Premier trimestre 1830
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Tout en France subit l’empire de la mode : les systèmes les plus opposés sur les objets les plus sérieux, comme sur les objets les plus frivoles, ont eu leur tour de faveur. La solution des questions importantes qui concernent les communications intérieures n’a pas été elle-même à l’abri de cette influence. La canalisation générale de la France, dont les immenses avantages avaient frappé tous les esprits, a subi depuis quelque temps une espèce de défaveur et les chemins de fer ont été préconisés avec un enthousiasme qui eût pu induire en de graves erreurs, s’il eût été moins exagéré. Ainsi, pour éviter que bientôt on ne propose de combler nos canaux pour établir des chemins de fer sur leurs ruines, il est bien important de proclamer cette vérité ; c’est que la question tendant à établir la prééminence de l’un des systèmes de communication intérieure, n’est pas susceptible d’une solution générale, et qu’une foule de circonstances locales et de considérations particulières peuvent faire pencher la balance dans l’un ou dans l’autre sens. M. Nadault, ingénieur des ponts-et-chaussées dans le département de la Haute-Marne, a eu l’heureuse idée d’étudier et de comparer les opinions dissidentes, de réunir les considérations générales et les expériences exactes, propres à définir chaque système de transport sous leurs divers points de vue, et enfin de réduire en nombres les avantages comparatifs de chacun d’eux, dans un mémoire qu’il vient de publier, sous le titre de Considérations sur les trois systèmes de communications intérieures, au moyen des routes, des chemins de fer et des canaux.
Un des résultats les plus utiles de ce travail, est la détermination des résistances propres à chaque voie de communication, ou des nombres qui sont le rapport inverse des poids qu’une même force peut mouvoir avec une vitesse déterminée, sur une route, un chemin de fer ou un canal. L’auteur arrive ensuite à l’élévation numérique des avantages absolus des trois systèmes, après avoir tenu compte de toutes les circonstances qui sont susceptibles d’entrer dans le calcul. Ces résultats, de la plus grande importance, sont établis sur tout ce qu’il était possible de réunir de plus positif en expériences exactes, et en considérations théoriques. Une partie intéressante du mémoire renferme des considérations remarquables sur l’état actuel des routes en France et en Angleterre, sur les péages en général, et sur la relation qui existe entre l’établissement des barrières des routes et la navigations intérieure du pays. Enfin des notes sur la force du cheval, sur les machines à vapeur et sur la comparaison de ces deux genres de moteurs, jettent une vive lumière sur une matière restée long-temps obscure.
Une exposition claire et méthodique d’un grand nombre de faits bien constatés, des conséquences remarquables déduites de ces faits par des raisonnemens rigoureux, caractérisent cet ouvrage qui se recommande également à l’attention des hommes de l’art, et à celle de toutes les personnes dont l’esprit est naturellement porté vers ces connaissances positives. On ne peut que savoir gré à M. Nadault d’avoir consacré ses loisirs à des recherches d’une utilité aussi immédiate, au moment même où s’agitent de grandes questions qui intéressent au plus haut degré l’industrie française. Ce jeune ingénieur a su, en outre, dépouiller la science de son austérité et mettre les vérités les plus abstraites à la portée de tout le monde : c’est un genre de mérite qui est bien loin d’être commun.
Passionné dès l’enfance pour les voyages, M. Caillié, âgé de 16 ans, et ne possédant que 60 fr., s’embarque sur la gabarre la Loire, qui allait au Sénégal de conserve avec la Méduse. Débarqué à Saint-Louis, il prend part dans une expédition de découvertes dont la mauvaise issue, loin de rebuter, enflamme son courage. Malgré les sages remontrances de M. Le baron Roger, il part de nouveau avec quelques marchandises, pour le pays de Braknas, dans l’intention d’apprendre l’arabe, ainsi que la pratique du culte des Maures. Il obtient un accueil favorable, en prétextant de se convertir à l’islamisme et de vivre chez un peuple dont il a entendu vanter la sagesse.
Maître enfin de la langue du pays, et assez familier avec le Coran, le jeune Caillié revient au Sénégal, et sollicite les moyens de mettre son projet à exécution ; mais son âge n’inspire pas assez de confiance. N’ayant rien pu obtenir, il amasse, pendant seize mois de pénibles labeurs, une somme de 2,000 fr., et avec ce faible pécule, quelques médicamens, deux boussoles de poche, un costume arabe et le Coran, il part pour son grand voyage. À peine a-t-il fait une marche de deux heures, qu’il trouve les tombeaux du major Peddie et de ses compagnons, morts victimes d’une entreprise semblable. Mais il repousse un si funeste augure et continue sa route.
