Revue dramatique - Torquemada de Victor Hugo

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Revue dramatique - Torquemada de Victor Hugo
Revue des Deux Mondes3e période, tome 52 (p. 214-226).
REVUE DRAMATIQUE

Torquemada, drame en 1 prologue et 4 actes, en vers, de Victor Hugo ; Paris, 1882. Calmann Lévy.

Récemment, un major qui se sentait devenir sénateur, M. Labordère, écrivait de sa garnison aux conseillers municipaux de Paris qu’il serait heureux de s’asseoir « entre Victor Hugo et Barodet. » S’il a eu le loisir, pendant une séance du sénat, de feuilleter ce drame annoncé depuis longtemps et qui vient de paraître en librairie, Torquemada, M. Labordère a dû ressentir une étrange déception : ce n’était pas là ce qu’il attendait du voisin de M. Barodet. Torquemada, par Victor Hugo, en 1882, ce devait être un spectacle, — à ravir M. Paul Bert, — des cruautés de l’ancien régime à peine trois siècles avant la révolution, un pamphlet dialogué contre les crimes du saint-office, une diatribe théâtrale contre le cléricalisme, un « musée des horreurs » fait pour animer le peuple à la haine des congrégations.

Or il se trouve que ce drame est une apologie de Torquemada ; — combien singulière, nous le verrons tout à l’heure, mais courageuse et nette jusqu’à la témérité, jusqu’à l’invraisemblance. Et cette apologie se produit au moment où l’auteur, dans des lettres publiques, déclare qu’en ce temps-ci même barbarie et religion sont synonymes et que le christianisme livre en Russie sa dernière bataille contre la civilisation ! En vérité, c’est à confondre le sens d’un officier, même supérieur, et d’un sénateur, même voisin d’un maître d’école : M. Labordère n’y doit rien comprendre, il faut que nous secourions sa raison. Aussi bien, la chose est simple pour nous, qui ne sommes que d’humbles gens de plume et n’avons point d’épée à briser.

Victor Hugo, lorsqu’il s’adresse à M. Meurice ou au tsar, fait acte d’homme politique ; lorsqu’il écrit un drame, il redevient homme de lettres. Les lettres ont cette vertu qu’elles communiquent à qui les aime la paix de l’âme et la sérénité : devant elles, l’homme de parti ne peut demeurer partial ; par un effet de leur charme, il quitte l’idée la plus utile à ses opinions de l’heure présente pour suivre la plus belle, dont la beauté ne passera pas. Elles ont compté dans ce siècle un grand nombre de croyans ; Victor Hugo est de tous celui qui a pratiqué le plus fidèlement leur culte. A quatre-vingts ans, et malgré tant de divertissemens fâcheux, il donne encore l’exemple du labeur littéraire. Il est juste que cette constance ait en elle-même son prix ; il est juste aussi que tout le public la respecte, et dans le public entendez-bien que je comprends la critique. Non que je réclame l’honneur de compter parmi les lévites qui, chaque fois qu’il parle, encensent le grand-prêtre : pour ceux-là tout ce qu’il dit est également beau, étant divin et révélé. Mais leur superstition au moins est touchante, et je la préférerais presque à l’irrévérence de quelques autres.

S’il est toujours facile d’aligner des points d’admiration, il est facile aussi d’opposer à Victor Hugo une critique brutale ou gamine. Mais la brutalité, ici, ne serait que grossièreté pure, et la gaminerie me paraîtrait simple polissonnerie. L’une et l’autre, d’ailleurs, avec des airs d’indépendance, approcheraient de la naïveté. M. Zola, qui ne peut se tenir, lorsqu’un journal lui est ouvert, de dire son avis sur toutes choses, n’a pas manqué, l’an dernier, de donner dans ce ridicule, qui ne laisse pas d’être vilain. Il a comparé la situation de Victor Hugo, dans la famille des gens de lettres, à celle d’un grand-père entouré de ses petits-enfans : ceux-ci, par une convention pieuse, feignent de ne pas apercevoir les incommodités de son âge ; mais quelqu’un peut venir qui dénonce la convention ; M. Zola est ce quelqu’un. Je n’envie pas son courage ; je n’envie pas davantage l’esprit de qui fera remarquer, par exemple, que Torquemada brûlant les corps pour sauver les âmes rappelle Ugolin mangeant ses fils pour leur conserver un père. Entre les fanatiques d’une part, et les grossiers ou les plaisans de l’autre, il est une place pour la critique libre et décente : — autant que de balancer l’encensoir devant l’homme ou que de le répandre à terre et de cracher dans les cendres, il est peut-être intéressant d’étudier l’ouvrage et d’y trouver qu’après un demi-siècle la doctrine du plus grand des romantiques et son imagination marchent encore par les voies différentes où d’abord elles s’étaient engagées, et que ces voies sont allées toujours en s’écartant l’une de l’autre.

