Rapport de la commission sénatoriale des États-Unis sur la catastrophe du Titanic

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L’ENQUÊTE SUR LA PERTE DU « TITANIC »

(28 Mai 1912 - Publié par ordre)


M. Smith, de Michigan, de la Commission de Commerce, a présenté ce qui suit :


RAPPORT

La commission de commerce autorisée et chargée d’enquêter sur la perte du vapeur anglais Titanic informe respectueusement que cette mission a été remplie et que la commission a déposé ses conclusions relatives à cette catastrophe.

Les résolutions sont les suivantes :

1°. — La Commission de commerce ou une de ses sous-commissions est, par la présente, autorisée et chargée de rechercher les causes ayant entraîné la perte du transatlantique Titanic de la Compagnie White Star Line et la perte d’existences humaines qui a si profondément ému le monde civilisé.

2°. — La dite Commission ou sa sous-commission ont, par la présente, pleins pouvoirs pour faire comparaître des témoins, faire venir toute personne ou tout document, faire prêter serment et s’ entourer de tous témoignages nécessaires pour déterminer les responsabilités et instituer une législation nécessaire destinée à éviter — autant que possible — toute répétition d’un désastre semblable.

3°. — La Commission enquêtera spécialement sur le nombre d’embarcations, radeaux, engins de sauvetage et autres équipements pour la sécurité des passagers et de l’équipage ; le nombre de personnes à bord du Titanic, passagers et membres de l’équipage, si le navire a donné lieu aux inspections qui s’imposaient vu le nombre considérable ds passagers américains voyageant sur un parcours habituellement regardé comme dangereux par suite des icebergs, et s’il est possible qu’un Congrès prenne des dispositions tendant à un accord international pour assurer la protection du trafic maritime, y compris une réglementation pour la dimension des navires et la désignation des itinéraires.

4°. — Que dans son rapport ladite Commission proposera la législation qu’elle jugera convenable. Les dépenses entraînées par l’enquête seront payées sur la caisse des frais imprévus en vertu de mandais approuvés par le Président de la dite Commission.

En conséquence, les sénateurs dont les noms suivent ont été désignés comme membres de la sous-commission :

William ALDEN SMITH (Michigan), Président.

George C. PERKINS (Californie),

Jonathan BOURNE, jr. (Orégon),

Théodore E. BURTON (Ohio),

F. M. SIMMONS (North Carolina),

Francis G. NEWLANDS (Nevada),

Duncan V. FLETCHER (Florida).


TÉMOINS INTERROGÉS

Nous avons interrogé 82 témoins sur les diverses phases de la catastrophe y compris l’interrogatoire de 53 sujets britanniques ou résidents de la Grande-Bretagne et 29 citoyens des États-Unis ou y résidant.

Nous avons interrogé deux officiers généraux de la Compagnie de Marine Marchande Internationale — propriétaires du vapeur Titanic.

J. BRUCE ISMAY, de Liverpool (Angleterre), Président et passager à bord du navire pendant ce voyage,

P. A. S. FRANKLIN, de New-York, vice-président aux États-Unis de la Compagnie de Marine Marchande Internationale.

Tous les officiers survivants, au nombre de 4 :

1° CHARLES HERBERT SIGHTOLLER, deuxième oflicier, de Netle^ Abbey, Hampshire, Angleterre ;

2° HERBERT JOHN PITMAN, de Somerset, Angleterre (3e officier) ;

3° JOSEPH GROLES BOSHALL, de Hull, Angleterre (4e officier) ;

4° HAROLD GODFREY SORVE, de North-Wales (5e officier) ; et enfin, 34 membres de l’équipage dont les noms suivent :

ANDEWS (C.-E.), aide maître d’hôtel, 145, Millbrook, Road, Southampton.

ARCHER (Ernest), matelot, 69, Porchester Road, Southampton.

BARRET (Frédéric), Chef soutier, Southampton.

BRICE (W.), matelot, 11, Sower Canal Walh, Southampton.

BRIDE (H.-S.), télégraphiste, Londres, Angleterre.

BRIGT (A.-J.), quartier-maître, 105, Firgrove Road, Southampton.

BULEY (E.-J.), matelot, 10, Cliff Road, Woolston, Southampton,

BURKE (W.), maître d’hôtel des premières, 67, Bridge Road, Southampton.

CLENCH (F.), matelot, 10, The Flaths Chantry Road, Southampton.

COLLINS (J.), aide-cuisinier, 65, Ballycarry, Belfast.

CRAWFORD (A.), steward, affecté au service des cabines, 22, Cranburn avenue, Southampton.

CHOWE (G.-F.), maître d’hôtel, 89, Milton Road, Southampton.

CUNNINGHAL (A.), steward, affecté au service des cabines, 60, Charlton Road, Southampton.

EVANS (F.-O.), matelot, 14, Rond Street, Southampton.

ETCIŒS (H.-S.), steward, affecté au service des cabines, 23, a. Gordon avenue, Southampton.

FLEET (F.), vigie (matelot) n° 9, Norman Road, Southampton.

HAINES (Albert), second maître de manœuvre, 62, Groves Street, Southampton.

HARDY (J.), maître d’hôtel, Oakleigh Holyrood avenue, Highfield, Southampton.

HEMMING (Samuel), lampiste, 31, Kingsley Road, Southampton.

HITCHENS (Robert), quartier-maître, 43, James Street, Southampton.

HOGG (G.-A.), vigie (matelot), 44, High Street, Soulhampton.

JONES (Thomas), matelot, 08, Westfîeld, Liverpool.

MOORE, matelot, 51, Graham Road, Southampton.

OLLIVIER (A.), quartier-maître, 38, Anderson Road, Southampton.

OSMAN (F.), matelot, 43, High Street, Itehen, Southampton.

PERKIS (W.-A.), quartier-maître, Victoria Road, Bitterne, Southampton.

PITMAN (H.-J.), troisième officier, Castle Carry, Somerset, Southampton.

RAY (F.-D.), maître d’hôtel des premières, Palmer Park avenue Deading.

ROWE (G.-T.), .quartier-maître, 63, Henry Street, Gosport.

SYMONS (G.), vigie (matelot), 55, Franchise Street, Weymouth.

TAYLORD (W.-H.), chauffeur, n° 2, Broad Street, Southampton.

WARD (W.), steward des premières, 107, Milbrook Road, Southampton.

WHEELTON (E.), steward des premières, Norwood house, Shireley Southampton.

WIDGERY (J.), (bains), 2.5, Rokeby avenue, Redland, Bristol.

Nous avons enregistré les témoignages de 21 passagers de toutes classes (y compris le président Ismay) et 23 autres témoins déposèrent sur des circonstances relatives à notre enquête (y compris le vice-président Franklin).

Nos sessions ont été tenues à New-York et à Washington et nous avons pris des témoignages par voie de déposition dans d’autres régions du pays ainsi qu’au Canada.

Les résultats de notre enquête sont les suivants :

ASSOCIATION D’ARMATEURS DU VAPEUR « TITANIC »

Le Titanic était un vapeur de la « White Star Line » appartenant à la « Oceanic Steam Navigation Ce » en Angleterre. Toutes les actions de cette compagnie sont la propriété de la « International Navigation Ce (Ltd) », Angleterre, dont les actions sont à leur tour la propriété de la « International Mercantile Marine Ce ». Corporation américaine constituée suivant les lois de New-Jersey.

INTERNATIONAL MERCANTILE MARINE Ce
(Compagnie de la Marine Marchande Internationale)

M. BRUCE ISMAY, de Liverpool, Angleterre, est le président de la « International Mercantile Marine Ce », et M. P. À. S. FRANKLIN, de New-York City, est un vice-président de cette compagnie dans les États-Unis.