On le voit, parti de Kakondy le 19 avril 1827, reconnaître la position presque inconnue des sources de Bafila, passer ensuite le Dhioliba (Niger) ; de là se rendre à Kankan, grande ville dans le pays de ce nom, et se porter jusqu’à deux cents milles dans l’est, au delà du Soulimana, jusqu’à Timé, où il arrive le 3 août. Là, il est retenu par le scorbut, et reste plusieurs mois entre la vie et la mort ; couché sur la terre, privé des secours de l’art et des médicamens, n’osant pas réclamer la pitié de ses hôtes, effrayés des progrès de la maladie, il ne trouve d’asile que dans la compassion d’une négresse qui lui prodigue les plus tendres soins. Comment ne pas frémir quand on voit cet intrépide jeune homme lutter cinq mois contre la mort, et arracher de ses propres mains les parties de son corps atteintes par la gangrène. Enfin il entre en convalescence, et, sans attendre son rétablissement, commence une autre excursion. Résolu de rejoindre le Dhioliba, il part le 9 janvier 1828. Après avoir vu ou passé plus de cent villages, il revoit le fleuve, et en traverse plusieurs bras pour se rendre à Jenné le 11 mars. Après une résidence de treize jours, M. Caillié s’embarque sur le grand fleuve et recueille des notions aussi positives que neuves sur son cours, sur ses affluens et ses îles, et notamment sur le lac Debo. Enfin il arrive le 19 avril à Cabra, port de Temboctou ; dès le lendemain, il fait son entrée dans cette ville célèbre.
Précédé par le souvenir de ses voyages aux sources du Mississipi et de la rivière sanglante, M. Beltrami était en droit d’attendre des lecteurs l’accueil que reçoit sa nouvelle publication. Nous nous réservons, dans un de nos prochains numéros, d’en rendre un compte plus étendu, et de donner quelques citations, qui pourront faire apprécier l’intérêt que présente ce voyage. Nous nous bornerons, pour le moment, à signaler d’une manière plus particulière, dans l’ouvrage de M. Beltrami, ce qui a rapport aux antiquités du Mexique, où nous avons remarqué une foule de renseignemens aussi curieux que nouveaux. La demi-civilisation du Mexique et de quelques autres parties de l’Amérique, était-elle, au moment de la découverte, dans un mouvement ascendant, ou au contraire, le résultat d’une civilisation décroissante et retournant à la barbarie ? Telle est la question restée jusqu’à ce jour sans solution. M. Beltrami, sans la résoudre lui-même, est parvenu à l’éclaircir par plusieurs fragmens de son voyage, et notamment par celui que nous venons de citer.
Ce nouveau Journal anglais paraît à midi, et part par la poste du jour pour les départemens et l’étranger.
Il contient les nouvelles arrivées par tous les courriers du matin, et celles des journaux de Paris, il possède une vaste correspondance, et consacre une partie de ses colonnes à des renseignemens financiers et commerciaux.
Les bureaux sont rue Feydeau, no 3, à Paris.
Pour Paris | 1 mois |
10 | fr. |
3 mois |
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6 mois |
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L’année |
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Pour les Départemens | 1 mois |
11 | fr. |
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L’année |
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Pour l’étranger | 3 mois |
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6 mois |
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L’année |
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Fondée vers la moitié du 17e siècle, cette société lorsqu’elle possédait les célèbres ministres protestans Bochard et Morin, Huet, évêque d’Avranches, Segrais, etc., fut dispersée par la révocation de l’édit de Nantes. Louis xiv lui octroya des lettres patentes, en 1705. Pendant le 18e siècle, elle composa, eut, prononça beaucoup de discours et de mémoires ; mais elle reçut la réserve de ne publier qu’un petit nombre de tant de poésies et dissertations. L’académie de Caen, depuis 1801, a prouvé par quatre volumes de ses mémoires, qu’elle a suivi les sciences et les arts dans leurs progrès, et profité de l’alliance de l’érudition et de la littérature avec la philosophie positive. On remarque dans le nouveau volume un mode de parallélisme, pour traduire en vers les poésies des Hébreux, par M. Vautier ; une dissertation curieuse sur le siége du Mont-Saint-Michel (en 1423-24), par M. Labbey de la Roque ; de l’influence des bains de mer par le docteur Trouvé, et trois mémoires concernant les terrains, la géognosie du Calvados.
Une colonie de Cenomans, à l’exemple de Bellovèse et conduite par Elitovius, pénétra, vers l’an 500 avant l’ère moderne, dans l’Italie, où elle fonda Bresse et Vérone. César trouva encore formidables les Aulerci Cenomani dans le pays dont se compose aujourd’hui le département de la Sarthe. Ce n’est cependant qu’en 1788, que M. Maulny découvrit l’aqueduc des Fontenelles, et en 1791, l’amphithéâtre des Arènes. M. Daudin, chargé en 1810 de reconstruire le pont, a trouvé, dans le lit de la Sarthe, des médailles impériales, des lampes, clefs, etc., et il a recueilli près de deux mille fragmens de poteries rouges et noires. La plupart de ces débris sont bien conservés, ornés de dessins élégans, de figures bien posées, de frises riches et artistement roulées. Mais, en vain, M. Daudin annonça sa précieuse découverte dès 1810 (in-4o de 18 pages). L’archéologie a trop négligé l’étude des poteries gallo-romaines ; et celles du Mans resteraient inconnues des antiquaires, sans le zèle généreux de M. de Caumont. L’ouvrage entier, tiré à un petit nombre d’exemplaires, n’aura que quatre livraisons.