La doctrine de Victor Hugo en matière de théâtre est exposée clairement, dès 1827, dans la préface de Cromwell ; depuis, elle n’a pas varié. — La forme propre du théâtre romantique, c’est le drame ; « le caractère du drame, — je cite textuellement, — c’est le réel. » La tragédie et la comédie ont vécu, représentant, l’une « des abstractions de vices et de ridicules, » l’autre « des abstractions de crime, d’héroïsme et de vertu… Après ces abstractions, il reste quelque chose à représenter : l’homme. — La nature donc ! la nature et la vérité, » ou plutôt la nature et l’histoire, voilà les deux puissances auxquelles il faut s’adresser si l’on veut autre chose que ces ouvrages où des personnages peu nombreux, « types abstraits d’une idée purement métaphysique, se promènent solennellement sur un fond sans profondeur. » Le personnage concret et le fond — ou plutôt le milieu — voilà désormais le double souci du poète. En effet, d’une part, il veut montrer dans l’homme « le mal avec le bien, le laid avec le beau, le sublime et le grotesque, » — car « le réel résulte de la combinaison toute naturelle de deux types, le sublime et le grotesque ; » — d’autre part, « on commence à comprendre de nos jours que la localité exacte est un des premiers élémens de la réalité ; » on se rit de cette Melpomène « qui laisse au costumier le soin de savoir à quelle époque se passent les drames qu’elle fait ; » l’art « feuillette la nature, » mais il a interrogé les chroniques ; non qu’il convienne de faire, comme on dit, de la couleur locale, c’est-à-dire d’ajouter après coup quelques touches criardes çà et là sur un ensemble du reste parfaitement faux et conventionnel. Ce n’est point à la surface du drame que doit être la couleur locale, mais au fond, dans le cœur même de l’œuvre, etc… »

On ne saurait mieux dire ; aussi, dans ses autres préfaces, l’auteur ne fait-il que répéter ce qu’il a dit dans celle-là. En tête d’Angelo (1835), il recommande « l’observation perpétuelle de tout ce qui est nature. » En tête de Ruy Blas (1838), il écrit encore une fois : « Le drame tient de la tragédie par la peinture des passions et de la comédie par la peinture des caractères ; » et, d’autre part, il déclare, dans la « note » qui suit la pièce, « qu’il n’y a pas dans Ruy Blas un détail de vie privée ou publique, d’intérieur, d’ameublement, de blason, d’étiquette, de biographie, de chiffre ou de topographie qui ne soit scrupuleusement exact… À défaut de talent, l’auteur a la conscience. Et cette conscience, il veut la porter en tout, dans les petites choses comme dans les grandes. »

Ainsi voilà qui est clair : les classiques, les grands, ceux de la bonne époque, ont montré dans leurs ouvrages l’homme épuré par l’analyse, réduit à tel ou tel de ses élémens essentiels et partant aussi vrai, — mais non davantage, — dans ce temps et ce pays-ci que dans ce temps et ce pays-là ; les classiques de la décadence ont peint des semblans d’hommes, appauvris par des semblans d’analyse, en somme invraisemblables dans tous les temps et dans tous les pays : les romantiques vont peindre l’homme ou plutôt des hommes tels qu’ils sont et tels qu’ils furent, — reconstitues par la synthèse, vraisemblables et vrais d’une vraisemblance générale et d’une vérité particulière ; chaque personnage de leur théâtre sera l’homme et tel homme, situé dans tel lieu, dans telle époque et non dans telle autre. À merveille ! L’art romantique ainsi sera le plus parfait, au moins le plus complet du monde ; en même temps, il sera bien l’art du XIXe siècle, héritier laborieux de la philosophie expérimentale du XVIIIe ; il lui conviendra justement, comme l’art classique au XVIIe, ce cartésien ; il accompagnera, non sans profit perpétuel, le merveilleux progrès des sciences naturelles et historiques : psychologie animée, histoire ressuscitée et mouvante, l’art romantique ne sera que de la science inspirée.

Mais qui donc établit cette magnifique doctrine ? Prenons-y garde : c’est Victor Hugo. Comment y parvient-il, à cette théorie de la synthèse ? Cela vaut qu’on l’examine, car peut-être, en découvrant comment il y parvient, nous comprendrons du même coup l’usage singulier qu’il en fera.

Est-ce par le commerce des sciences naturelles et historiques, est-ce par un long usage de la philosophie expérimentale que le poète en est venu à former ces maximes ? Non, mais simplement par le tour naturel de son imagination. Philosophie et sciences n’ont apparu qu’après coup : elles marchent auprès de la doctrine pour la soutenir et l’encourager ; elles sont, si l’on veut, ses marraines et lui donnent raison ; mais la doctrine est née du génie même du poète : s’il parle ainsi, c’est qu’il pense, ou plutôt qu’il sent, qu’il voit, qu’il imagine d’une certaine façon ; ce n’est aucunement, comme on pourrait croire, par critique et par choix.