Le Comité des Directeurs de la « International Mercantile Marine Ce » est ainsi composé :

C. A. GRISCOM.

J. BRUCE ISMAY, Président.

E. C. GRENFELL.

PERCY CHUBB.

John F. ARCHBOLD.

E. J. BERWIND.

John I. WATERBROUG.

Harold A. SANDERSON.

The Righ Hon. Lord PIRRIE.

P. A. B. WIDENER.

George W. PERKINS.

Charles F. FORREN.

Charles STEELE.

J. P. MORGAN, jr.

La « International Mercantile Marine Ce », par ses ramifications diverses et les compagnies qui la constituent, possède : La « White Star Line » ; La « American Line » ; La « Red Star Line » ; La « Atlantic Transport Line » ; La « National Line » ; Et la plus grande fraction des actions de la « Seyland Line ».

Le capital de la Compagnie est ainsi réparti :

$ 102.000.000.

$ 52.000.000

$ 19.000.000.

$ 7.000.000.

CARACTÉRISTIQUES GÉNÉRALES DU VAPEUR « TITANIC »

Le Titanic a été construit par Harland et Wolff, à Belfast, Irlande. Aucune restriction tendant à limiter les frais de construction n’a été imposée aux constructeurs. Le Titanic fut lancé le 31 mai 1911. Le tonnage de registre était de 46.328 tonneaux ; la longueur du bâtiment 888,6 pieds ; la largeur 93,6 pieds. Le pont de rouffle-passerelle et le pont dominaient de 70 pieds la ligne de flottaison. Suivant la déposition du président Ismav, « la construction spéciale du Titanic lui assurait la flottabilité, même si ses deux plus grands compartiments étanches avaient été remplis d’eau ».

Le navire entièrement équipé a coûté £ 1.500.000, soit environ $ 7.500.000.

Au moment de la catastrophe, le navire était assuré pour une somme de £ 1.000.000, soit environ $ 5.000.000, le restant du risque étant couvert par les fonds d’assurances de la Compagnie.

Le Titanic était un double de l’ Olympic et la propriété de la même compagnie, avec la seule différence que les aménagements du premier permettaient de recevoir 2.599 passagers et qu’il comportait des aménagements supplémentaires pour les officiers et membres de l’équipage s’élevant à 903.

ESSAIS DU VAPEUR « TITANIC »

D’après les témoignages, la Commission constate que les épreuves d’essai du navire ont duré entre 6 et 7 heures, à Belfast Langh, le lundi 1er avril dernier.

Quelques cercles entiers d’évolution ont été effectués, les compas réglés et le bâtiment navigua un peu à toute vapeur sans que toutefois la vitesse maxima ait été réalisée.

Un officier général était à bord pendant les épreuves d’essai et les constructeurs étaient représentés par M. Thomas Andrews, qui avait dirigé la construction du Titanic.

M. Andrews commanda différentes épreuves à Southampton, et représenta les constructeurs tant à Southampton que durant le premier voyage.

Avec une fraction de l’équipage, le navire quitta Belfast immédiatement après l’épreuve et parvint à Southampton le mercredi :> avril vers minuit. Il s’amarra le côté bâbord au quai jusqu’au 10 avril vers midi, et, de là, prit la mer pour Cherbourg, Quentown et New-York.

En fait d’exercices, seules deux embarcations de sauvetage furent mises à l’eau.

Une grande partie de l’équipage ne rejoignit le navire que quelques heures avant le départ et le seul exercice accompli pendant que le Titanic était à Southampton ou en cours de route, consista dans la mise à l’eau sur tribord de deux embarcations, qui furent hissées au pont des embarcations en une demi-heure. Aucune liste indiquant les postes des divers membres de l’équipage ne fut affichée avant plusieurs jours après le départ de Southampton, les hommes affectés aux embarcations ayant ignoré leurs postes respectifs jusqu’au vendredi matin suivant.

CERTIFICAT DU BOARD OF TRADE BRITANNIQUE

Mercredi matin, le jour où le navire quitta Southampton, le capitaine Clark, délégué du Board of Trade britannique, vint à bord et, sous peu, délivra le certificat nécessaire autorisant le départ.

BOSSOIRS ET EMBARCATIONS DE SAUVETAGE DU « TITANIC »

Le Titanic était pourvu de 16 jeux de bossoirs à double action de type moderne, pouvant manœuvrer deux ou trois embarcations par jeu. Les bossoirs pouvaient donc manœuvrer 48 embarcations, alors que le navire n’en portait que 16 et 4 bateaux pliants, se conformant ainsi à toutes les prescriptions du Board of Trade britannique.

Le Titanic avait 14 embarcations de sauvetage destinées à contenir chacune 65 personnes, soit 910 personnes ; 2 bateaux insubmersibles destinés à contenir chacun 35 personnes, soit 70 personnes ; 4 bateaux pliants destinés à contenir chacun 49 personnes, soit 196 personnes.

Capacité totale des embarcations de sauvetage : 1.176.

Les ceintures de sauvetage étaient largement en quantité suffisante pour tous.

DÉPART DU VAPEUR « TITANIC »

Le navire quitta Southampton le mercredi 10 avril à 12 h. 15 p. m. avec le complément des officiers et de l’équipage (Voir annexe A), soit 899 personnes. Alors que le Titanic quittait le quai de Southampton, les mouillages du New-York furent arrachés par le ressac que provoquait l’hélice tribord du Titanic causant un retard d’une demi-heure environ.

PASSAGERS ET LISTE DES SURVIVANTS DU VAPEUR « TITANIC »

Le Titanic atteignit Cherbourg, tard, le même après-midi. Le Titanic quitta Cherbourg en route pour Queenstown, Irlande, où il arriva jeudi vers midi, et repartit pour New-York immédiatement, après avoir embarqué les courriers et les passagers. La liste des passagers était la suivante :

CHIFFRES TOTALISÉS DES PASSAGERS ET SURVIVANTS :

Y compris l’équipage, le Titanic prit la mer après avoir embarqué 2.223 personnes dont 1.517 ont disparu et 706 ont été sauvées. On remarquera que 60 p. 100 des passagers de premières ont été sauvés ; des secondes 42 p. 100 ; des troisièmes 25 p. 100 ; de l’équipage, 24 p. 100.

CONDITIONS MÉTÉOROLOGIQUES PENDANT LE VOYAGE

Pendant tout le voyage, le temps fut clair à la seule exception de 10 minutes de brouillard ; la mer fut calme. Chaque jour, le soleil brillait toute la journée ; chaque nuit, le firmament était clair et constellé d’étoiles. Aucun incident malencontreux ne troubla le voyage. Des saluts furent fréquemment échangés au moyen des signaux appropriés avec les navires rencontrés.

AVERTISSEMENTS RELATIFS AUX ICEBERGS

Le troisième jour, des avertissements relatifs aux icebergs parvinrent par T. S. F. aux télégraphistes du Titanic et les dépositions témoignent, d’une manière concluante, qu’au moins trois avertissements parvinrent directement au commandant du Titanic, le jour de la catastrophe : le premier vers midi, du Baltic de la White Star Line. Il est à remarquer que ce message indiquait la position d’icebergs à moins de cinq milles de l’itinéraire que suivait le Titanic et à proximité de l’endroit où la ^catastrophe eut lieu. Le message du commandant du Baltic est ainsi :

Vapeur Baltic, 14 Avril 1912.

