.

FIN.