J’ai noté jadis, en tête d’une des parties de Marie Tudor (journée III, partie II), cette indication, de mise en scène : « La salle est tendue de deuil d’une façon particulière ; le mur de droite, le mur de gauche et le plafond d’un drap noir coupé d’une grande croix blanche ; le fond, qui fait face au spectateur, d’un drap blanc avec une grande croix noire. » Dans Torquemada, je note aujourd’hui (acte Ier, scène II) : « Deux files de pénitens, l’une noire, l’autre blanche. Les pénitens blancs ont la cagoule noire, les pénitens noirs ont la cagoule blanche. » En 1833, en 1882, même système : blanc sur noir, noir sur blanc. Pourquoi ? Il se peut que les pénitens, au XVe siècle, en Espagne, eussent vraiment ce costume, et que la robe noire n’allât pas sans la cagoule blanche ni la robe blanche sans la cagoule noire. Mais, pour la salle de Marie Tudor, aucun texte, j’imagine, ne déclare qu’il fût d’étiquette, à la tour de Londres, de tendre ainsi la pièce où la reine attendait la nouvelle de l’exécution de son amant. Pourquoi donc, je vous prie, cette façon de tenture « particulière ? » Le poète l’a mise là parce qu’il ne pouvait, en effet, l’imaginer autre : il ne peut voir une croix blanche autrement que sur un fond noir ni la voir sans qu’elle se double d’une croix noire sur un fond blanc. Sa faculté maîtresse est l’imagination du relief, obtenu comment ? Par le contraste des tons. S’agit-il pour lui de se figurer des êtres moraux ? C’est encore par un contraste qu’il les détermine. La préface de Lucrèce Borgia contient, à ce propos, une confession précieuse. « L’idée, y est-il dit, qui a produit le Roi s’amuse et l’idée qui a produit Lucrèce Borgia sont nées au même moment… Quelle est, en effet, la pensée intime cachée dans le Roi s’amuse ? La voici. Prenez la difformité physique la plus hideuse, la plus repoussante, etc., et puis jetez-lui une âme, et mettez dans cette âme le sentiment le plus pur qui soit donné à l’homme : le sentiment paternel. Qu’arrivera-t-il ? . C’est que l’être difforme deviendra beau. Au fond, voilà ce que c’est que le Roi s’amuse. Eh bien ! qu’est-ce que c’est que Lucrèce Borgia ? Prenez la difformité morale la plus hideuse, la plus repoussante, etc., et maintenant mêlez à cette difformité morale un sentiment pur, le plus pur que la femme puisse éprouver : le sentiment maternel, et cette âme difforme deviendra presque belle à vos yeux. » Le procédé, ici, apparaît à plein. J’ai souligné à dessein ce « maintenant » après cet « et puis : » c’est qu’en effet le poète, naturellement et presque sans y prendre garde, lorsqu’il imagine un être moral, aperçoit deux élémens contraires, isolés dans la nature ; c’est qu’il les aperçoit presque d’un même coup d’œil et les ajoute l’un à l’autre ; l’addition, pour lui, est si rapide et facile, — étant nécessaire, — qu’il ne se souvient pas de l’avoir faite et croit de bonne foi qu’il a seulement constaté un total ; ravi de la beauté du contraste, il ne voit pas que, ce contraste, c’est lui qui l’institue, et, trouvant le beau, du même coup il croit toucher le réel. Triboulet, dans le Roi s’amuse, « l’être difforme devenu beau, » et Lucrèce, « l’âme difforme devenue presque belle, » sont pour lui des personnes réelles ; les contrariétés même de leur nature sont, à ses yeux, une garantie de leur réalité ; ces créatures de sa fantaisie ont la vérité humaine, psychologique, universelle, éternelle ; il n’a plus qu’à leur communiquer la vérité particulière, historique, locale, temporaire ; il ne s’occupe plus que de leur costume et du milieu où elles figureront : ainsi, le plus souvent, une synthèse de Victor Hugo n’est qu’une antithèse habillée.