Au Capitaine Smith du Titanic,

« Depuis départ, avons eu vents variables et modérés et beau temps. Vapeur grec Athinai signale passage icebergs et grandes quantités banquises aujourd’hui à latitude 40.42 Nord, longitude 55.11. Hier soir, avons communiqué avec navire allemand, pétrolier Deutschland, allant de Stettin à Philadelphie, à court de charbon ; latitude 40.42 Nord, longitude 55.11. Désire être signalé à New-York et autres vapeurs. Vous souhaite et au «. Titanic tout succès.

« Commandant du Baltic. »

Le second message fut reçu par le Titanic du Californian, appartenant à la « Leyland Line », vers 5 h. 35 du soir, heure de New-York, le dimanche dans l’après-midi, signalant de la glace à environ 19 milles au Nord de l’itinéraire que suivait le Titanic. Le message était ainsi :

« Latitude 42.3 Nord, longitude 49.9 Ouest. Trois grands icebergs à 5 milles de nous, au Sud.

« Salutations. (Signé Lord). »

Le troisième message fut transmis de l’ Amerika via le Titanic et Cap Race à la station hydrographique de Washington, D. C, signalant la présence de glace environ 19 milles au Sud du trajet que suivait le Titanic. Ce message était ainsi rédigé :

« Vapeur Amerika via Titanic et Cape Race.

14 Avril 1912.

« Station hydrographique de Washington D. C.

« Amerika a passé deux grands icebergs le 14 avril à 41.27 Nord, 50.8 Ouest.

« K. N. U. T. »

Ce message parvint effectivement à la station hydrographique de Washington, le i4 avril, à 10 h. 51 du soir.

Le quatrième message fut adressé au Titanic à 9 h. 5 du soir, heure de New-York, le dimanche 14 avril, approximativement une heure avant la catastrophe.

Le message était ainsi : « Nous sommes arrêtés et entourés de glace. » A quoi le télégraphiste du Titanic répliqua :

« Taisez-vous, suis occupé, je communique avec Cap Race. »

Alors que ce message fut le dernier adressé par le Californian au Titanic, les témoignages font ressortir que le télégraphiste du Californian conserva son casque sur sa tête et entendit le Titanic communiquer avec Cape Race jusqu’à quelques minutes avant la catastrophe, et c’est quelques minutes avant la catastrophe « qu’il enleva son casque, se déshabilla et se coucha ».

Le télégraphiste du Baltic surprit des messages au sujet de glace adressés au Titanic de la part du Prinz Friedrich Wilhem, et de la part de l’ Amerika (p. 1.061), alors que le Carpathia surprit le même jour le Parisian échangeant des messages au sujet de glaces avec d’autres navires.

DE LA GLACE AUSSI BIEN AU NORD QU’AU SUD DE L’ITINÉRAIRE SUIVI PAR LE « TITANIC »

Ceci autorise la Commission à dire que les positions des glaces signalées d’une manière si déterminée au Titanic immédiatement avant la catastrophe indiquaient la présence de glace des deux côtés de l’itinéraire que suivait le Titanic et dans son voisinage immédiat. Aucune discussion générale n’eut lieu parmi les officiers ; il n’y eut aucune délibération en présence de ces avertissements ; on n’en tint pas compte. La vitesse ne fut pas ralentie, les vigies ne furent pas augmentées, la seule précaution prise par l’officier de quart ayant été de recommander aux vigies de « veiller très attentivement aux glaces )>. Il faut cependant remarquer, comme l’indiquent les dépositions, que le capitaine Smith fit l’observation suivante à l’officier Lightoller qui a été de quart sur le pont jusqu’à 10 heures (heure du navire), soit 8 h. 27 (heure de New York) :

« — Si le moindre brouillard survenait, nous devrions, cela ne fait pas de doute, marcher très lentement, et si le temps est le moins du monde indécis, prévenez-moi. »

Les témoignages rapportent que le temps était exceptionnellement clair. Il n’y avait pas de brouillard et la vitesse du navire ne fut pas réduite.

VITESSE

La vitesse du Titanic augmenta graduellement après le départ de Queenstown. Le parcours du premier jour fut de 464 milles, celui du second jour, 519 milles, celui du troisième, 546 milles. Immédiatement avant la collision, le navire réalisait la vitesse maxima du voyage : pas moins de 21 nœuds, soit 24 2 milles à l’heure.

LA COLLISION

À 11 h. 46 du soir (heure du navire), soit 10 h. 13 du soir (heure de New-York), la vigie communiqua avec le pont et téléphona à l’officier de quart : « Iceberg à l’avant ». L’officier de quart, M. Murdock, commanda sur-le-champ au quartier-maître à la barre : « Bâbord, toute ! » et renversa la marche. Mais pendant que le sixième officier qui se tenait derrière le quartier-maître à la barre rendait compte à l’officier Murdock : « La barre est a bâbord, toute ! », le Titanic toucha la glace.

Le choc, bien que pas assez violent pour déranger les passagers ou l’équipage ou pour arrêter la course du navire, le fit légèrement rouler et provoqua l’arrachement des tôles d’acier au-dessus de la courbe de bouchain.

PREMIER DÉGÂT SIGNALÉ

Les témoignages rapportent qu’au moment de la collision, on entendit un sifflement d’air provenant du tuyau de trop plein de la cale à eau avant, dû à l’envahissement de l’eau. C’est pour ainsi dire immédiatement que la cale à eau AV, les cales nos 1, 2 et 3, ainsi que la chambre des chaudières AV, furent remplies d’eau dont la présence fut signalée aussitôt, du local affecté aux courriers postaux, de l’emplacement réservé au jeu de tennis, du puits d’hélice (trunk room) dans la cale 3, ainsi que du poste des chauffeurs dans la cale n° 1. Le chauffeur en chef Barret vit l’eau faire irruption dans la chambre de chauffe AV par une déchirure à environ deux pieds au-dessus des plaques de parquet de cette chambre et à environ 20 pieds au-dessus de la ligne de flottaison. La déchirure s’étendait de deux pieds dans la soute à charbon à l’extrémité avant de la deuxième chambre de chauffe.

L’IMPORTANCE DES DÉGÂTS EST RECONNUE

Après différentes inspections du navire, les communications faites au capitaine ont dû rapidement l’édifier sur l’importance des dégâts. C’est dans cet état d’esprit qu’il répondit lorsqu’il fut interrogé par le président Ismay. Il y a également lieu de croire que la gravité de la situation fut promptement reconnue par le mécanicien en chef et le représentant de la maison de construction, Mr Andrews, dont aucun ne survécut.

L’EAU ENVAHIT LE NAVIRE

Sous cette pression d’eau, l’avant du Titanic s’enfonça de plus en plus. Par l’écoutille ouverte donnant accès au local des courriers postaux et aussi par d’autres ouvertures, l’eau inonda vite le pont E, au-dessous duquel se terminaient les 3e, 4e, 5e, 6e, 7e et 8e cloisons transversales, provoquant ainsi l’inondation des compartiments à l’arrière de la cale n° 3.

COMPARTIMENTS ÉTANCHES

Le Titanic était pourvu de 15 cloisons transversales, dont une seulement, la cloison n° 1, la première à partir de l’AV, s’étendait jusqu’au pont supérieur continu C ; les cloisons n°s 2, 10, 11, 12, 13, 14 et 15 s’étendaient jusqu’au deuxième pont continu D ; enfin, les cloisons nos 3, 4, 5, 6, 7, 8 et 9 s’étendaient seulement jusqu’au troisième pont E.

Les fermetures des écoutilles du pont E n’étaient pas étanches, car il a été reconnu que l’inondation du pont E a largement contribué à faire couler le navire.

