Recueil de tombeaux des quatre cimetières de Paris/7

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(7ème Livraison.)

DESCRIPTION
DES TOMBEAUX.
Planches 25, 26, 27, 28.

CIMETIÈRE DE MONT-LOUIS.

Planche 25.

TOMBEAU d’Alexandre Hector LEMAIRE


On arrive à ce monument en traversant le carrefour de l’Étoile, il se trouve à droite près du bord de la route tournante presque vis-à-vis du tombeau, de madame la duchesse de Valmy.

Ce tombeau se compose de trois pierres tumulaires Sur celle du milieu s’élève un monument triangulaire à orillon, d’un bon style.

Ce monument est en marbre noir granit de Flandres.

Chaque table d’inscription est ornée de trois couronnes gravées dans la pierre. Ces couronnes sont dorées et enlacées l’une dans l’autre. Elles sont l’une de lauriers, l’autre de ns la pierre. Ces couronnes sont dorées et myrte la troisième en feuilles de chêne, l’urne de chaque face est posée sur un socle qui forme un triangle, sur celle à droite : on lit : Pater, sur celle à gauche Mater et sur celle du milieu Filius.


Traduction de l’Épitaphe latine d’Alexandre-Hector LEMAIRE[1].


Ici, reposent, solitaires encore, les ossemens d’Alexandre-Hector LEMAIRE, qui, n’étant encore âgé que de 18 ans, élèvé émérite de rhétorique, s’occupait de faire ses cours de droit et de philosophie.

Excellent écolier en vers latins, ses compositions lui avaient mérité plusieurs prix.

Doué de toutes les qualités de l’esprit et du cœur, faisant les délices de la meilleure des mères, la gloire d’un père, son instituteur, il fut enlevé par une mort imprévue et cruelle, le 11 décembre 1812. Ses condisciples le pleurèrent et il fut regretté de ceux même qui ne le connaissaient qu’indirectement.

On lit sur une autre face du tombeau l’inscription suivante.

O generose puer,
Tu frustra plus,
In eterno sepulcri exilio jaces ;
Sed non diu solus ibi morabere ;
Mox aderunt, quos praecessisse non decuit,
Et juxta te medium, dextra laevaque compenindi
Sub eodem et proprio cespito conquiescent ;
Gine, qui jam non pater,
Naenia solemni, sineret dolor, te prosequeratur,
Illine, miserrima inter omnes mater,
Quae consolari non vult, quia non es,
Vule, et nos expecta
Non longinquo digressu separatos.


TRADUCTION DE CETTE INSCRIPTION


Aimable jeune homme, c’est en vain que tu fus recommandable par ta piété filiale, tu reposes dans l’Éternel exil des tombeaux ; mais, seul, tu n’y resteras pas encore long-temps. Bientôt, reposeront auprès de toi ceux qui auraient dû te précéder dans la tombe, l’un à ta droite, l’autre à ta gauche, et tous deux sous la même pierre ; ce père, qui, ayant cessé, de l’être du moment où tes dépouilles ont été enfermées sous ce tombeau, est continuellement poursuivi par sa douleur, et la plus malheureuse d’entre toutes les mères qui ne veut point être consolée, parce qu’il n’y a plus pour elle de consolations depuis que tu n’existes plus.

Adieu. Attend nous, nous ne resterons pas encore longtemps séparés.

Le jeune Hector LEMAIRE, dont on a annoncé la mort prématurée, n’avait que dix-sept ans et demi, au lieu de dix-neuf, qu’on lui avait donné. Voici quelques mots prononcés sur sa tombe, le 12 décembre 1812 ; par M. BASSET, directeur des Études de l’École Normale.

« Avant de nous quitter pour toujours, cher enfant, reçois les adieux et les regrets de tes parens inconsolables, et ceux de tes amis, de tes maitres et de tes camarades… Si la mort te précipite avec violence dans la tombe, si elle anéantit, comme par un coup de foudre, le bonheur et les espérances de la famille, le ciel sans doute, le ciel a jugé la bonté de ton âme trop parfaite pour cette terre, et il la réclame dans sa justice, comme sa propriété éternelle.

» Tu n’étais encore, il est vrai, qu’au matin de la vie. Mais qu’il était serein, qu’il était brillant ! quelle belle journée il annonçait et pour toi et pour nous ! n’importe ; tu as assez vécu, et dix-sept ans passés dans la pratique des vertus de ton âge, dans la plus pure innoncence, dans l’emploi constant des talens, ont fait de ta trop courte existence une vie pleine et entière.

» Tous ceux qui entourent tes tristes restes, tous ceux que tu aimais, dont tu étais aimé, ne versent pas pour toi les premières larmes ! Chaque année ils en arrosaient tes triomphes classiques, et les fruits bien mérités d’un travail assidu : Aujourd’hui, celles dont ils mouillent ta cendre, sont remplies d’amertume, elles ne seront pourtant pas les dernières ! Eh ! pourrons-nous jamais à l’avenir voir une couronne orner le front d’un écolier, sans nous écrier avec un douloureux souvenir.