Quoique notre Revue ne s’occupe pas d’ouvrages en vers, nous faisons mention de cet opuscule, moins à cause du talent réel de M. Alphonse Le Flaguais, que parce que ce jeune écrivain a compris que la poésie trouverait encore des sujets intéressans à traiter parmi nos antiquités nationales.
Les navigateurs, dans leurs relations, les naturalistes, par leurs descriptions, n’ont pu nous faire connaître que d’une manière imparfaite cette végétation si vigoureuse, extraordinaire par ses formes, si variée dans ses espèces et ses nuances. Les dessins les plus fidèles ne rendent pas les contours des énormes jacks, qui pèsent jusqu’à cent livres. Quel lecteur n’a envié à l’Océanie l’arbre à pin, à la voluptueuse Taïti l’hevy (arbre de Cythère) ? Qui ne se ressouvient des coyaviers et du palmiste sagoutier de Paul et Virginie, des cocotiers et des pampleucoussiers d’Atala ? L’Europe, malgré l’immense consommation qu’elle fait des épices, ne parviendra jamais à posséder les arbres qui les produisent ; les essais tentés pour en acclimater quelques-uns n’ont rendu que des fruits dégénérés ; toujours notre continent sera tributaire des Indes qui n’ont rien à lui demander.
Un Français né dans le Calvados, M. Robillard d’Argentelle, capitaine d’état-major dans l’expédition qui arriva en 1802, à l’île de France, a employé vingt-cinq années à modeler les plantes et les fruits les plus remarquables des tropiques. Décédé à son retour en 1827, il a emporté dans la tombe le secret de ses procédés ; mais sa précieuse collection reste unique, et elle a traversé les mers sans subir la moindre altération. Elle se compose de cent douze plantes « représentées en tout ou en partie, de grandeur naturelle et avec une perfection telle, qu’elle peut faire illusion aux yeux d’un botaniste exercé. Ces plantes artificielles sont très-supérieures à tout ce qu’on connaît en ce genre ; elles sont dignes de figurer honorablement dans toute collection ouverte au public, où elles procureraient facilement la parfaite connaissance d’objets intéressans. »
Le rapport de MM. Desfontaines, Labillardière et Cassini, approuvé par l’académie des sciences (séance du 10 août 1829), est comme sanctionné par les navigateurs, par les naturalistes, par les instituteurs, les artistes et les familles qui visitent le Carporama. Dans cette sorte d’herborisation, on peut étudier le vaquois de l’île de France, et le corossol de l’Amérique méridionale ; la cacaoyer de la Guyane et le mangoustan du Malabar, dont le fruit est le plus exquis de ceux de l’Asie ; le cambare de Java, le cannelier de Ceylan, le précieux sapokayer du Brésil, le plaqueminier du Japon, etc. Au départ de M. d’Argentelle, les habitans de l’île de France sollicitèrent la faveur d’admirer pour la dernière fois sa collection, qui, à peine exposée à Paris, trouve déjà des acheteurs ; mais ce sont des étrangers. Les amis de la science et des arts doivent désirer qu’elle soit jointe au Muséum d’histoire naturelle ou au Musée maritime.
Nos cœurs n’en aimeront que mieux.
Elle est un reste d’ambroisie
Qu’aux mortels ont laissé les Dieux.
Ces quatre vers sont le principe de l’Écho poétique des départemens, à la tête duquel ils figurent comme épigraphe : en effet, le nouveau recueil n’est composé que de vers et de quelques analyses de poèmes dus au génie de la province.
Nous y avons remarqué plusieurs pièces très-distinguées, telles que celles qui sont sorties de la plume d’Antony Gaulmier, jeune professeur de Bourges, enlevé récemment à la littérature ; d’autres qui ne sont qu’agréables ; quelques-unes seulement passables ; mais en somme, la lecture des trois livraisons qui ont paru, nous a semblé intéressante, même pour les personnes qui ne s’occupent pas habituellement de poésie. Nous signalerons surtout au lecteur, la Jeune mère mourante ; l’Anniversaire du poète, le Viel Amant, l’Épître à M. Royer-Collard, l’Épître à mon ami ; l’Ange et l’Enfant ; le Dialogue avec M. Jacotot, et la Satire d’Hernani, pièces empreintes d’un vrai talent.
On s’abonne à Paris, au bureau de l’Écho poétique, rue du sentier, no 15 ; chez Denain, libraire rue Vivienne, no 16 ; et chez les principaux libraires des départemens.
Prix de l’abonnement, 34 fr. par an, et 18 fr. pour 6 mois, franc de port : pour l’étranger, 40 fr. par an, et 21 fr. pour 6 mois.