Mais, cependant, plus une antithèse est parfaite et plus elle diffère d’une synthèse vivante. Une antithèse parfaite est celle de deux abstractions, — car deux êtres concrets ont toujours des ressemblances, — une antithèse parfaite n’est qu’une abstraction double : or Victor Hugo est ainsi doué que les antithèses qu’il imagine ne sauraient être imparfaites. Par là, ses personnages sont des monstres, — au sens où les naturalistes et les botanistes prennent ce mot, — et son théâtre un musée de tératologie morale. Tel de ces héros fait sur lui-même et ses voisins, à ce sujet justement, de singuliers aveux. « Deux anges luttaient en moi, dit Lucrèce Borgia, le bon et le mauvais, mais je crois enfin que le bon va l’emporter ; » Gubetta lui répond : « Si nous devenions, vous une bonne femme et moi un bon homme, ce serait monstrueux. » Monstrueux, en effet ! Gubetta dit bien ; et cependant, avertis, nous assistons à ce spectacle : Lucrèce, au moins, devient une bonne femme ou, plutôt, elle l’est dès ce moment où le poète imagine presque à la fois et d’un seul trait d’esprit sa vilenie morale et sa noblesse maternelle. Et notez qu’il ne cherche pas, comme ferait un véritable observateur, quelle spéciale qualité de mère une pareille femme peut offrir ; entre ces sentimens contraires, il ne se soucie pas d’introduire une série de sentimens moyens. A quoi bon ? Il a naturellement combiné une antithèse ; il croit sincèrement avoir constaté une synthèse ; il voit déjà la préface qu’il écrira pour la pièce, — où la synthèse sera recommandée, prônée, annexée. En attendant cette préface, sans se mettre en peine d’autre chose, il passe tout de suite à l’habillement de son antithèse et puis à son logement : il s’occupe du costume, et puis du décor, avec conscience, avec scrupule. Comment douter que cette Lucrèce soit vraisemblable et même vraie ? Comment nier qu’elle soit humaine puisqu’elle est contradictoire et, par surcroît, historique ? Qui donc, je vous prie, sinon la propre fille du pape Alexandre VI, nous apparaîtrait dans cette salle du palais ducal de Ferrare ? Car c’est bien ici le palais ducal de Ferrare : voici les « tentures de cuir de Hongrie frappées d’arabesques d’or, » voici le « fauteuil ducal en velours rouge, brodé aux armes de la maison d’Esté. » Et pourtant, nous de sang-froid, pour qui la beauté d’un contraste n’est pas le caractère de sa réalité, nous ne pouvons nous tenir de murmurer tout bas que la vilenie morale toute pure et l’amour maternel tout pur sont deux abstractions, que cette Lucrèce du poète n’est qu’une abstraction double et, qui pis est, monstrueuse, — et partant plus chimérique, sous son nom de synthèse, dans son costume et dans ses meubles, que les personnages de la tragédie classique, ces exemplaires de l’humanité simplifiée par l’analyse, ces « types d’une idée purement métaphysique qui se promenaient solennellement sur un fond sans profondeur ! »

Tel est le désaccord entre la doctrine du grand dramaturge romantique et son œuvre, et ainsi s’explique-t-il. La doctrine, qui est juste, procède par une sorte de méprise heureuse du tour particulier d’imagination du poète ; et l’œuvre, qui procède logiquement de ce tour, est contraire à la doctrine. Quelques changemens qu’aient subis, en un demi-siècle plus qu’achevé, la philosophie de Victor Hugo et son style, ce tour d’imagination est resté le même, et ce désaccord entre la doctrine et l’œuvre n’a fait qu’empirer : Torquemada nous en offre un singulier document.

Quelle antithèse morale le père de Triboulet et de Lucrèce a-t-il imaginée cette fois ? Au bénéfice de quelle idée a-t-il prétendu en concilier les élémens ? Malgré le titre de l’ouvrage, qui sonne comme le cri d’un instrument de torture, il était possible de nommer cette idée à l’avance, pour quiconque avait suivi le mouvement de la philosophie de l’auteur : c’est l’idée d’humanité. Le mot, dans ses deux sens, est également cher au poète, — qu’il désigne le genre humain ou le sentiment de bienveillance que l’homme doit éprouver pour ses semblables. La Légende des siècles, le dernier ouvrage de Victor Hugo où son génie éclate tout entier, est un cantique à la gloire de l’humanité militante et, à la fin, triomphante ; le dernier drame tiré de son dernier roman, Quatre-vingt-treize, s’achève par ce cri : « Vive l’humanité ! » L’humanité du poète, au sens dérivé du mot, n’a guère manqué depuis longtemps une occasion de se manifester ; elle s’est même répandue et attendrie en trop de circonstances où peut-être elle eût mieux fait d’être plus contenue et plus ferme ; elle tourne quelquefois à « l’humanitairerie » sénile ; sans parler de tel manifeste en faveur de telle cause presque indigne d’intérêt, il est permis de rappeler cette manière de quiétisme dangereux dont une pièce de la Légende des siècles. Sultan Mourad, offre un exemple. Ici l’humanité a si bien une valeur absolue qu’il suffit pour le rachat d’innombrables crimes qu’elle se soit appliquée une seule fois, non pas même à un homme, mais à un animal. Mourad a un jour délivré un pourceau des mouches qui l’obsédaient ; et pour cet acte d’amour, il trouve grâce devant Dieu, après une vie pleine de forfaits. Le monde entier l’accuse, le pourceau le défend ; Dieu met

: Dans un plateau le monde et le pourceau dans l’autre,
: Du côté du pourceau la balance pencha.