« C’est ainsi qu’Hector Lemaire, payait d’une branche de laurier, tous les soins d’un père chéri qui mettait sa gloire et son plaisir à compter son fils parmi ses meilleurs disciples. »

Loin de nous tout murmure contre les décrets éternels… Repose en paix, tendre victime, et que ton âme s’envole dans le sein de celui qui te prépare déjà la palme, due au chrétien vertueux, au fils respectueux et sensible, au bon

parent, à l’ami fidèle et à l’exemple de la jeunesse.


CIMETIÈRE DE MONT-MARTRE

Planche 26.

TOMBEAU DE J. P. NAUDET.


En entrant à gauche sur le sommet de la colline, est un bosquet, formant berceau, d’environ six pieds carrés. Ce bosquet tient à la muraille ; il est planté de lillas et de quelques cyprès il est entouré d’un treillage orné de chevrefeuilles, de rosiers et d’autres arbrissaux, qui forment ombrage entre le tombeau et le mur de clôture.

Le tombeau est placé au milieu du bosquet. Il forme un piedestal carré à orillon, surmonté d’une urne cineraire. Les couronnes qui en font l’ornement sont de bronze antique.

À droite, on a gravé ce qui suit :

Ici repose J. P. NAUDET, né à Paris, le 24 mars 1779, mort le 17 mars 1804. Au grand regret de ses parens et amis, dont il faisait toute la jouissance et le bonheur.

Ô vous qui passez dans ce lieu, priez pour lui.
À gauche, on lit :
Érigé par les soins de ses bons amis,
SOREL, DEPENNE, et L’HABITTANT
Derrière, on lit :
Immortalité.




CIMETIÈRE DE VAUGIRARD

Planche 27.

TOMBEAU DE M. COINY.


Ce monument est adossé au mur de gauche en entrant par la grande porte. Il forme un sarcophage qui fait saillie de six pouces environ sur le mur. Au bas, est une tombe de pierre de la longueur dudit sarcophage et d’environ trois pieds de large, sur laquelle on a gravé une inscription qui avertit les passants que le père et le fils morts, à peu d’intervalle l’un et l’autre, reposent ensemble sous cette pierre.


Notice sur Jacques Joseph COINY, Graveur
en taille-douce.


Jacques Joseph COINY, était fils d’un Orfèvre de

Versailles, qui s’était acquis une certaine réputation dans
l’art de l’Orfèvrerie. La célébrité dont jouissait son père, jeune

encore, lui donna le désir, en marchant sur ses traces de s’acquérir aussi une réputation dans la profession qu’il devait embrasser.

Ayant manifesté de bonne heure de grandes dispositions pour celle de graveur, il s’y livra avec une application et une intelligence toute particulières, et il obtint dans l’exercice de cette profession les plus grands succès.

Enthousiaste de son art et s’en occupant avec passion, sa santé qui était très-délicate, s’affaiblit de jour en jour. Son courage se ranimait en raison du peu d’années qui lui restait encore à vivre, car, tous lui annonçait constamment sa fin prochaine. Les soins précieux que l’épouse la plus tendre lui prodigua, ne purent éloigner d’elle ce moment fatal ou elle devait le perdre pour toujours. Il mourut le 28 mai 1809, n’était âgé que de quarante-huit ans. Les arts le regrettèrent et le pleurent encore. Si M. COINY, eut pût s’ouvrir une plus longue carrière, il n’y a pas de doute que la réputation qu’il se serait acquise, aurait égalé celle de nos plus célèbres graveurs.

Il y a un vieux proverbe populaire qui dit qu’un malheur ne va pas sans l’autre. Madame COINY, en a fait la triste expérience. Le lendemain du jour elle eut la douleur de perdre son époux, mourut son second fils âgé de trois ans, sur lequel reposait, pour l’avenir une partie de ses espérances. Cet enfant repose sous la même pierre avec son père.

Les épitaphes du père et du fils, se lisent sur le dessin de leurs tombeaux qui se trouve à la planche 27.



CIMETIÈRE SAINTE-CATHERINE.

Planche 28.

TOMBEAU DE Mademoiselle HORTENSE.


Ce monument est composé de deux dalles de pierre de liais dont une est adossée au mur de clôture, près de l’angle du fond du cimetière, à gauche en entrant ; l’autre pierre qui est arrondie par le haut se trouve placée au pied.[2]

La pierre adossé au mur est ornée de chèvrefeuille, qui serpente de chaque côté et qui forme guirlande.

Le pied de ce monument, est entretenu dans les belles saisons, de fleurs de toute espèce.

Une couronne de roses et une de cyprès étaient appendues à l’orillon quand on a dessiné ce tombeau.

On l’a représenté tel qu’il était alors.

  1. Cette épitaphe est gravée sur le dessin que nous donnons du tombeau du jeune LEMAIRE. Voyez la planche 25.
  2. Voyez la planche 32 de la huitième livraison.