Vie de plusieurs personnages célèbres des temps anciens et modernes[1]. — Plus généralement répandu à toutes les époques que le goût de l’histoire, celui des biographies particulières qui nous rapprochent des hommes célèbres, et nous dévoilent leur intérieur, semble avoir pris de nos jours une nouvelle extension, et cette circonstance est facile à expliquer. Aucune période n’avait vu, avant les trente dernières années qui viennent de s’écouler, un aussi grand nombre d’individus parvenir, par toutes sortes de voies, à une célébrité spontanée. Il était naturel de chercher à connaître et leurs titres et leur point de départ ; et de là cette vogue des biographies qui, après avoir exploré notre époque, se sont généralisées. Quoi qu’il en soit, c’est à ce goût général partagé par M. Walckenaër, membre de l’Institut, qu’est dû l’ouvrage que nous avons sous les yeux. Il est le résultat de la réunion d’articles composés pour accompagner diverses éditions d’auteurs, ou pour la Biographie universelle, et auxquels le savant académicien donne plus d’extension. Le second volume, consacré aux modernes, nous a paru devoir plus particulièrement mériter l’intérêt des lecteurs.
Mémoires curieux, anecdotes secrètes, histoires inédites ; par A. Châteauneuf[2]. — Il y a des scènes piquantes dans ces mémoires, des documens sur des noms illustres ignorés jusqu’à ce jour, et des renseignemens précieux qui dévoilent l’insolence de petits êtres qui se sont crus de grands personnages, parce que la faveur et leur bassesse les avaient élevés. L’auteur les a remis à leur place ; c’est aux familles des grands hommes, des artistes de distinction dont M. Châteauneuf est l’historien, à savoir dignement l’apprécier. Il y a de tout dans cet ouvrage historique, des pages sérieuses et d’autres plaisantes : nous allons en citer une de ces dernières.
« Ludovic de Piles, rejeton de la famille de Fortia, était aimé de Louis xiii ; il tua un jour en duel le fils de Malherbe ; ce poète se vengea par une satire. Voyageant avec son frère, il entra, à Valence, dans une hôtellerie. On leur dit qu’il ne restait que du pain et des œufs. Cependant ils remarquent une broche bien garnie, souper réservé à quatre officiers. — « Mais il y a des viandes pour huit ; ne pouvez-vous prier ces messieurs de partager ce repas avec deux voyageurs mourant de fatigue et de faim ? » L’hôte va, et revient avec un refus. Ludovic n’en dormit pas, et put entendre de son lit les railleries des quatre convives. Cependant il part. À un quart de lieue il dit à son frère : « J’ai oublié ma bourse ; je te rejoindrai à la dînée. » Il éveille les quatre officiers : « Je suis, leur dit-il, un des voyageurs à qui vous avez refusé peu poliment de céder le superflu d’un grand souper. Je n’ai rien à dire. Il n’en est pas de même des propos que j’ai entendus : j’en demande raison à tous les quatre. » Ils descendent, et Ludovic met l’épée à la main tour à tour avec les quatre officiers, qu’il tue sur la place ; il rejoint son frère, et ne lui parle de rien. Celui-ci, dès son arrivée à Paris, fait une visite au cardinal Mazarin, qui lui dit d’un air de mystère : « Ludovic est-il ici ? – Oui, monseigneur. – Est-ce qu’il a perdu la tête, après ce qui lui est arrivé à Valence ? – Quoi donc ?
— Vous n’en savez rien ? – Non, en vérité. – Vous ne savez pas qu’il a tué quatre officiers ? – Je ne l’ai pas quitté de tout le voyage. – Je vous le dis, moi, et j’en suis sûr. – Ah ! mon Dieu, je me rappelle,…. il m’a quitté pour aller chercher sa bourse. – Eh bien ! c’était pour ce duel : dites-lui de ne pas se montrer avant d’être assuré que cette affaire n’aura pas de suite. »
M. Châteauneuf est auteur de plusieurs autres ouvrages intéressans, entre autres de l’Histoire des grands capitaines, qui ont commandé en chef les armées de la république et de l’empire, dont on fait le plus grand éloge. Nous avons lu des aricles de louanges bien méritées, adressés à l’auteur par MM. de Boufflers, Esménard l’aîné, Palissot, Fontanes, Salgues, Jondot, Malte-Brun, etc. Après des noms comme ceux-ci, de quel poids seraient les nôtres ! Dans le petit nombre des ouvrages de cet auteur que nous avons lus, nous avons remarqué une énergie de pensées remarquable, une plume exercée et surtout une grande franchise de critique… C’est tout naturel !… M. Châteauneuf, après trente-cinq années de travaux, a été négligé des ministres ; il s’est plaint d’eux, et ne les a jamais importunés. Il a donc, pour écrire, toute l’indépendance que les faveurs ministérielles ravissent aux écrivains qui les reçoivent.