Eh bien ! voyez en esprit l’homme qui a le plus torturé les hommes, et voyez du même coup la cause de sa cruauté ; voyez que cette cause est contradictoire à son effet, et que cet homme n’a jamais été cruel, sinon par amour… O le beau contraste, et combien utile ! Le beau triomphe que celui de ce paradoxe ! Il aura réconcilié Torquemada et l’humanité ! Le vieux poète, qui ne veut haïr personne, se réjouira tout à l’aise dans la paix de son imagination ; Torquemada lui-même n’est plus exclu de sa clémence, comme ces damnés roulant parmi les braises

: plus loin que le pardon de Dieu ;


Torquemada se rencontre dans la mémoire attendrie du poète avec Vincent de Paul, Jésus, Çakya-Mouni, tous ces représentans de la charité qui s’y croisent, comme en un lieu de béatitude, « Vêtus de leur lumière propre ! .. » Après celui-là, qui donc restera dans les ténèbres extérieures ?

Torquemada brûlant les corps par amour des âmes, torturant les hommes par amour des hommes, voilà cette fois le monstre : cruauté, charité sont les deux faces de l’abstraction décorée de ce nom terrible ; elles sont accolées pour la gloire de l’idée d’humanité. Cette vision, est-elle conforme à l’histoire ? Il est peut-être inutile d’établir qu’elle la contredit. L’inquisition s’était donné pour tâche, non de racheter l’esprit par la souffrance de la chair, mais d’établir l’unité religieuse en exterminant les hérétiques. En les jetant au bûcher, elle supprimait un scandale et ne s’inquiétait nullement d’assurer leur salut. Comment l’aurait-elle fait ? L’interprétation du poète, si éloignée qu’elle soit de la vérité historique, l’est encore plus de la vraisemblance humaine : elle est justement contraire à la psychologie du chrétien. Comment un chrétien pourrait-il croire qu’en brûlant un hérétique, il le sauvera contre son gré ? Pour que la douleur de la chair profite à l’esprit, il faut que l’esprit l’accepte et l’offre au Seigneur ; le supplice n’a pas la valeur morale du martyre, et le ciel n’admettra pas ce racheté malgré lui.

Donc ce Torquemada n’est ni vrai, ni possible ; les figures qui l’entourent ne le sont pas davantage. On connaît le procédé d’évocation du poète. Sans cesse hanté par l’hallucination du contraste, il imagine d’ordinaire les êtres moraux par couples ; chacun, nous l’avons dit, n’est le plus souvent qu’une abstraction double, mais chacun aussi n’est que le contraire, ou du moins le pendant d’un autre. Torquemada est le personnage central du drame : les autres, disposés autour de lui, n’empruntent que de lui leur raison d’être, et, s’ils déterminent à leur tour deux ou trois comparses, c’est de lui seulement qu’ils en tiennent le pouvoir. Représentant de l’idée religieuse, il a par ici ce pendant : le roi, — Ferdinand doublé d’Isabelle, représentant de l’idée monarchique. Représentant de la terreur dans le drame, il a par là ce pendant, le représentant de la pitié : le couple candide et gracieux de don Sanche et de dona Rose, — deux enfans qui l’ont sauvé lorsqu’il était condamné à périr au fond d’un in-pace, qu’il a juré de sauver à son tour, et qu’il sauve en effet, à sa manière, en les livrant au feu parce qu’ils ont pour forcer son cachot employé le fer d’une croix. Représentant de la cruauté catholique, il a de ce côté ce pendant, le représentant de la mansuétude chrétienne : François de Paule. Entre les deux, convaincus également, il faut un sceptique : ce sera un pape ; un pape : ce sera Borgia. Voyez-vous les contrastes, — entre les personnages, et dans l’âme de tel ou tel ? Don Sanche et doña Rose, pour les rattacher au roi, auront un grand-père, vieux coquin recuit dans tous les poisons de la vie de cour : du jour où ce démon se connaît un petit-fils, il devient un ange :

: Je vivais pour le mal, je vivrai pour le bien !


Le drôle est contemporain de Lucrèce Borgia : il y paraît. Il paraît aussi que le poète n’a pas changé sa façon. Loin de la changer, il y persévère, toujours avec plus de rigueur. Les personnages de ce dernier de ses drames sont singulièrement plus abstraits, plus éloignés de la vérité, plus reculés de la vraisemblance que ceux de ses drames d’autrefois. Et comment seraient-ils autres, ne tenant, je le répète, que d’une abstraction centrale la raison de leur semblant d’être ? Le plus important de tous, celui qui devrait être le plus humain, celui qui serait le plus facilement historique, le roi, s’explique justement là-dessus dans un discours où s’épanche la philosophie de l’auteur :

: N’être pas même un roi ! Misère ! être un royaume !