Les cloisons décrites ci-dessus divisaient le navire en 16 compartiments étanches principaux et la construction du navire était telle que, même si deux compartiments principaux avaient été envahis par l’eau, la sécurité du bâtiment ne s’en trouvait nullement compromise.

Comme on l’a déjà dit, les faits démontrent que les cinq compartiments à l’extrême-avant ont été, pour ainsi dire, immédiatement envahis par l’eau. Dans ces conditions, en raison de la non-étanchéité du pont où aboutissaient les cloisons transversales, les compartiment supposés étanches ne l’étaient PAS et le navire a sombré.

SIGNAUX DE DÉTRESSE,

Aucune alarme générale ne fut donnée à bord ; on ne fit retentir aucune sirène et les passagers ne reçurent aucun avertissement systématique.

En quinze ou vingt minutes environ, le capitaine visita le poste de T. S. F. et donna l’ordre au télégraphiste de demander de l’aide en lançant le signal de détresse C. Q. D.

LES SIGNAUX DE DÉTRESSE FURENT ENTENDUS.

Le signal de détresse fut reçu par le poste de T. S. F. de Cape Race, ce soir là à 10 h. 2 5 (heure de New-York), ainsi que le message faisant connaître que le Titanic avait touché un iceberg. En même temps, cette communication fut reçue, par hasard, par le Mount Temple qui vira immédiatement (p. 760) et se dirigea vers le Titanic. En moins de deux ou trois minutes, une réponse du Frankfurt parvint. En moins de dix minutes, le télégraphiste du sans-fil à bord du Carpathia, heureusement et par le plus grand des hasards, entendit l’appel C. Q. D. du Titanic qu’il communiqua sur-le-champ au capitaine.

Le Carpathia vira à l’instant même (p. 19), signala au Titanic sa longitude et sa latitude et qu’il se dirigeait vers lui à toute vapeur (p. i£8 et 8OT). Cependant le Frankfurt ne fit pas connaître sa longitude et sa latitude et, après 20 minutes d’attente, demanda au télégraphiste du Titanic : « Qu’y a-t-il ? ». A quoi le télégraphiste du Titanic répondit « qu’il n’était qu’un imbécile ».

Vu ce fait qu’aucun relèvement n’avait été donné par le Frankfurt et qu’à ce moment là son éloignement exact du Titanic n’était pas connu, la réponse du télégraphiste du Titanic n’était pas précisément celle que la prudence aurait dû lui dicter. Quoi qu’il en soit, le Mount Temple entendit le Frankfurt signaler « Notre capitaine se dirige sur vous ».

Les communications furent vite établies avec l’Olympic, le Baltic et le Coronia, à environ 800 milles à l’Est, surprit l’appel C. Q. D. du Titanic.

Le message sans fil du Titanic fut particulièrement enregistré au poste de Cape Race, par le Mount Temple et en partie par le Baltic.

Le Mount Temple entendit le Titanic pour la dernière fois après la catastrophe à n h. 47 du soir (heure de New-York) (p. 929).

Le Baltic et le Carpathia perdirent contact à la même heure environ, le dernier message reçu étant « La chambre des machines est envahie par l’eau ».

Le Virginian entendit les signaux du Titanic pour la dernière fois à 12 h. 27 (heure de New-York) et les rapporta comme étant confus et s’étant brusquement interrompus (p. 175).

PREMIÈRES NOUVELLES COMMUNIQUÉES PAR LA PRESSE

Cette indication est contenue dans un compte rendu reçu de Cape Race par l’Association de la presse, communiqué par elle au public ainsi qu’au vice-président Franklin de la « Withe Star Line », enfin, confirmé plus tard par son office à Montréal, dans les termes suivants :

« Cape Race, New Brunswick. Dimanche soir, 14 avril.

« Cette nuit, à 10 h. 20, le vapeur Titanic de la White Star Line lança l’appel C. Q. D. au poste sans fil de Marconi, ici, signalant qu’il avait touché un iceberg. Ce navire faisait connaître qu’il nécessitait des secours immédiats. »

Un autre message parvint une demi-heure après annonçant que le Titanic s’enfonçait de l’avant et que des femmes prenaient place dans les embarcations de sauvetage.

Le télégraphiste du Titanic signala que le temps était calme et clair et indiqua la position du navire comme étant 41°46’ latitude Nord et 50°14’ longitude Ouest.

Le poste Marconi de Cape Race notifia immédiatement ces faits au « liner » Virginian de la compagnie Allan, dont le capitaine répondit aussitôt qu’il se dirigeait sur les lieux du sinistre.

À minuit, le Virginian se trouvait à environ 170 milles du Titanic et pensait atteindre ce navire vers 10 heures du matin, lundi.

Lundi, 2 heures du matin. L’ Olympic se trouvait de très bonne heure ce matin (lundi) par 40°32’ latitude Nord et 61°18’ longitude Ouest. Il communiquait directement avec le Titanic et se dirige actuellement sur ce navire à toute vitesse.

Le vapeur Baltic a également annoncé qu’il se trouvait à environ 200 milles à l’Est du Titanic vers lequel se dirigeait aussi rapidement que possible.

Les dernières communications du Titanic ont été reçues par le Virginian, à midi 27.

L’opérateur de T. S. F. à bord du Virginian annonce que les signaux étaient confus et ont cessé brusquement.

NAVIRES DANS LES PARAGES DU VAPEUR « TITANIC »

La Commission juge qu’il est utile d’attirer l’attention sur les positions des navires se trouvant dans les parages du Titanic, lors des signaux de détresse de celui-ci.

Le Californian, de la Seyland Line, se dirigeant vers l’Ouest, se trouvait par 42°05’ latitude Nord et 50°07’ de longitude Ouest. Il se trouvait distant dans une direction Nord à 19 1/2 milles du lieu du sinistre, suivant les calculs du capitaine.

Le Mount Temple de la Canadian Pacific Railroad Line, se dirigeant vers l’Ouest, se trouvait par 41°25’ latitude Nord et 51°14’ longitude Ouest, à environ 49 milles à l’Ouest du Titanic.

À son retour à la position du Titanic, il croisa un schooner inconnu.

Le Carpathia de la « Cunard Line » se dirigeant vers l’Est, était à 58 milles du Titanic et prit une direction au Nord, 52° Ouest, pour atteindre le Titanic.

Le Birma, un navire russe, se trouvait à 70 milles du Titanic à midi 25, le lundi 15 avril.

Le Frankfurt, de la North German Lloyd Line, se dirigeant vers l’Est, se trouvait par 39° 47’ latitude Nord et 52° 10’ longitude Ouest, à 153 milles au Sud-Ouest.

Le Virginian, à minuit, se trouvait à environ 170 milles du Titanic.

Le Baltic de la White Star Line, se dirigeant vers l’Est, se trouvait à environ 243 milles au Sud-Est de la position du Titanic, vers 11 h. du soir, dimanche (heure de New-York).

L’Olympic, de la White Star Line, se dirigeant vers l’Est, se trouvait à midi 14 (heure de New-York), à 512 milles à l’Ouest, par 40°22’ latitude et 61°18’ longitude Ouest.

FEUX DE NAVIRES APERÇUS DU VAPEUR « TITANIC »

Seize témoins du Titanic comprenant des officiers et des marine expérimentés, ainsi que des passagers de jugement sain, ont déclaré avoir vu au loin la lumière d’un navire. Quelques-unes des embarcations de sauvetage furent dirigées vers cette lumière pour déposer les passagers et revenir ensuite au Titanic. Le Titanic lança des fusées de détresse et tenta de se mettre en communication avec le navire au moyen d’une lampe électrique actionnée suivant le code Morse.

