Recueil de tombeaux des quatre cimetières de Paris/16
DESCRIPTION
DE TOMBEAUX.
Planches 61, 62, 63, 64.
Planche 61.
TOMBEAU DE MADAME HOWARD.
Ce tombeau, qui se trouve dans une des contr’allées, est adossé à la charmille du bosquet de l’avenue de Vincennes, dite du Dragon. Il se compose d’une colonne surmontée d’une urne. Le tout est en pierre.
À côté de cette colonne, on voit la tombe de madame Désanges. C’est une dalle de pierre, dans laquelle est incrusté un marbre noir où son épitaphe est gravée en lettres d’or.
Le monument de madame Howard porte une inscription latine dont voici la traduction :
Planche 62.
TOMBEAU DE MADEMOISELLE CHAMEROI.
Ce monument est situé à droite, dans le fond du vallon qui est en face de la porte. Il est en pierre et se compose d’une tombe à dossier. Des lilas et des rosiers répandent à l’entour leur ombre et leur parfum. Le site en est très-pittoresque. Cette tombe qui a dévoré jeunesse, grâce, légèreté, offre au spectateur le sujet d’une triste méditation.
Planche 63.
TOMBEAU DU GÉNÉRAL DE PONS.
On voit ce monument sur le plateau de la colline de gauche, en entrant dans le cimetière. Il se compose d’une tombe en pierre, sur laquelle est représentée une croix en relief. À l’extrémité supérieure de cette croix, s’élève un piédestal surmonté d’une petite corniche. Le tout est en pierre. Sur le monument on a placé une coupe qui sert de bénitier, un goupillon de rameaux de cyprès, et tout près, une lampe de forme antique. Les vases lacrymatoires ainsi que les lettres en relief, sont en bronze et artistement travaillés.
Derrière ce monument, on lit ces mots :
À côté de cette tombe, et dans la même enceinte, on en voit une autre en pierre, dont la forme est celle d’un piédestal ; on y lit cette épitaphe :
Planche 64.
TOMBEAU DE MONSIEUR PRANGEY.
On trouve ce tombeau, en entrant par la porte du petit Vaugirard. Il est formé d’un piédestal carré, avec socle et double socle, Une petite corniche, un fronton angulaire, des oreillons, et une urne funéraire qui le surmonte. Il est ombragé de cyprès et d’un saule pleureur.
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À UN ROSIER MOURANT.
Toi que, dès la naissante aurore,
Arrosait ma soigneuse main.
Toi que plus assidue elle arrosait encore,
Lorsque le jour, à son déclin,
Fuyait devant la nuit qui s’empressait d’éclore ;
Arbuste cher, toi dont la fleur
Devait parer ma solitude
Et la remplir de ton odeur ;
Objet de ma sollicitude,
Doux rosier, tu péris, hélas !
Et je ne puis sauver ta tige
Des injustes coups du trépas !
Que n’ai-je, pour charmer le regret qui m’afflige,
L’espérance de voir, par un nouveau prodige,
Sur ton pied desséché refleurir tes appas ?
Mais non : tu meurs pour ne renaître pas !
Tu meurs ! Ni le printemps ranimant la nature,
Ni du zéphir le souffle bienfaiteur,
Ni d’un soleil nouveau la féconde chaleur,
Ni la fraîcheur d’une onde pure,
Rien n’a pu de ta sève animer la langueur ;
Rien n’a pu de ton front conserver la verdure ;
Tu meurs !… Naguère encore je voyais tes rameaux,
Chaque matin à leur parure
Ajouter des attraits nouveaux ;
Toujours à mon réveil je les trouvais plus beaux ;
Fidèle à mon espoir, chaque nuit faisait naître
Quelques feuilles, doux prix de mes soins assidus !
Chaque aurore, un bouton s’efforçait de paraître ;
Mais enfin des plaisirs si long-temps attendus,
Le moment me sourit, j’aperçois une rose,
Qui parmi la verdure, étalant sa rougeur,
Avec le jour naissant disputait de fraîcheur.
Sur elle avec plaisir mon regard se repose ;
J’admire tour-à-tour son éclat, sa candeur,
Et plein d’émotion j’en savoure l’odeur.
O courte joie ! ô plaisir éphémère !
J’ignore quel souffle impur,
Pénétrant l’écorce légère,
Dissipa mon ivresse et d’un bonheur futur
Emporta l’espérance, hélas ! trop mensongère.
Je me refuse encore à de justes soupçons…
Cependant sur l’arbre que j’aime,
La feuille sans ressort fléchit sous elle-même ;
Et mon dernier espoir, les fragiles boutons,
Sur leurs rameaux flétris laissent tomber leurs fronts.
Comment d’un mal si prompt combattre le ravage ?…
Redoutant du soleil un rayon trop ardent,
A l’arbuste ma main prépare un doux ombrage ;
Son pied d’une eau limpide est baigné plus souvent ;
De la fraîcheur des nuits la cloche le défend…
Tout est vain ! la pâleur a terni son feuillage ;
Son tronc se dépouille et noircit ;
Tandis que la fleur en poussière,
S’envole, tombe et retourne à la terre,
Qui la fit naître et la nourrit.
Ainsi mes yeux t’ont vue, aimable Leonore,
Pâlir, sécher, languir et descendre au tombeau,
Quand de ta vie à peine avait brillé l’aurore,
Quand l’espoir t’entourait d’un avenirs si beau !
Innocente, sensible, hélas ! par quelle offense,
Pouvais-tu mériter un sort si rigoureux ?
Mais je connais du ciel la jalouse puissance,
Nous étions criminels, nous étions trop heureux !
Un tel forfait criait vengeance !
Le ciel punit toujours de pareils attentats.
Et malgré tes vertus, ta jeunesse, tes charmes,
Sourd à nos vœux, sourd à nos larmes,
Sur toi dans sa colère, il lança le trépas.
D’un père chancelant au bout de sa carrière,
Ta tendresse pieuse étayait les vieux ans :
Le malheureux a fermé ta paupière !…
Ô douleur ! et tes yeux mourans
Sur ta couche funèbre ont vu pleurer ta mère,
Tandis qu’auprès de toi mes sanglots impuissans,
S’opposaient, mais en vain, à ton heure dernière.
Leonore ! Ombre chère ! ah ! si ma faible voix
Avec succès un jour ose se faire entendre,
Je le jure aujourd’hui, pour la seconde fois,
J’obtiendrai des pleurs à ta cendre.
Tous les cœurs attendris sur ton malheureux sort,
Rediront les accens de l’ami le plus tendre,
Et partageant son deuil, gémiront sur ta mort !
virginis occurrit. JUV. Sat. 15.
De ces demeures redoutables,
Les froids et mornes habitans
Sont devenus fort bonnes gens,
Point ennemis de leurs semblables,
Point serviles, point arrogans,
Point envieux, point irritables,
Point menteurs et point médisans,
Et point bavards insupportables…
Ma foi, quand je songe aux vivans,
Je trouve les morts bien aimables.