NOUVELLES CONTEMPORAINES, in-12, 1826. — Ce recueil comprend trois nouvelles : Laurette, Blanche de Beaulieu, et Marie. De l’intérêt, des détails touchants, un air de vérité qui attache, voilà ce qu’on trouve dans ces nouvelles, et particulièrement dans la seconde, qui offre plusieurs situation dramatiques. L’héroïne, fille du marquis de Beaulieu, l’un des généraux vendéens, accoutumée, dès son enfance, à porter l’habit d’homme, partageait, sous ce costume, les fatigues et les périls de son père. La petite troupe qu’il commandait, cernée dans un bois pendant la nuit, est taillée en pièces par un détachement de l’armée républicaine. Blanche est sauvée par le général de cette armée, qui la conduit à Nantes, dans sa famille. Mais bientôt les représentants découvrent Blanche et la font arrêter ; le général, dans l’espoir de la sauver, la fait consentir à lui donner sa main ; il part aussitôt pour Paris, obtient la grâce de son épouse, revient en poste à Nantes, où il arrive au moment où la tête de l’infortunée Blanche venait de rouler sur l’échafaud !
CHRONIQUES DE FRANCE. — Isabelle de Bavière, 2 vol. in-8, 1835. — Le premier volume de ce roman s’ouvre à l’entrée de la reine Isabelle de Bavière à Paris, le 20 août 1389, et conduit les événements jusqu’au 23 novembre 1407, jour de l’assassinat du duc d’Orléans ; le second volume, reprenant après un intervalle de dix ans, c’est-à-dire en 1417, nous fait parcourir cette époque de crimes, de malheurs et de honte qui s’arrête à la mort de Charles VI. On sait quels drames sanglants signalèrent ces deux périodes, toutes remplies des haines et des guerres de Bourgogne et d’Armagnac. Eh bien ! ils se reproduisent avec toute leur énergie dans Isabelle de Bavière. Les scènes dramatiques s’y succèdent rapidement, et, soit que l’auteur redise à sa manière une catastrophe racontée par les historiens, soit qu’il crée quelques circonstances, un intérêt palpitant vous attache à ses pages ; aussi l’on court du commencement à la fin du livre sans s’arrêter un moment.
SOUVENIRS D’ANTONY, in-8, 1835. — Antony ne joue pas le moindre rôle dans ce livre ; il lui donne son nom et rien de plus. Le premier des souvenirs nous reporte en Calabre, parmi des brigands auxquels un régiment français donne la chasse. Plus tard on assiste au bal masqué des Variétés, puis on roule en cabriolet pour aller faire visite à Mlle Mars, à M. Charles Nodier, à M. Taylor, pendant que le cocher nous débite une histoire qui se termine absolument comme Angèle. À cette histoire succède un épisode des guerres de la Vendée, où Marceau joue le principal rôle. Puis on se retrouve à Paris, au Théâtre-Français, assis entre Camille Desmoulins, Saint-Just et Robespierre. Les souvenirs se terminent par la biographie de Jacques Ier et de Jacques II, qui ne sont pas de la race des Stuarts, mais de celle des quadrumanes.