Les officiers du Californian reconnaissent qu’ils ont aperçu vers le même moment des fusées dans la direction du Titanic et rapportent qu’ils ont immédiatement mis en action une puissante lampe Morse aisément visible à la distance de 10 milles, alors que plusieurs membres de l’équipage du Californian déclarent qu’à 11 h. 30 du soir (heure du navire), quelques instants avant la catastrophe, les feux de côté d’un grand navire allant à toute vitesse étaient clairement visibles du pont inférieur du Californian. Aucune déposition ne fait ressortir que des fusées aient été lancées par un navire quelconque se trouvant entre le Titanic et le Californian bien qu’à bord du Titanic tous les yeux scrutassent l’horizon en vue d’une aide possible.

RESPONSABILITÉ DU VAPEUR « CALIFORNIAN »

La Commission est obligée d’arriver à cette conclusion inévitable que le Californian était plus rapproché du Titanic qu’à la distance de 19 milles déclarée par le capitaine.

Que les officiers et l’équipage ont aperçu les signaux de détresse du Titanic, auxquels ils n’ont pas répondu contrairement à la solidarité humaine, aux usages internationaux et aux prescriptions de la loi.

La seule réponse aux signaux de détresse ayant été un contre-appel par les moyens d’un fort feu blanc éclairant pendant deux heures environ du mât du Californian.

Dans notre opinion, une semblable conduite, qu’elle résulte de l’indifférence ou de négligence grossière, est des plus répréhensibles et fait encourir au commandant du Californian une lourde responsabilité.

L’opérateur du T. S. F. à bord du Californian ne fut prévenu qu’à 3 h. 30 du matin (heure de New-York), le 15, après de longues conversations entre les officiers et les membres de l’équipage au sujet de ces signaux et fusées de détresse. L’opérateur du T. S. F. reçut l’ordre de l’officier chef de quart de s’informer si un événement quelconque avait eu lieu parce qu’un navire avait lancé des fusées pendant la nuit.

Les recherches débutant ainsi révélèrent aussitôt que le Titanic avait coulé.

Si une aide avait été rapidement tentée ou si l’opérateur du T. S. F. du Californian était resté quelques minutes de plus à son poste, le dimanche soir, ce navire aurait eu la fière distinction de sauver l’existence des passagers et de l’équipage du Titanic.

SIGNAUX INTERNATIONAUX DE DÉTRESSE EN MER.

La Commission estime qu’il est important d’insister sur la signification des signaux de détresse.

SIGNAUX DE DÉTRESSE.

Lorsqu’un navire est en détresse et requiert de l’aide d’autres navires ou de terre, il utilisera les signaux suivants, soit ensemble, soit séparément.

Pendant le jour.

1° Canon ou autre signal explosif à intervalles réguliers d’une minute environ ;

2° Signal de détresse du Code international indiqué par N. C ;

3° Signal à distance consistant en un pavillon carré ayant au-dessus ou au-dessous un ballon ou tout ce qui peut y ressembler [1] ;

4° Le signal à distance consistant en un cône ayant au-dessus ou au-dessous un ballon ou tout ce qui peut y ressembler ;

5° Un son continu produit par tout appareil en usage par temps de brouillard.

Pendant la nuit.

1° Canon ou autre signal explosif à intervalles réguliers d’une minute environ ;

2° Lueurs (telles qu’en peuvent produire un tonneau de goudron ou d’huile) ;

3° Fusées ou grenades lançant des étoiles de toute couleur ou de toute nature, lancées une à une à de courts intervalles ;

4° Un son continu produit par tout appareil en usage par temps de brouillard.

LES EMBARCATIONS DE SAUVETAGE DU « TITANIC » SONT PARÉES.

Lorsque le capitaine Smith apprit que l’eau envahissait le navire, il donna promptement l’ordre de parer les embarcations de sauvetage et, plus tard, d’y faire embarquer les femmes et les enfants. Entre temps, des fusées de détresse étaient lancées à de fréquents intervalles.

C’est à ce moment que le manque d’exercice se révéla de la façon la plus évidente :

Aucun dispositif pour le chargement des embarcations ;

Grande indécision quant au pont où elles seraient chargées ;

Opinions très variées quant au nombre d’hommes pour constituer l’équipe de chaque embarcation ;

Instructions d’aucune espèce quant au nombre de passagers devant prendre place dans chaque embarcation et aucune uniformité dans le chargement de celles-ci. Tantôt on n’embarquait que les femmes et les enfants, tantôt il y avait une proportion pour ainsi dire égale d’hommes et de femmes, mais la préférence a été donnée aux femmes et aux enfants dans tous les cas.

Le fait de n’avoir pas utilisé les embarcations suivant la capacité qui leur était reconnue pour la sécurité a indubitablement entraîné le sacrifice inutile de plusieurs centaines d’existences qui, autrement, auraient pu être épargnées.

CAPACITÉ DES EMBARCATIONS DE SAUVETAGE NON UTILISÉE.

Comme il est dit plus haut, le navire était pourvu d’embarcations de sauvetage susceptibles de recevoir 1.176 personnes, alors que 706 furent sauvées. Seules, quelques embarcations de sauvetage du Titanic étaient chargées à plein, d’autres partiellement. Quelques-unes furent chargées au pont d’embarcations, d’autres au pont A et mises successivement à l’eau. La vingtième embarcation fut enlevée par un coup de mer, alors que la partie avant du navire était submergée et, complètement retournée, servait de radeau de sauvetage à 30 personnes environ, y compris le second officier Lightoller, les opérateurs de T. S. F. Bride et Phillips (ce dernier mort avant d’avoir pu être sauvé) ; les passagers colonel Gracie et Mr. Jack Tayer, et d’autres membres de l’équipage qui s’y hissèrent hors de l’eau au moment où le navire disparut.

MODÈLE DES EMBARCATIONS DE SAUVETAGE.

Il y a lieu de rechercher si, la mer étant houleuse, les embarcations du Titanic auraient pu être mises à l’eau sans être endommagées ou détruites. Le point de suspension des embarcations se trouvait à 70 pieds environ au-dessus du niveau de la mer. Si le navire avait roulé fortement, les embarcations, pendant la descente, auraient été balancées à l’extérieur pour venir se briser contre la muraille du navire. D’après les dépositions, il est évident qu’au moment où le Titanic donnait sensiblement de la bande, les embarcations frottaient contre le haut bord du navire.

Tous les efforts devraient, par conséquent, tendre à l’amélioration des dispositifs pour la manœuvre des embarcations.

CONTRADICTIONS DANS LES DÉPOSITIONS RELATIVEMENT AUX EMBARCATIONS DE SAUVETAGE.

Dans les dépositions des survivants, les avis diffèrent considérablement quant au nombre de personnes que contenait chaque embarcation. Par exemple, un survivant déclare qu’il y en avait 10 dans l’embarcation n° 1. Le marin qui en avait la conduite déclare qu’elle portait 7 membres de l’équipage et de 14 à 20 passagers. L’officier qui assura l’embarquement estime qu’il y avait de 3 à 5 femmes et 22 hommes.

En se basant sur le minimum indiqué par n’importe quel survivant de toute embarcation, le total dépasse de beaucoup le nombre réel recueilli par le Carpathia.

AUCUNE DISTINCTION N’A ÉTÉ FAITE PARMI LES PASSAGERS.

Les dépositions font très affirmativement ressortir qu’il n’y a pas eu de panique, sauf quelques cas isolés. En chargeant les embarcations, aucune distinction n’a été faite entre les passagers de 1re, 2e et 3e classe, bien qu’il y ait eu plus de victimes parmi ceux-ci que pour les deux autres classes.