— Françoise de Rimini, drame en cinq actes et en vers ; par M. Gustave Drouineau[3]. — Deux auteurs, avant M. Drouineau, s’étaient essayés sur ce sujet. Silvio Pellico, poète italien, et M. Constant Bérier, dont la pièce obtint quelque succès, il y a trois ou quatre ans, à l’Odéon. M. Drouineau a emprunté quelque chose au premier ; mais il faut le dire à sa louange, tout ce qui est de son invention est bien supérieur à ce qu’il a pu calquer sur le poète italien. On peut en juger par cette scène dramatique qui termine le troisième acte. — Bertold, duc de Rimini, a ordonné un tournoi pour célébrer le retour de Paolo, son frère. Un instant on l’a cru blessé, et Françoise s’est éloignée avant que la lutte ne fût terminée ; elle était trop émue ! Paolo revient victorieux ; c’est pour Bertold une occasion de confirmer les horribles soupçons qu’il a conçus ; il insiste pour que ce soit Françoise elle-même qui décerne l’écharpe au vainqueur, et lui donne le baiser, prix de la victoire. Françoise troublée refuse ; mais Bertold le veut ; il avait déjà tout compris !… Cette scène, essentiellement dramatique, est toute de l’auteur. Il est donc à regretter qu’il n’ait pas demandé davantage à son imagination !… Résumons-nous. Les deux premiers actes sont froids ; il y a un peu trop de mysticité, même pour cette époque. On trouve une belle scène au premier acte, de belles pages au quatrième ; ce sont des scènes d’intérieur touchantes, des événemens domestiques, comme dit l’auteur, des chagrins comme il en est entré dans le cœur de bien des femmes !… enfin il y a de la passion vraiment sentie et de la vérité dans le dernier acte, peut-être un peu trop de déclamation !
Quoi qu’il en soit, on ne se permettra pas, sans doute, d’adresser à M. Drouineau le reproche mal fondé que l’on a fait à cette nouvelle école, déjà si féconde en beaux talens, d’outrager la mémoire de nos grands maîtres. Écoutez M. Drouineau dans la préface de son drame : « Jeunes gens que nous sommes, dit-il, inclinons-nous devant les grands génies qui nous ont dotés d’un théâtre si riche, si beau, si admirablement régulier ! Hommage à Molière, à Corneille, à Racine, à Voltaire, noms que tout Français ne devrait pas prononcer sans un tressaillement d’admiration et d’orgueil. Ne l’oublions point : autrefois, avant d’entrer dans la lice, les athlètes saluaient les statues de leurs devanciers placées sous des portiques, et ne les insultaient pas. »
— Musée Cosmopolite. — Allez voir Alger au musée cosmopolite de M. Mazzara[4], si vous voulez bien comprendre tous les mouvemens de notre armée de terre et de notre marine, depuis son entrée dans la baie de Sidi-el-Feruch, jusquà sa marche glorieuse au fort de l’Empereur. Vous n’y remarquerez pas seulement une page d’histoire, car le tableau, par le mérite seul de son exécution et la vérité de ses effets, vaut la peine d’être vu. Regardez Alger d’abord, ne vous occupez d’Alexandrie qu’ensuite ; car si vous commenciez par ce dernier, peut-être trouveriez-vous le premier un peu terne et n’y reconnaîtriez-vous pas ce soleil brûlant, et cette atmosphère diaphane du ciel d’Afrique, dont Alexandrie nous présente un effet, tandis que c’est Alger qui s’éveille encore voilé par les vapeurs de la mer et les brumes du matin.
— Éthelgide ou le cinquième siècle, roman historique ; par madame Dieudé-Defly[5]. – L’action de ce roman, comme l’indique le titre, commence vers 450. Mérovée régnait alors sur les Francs de la seconde Belgique, Valentinien iii gouvernait faiblement l’empire d’Occident, et les Romains occupaient encore le centre de la Gaule : mais incapables de résister aux Francs, ils étaient devenus leurs alliés.
C’est de 450 à 456, époque marquée par l’invasion d’Attila ; le sac de Rome, par Genseric ; l’expulsion des Suèves par Théodoric ii, et la révolte des Francs contre Childéric Ier, que l’auteur a mis en action ses personnages.
Ce dernier prince est le héros du roman. On sait que ce monarque, qui était le plus beau et le plus vaillant guerrier de son siècle, fut d’abord chassé par ses sujets, qui mirent à sa place Ægidius ; mais celui-ci s’étant rendu odieux par sa tyrannie, il fut à son tour renversé du trône, où Childéric remonta à sa place. Quelques-uns des personnages appartiennent donc à l’histoire ; les autres sont de pure invention.
L’ouvrage, du reste, annonce une instruction et des connaissances historiques qu’il est rare de trouver dans une femme, et les notes placées à la fin de chaque volume prouvent que madame Dieudé avait non-seulement étudié l’histoire du temps qu’elle retrace, mais qu’elle connaît aussi bien l’histoire ancienne et moderne, et quelques langues étrangères.
Le style de l’ouvrage est pur. Les scènes d’amour y sont peintes avec une réserve remarquable ; elles traînent quelquefois en longueur, mais elles sont toujours vraies. Il y a des passages vigoureux et fortement touchés : en un mot, l’auteur a su rendre son héros intéressant au milieu même de ses désordres et tirer parti d’une époque barbare qui semblait dépourvue d’évènemens propres à émouvoir la sensibilité du lecteur. Toutefois nous nous permettrons quelques observations.
