Recueil de tombeaux des quatre cimetières de Paris/6

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(6ème Livraison.)

DESCRIPTION
DES TOMBEAUX.
Planches 21, 22, 23, 24.

CIMETIÈRE DE MONT-LOUIS.

Planche 21.

TOMBEAU de la Famille FIEFFÉ.


Ce tombeau construit en pierre de liais, forme un Sarcophage, d’une belle proportion dans sa simplicité, sous lequel est un caveau.

Il n’a d’autres ornemens que deux lacrymatoires de chaque côté de l’inscription.

À l’une des extrémités, au couchant, est l’entrée du caveau destiné à la famille. Sur la porte en pierre, de ce tombeau, est gravée cette inscription : Sépulture de la famille FIEFFÉ. Cette porte est fermée par un cadenas. On y voit suspendues une couronne d’immortelles en fleurs naturelles, ainsi qu’une autre à l’orillon.

Ce tombeau est situé au milieu d’une belle allée de tilleuls, laquelle a ses contre allées revêtues de charmille et dont une de ses extrémités reprend la vue sur une vaste campagne. On appelle cette allée, l’allée de Vincennes, parce qu’on y découvre les donjons de ce château fort.

Ce monument est entouré d’une balustrade en fer de neuf pieds de long, sur six pieds et demie de large, à chaque angle de laquelle on a planté un Cyprès.[1]

Devant l’entrée du caveau, est un banc en pierre de huit pieds et demie de long. On voit souvent sur cette pierre les parens de M. et Mad. FIEFFÉ, se livrer à leur pieuse douleur et à cette idée consolante, qu’un jour viendra leurs cendres seront confondues avec les leurs.

Le chemin le plus direct pour arriver à cette sépulture est de prendre en entrant dans le cimetière, l’allée tournante à droite, traverser le carrefour de l’Étoile et le petit sentier pratiqué diagonalement sur le penchant de la colline. Arrivé là, le tombeau est alors tout près de vous, sur la droite.

Le pourtour de ce tombeau excepté le côté de l’entrée est orné d’une caisse en fleurs que je n’ai pu placer dans la gravure, parce qu’elle aurait caché l’épitaphe de M. et Mad. FIEFFÉ. Cette caisse depuis le commencement du printems jusqu’à la fin de l’automne est couverte de fleurs, suivant les saisons.

Tout le monde a connu M. FIEFFÉ. Les fonctions honorables de Notaire, de Maire, de Législateur, qu’il remplit successivement, le mirent en rapport avec la grande majorité des habitans de cette Capitale. Je ne dirai pas que personne n’eût à se plaindre de lui ; tous eurent à se féliciter de s’être adressé à cet homme estimable, dans les différentes affaires qui ressortissaient de son pouvoir. Comme Notaire, la probité, l’honneur, la sagesse le dirigèrent constamment dans toutes ses démarches. Comme Maire, sa justice, sa bonté, son désir d’être utile à tous, le firent aimer de tous ses administrés. Comme Législateur, jamais l’intrigue, la basse adulation ne le déterminèrent à agir contre sa conscience. Comme une famille est heureuse de pouvoir citer un tel homme pour lui avoir appartenu !!


CIMETIÈRE DE MONT-MARTRE

Planche 22.

TOMBEAU DE Mad. BONTEMS, de Saint-Cernin.


Ce monument pyramidal, est construit en pierre de liais ; les tables saillantes d’inscriptions, sur toutes les faces ; sont en marbre noir. Il est placé dans le vallon à gauche en entrant. Il est composé d’un piedestal sur lequel est posé une pyramide, laquelle est surmontée d’un globe doré, portant une croix et des armoiries, d’autres armoiries se voyent aussi sur la pyramide et le piedestal.

Le dessein de ce monument et les inscriptions sont de M. BONTEMS, de Saint-Cernin.


TRADUCTION.


Elle surpassa par ses vertus, les femmes les plus recommandables sous le rapport de leur conduite. Sous celui des agrémens de la figure, aucunes ne purent lui être comparées ; depuis sa naissance jusqu’au milieu de sa carrière les honneurs l’environnèrent, elle vient au sein de l’opulence, elle fut la gloire de son époux, les délices de ses enfans, l’objet constant de l’amour de ses parens, de sa famille, de tous ceux qui eurent le bonheur de la connaitre.

Hélas ! combien la félicité de ce monde est de courte durée ! Cette révolution subite qui bouleversait la France, en détruisant cet état de bonheur dans lequel elle vivait, et en la livrant à une longue suite d’infortunes la conduisit au tombeau bien avant l’âge elle aurait dû y descendre.

En imitant ses vertus, ses enfants recueilleront un riche héritage.

Elle est pleurée de ses amis, bien plus encore de son époux, qui pour consacrer la preuve de son éternelle douleur lui a fait élever ce modeste monument.

Inscription sur la face opposée de l’inscription ci-dessus.


À LA MÉMOIRE D’ADOLPHE,

Marie, François, Joseph, ADOLPHE, de Saint-Cernin, capitaine de hussards et aide-de-camp du général WESPHALIEN, comte d’HAMERSTEN, fils de l’excellente mère, dont les restes reposent sous cette tombe, a été moissonné le 7 septembre 1812, dans les plaines de Moscou, âgé de vingt-quatre ans, deux mois et dix-huit jours.