LA SALLE D’ARMES, 1838. — Pauline était une jeune demoiselle accomplie et riche, qui épousa, après 1830, le jeune comte de Beuzeval. Un sentiment étrange, comme produit par une fascination magique, un amour mêlé d’épouvante, avait entraîné, presque malgré elle, cette pure et douce jeune fille dans les bras du comte. Un tel époux était bien fait pour inspirer de l’effroi : sans parler des bruits étranges qui couraient sur lui, le comte avait des habitudes et des manières qui n’étaient guère propres à rassurer une jeune femme. Il ne se couchait jamais sans avoir à la portée de sa main une paire de pistolets chargés, et un cheval sellé nuit et jour semblait attendre qu’on eût besoin de lui pour la fuite. De plus, le comte avait deux amis, Henri et Max, chez lesquels on remarquait les mêmes habitudes. Sauf ces singularités, M. de Beuzeval était un homme charmant et le meilleur des époux. Peu de temps après son mariage, il annonce à sa femme qu’il est obligé de la quitter, bien à regret, pendant un ou deux mois ; mais un engagement pris étant garçon le force de recevoir deux de ses amis pendant l’époque des chasses, dans son château de Burcy, masure à demi ruinée, inhabitable pour une femme, qui n’a d’autre avantage que d’être parfaitement située pour la chasse. Pauline s’afflige, demande instamment à suivre son mari, ce qu’elle ne peut obtenir. À peine Beuzeval et ses deux amis sont-ils arrivés au château de Burcy que de fréquents et audacieux assassinats épouvantent la contrée ; chaque jour les feuilles de Paris répètent des articles effrayants empruntés aux journaux de la province, où sont rapportés les vols, les assassinats et les incendies dont les environs de Burcy sont le théâtre. Pauline inquiète prend le parti d’aller rejoindre son mari ; elle arrive au château de Burcy, où on était loin de l’attendre et surtout de la désirer, car les auteurs de tous les crimes qui épouvantent la contrée ne sont autres que son mari, Max et Henri. Toutefois, Beuzeval l’accueille avec amour. Une partie engagée pour les jours suivants force le comte à quitter sa femme le lendemain même de son arrivée ; il s’excuse de la laisser seule, et promet que dorénavant ces lointaines excursions ne se renouvelleront plus. Seule dans son château isolé, Pauline a peine à surmonter les craintes qui l’agitent ; son oreille, que l’effroi tient éveillée, est frappée de bruits de pas, de portes fermées ; elle a vu pendant la nuit la tête de son mari penchée au-dessus de son lit comme pour s’assurer qu’elle est endormie ; il n’est donc pas parti ; il se cache ; quel effrayant mystère ! Le hasard lui fait découvrir une porte secrète qui aboutit à un escalier dont l’existence lui est inconnue. Pauline a le courage de s’engager dans cet escalier, et après avoir descendu plusieurs étages, elle entend les voix de son mari et de ses amis. Elle avance vers le lieu d’où partent ces voix, et à travers les fentes d’une porte mal jointe, elle voit les trois amis à table, au milieu du désordre d’une orgie. Mais ils ne sont pas seuls ; dans le fond de la pièce, sur un mauvais lit, est étendue une femme, attachée par les quatre membres et demi-nue. Henri et Max se disputent à qui l’aura, et la querelle est sur le point de se vider à coups de poignard, lorsque le comte met les deux rivaux d’accord en envoyant adroitement une balle dans le cœur de la femme convoitée par les brigands. Pauline pousse un cri et s’évanouit. Elle se réveille dans un souterrain. Devant elle sont une lampe prête à s’éteindre, une lettre et un verre d’eau. Par la lettre, le comte apprend à sa femme qu’il l’adore, mais que, comme elle a surpris son secret, elle doit mourir. Tout ce qu’il peut faire pour elle, c’est de lui épargner les angoisses d’une longue agonie, et le verre d’eau empoisonnée qu’elle a devant elle, est le dernier gage de son amour. Pauline lutta deux jours contre la mort, et à la fin, vaincue par le désespoir et la souffrance, elle porta le poison à ses lèvres ; c’est alors que le jeune Alfred de Nerval eut le bonheur de la délivrer. Le monde la croyait morte ; le comte de Beuzeval avait eu l’adresse de faire passer le cadavre de la femme assassinée pour celui de Pauline, et il jouissait en paix de la haute position que lui procurait son heureuse habileté. Ce que l’on vient de lire suffit pour donner une idée de l’horrible composition de M. Dumas. Nous n’irons donc pas plus loin, et laisserons à chacun le soin d’achever cette épouvantable histoire.
Nous connaissons encore de M. Alexandre Dumas : Impressions de Voyage, 4 vol. in-8, 1833-36, et plusieurs Nouvelles insérées dans diverses revues.