Childéric nous semble pour cette époque un peu trop civilisé dans ses manières et son langage. Nous trouvons aussi que l’auteur a fait son héroïne d’une vertu trop rigide. Éthelgide, en effet, épouse un certain Brithennès. Au bout de quelque temps de mariage, il part pour l’armée, et bientôt Éthelgide apprend la fausse nouvelle de sa mort. Il y a déjà plus de trois ans qu’elle croit l’avoir perdu, lorsque son père Arbogaste donne l’hospitalité à Leutharis, lequel Leutharis n’est autre que Childéric fils de Mérovée, qui, retenu chez Arbogaste par une blessure, parvient dans cet intervalle, et sous ce nom supposé, à se faire aimer d’Éthelgide et de son père, au point qu’en mourant le vieillard consent à leur union. Mais la douleur qu’éprouve Éthelgide d’avoir perdu son père retarde leur mariage. Dans cet intervalle arrive Brithennès, que l’on croyait mort. Mue alors par un sentiment qui devait être inconnu dans ces temps barbares, Éthelgide, qui est païenne, qui doit avoir suivi les mœurs de son temps alors fort relâchées, et à qui les lois romaines apportées dans les Gaules permettaient le divorce, préfère un homme qu’elle connaît à peine, à Childéric qui s’est enfin fait connaître, qu’elle aime, et qui lui apporte une couronne.
Sauf cette légère invraisemblance, l’ouvrage est fort distingué dans son genre ; il mérite d’être connu, et quand on l’aura lu, on verra que nous ne l’avons pas jugé trop favorablement.
— Temple anté-diluvien. — C’est une grande question que celle de savoir si le monde est beaucoup plus ancien qu’on ne l’a cru pendant long-temps. D’après l’ère des brachmannes, l’âge du monde est calculé à 3,892,858 ans ; d’autres calculs le font remonter encore plus haut, tandis qu’il en existe qui ne lui donnent que 5,558 ans. Certaines traditions placent un espace immense entre le déluge et la naissance de Jésus-Christ, tandis que selon le texte samaritain, il n’aurait eu lieu que 3044 ans avant Jésus-Christ.
Au surplus notre dessein n’est pas de nous immiscer dans ces débats ; nos yeux sont encore couverts d’un voile obscur, que le temps, de savantes recherches, ou le hasard peut-être feront disparaître un jour. Et qui n’hésiterait à décider une telle question, quand le savant Cuvier, dans son cours d’histoire naturelle, s’appuyant sur des faits et des documens qui paraissent incontestables, cherche à prouver que l’apparition de l’homme sur la terre ne remonte pas au delà de trois mille ans avant l’ère chrétienne ? Nous ne donnerons donc point notre avis sur un sujet d’une aussi haute importance.
Le déluge, au contraire, n’est plus aujourd’hui un objet de doute pour personne : tout s’accorde de plus en plus pour démontrer la vérité d’une grande catastrophe : tout s’accorde pour prouver que cette catastrophe a détruit des montagnes, éteint des races monstrueuses, transporté leurs débris dans des régions lointaines, en un mot qu’elle a labouré le globe. Reste à savoir si quelques constructions immenses et d’une grande solidité, n’auraient pas pu résister à ce bouleversement général.
Tel est le sujet d’un ouvrage de M. Mazzara[6], intitulé Temple anté-diluvien, dit des Géans. Il en a découvert les ruines dans l’île de Calypso, aujourd’hui Gozo, près de Malte, durant un voyage qu’il fit en Afrique en 1827.
Quand on a vu les gravures de M. Mazzara qui nous représentent les vastes débris de ce temple, et qu’on en a lu l’explication, une foule d’idées se présentent à l’imagination ; doit-on conserver cette pensée de l’éducation première qui nous montre tout anéanti par le déluge ? Faut-il croire que ce temple existait avant l’effroyable cataclysme ? Qu’y aurait-il donc d’impossible à ce qu’une construction immense, comme devait l’être ce monument, eût pu résister en partie au séjour des eaux sur la terre ? Nous disons, en partie, car il n’en reste plus que des masses informes et des rochers entassés les uns sur les autres. En quelques endroits néanmoins on trouve des pierres travaillées et placées avec assez de précision pour indiquer le travail de l’homme.
Au reste, pour donner une idée de l’ouvrage de M. Mazzara, nous allons extraire du texte quelques-unes de ses réflexions : « Pour partir d’une époque non contestée, dit-il, admettons que le monde n’existe que depuis 5,588 ans. Le déluge a eu lieu, selon cette manière de compter, l’an du monde 1656 ; Noé, à cette époque, possédait déjà assez de connaissances pour construire l’arche qui dû surnager pendant trois-cent-soixante-quinze jours au milieu du plus vaste océan. Cent cinq ans après, toutes les familles réunies sont en état d’élever la tour de Babel ; deux cent quarante ans après le déluge fut creusé le lac Mœris, et onze cent quarante-quatre ans après le même événement furent construites les deux grandes pyramides de Memphis. Ces étonnantes productions nous montrent clairement que, si dans cet espace de temps ceux qui vinrent après le déluge purent arriver à de tels résultats, nous n’avons aucun droit de contester aux anté-diluviens des notions suffisantes pour avoir élevé un simple temple. Les premiers hommes ne furent pas étrangers au sentiment d’adoration de la Divinité ; ils lui présentèrent leurs offrandes et lui élevèrent des autels.