La préférence a toujours été accordée aux femmes et aux enfants.

La Commission estime que si une bonne discipline avait été observée, les survivants auraient pu se grouper dans un plus petit nombre d’embarcations, une fois celles-ci à l’eau, et nous pensons qu’il eût été possible de sauver bien des existences si ceux qui commandaient les embarcations, après avoir été débarrassés des personnes qu’elles contenaient, étaient revenus promptement sur les lieux de la catastrophe.

CONDUITE SUR LES EMBARCATIONS DE SAUVETAGE.

Une fois mises à l’eau, plusieurs des embarcations ramèrent de nombreuses heures dans la direction des feux que l’on suppose avoir été provoqués par le Californian. D’autres embarcations restèrent sur place dans le voisinage du navire qui coulait et recueillirent quelques survivants.

Après avoir réparti ses passagers dans les quatre autres embarcations qu’il avait rassemblées et que les cris de détresse ne s’entendaient plus, le 5e officier Lowe, dans l’embarcation n° 14, se rendit sur les lieux du naufrage et sauva de l’eau quatre passagers, dont l’un est mort dans l’embarcation, mais fut identifié. L’officier Lowe mit alors à la voile l’embarcation n° 14, prit un bateau pliant en remorque et procéda au sauvetage des passagers à bord d’un autre bateau pliant.

Les hommes qui s’étaient réfugiés sur le bateau pliant retourné furent sauvés (y compris le 2e officier Lightoller, les passagers Gracie et Thayer, les télégraphistes Bride et Phillips) par les embarcations de sauvetage nos 4 et 12, avant l’arrivée du Carpathia. Le quatrième bateau pliant fut amené au Carpathia et contenait 28 femmes et enfants, pour la plupart des passagers de 3e classe, 3 chauffeurs, 1 steward, 4 habitants des Iles Philippines, le président Ismay et Mr. Carter, de Philadelphie. Cette embarcation était dirigée par le quartier-maître Rowe.

LE NAVIRE SOMBRE.

Le navire s’enfonça graduellement par lavant, ayant une position presque perpendiculaire avant de sombrer, à midi 27 (heure de New-York) le i5 avril. Il y a eu beaucoup de dépositions contradictoires sur le fait que le navire se serait brisé en deux ; mais, suivant la majorité des témoignages, le navire coula intact.

PAS DE TOURBILLONS.

La Commission estime devoir attirer l’attention sur l’importance de ce fait qu’au moment où le navire sombra il n’y eut pas de tourbillon apparent et que la surface de l’eau n’accusa pas de désordre inaccoutumé. Nombre de dépositions attestent qu’au moment où le navire sombrait, l’effet d’un tourbillon ne se révéla ni aux personnes dans l’eau ou sur le bateau pliant retourné, ou sur des épaves, ni aux personnes occupant des embarcations de sauvetage dans le voisinage du navire, ni enfin pour empêcher les personnes dans l’ eau, pourvues ou non de ceintures de sauvetage, de nager aisément du navire pendant qu’il s’enfonçait.

LE CAPITAINE ROSTRON.

La Commission attire votre attention sur les dispositions prises par le capitaine Rostron, commandant le Carpathia, dès que parvint par T. S. F. l’appel de détresse ; le capitaine Rostron donna immédiatement l’ordre de virer, se dirigea sur le Titanic et commanda au chef mécanicien d’assurer les services d’un autre quart de chauffeurs et de réaliser toute la vitesse possible.

Comprenant la présence possible de glaces, à cause de la collision, le capitaine Rostron doubla ses vigies, stimula la vigilance de tous, fit placer une vigie supplémentaire à l’avant et prit un autre officier sur le pont. Le capitaine donna aussitôt l’ordre au premier officier de « préparer toutes nos embarcations de sauvetage pour les mettre à l’eau ». Il fit venir les divers chefs de service et donna les ordres suivants que la Commission estime assez importants pour les citer en entier :

Docteur anglais avec aides doivent demeurer dans la salle à manger des premières.

Docteur italien avec aides doivent demeurer dans la salle à manger des secondes.

Docteur hongrois avec aides doivent demeurer dans la salle à manger des troisièmes.

Chaque docteur doit avoir ce qu’il lui faut pour restaurer et stimuler et, sous la main, tout ce que peuvent nécessiter des blessés ou des malades.

Le commissaire aux vivres, son adjoint et le « chief steward » doivent recevoir les passagers, etc., à différentes coupées ; contrôler les « stewards » conduisant les passagers du Titanic aux salles à manger, etc., et se procurer le plus tôt possible les prénoms et noms de tous les survivants, en vue de les transmettre par sans fil.

L’inspecteur, les « stewards » d’entrepont et le capitaine d’armes doivent surveiller nos passagers d’entrepont, leur interdire l’accès de la salle à manger des troisièmes et les empêcher d’envahir le pont pour éviter la confusion. Ordre au « chief steward » de faire préparer du café à distribuer à tous les membres de notre équipage.

Préparer du café, du thé, de la soupe dans chaque salon. Y faire placer des couvertures, ainsi qu’aux coupées, et en avoir prêtes poulies embarcations. Veiller à ce que tous les survivants soient bien soignés et leur assurer ce dont ils peuvent avoir immédiatement besoin.

Ma cabine et celle de tous les officiers seront cédées. Les fumoirs, la bibliothèque, etc., les salles à manger recevront les survivants.

Toutes les couchettes de l’entrepont à la disposition des passagers du Titanic. Réunir tous nos passagers d’entrepont.

Les « stewards » se placeront dans chaque coursive pour rassurer nos passagers s’ils s’inquiétaient du bruit causé par la mise à l’eau des embarcations, des machines, etc.

À tous, j’ai fait ressortir la nécessité de se conformer à l’ordre, à la discipline et de rester calmes pour éviter toute confusion.

Ordre au principal officier et au premier officier : rassembler tout l’équipage : distribution de café ; parer et décrocher toutes les embarcations.

Faire ouvrir les portes de toutes les coupées.

Éclairage électrique dans chaque coupée et par-dessus bord. Une poulie avec passeresse fixée à chaque coupée. Un brancard pour blessés avec appareil de levage à chaque coupée. Chaises de gabier. Échelles de côté. Cendriers en canevas à chaque coupée ; les cendriers devant servir pour transporter les enfants.

Amarres, etc., etc., à l’usage des embarcations ou pour hisser les personnes, pour les attacher à des chaises, etc.

Mâts de charge à l’avant parés. Treuils sous pression.

Officiers détachés dans différents postes en vue de certaines éventualités.

Ordre de lancer des fusées a 2 h. 45 du matin et ensuite à chaque quart d’heure d’intervalle pour rassurer les passagers du Titanic.

La Commission estime que la conduite du capitaine Rostron mérite les plus grands éloges. Ses instructions sont un chef-d’œuvre d’organisation et de méthode.

Les mesures prises par lui lui ont permis de suivre son itinéraire en contournant des icebergs et en naviguant au milieu de ceux-ci jusqu’à ce qu’il fît arrêter las machines, à 4 heures du matin, sur les lieux de la catastrophe où il recueillit les embarcations de sauvetage du Titanic et leurs survivants.

SUR LES LIEUX DE LA CATASTROPHE.

La première embarcation fut recueillie le lundi à 4 h. 10 du matin et le dernier des survivants était à bord à 8 h. 30.

À l’arrivée du Californian, vers 8 heures du matin, le capitaine du Carpathia communiqua avec son commandant, exposant que tous les passagers des embarcations avaient été sauvés, mais qu’une avait probablement disparu. Des dispositions furent prises et le Californian se mit activement à sa recherche.