Il dirait mieux encore s’il disait : une royauté. La confession, telle quelle, vaut cependant qu’on la retienne. Est-ce là Ferdinand le Catholique, ce « véritable auteur de la puissance espagnole, » ce politique serré, attaché à sa besogne, d’une activité si dure, d’une perfidie si forte ? Est-ce là cette Isabelle, toujours à cheval au front de ses troupes, lorsqu’elle n’expédiait pas avec ses secrétaires les affaires de l’état, cette Sémiramis de la Castille, d’une si prodigieuse énergie, qui fit pour la prise de Grenade plus que toute son armée, et, sans diminuer son roi, sut être une grande reine ? Non, ce n’est ni l’un ni l’autre, mais plutôt, — comme le dit lui-même ce Ferdinand rêveur,

: deux larves,
: Deux masques, deux néans formidables, le roi,
: La reine — elle est la crainte et moi je suis l’effroi !


Je ne sache pas que l’effroi ni la crainte soient des personnages humains et possibles, encore moins des personnages historiques. Et, pourtant, c’est de personnages historiques que le poète leur a donné l’air en les affublant de costumes, et c’est à ce titre qu’ils paraissent prétendre à la qualité d’humains.

Victor Hugo a gardé le souci de la localité du costume. Le prologue, qui, d’ailleurs, tient plus d’un tiers du drame, suffit à montrer comme l’auteur est hanté par l’histoire. Nous sommes dans un couvent, mais dans lequel ? Non pas dans un couvent quelconque. C’est « le monastère Laterran, de l’ordre des augustins et de l’observance de Saint-Ruf ; » il dépend de deux chefs : « l’un à Cahors, l’autre à Gand. » Quelques chicaniers pourront dire que « Cahors » est là pour rimer avec « dehors » et « Gand » avec « intrigant, » mais que réellement le chef de l’ordre habitait Avignon. Les mêmes se demanderont si le « vicomte d’Orthez » est bien en effet l’abbé de ce couvent, ou s’il n’est là que pour rimer avec « la règle Magnates, » — à moins que cette règle, au contraire, ne soit inventée pour lui fournir une rime : aussi bien il se peut que l’un et l’autre soient inventés du même coup pour rimer ensemble. Les mêmes encore examineront si vraiment existèrent, et, dans cet ordre, les seigneurs féodaux dont le poète fait descendre don Sanche : Loup Centulle, duc des Gascons,

: Puis Luc, roi de Bigorre, et Jean, roi de Barège,
: Puis le vicomte Pierre, et Gaston Cinq…
: — Abrège,

interrompt Ferdinand. Nous ferons comme lui : peu nous importe si le détail historique est exact ; l’intention de le marquer suffit ; au moins, ce n’est qu’elle que nous cherchons : or cette intention, personne n’en peut douter. L’auteur est à ce point préoccupé de l’histoire que ses personnages savent comme lui ce qui s’est passé depuis leur mort. Le roi, dit le bouffon Gucho, le roi Ferdinand est « obscène,

: Athée et catholique :
: Et tant pis, il aura plus tard ce sobriquet ! »


Rien, dans le décor, n’est laissé au choix du peintre, du metteur en scène ou du tapissier. Au premier acte, nous sommes « dans le patio royal, dit Condes-reyes, au palais-cloître de la Llana, à Burgos ; » il faut que le trône où s’assied le roi soit a une chaise de fer, blasonnée et couronnée d’un pinacle que surmonte une épée, la pointe en l’air. » Au troisième, nous sommes à Séville « dans l’ancien palais maure, » lequel « avait vue sur la Tablada où était le Quemadero ; » il ne suffit pas que sur la table il y ait « tout ce qu’il faut pour écrire, » comme dirait M. Scribe : il faut que les plumes fichées « dans les trous de l’encrier » soient « dorées et peintes. » Pour les costumes, contentons-nous de noter qu’un scoliaste pourrait écrire tout un chapitre rien que sur les chapeaux. Au premier acte, don Sanche a sur la tête « le chapeau de comte, surmonté de l’aigrette Alumbrado (éclair), mélange de plume et de pierreries. » Au deuxième, le pape Alexandre VI, en habit de chasse, est « coiffé d’un haut bonnet d’or à trois cercles de perles. » Au troisième, le roi, « en grand habit d’Alcantara, » — il avait paru dans le prologue avec le petit habit, — porte le « chapeau de velours vert, sans plume, cerclé de la couronne royale. » Il va sans dire que le fou porte « un chapeau de sonnettes. » Comment soupçonner de n’exister pas des personnages ainsi coiffés ? Le chapeau prouve l’homme : je suis coiffé, donc je suis. Et cependant nous percevons que ces figures sont vides de réalité. A voir, dans cette singulière scène du troisième acte,