» Le séjour des eaux à la surface du globe, pendant trois cent soixante-quinze jours est-il donc suffisant pour avoir détruit tous les ouvrages des hommes ? Non ! Par quels moyens donc notre temple situé au sommet d’une montagne insulaire, pourrait-il avoir été comblé, si ce n’est par une inondation générale ? Les eaux, s’étant retirées, ont déposé, dans l’intérieur de l’édifice, des limons auxquels les murs ont servi de barrière en fermant les issues ; le temps a insensiblement découvert les faces extérieures ; mais la main seule des hommes pouvait en déblayer l’intérieur. »
« Ce ne sont donc point les rêves d’une imagination fantastique, et bien moins encore le désir du merveilleux qui ont porté l’auteur à faire remonter si haut dans l’histoire du monde l’origine de ce temple. La contemplation des restes des premiers âges, leur comparaison avec les monumens que nous a légués l’antiquité, les traditions de l’histoire, les limites, la nature, la situation et l’aspect du sol qui supporte ces ruines, tout confirme l’idée d’une ancienneté primitive, et tout semble nous dire que ce temple a précédé le déluge…
« Mais, par une destinée commune à tout ce qui existe, il semble que ce temple ne se soit montré que pour courir à une ruine complète. Au milieu d’une population ignorante, chaque jour les pierres taillées en sont enlevées pour les moindres besoins, et ses masses informes sont brisées pour servir de barrières qui retiennent les terres sur la pente des rochers.
« L’auteur a donc regardé comme un devoir de faire connaître ces restes précieux au monde savant qui accueille toujours favorablement jusqu’aux moindres découvertes. Heureusement, si ces vestiges, dignes d’un si haut intérêt, doivent à ses efforts leur conservation et l’attention des hommes éclairés ! »
Troisième trimestre 1830
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Après de violentes commotions, quand un peuple abandonné à lui-même, roi il y a un mois, vient de rentrer dans ses foyers, n’exigeant rien, satisfait de son intelligence et de son courage, quand l’ordre se rétablit, plus admirable qu’avant les jours de la victoire, une foule de journaux, nés dans la bataille, ont paru, bons et mauvais, mais tous s’écriant à l’envie : Gloire au peuple ! gloire à notre garde nationale !!!
C’est devenu un beau nom que le titre de garde national ; un journal a eu l’heureuse idée de s’en emparer : il continuera sans doute sa marche ascendante ; car il n’y a pas un seul citoyen qui ne voudra dans ses longues heures de garde charmer ses loisirs par la lecture d’un journal qui lui fera connaître tous ses devoirs d’homme au service de la patrie qu’il a si puissamment contribué à sauver.
Le Garde national paraît tous les jours ; il doit entretenir une correspondance étendue entre toutes les villes de France.
Fidèle à son titre comme le garde citoyen l’est à son poste, il veillera à la conservation des droits publics et au maintien de l’ordre. Il consacrera ses principaux articles aux meilleurs moyens d’organisation, d’émulation et d’entretien de la garde nationale, aux faits généraux, aux résultats politiques, aux nouvelles diverses, aux progrès scientifiques, agricoles, commerciaux et industriels, à une biographie nationale : enfin, sous le titre de Veillées au corps-de-garde, il donnera un article anecdotique ou de mœurs, dont le sujet se rattachera autant que possible à la spécialité de ce journal.
Parmi les journaux nés de notre nouvelle organisation nous citerons le Patriote, journal du peuple, qui se fait remarquer par la rédaction de ses articles. On doit des éloges à ses fondateurs, car c’est un journal impartial, et, quoiqu’il ait quelque analogie avec un autre, il est beaucoup plus modéré dans les opinions qu’il émet, et s’attache plutôt à défendre nos droits qu’à attaquer le pouvoir : aussi doit-il être lu par tous les gens sages, et qui cependant ne veulent pas voir perdus pour la France les fruits de notre glorieuse révolution.
Au moment où l’ordre social troublé un instant commence à se rétablir, il surgit de toutes parts une foule d’associations tendant à favoriser les industries de toute espèce, et à faire partager aux habitans des campagnes le bien être qui doit en résulter. De ce nombre est la Compagnie d’assurances mutuelles contre la grêle. Nous signalons bien volontiers aux propriétaires territoriaux cette société philanthropique, qui a pour but de garantir mutuellement ses membres des périls et dommages que pourraient causer les ravages de la grêle aux récoltes pendantes par racines, jusqu’à leur enlèvement. Les conditions de l’assurance sont on ne peut plus favorables aux membres de la société : elles annoncent, à l’article 10 des statuts, qu’il y a exclusion de toute solidarité, et que pour un prix proportionné à la valeur de ses récoltes, chaque membre est à l’abri de la grêle, de ce fléau terrible et destructeur. Les bureaux de la direction sont à Paris, rue du Bac, no 98.