Priez Dieu, qu’il lui fasse miséricorde, et qu’il donne enfin quelques consolations à une famille accablée, en si peu de temps, de deux pertes aussi cruelles.


CIMETIÈRE DE VAUGIRARD

Planche 23.

TOMBEAU de M. GAGNAGE.


Ce petit monument, consiste en une dalle de pierre de liais, il se trouve à droite en entrant par la petite porte du cimetière.

CIMETIÈRE SAINTE-CATHERINE.

Planche 24.

TOMBEAU DE Mad. GREGUELU.


Il se trouve à gauche en entrant. Il consiste en une dalle de pierre scellée au mur de clôture, sur laquelle on a gravé l’épitaphe.

suite du discours.
Prononce par M…, sur la tombe de Jacques DELILLE. ( Voyez la 1 2 3 4 Set 6me. Livraison.).


» Enfin, à 75 ans, frappé d’un mal subit, mais exempt de douleur, entouré des soins de la plus tendre épouse, tu n’as fait que passer, pour ainsi dire, des bras de l’Amitié et des Muses à un paisible sommeil. Oublierais-je ici ce noble triomphe de tes funérailles, le peuples, les grands, tous les amis des arts et des lettres, tous ceux que tu honorais d’une affection particulière, versant des larmes sur ton cercueil ? Après ces premiers tributs de la douleur générale, ne vois-je pas encore l’Europe attentive à ta perte, l’Europe qui partage les regrets de

la France veuve de son poëte ? Quel digne prix de tes savantes veilles ? Quelle récompense des travaux d’une vie
consacrée entière au culte des Muses, que les regrets de ses contemporains et la palme de l’immortalité ? Cette glorieuse récompense, ton maître l’espérait à son dernier soupir, et les Dieux n’ont point trompé son attente. Mais, hélas ! Naples ne conserve ni les restes sacrés, ni le tombeau de ce grand homme ; à peine se souvient-elle du lieu de sa sépulture. Tu seras plus heureux que Virgile. L’antique capitale de la France, cette enceinte où reposent les ossemens de nos pères, cette nation héroïque seront plus fidèles au dépôt que tu leur laisses. Nos fils, nos descendans, conserveront, de race en race, tes cendres, ton monument et ta mémoire. »


Suite de la description du Tombeau de Jacques DELILLE.


L’enceinte où est placé le tombeau de J. DELILLE, forme un quaré long de 56 pieds sur 19 pieds 5 pouces de large, pris hors œuvre. Il est entouré d’un mur d’appui de 16 pouces de haut, construit en pierre. À chaque extrémité de ladite enceinte est pratiqué une porte. Le mur d’appui est surmonté d’une grille de fer à barreaux ronds et terminée en pointes aiguës de 3 pieds de haut. Le tombeau se trouve au milieu de cet emplacement : il est entouré de gazons, et de fleurs odoriférantes. L’intérieur forme un oratoire de recueillement. Il est meublé de six escabeaux, ou tabourets en bois, d’un tapis de pied en velours d’Utrecht. Les deux coffres en bois de chêne, dans l’un desquels est renfermé le corps de J. DELILLE ; l’autre est destiné pour madame DELILLE. Ces deux coffres sont recouverts d’un devant et d’un dessus d’autel à gradin, construits en dalles de pierre de liais. Sur l’autel est un Christ en cuivre doré et autres accessoires convenables à la décoration d’un autel.

La grille qui formait le panneau du haut de la porte d’entrée vient d’être supprimée et remplacée par un panneau en mosaïque, dont les fleurons qui terminent la jonction de chaque barreau sont dorés. Cette petite grille est fermée en dedans par un chassis vitré est en verre de couleur gros bleue, qui s’ouvre et se ferme à volonté. Madame DELILLE, d’après le vœu de M. DELILLE, exprimé dans la dernière épître qu’il lui adressa, a fait placer une croix en pierre sur le sommet du fronton du monument, du côté de l’entrée et au-dessus de la porte a fait graver cette inscription,

JACQUES DELILLE.

Ce tombeau a été commencé par M. BRONYARD, Architecte dudit Cimetière, etc.


LE VAIN USAGE DE LA VIE.

ODE.


Faut-il que d’une main avare
Le ciel ait mesuré nos jours,
Et que la nature barbare
En termine si-tôt le cours ?
Une vaste et longue carrière
Séduit nos yeux à la barrière ;
Bientôt le terme est aperçu ;
Vainement on voudrait poursuivre,
À peine songe-t-on à vivre
Qu’il faut songer qu’on a vécu.


  1. On a attaché injustement une idée funèbre au Cyprès, par la raison que les anciens en plantaient autour des tombeaux des personnes riches, comme on le voit par un vers de Lucain, l. 3. v. 442.

    Et non plebeios luctus testata Cupressus.

    Ce qui signifie : Et le Cyprès ne sen point à marquer le deuil du Plébeïn.

    Mais il faut observer qu’on ne plaçait des Cyprès autour des tombeaux, que parce qu’ils faisaient une décoration. Les Romains employaient aussi cette arbre pour l’agrément. Petrone parle d’une plantation de Cyprès, dans un lieu de délices ; et Pline en avait orné sa campagne. Epist. 8.