: L’idole Ferdinand et l’idole Isabelle,


assises sur leurs trônes jumeaux, tantôt silencieuses, « l’œil vague et fixe, » tantôt échangeant, de leurs lèvres qui remuent à peine quelques brèves paroles mollement répétées ; à voir à quelle inanité de « larves » le poète a réduit en effet ce roi politique et cette reine guerrière ; à voir ces fantômes, ces « idoles, » — l’auteur a bien dit, — ces abstractions parées de ses mains pour les cérémonies de son symbolisme, on éprouve une étrange impression de malaise, un profond sentiment de pitié pour ces créatures d’une littérature finissante, et l’on trouve du même coup le caractère de cet art, qui est le byzantin. On se rappelle devant ces « deux néans » couverts d’habits magnifiques, les personnages mystérieux, somptueux et pitoyables des mosaïques de Ravenne, — l’empereur Justinien et l’impératrice Théodora de l’église San-Vitale, ces corps émaciés, ensevelis sous de raides et pesantes chapes d’or, ces fronts étroits opprimés par l’édifice du diadème, ces visages exsangues dévorés par de grands yeux, ces yeux immobiles aux cornées blanches et ternes… Voilà ce qui reste, au vie siècle, de l’humanité figurée, alors que l’artiste a depuis longtemps quitté l’étude du modèle ; — et voilà ce qui reste de l’humanité dramatique dans l’œuvre d’un grand poète, un demi-siècle après qu’il a recommandé « l’observation perpétuelle de la nature » et déclaré que « le caractère du drame » était proprement « le réel ! »

Ainsi le désaccord entre la doctrine et l’imagination est allé s’aggravant. Plus que jamais le décor et les costumes ont la prétention d’être exacts : voilà pour la doctrine ; plus que jamais les créatures du maître sont des abstractions de sa fantaisie : voilà pour l’imagination. Ces abstractions costumées sont d’un effet grandiose : de même les fantômes splendidement drapés de Ravenne. Mais de même qu’on voit clairement que ceux-ci sont des fantômes et n’ont sous leurs manteaux ni muscles ni os, de même on voit que ces abstractions sont des abstractions, et sous leurs costumes on ne s’avise même pas de chercher aucune réalité ni aucune vraisemblance. A quoi bon, puisque ce sont des abstractions, examiner si les personnages dont elles portent les noms ont commis ou pu commettre les actes qui leur sont attribués ? A quoi bon s’informer si Torquemada put rencontrer en Italie François de Paule qui, à cette époque, habitait la France ? A quoi bon vérifier s’il n’a pas été nommé grand inquisiteur par Sixte IV, et non par Alexandre VI, lequel par surcroît est séparé de Sixte IV par Innocent VIII ? A quoi bon ces chicanes ? Le poète avait besoin de confronter l’abstraction qu’il a nommée Torquemada avec ces deux autres à qui convenaient les noms de François de Paule et d’Alexandre VI. Il s’est passé cette fantaisie ; j’en regarde seulement l’effet. Il eût fait se rencontrer l’inquisiteur avec Hérode et Robespierre ou Daniel et Fénelon que je n’en serais pas autrement choqué : je sais que pour lui tous les personnages de l’humanité sont également familiers et contemporains, à peu près comme pour l’astronome toutes les étoiles se projettent à une même distance sur une sphère idéale. L’histoire n’est plus pour lui qu’un magasin de noms, où il prend de quoi décorer ses chimères. Il use et abuse de ce privilège que Goethe a reconnu par deux fois au poète, dans ses Entretiens avec Eckermann, à propos des tragédies de Manzoni, et, d’une façon plus explicite encore, dans son opuscule sur l’Art et l’Antiquité : « Il n’y a point, à proprement parler, de personnages historiques en poésie ; seulement, quand le poète veut représenter le monde qu’il a conçu, il fait à certains individus qu’il rencontre dans l’histoire l’honneur de leur emprunter leurs noms pour les appliquer aux êtres de sa création. » — Mais justement Victor Hugo, dans une note de Cromwell, a protesté contre cette théorie, sans compter ces excellentes phrases qu’il a faites et que nous avons citées, sur la différence de la fausse « couleur locale » et de la vraie ! Mais il nous invite lui-même à le critiquer l’histoire en main, et non-seulement par ses préfaces, mais par ce perpétuel spectacle du décor et des costumes prétendus historiques ! . — Hé ! sans doute, il nous offre des verges pour le frapper, mais nous les refusons. Pourquoi nous armer de sa doctrine contre son œuvre, puisque nous n’en sommes pas dupes ? Il nous suffit de constater le désaccord, et qu’il est irrémédiable ; nous négligeons de soulever le costume, sachant qu’il n’y a rien dessous.

