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Revue des Romans/Jean Vatout

La bibliothèque libre.
Revue des Romans.
Recueil d’analyses raisonnées des productions remarquables des plus célèbres romanciers français et étrangers.
Contenant 1100 analyses raisonnées, faisant connaître avec assez d’étendue pour en donner une idée exacte, le sujet, les personnages, l’intrigue et le dénoûment de chaque roman.
1839
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VATOUT (M…)


LA CONSPIRATION DE CELLAMARE, 2 vol. in-8, 1832. — Louis XIV avait, par testament et codicille, confié la régence, le commandement supérieur de sa maison militaire et la surveillance du jeune roi au duc du Maine, prince légitimé. Après la mort du roi, Louis-Philippe d’Orléans, s’appuyant sur son droit de naissance, fit casser le testament par les parlements qui lui décernèrent la régence. Philippe V, petit-fils de Louis XIV, pensant que la régence lui revenait de droit, et qu’il lui était loisible de la substituer à une personne de son choix, donna au prince de Cellamare, son ambassadeur près la cour de France, instruction qui lui enjoignait de sonder les vues de Louis XIV relativement à la régence ; de là la conspiration de Cellemare. Le livre de M. Vatout est l’histoire vivante, animée, pittoresque, de cette conspiration, conçue d’une manière si profonde, et exécutée d’une façon si folle, si gaie, si française. C’est d’abord le vieux roi qui s’éteint au milieu de sa cour, sombre, austère et religieuse. Il meurt, tout change ; Paris, Versailles, prennent une physionomie toute nouvelle, toute jubilante, toute radieuse ; partout on crie : « Vive le régent, qui va plutôt à l’Opéra qu’à la messe ! Vive le régent ! » Cependant, des mécontents se rassemblent autour de sa jolie, ardente et spirituelle duchesse du Maine. Par un beau soir d’été, au milieu d’une fête, sur un bateau qui sillonnait les eaux d’un lac limpide, le prince de Cellamare parle, promet l’appui de son maître, et la trame est conçue. Sceaux devint le foyer, le centre de la conspiration ; tout allait peut-être réussir, lorsque le plus inouï des hasards vint renverser le fruit de tant de calculs ; et comme si tout devait porter le cachet de cette époque si rieuse, si amusante et si corrompue, la régence est sauvée par une entremetteuse, dans un mauvais lieu. Lisez plutôt le charmant chapitre sur Marianne. Marianne est la fille d’un vieux sergent qui a suivi le duc d’Orléans dans ses campagnes. Appuyé sur le bras de sa fille, le sergent se présente au régent, qui accueille le soldat et promet une pension, qui cependant n’arrive pas, parce qu’un grand seigneur a trouvé Marianne jolie, et qu’il espère que ses vœux seront plutôt accueillis de Marianne pauvre et mendiante, que de Marianne ayant du pain et un abri. Il dépêche la Fillon, et d’embûches en embûches, il possède la douce et naïve Marianne, qui, voyant qu’elle est déshonorée, demande à l’entremetteuse comme une grâce de rester chez elle. Et, par une singulière contradiction, Marianne reste pure dans ce lieu de débauche, jusqu’au moment où le hasard y conduit le secrétaire du prince de Cellamare. Marianne le voit et en est éprise. Les rendez-vous se suc cèdent ; mais une fois Marianne attend une nuit son amant qui ne vient pas. Enfin, au point du jour il arrive, pâle, défait. La jalousie de Marianne s’éveille ; elle pleure, elle gémit. Enfin, pour la calmer, le jeune diplomate lui avoue que le prince de Cellamare, ayant des dépêches du plus haut intérêt à faire copier, puisqu’il s’agissait d’attaquer la régence, l’avait retenu dans son cabinet toute la nuit ; Marianne le croit et oublie ses soupçons. Mais les amants n’étaient pas seuls ; la Fillon écoutait à la porte. Elle court chez Dubois ; la conspiration est découverte ; les conspirateurs sont arrêtés, et… Mais cette histoire si vraie, si prouvée, est partout si romanesque, que nous ne voulons pas la déflorer, pour laisser au moins au lecteur le plaisir de lire le dénoûment dans le livre.