Rational (Durand de Mende)/Volume 2/Quatrième livre/Chapitre 18

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Traduction par Charles Barthélemy.
Louis Vivès (volume 2p. 109-111).


CHAPITRE XVIII.
LE PRÊTRE OU L’ÉVÊQUE ET SES ASSISTANTS S’ASSEOIENT.


I. L’oraison finie, le prêtre ou l’évêque s’asseoit. Il est à remarquer que dans la célébration de la messe le prêtre s’asseoit à trois moments : d’abord pendant la lecture de l’épître. On parlera de cette première fois au chapitre du Changement de Place du prêtre. Ces trois moments signifient les trois jours que le Seigneur demeura dans le temple de Jérusalem, au milieu des docteurs, les écoutant et les interrogeant. Le prêtre, en s’asseyant, se tient tourné vers le peuple, pour montrer la puissance qui lui a été donnée par Dieu, et pour pouvoir considérer ceux qui se tiennent humblement debout dans l’église et dominer ceux qui s’y tiennent orgueilleusement ; car leurs âmes lui ont été confiées, et il doit en rendre compte à Dieu. Il doit encore être placé sur un siège élevé, afin que, comme le maître d’une vigne, il veille sur son bien et ait la haute main sur le peuple ; car le Seigneur, assis sur son trône dans les hauteurs des cieux, garde sa cité. Enfin, l’oraison qui précède l’épître, et que l’on dit avant que le prêtre s’asseoie, marque surtout le temps auquel le Christ, prêt à monter au ciel, bénit ses disciples. Quand il s’asseoit ensuite, cela signifie le repos du Christ à la droite de son Père, après son ascension ; s’asseoir, c’est un signe de victoire. Voilà pourquoi le prêtre, en s’asseyant, figure la victoire du Christ, comme on le dira au chapitre du Changement de Place du prêtre.

II. Quand les assistants s’asseoient, cela figure ce que dit le Christ : « Vous serez aussi assis sur des trônes et vous jugerez les douze tribus d’Israël ; » et ils représentent les justes qui règnent déjà dans les cieux. Ceux qui vont et viennent dans le chœur représentent ceux qui accomplissent encore leur pèlerinage en ce monde. C’est pourquoi les chantres et les lecteurs, lorsqu’ils se lèvent pour remplir leur office, font l’œuvre de Dieu ; c'est à eux qu’il a été dit : « Faites profiter cet argent jusqu’à ce que je revienne. » Donc, quelques-uns des assistants s’asseoient avec l’évêque, pour symboliser les membres du Christ qui reposent déjà dans la paix, et dont l’Apôtre dit : « Il nous a fait asseoir dans le ciel en Jésus-Christ. » Ils représentent encore ceux qui jugeront les douze tribus d’Israël. Les autres se tiennent debout pour figurer les membres du Christ qui combattent encore. Dans certaines églises, pendant que le pontife est assis on change les chandeliers de place et on les met en rang sur une seule ligne, en commençant par le premier jusqu’à l’autel, pour marquer que nous avons tous reçu de la plénitude du Christ l’unité de son esprit, mais aussi la variété de ses grâces ; car les grâces se divisent, mais l’Esprit reste le même (De consec., d. iv, Cum omni). Or, l’Esprit, figuré par le premier cierge debout ou premier chandelier, c’est-à-dire le Christ, qui découle de lui, et qui va jusqu’à l’autel, c’est-à-dire jusqu’aux cœurs des élus, varie les dons de ses grâces alternativement dans chacun des membres du Christ. Et rappelle-toi que les acolytes mettent leurs chandeliers par terre, parce que les prédicateurs, après avoir achevé de prêcher, reconnaissent humblement qu’ils sont poussière et cendre, comme dit Abraham : « Je parlerai au Seigneur, quoique je ne sois que poussière et que cendre. »

III. On lit dans l’Ordre romain que le pontife ne doit pas s’asseoir avant que l’Amen n’ait été dit à la fin de la première oraison. Il ne doit pas s’asseoir jusqu’à la lecture de l’épître, parce que la partie de la messe qui précède ce moment est consacrée à la joie causée par l’avènement et les miracles du Christ. Or, l’évêque figure le Christ venant et agissant en ce monde, et les autres assistants représentent ceux qui allaient devant, derrière le Christ et à sa rencontre lorsqu’il fit son entrée à Jérusalem.