Le capitaine Rostron dépose que le Carpathia a recueilli quinze embarcations de sauvetage et deux bateaux pliants [2].

Après avoir pris ses dispositions pour faire faire de minutieuses recherches dans le voisinage par le Californian, le capitaine Rostron prit la direction de New-York et par T. S. F. adressa le message suivant aux fonctionnaires de sa compagnie à New-York :

New-York, Lat. 41° 45’, Long. Ouest 50° 20’.

Me dirige sur New-York, sauf ordre contraire, avec environ 8oo personnes, après avoir consulté Mr. Ismay et envisagé les circonstances. Entourés de glaces au point où nous le sommes, juge préférable nous rendre New-York. Grandes quantités d’icebergs et champ de glace de 20 milles avec icebergs.

PAS DE CORPS VISIBLES.

La Commission attire l’attention sur ce fait que le capitaine Rostron, du Carpathia, bien qu’ayant exploré pendant quatre heures les parages de la catastrophe, n’aperçut aucun corps. Il en fut de même pour le capitaine Lord, du Californian, qui demeura trois heures dans le voisinage de la catastrophe.

Le capitaine du Mount Temple ne fut pas plus heureux.

Comment expliquer qu’aucun cadavre n’ait été vu le matin du jour qui a suivi la catastrophe ? Il faut admettre que les personnes ayant sombré avec le navire ne sont pas remontées à la surface, ou bien elles ont été entraînées et cachées par la banquise considérable qui, pendant la nuit, s’est placée à l’endroit où le navire a disparu, alors que les corps retrouvés au loin ont été probablement entraînés par les courants ou le déplacement des glaces.

SERVICE DE T. S. F.

De nombreux messages de caractère officiel ont été remis à l’opérateur du Carpathia, le lundi matin 15 avril, avec instructions détaillées du capitaine en vue de procéder sur-le-champ à leur transmission et, si nécessaire, par l’intermédiaire d’autres navires.

La déposition du capitaine Rostron, le 19 avril 1912, le lendemain de son arrivée à New-York est absolument formelle relativement aux dispositions prises par lui en ce qui concerne les messages envoyés par sans fil.

« Dès le commencement, je me chargeai de tout, ordonnant que tout message soit transmis sous mon autorité et aucun sans mon assentiment. Mes ordres furent : d’expédier avant tout les messages officiels au nombre de deux :

1° À la « Compagnie Cunard » ; 2° à la « White Star Line », au sujet de la catastrophe, faisant savoir le nombre de passagers recueillis et que je me dirigeais sur New-York. Ceci à la « White Star Line » et l’autre à notre Compagnie, naturellement, informant que je procédais pour New-York, à moins d’ordres contraires, considérant pour bien des raisons que New-York devait être notre but.

À la suite de ces deux messages, j’en ai fait transmettre un à l’Association de la Presse (Associated Press) dans les mêmes termes, pour ainsi dire, qu’aux Compagnies, sous ma signature.

Voilà quels furent les trois premiers messages envoyés. Ensuite nous transmîmes les noms des passagers de 1re classe. Ceci, par l’intermédiaire de l’ Olympic, le lundi soir. La première et, je crois, toute la deuxième série des messages, furent transmises par l’ Olympic. Ensuite nous perdîmes contact.

Mes ordres assuraient le contrôle de tout le service de T. S. F. Les messages officiels, comme je l’ai déclaré, ont été transmis en premier lieu. Ensuite, la communication à la presse, puis les noms des passagers.

Enfin, après les noms des passagers et de l’équipage, je donnai l’ ordre de transmettre les messages privés des passagers du Titanic, dans Tordre où ils étaient remis au commissaire aux vivres, sans préférence d’aucune sorte.

La question de l’autorité exercée sur l’opérateur du Carpathia ayant été soulevée, le président de la Sous-Commission adressa le câblogramme suivant au capitaine Rostron :


New-York, 4 Mai 1912. Au capitaine Rostron, Cunar Steamship Carpathia, Gibraltar.

Message original sans fil envoyé par Bruce Ismay, adressé Islefrank, New-York City, dès arrivée à bord Carpathia lundi matin i5 avril, contenant ces mots : « Ai douleur informer que Titanic a sombré ce matin après collision avec iceberg, d’où perte considérable d’existences. Détails suivront. Signé Bruce Ismay ». Est actuellement en ma possession.

Ismay, relevé de son serment, je désire câblogramme de vous indiquant contenu de ce message et tous détails à ce sujet indiquant heure et date envoi message par télégraphiste de Carpathia et par intermédiaire quel navire ou station à terre, et si, de ceux-ci, à un autre navire.

Avez-vous interdit au télégraphiste communiquer ce message, ou d’autres, via vapeurs Californian ou Olympic ? Télégraphiste a-t-il été empêché par vous d’envoyer ce message ou tout autre concernant la catastrophe ?

Réponse à moi, Washington.

William-Alden SMITH, Président de la Sous-Commission sénatoriale.


J’ai reçu la réponse suivante :


Au sénateur W.-A. SMITH, président de la Sous-Commission sénatoriale.

Le télégramme Ismay débute :

« Islefrank, New-York : ai douleur informer que Titanic a sombré ce matin, 15, après collision avec iceberg, d’où perte considérable d’existences ; détails suivront. Bruce Ismay, Exe » (fin). Trésorier m’a demandé autorisation envoyer ce message que j’ai accordé. Comme c’était message officiel et Ismay moralement très souffrant à ce moment, trésorier lui a demandé d’ajouter les trois derniers mots. Message a été envoyé par Sable Island, le 17 avril. Message remis au trésorier après-midi du 15 ; trésorier remis personnellement message à télégraphiste Gottam et donnai mon autorisation de le transmettre le plus tôt possible. Je n’ai point interdit utiliser intermédiaire de tout autre navire. Au contraire, ai particulièrement indiqué faire tout possible pour transmettre par les moyens les plus commodes messages officiels, noms des survivants, ensuite messages des survivants. Par Olympic ont été envoyés messages signés par moi à Cunard, Liverpool et New-York, White Star et messages à la presse. Télégramme d’Ismay presque identique au mien. Avons communiqué Olympic aussi longtemps que possible. Les messages dont seul j’ai empêché l’envoi étaient autres messages pour presse. Désire enquête complète sur tous mes actes.

10.40 p. m.

ROSTRON.


Nonobstant les instructions du capitaine au télégraphiste dans la matinée du 15 avril, relativement à la transmission du message de M. Ismay à M. Franklin, à New-York, il n’est parvenu à M. Franklin que vers 9 heures du matin le mercredi 17 avril. Le message original (entre les mains de la Commission) fut transmis du Carpathia, le 17 avril, via Halifax. Notre enquête a fait ressortir que le message fut délivré à M. Franklin, à New-York, peu après sa réception par la « Postal telegraph et câble Cie ».

INFORMATION PUBLIQUE.

La première information officielle communiquée au public par les fonctionnaires de la « White Star Line » avait été adressée par le capitaine Haddock de l’ Olympic, le lundi 15 avril à 6 h. 15 du soir. Le message était ainsi conçu : « Carpathia est arrivé sur la position du Titanic à la pointe du jour. N’a trouvé qu’embarcations et épaves. Titanic a sombré vers 2 h. 20 du matin, par 41° 16’ Nord et 50° 14’ Ouest. Toutes les embarcations retrouvées. 675 personnes sauvées, équipage et passagers. Ces derniers presque tous femmes et enfants. Vapeur Californian de la « Seyland Line » demeure sur place repérant le lieu du désastre. Carpathia retourne New-York avec survivants. Veuillez informer « Cunard ».