Rien ! — faut-il le redire ? — c’est une façon de parler ; rien, si l’on cherche des hommes et les héros d’un drame ; mais ces costumes, encore une fois, recouvrent des idées. Ces idées sont éloquentes, ces idées sont poètes ; non poètes dramatiques, mais épiques et lyriques, et comme telles, elles parlent la langue de la première Légende des siècles. Dramatiques, à vrai dire, comment le seraient-elles ? Des idées ne peuvent exprimer qu’elles-mêmes, en des manières de monologues ; elles n’ont point de passions ; elles ne souffrent pas, elles ne jouissent pas, elles ne se battent pas entre elles. Le drame, dans Torquemada, s’il en existe un, reste à l’état d’ébauche, et d’ébauche informe, On le devine à voir ce prologue de 78 pages pour quatre actes qui, ensemble, n’en comptent que 125. A peine si, dans le premier acte et dans le troisième, l’amour inquiet du vieux courtisan pour son petit-fils menacé par le roi fournit une apparence de situation dramatique. Cependant Victor Hugo, s’il a moins que jamais l’imagination psychologique, laquelle seule enfante le drame proprement dit, garde encore cette imagination théâtrale qui produit de beaux effets de mise en scène : la descente de Torquemada dans l’in-pace, devant les moines assemblés, et la visite des juifs, le grand rabbin en tête, à Ferdinand et à Isabelle, fourniraient de magnifiques motifs à un imprésario d’opéra. Mais, j’y reviens, c’est l’expression épique ou lyrique des idées qui fait la valeur de l’ouvrage. La langue, d’une richesse qui exclut souvent le choix, mais aussi d’un éclat et d’une solidité incomparables, au moins dans plusieurs passages ; le rythme aussi, d’une magnificence et d’une sûreté prodigieuses, au moins dans ceux-là, indiquent nettement que ce drame ne date pas de ces dernières années, mais qu’il doit être resté, depuis un quart de siècle environ, dans les cartons du poète comme une grandiose esquisse : il est postérieur de peu, s’il l’est en effet, à la première Légende des siècles. La méditation de Torquemada dans le prologue, son entretien avec François de Paule au deuxième acte ; au troisième, son prône effrayant devant le bûcher, — autant de morceaux marqués de la marque du bon temps, auxquels notre admiration ne sera pas marchandée. Cependant ce drame est aujourd’hui le dernier de Victor Hugo, et peut-être il convient qu’il reste le dernier : on ne conçoit guère que la doctrine et l’imagination du poète puissent aller plus loin dans les voies où d’abord elles s’étaient engagées, ni que ces voies puissent encore s’écarter davantage ; et c’est pourquoi peut-être il était curieux de constater maintenant cet écart.

Du plus grand des romantiques que reste-t-il aujourd’hui, pour nous autres gens de théâtre ? Des œuvres belles encore et qui le seront toujours par leurs qualités épiques ou lyriques, mais dont l’essence dramatique, si tant est qu’elle ait existé ou paru exister, s’est évaporée déjà : le décor et le costume ne donnent plus le change à présent sur le peu de vérité historique et de vraisemblance humaine des personnages. Derrière ces œuvres il reste une doctrine, née du même génie par un heureux accident, et qui leur est contraire ; c’est, en effet, la doctrine propre du drame. D’autres l’ont adoptée, qui travaillent à l’illustrer par des ouvrages plus conformes à son esprit : je parle de tous ceux qui, de bonne foi, cherchent à restituer au théâtre ou, si l’on veut, à lui donner un caractère d’humanité. Ceux-là se remettent courageusement à l’étude du modèle, de ses traits particuliers comme de sa. structure générale, et de son costume aussi bien que de ses traits. Par-delà les fantaisies de l’imagination romantique, ils renouent la tradition de la psychologie classique et reviennent à la connaissance de l’homme, à laquelle ils prétendent ajouter, par l’aide des sciences naturelles, historiques et sociales, la connaissance des hommes. C’est à peu près ce qu’ordonnait la doctrine romantique ; mais qui donc aujourd’hui se souvient qu’elle l’ordonnait ? La contradiction des œuvres a étouffé la doctrine : aussi n’est-ce pas de Victor Hugo qu’on se réclame, mais de qui ? De Balzac : Balzac a illustré, au moins dans le roman, la doctrine exposée dans la préface de Cromwell.

La théorie romantique, on l’a trop méconnu, peut servir de légende à l’œuvre du plus grand des réalistes ; le plus grand des romantiques, par tous ses drames, depuis le premier jusqu’à ce dernier, Torquemada, témoigne d’une contradiction nécessaire entre son imagination et cette théorie, née pourtant comme ces drames de cette imagination même ; la théorie vit encore et les drames sont morts, — s’ils ont jamais vécu, — au moins en tant que drames : — et cependant les drames font oublier que la théorie appartient à leur auteur, si bien que ceux qui suivent aujourd’hui ses conseils blasphèment son nom pour la plupart et glorifient un rival ! .. Quelle puissance ironique règle donc les rapports de la doctrine et de l’œuvre et les destinées de l’une et de l’autre ?


Louis GANDERAX.