HADDOCK. »

Quoique ce message fût entre les mains des fonctionnaires de cette compagnie, un télégramme fut adressé au représentant J.-A. Hughes Hutington, W. Va., daté de New-York, i5 avril 1912, ainsi libellé : « Titanic se dirige sur Halifax. Passagers y débarqueront probablement mercredi, tous sains et saufs. White Star Line, 8h. 27 soir. »

La Commission n’a pu établir l’identité de l’auteur de ce télégramme. Le message a cependant été délivré à la « Western Union Branch Office » dans Je même immeuble que les bureaux de la « White Star Line », 11, Broadway, à 7 h. 51 du soir, ce jour-là, mais la Commission est dans l’incertitude la plus absolue quant à l’expéditeur de ce message.

La personne, quelle qu’elle soit, s’est rendue coupable, dans ces circonstances, de la conduite la plus répréhensible.

La Commission ne croit pas que le télégraphiste du Carpathia ait déployé la vigilance voulue lors des importantes fonctions qui lui étaient confiées après la catastrophe. Des nouvelles relatives à un sinistre en mer ont déjà été utilisées à son profit par un opérateur de T. S. F. antérieurement à la catastrophe du Titanic. Le fait qu’une telle façon d’agir a été autorisée par la Compagnie Marconi pourrait bien avoir eu une certaine influence dans les circonstances actuelles. La tendance des fonctionnaires de la compagnie Marconi a tolérer cette pratique et le fait que des représentants de cette Compagnie ont pris des dispositions pour la vente des nouvelles des opérateurs de T. S. F. du Titanic et du Carpathia, expose les participants à la critique, et une semblable pratique devrait être prohibée.

La Commission est heureuse de signaler que Mr. Marconi approuve cette interdiction.

RECOMMANDATIONS

La Commission estime que la catastrophe démontre clairement la nécessité d’une législation plus étendue pour la sécurité de la vie en mer.

Selon la loi, les États-Unis acceptent réciproquement l’inspection des certificats de pays étrangers dont les lois d’inspection se rapprochent de celles des États-Unis. Sauf s’il n’est procédé à bref délai à la révision des lois d’inspection des pays étrangers en s’inspirant des indications qui suivent, la Commission estime convenable de conclure de semblables dispositions réciproques et aucun navire ne sera autorisé à transporter des passagers de ports des États-Unis avant de s’être entièrement conformé aux règlements et prescriptions des lois des États-Unis.

La Commission recommande l’amendement des articles 4481 et 4488, des statuts révisés, pour prescrire définitivement à bord des navires le nombre suffisant d’embarcations pour recevoir tous les passagers et tous les membres de l’équipage. Les grandes compagnies reconnaissent si bien l’importance de cette mesure, que sur beaucoup de lignes des dispositions sont prises en vue d’assurer la capacité d’embarcations de sauvetage suffisante pour toutes les personnes à bord y compris l’équipage. Cette mesure est l’objet d’une grande publicité.

Le président de la « International Mercantile Marine C° », M. Ismay, a définitivement déclaré à la Commission : « Nous avons donné des ordres pour qu’aucun navire de nos lignes ne quitte un port s’il transporte plus de passagers et d’équipage que ne le comporte la capacité des embarcations de sauvetage. »

A chaque embarcation on ne devrait pas affecter moins de quatre membres de l’équipage, habiles à la manœuvre des embarcations. Tous les membres de l’équipage affectés aux embarcations de sauvetage devraient être exercés, au moins deux fois par mois, à la mise à l’eau et à la manœuvre des embarcations. Les résultats de ces exercices seront consignés dans le livre de bord.

La Commission recommande d’affecter les passagers et membres de l’équipage aux différentes embarcations avant le départ du navire, que les occupants d’un certain nombre de locaux (salles à manger, salons, etc., et les stewards de ces locaux soient affectés à certaines embarcations les plus commodément placées par rapport aux locaux en question. Les personnes affectées aux embarcations et le plus court trajet des locaux à celles-ci seront affichés dans chaque local.

La Commission recommande qu’il soit prescrit à chaque vapeur transatlantique transportant cent passagers ou au-dessus, d’être pourvu de deux projecteurs électriques.

La Commission estime que la catastrophe fait clairement ressortir la nécessité de réglementer la radio-télégraphie. Un opérateur devra être de service en tout temps, jour et nuit, pour assurer la réception immédiate de tout appel de détresse, avertissement ou autres transmissions importantes. On assurera une communication directe entre le poste de T. S. F. et le pont soit au moyen d’un téléphone haut parleur, tube acoustique, soit par un messager, de telle sorte que l’opérateur ne quitte pas son poste.

Il y a lieu d’appliquer une législation précise pour éviter toute immixtion de la part d’armateurs, pour garder aux radiogrammes ou messages par T. S. F. leur nature confidentielle. Il y aura une force mécanique auxiliaire, accumulateurs ou moteur, pour assurer l’actionnement du poste de T. S. F. jusqu’à ce qu’il soit submergé.

La Commission recommande l’adoption prochaine de l’article 6412 déjà voté par le Sénat et favorablement accueilli par la Chambre.

La Commission recommande que le fait d’utiliser des fusées ou bougies en haute mer à toute autre fin que pour un signal de détresse soit considéré comme un délit.

La Commission recommande de prescrire les dispositions supplémentaires suivantes dans la construction des vapeurs transatlantiques à passagers dont la construction est entreprise après la présente date.

Tout navire transatlantique en acier ou tout navire caboteur transportant cent passagers, ou au-dessus, sera pourvu d’un revêtement étanche en dedans du bordage extérieur, ne s’étendant pas à moins de 10 p. 100 de la ligne de charge au-dessus de la pleine ligne de charge, soit sous forme de fond intérieur, soit sous forme de cloisons étanches longitudinales dont la construction s’étendra de la cloison de collision AV sur les deux tiers au moins de la longueur du navire.

Tout navire transatlantique en acier et tout navire caboteur transportant cent passagers, ou au-dessus, sera pourvu de cloisons placées de telle sorte que si deux quelconques des compartiments adjacents du navire sont envahis par l’eau, la flottabilité et la stabilité du navire n’en seront pas compromises ; les cloisons étanches transversales devront s’étendre d’un côté à l’autre du navire et feront corps avec la partie extérieure de la coque. Les cloisons transversales à l’avant et à l’arrière des emplacements des machines seront des cloisons verticales continues jusqu’au pont supérieur des structures continu, lequel sera étanche. Les cloisons dans les limites des emplacements de la machine ne devront pas s’étendre à moins de 15 p. 100 du tirant d’eau du navire au-dessus de la ligne de charge et devront se terminer à un pont étanche. Toutes cloisons et ponts étanches seront proportionnés de manière à pouvoir supporter, sans qu’il en résulte de déviation matérielle permanente, une pression d’eau égale à celle qu’elle produirait si elle dépassait de cinq pieds la hauteur totale de la cloison. Les cloisons de dimensions modernes ou les échantillons seront éprouvés en étant soumis à une réelle pression d’eau.

  1. Ceci est simplement un signal de code et non un des signaux de détresse indiqués dans les règles de route dont l’usage, s’il n’est pas nécessité, entraîne des pénalités pour le capitaine de navire d’où il a été lancé.
  2. Les différentes dépositions recueillies par la Commission d’une personne au moins par embarcation de sauvetage, indiquent que les seize embarcations dont le Titanic était pourvu ont toutes été retrouvées. — Treize de ces embarcations ont été hissées à bord et transportées à. New-York par le Carpathia.