Ce magnifique ouvrage a fondé depuis long-temps la réputation de son auteur. Il est recherché aujourd’hui par toute l’Europe savante. L’atlas de M. Brué est devenu en effet indispensable, non-seulement aux personnes qui s’occupent de géographie, mais à tous ceux qui cultivent l’histoire. Nous ajouterons qu’il peut aussi servir de modèle, sous le rapport typographique.
Prix : Paris, pour l’année 18 fr., pour 6 mois 10 fr. Ce recueil paraît tous les mois par cahiers de 50 à 60 pages in-8o, et forme 2 vol. par an.
La dernière fête de Tivoli a été remarquable. Le directeur de ce beau jardin n’avait rien épargné pour la rendre complète ; aussi depuis long-temps n’y avait-on vu une aussi brillante réunion. Nous engageons M. Robertson à continuer ; il est sur la bonne route, et c’est ainsi qu’il verra se renouveler chaque fois cette foule admiratrice de ses prodiges. Il y a une pensée nationale, dont on doit tenir compte au directeur de cet établissement, c’est le désir qu’il a d’y attirer les étrangers, de captiver leurs suffrages et d’étendre ainsi les limites de notre commerce et de notre industrie.
L’auteur commence par faire sa profession de foi ; c’est-à-dire par nous apprendre qu’il est pour la nouvelle école. Aussi son poème s’en ressent-il ; mais si le romantique a ses défauts, il a ses beautés ; c’est aussi ce qu’on rencontre dans l’ouvrage de M. Eugène Desmares. Si l’on y trouve de belles strophes, on en trouve aussi de très-défectueuses et de hasardées. Nous pourrions en citer des unes et des autres ; mais le manque d’espace nous sauve des critiques, et nous prive des éloges. En somme, c’est l’ouvrage d’un jeune homme qui débute, et dont les premiers pas méritent l’intérêt et des encouragemens.
M. Desmares nous annonce un nouveau poème en dix chants sur la restauration de notre liberté. C’est un beau sujet sans doute ; mais quand on a le talent de M. Desmares, et qu’on veut rendre ses sujets populaires, la prose offre des avantages plus réels et plus généralement appréciés.
N.B. Quoique cette partie de notre recueil ne soit destinée qu’aux publications imprimées, nous croyons devoir déroger à l’usage ordinaire en annonçant ici que nous avons été assez heureux pour obtenir la communication d’un manuscrit sur un Voyage autour du monde, que nous devons à l’obligeance d’un de nos savans collaborateurs, M. Perrottet. L’abondance des matières, qui va toujours s’augmentant, nous a seule empêché jusqu’à ce jour d’en insérer quelques fragmens. Nous espérons cependant pouvoir bientôt nous acquitter envers l’auteur. En attendant, nous croyons devoir signaler toute la partie relative aux grandes îles de l’Asie, qui nous a paru offrir des détails entièrement neufs et pleins d’intérêt.
Nous reviendrons prochainement sur cet ouvrage, dont le plan et la conception font honneur à l’auteur.
Le manque de loisir nous prive de parler plus au long de cet excellent écrit ; mais nous aurons occasion d’y revenir dans nos esquisses du moyen-âge.
ANNONCES.
M. Barbié du Bocage, professeur à la faculté des lettres, doit ouvrir le lundi 6 décembre, à onze heures et demie, son cours de géographie à la Sorbonne. Il traitera cette année de la géographie moderne, considérée dans ses rapports avec la géographie ancienne. Il terminera son cours par un exposé succinct des progrès des connaissances géographiques depuis la fin du dix-huitième siècle jusqu’à nos jours. Le cours continuera les lundis et jeudis à la même heure.
Pressés par le temps, gênés par l’espace, nous nous bornerons à signaler ici ce bel ouvrage, qui formera 3 vol. in-fol., de cent planches, et 5 vol. de texte de format in-8o[7]. Aussitôt que nous aurons reçu le texte, nous nous empresserons de donner une analyse raisonnée de cet ouvrage, qui suffirait à lui seul pour faire une réputation, si les travaux de M. Riffaut n’étaient déjà connus et appréciés du public.
Par divers argumens l’auteur prouve qu’il s’opère pendant la durée du mouvement héliaque des changemens si considérables sur la planète de la terre, que pour quelques contrées le changement de latitude est de plus de 46°.
Partant de là, il n’est donc pas étonnant, dit-il, de trouver au Kamtschatka des vestiges de l’éléphant, puisqu’il y a douze cents ans ce pays était entre les tropiques ; il n’est pas étonnant que la Russie paraisse un pays nouveau, puisqu’il n’y a que cinq mille cinq cents ans que le pôle nord de l’équateur était sur Saint-Pétersbourg, et l’on ne pouvait pas plus y aborder qu’on ne peut aborder au pôle où le capitaine Parry n’a pu pénétrer.
Il n’est pas étonnant que l’on ait trouvé dans des histoires antiques des traditions annonçant que le soleil s’était levé à l’ouest, le mouvement héliaque venant prouver qu’à Paris le soleil se lèvera à l’ouest actuel dans 12,980 ans d’ici, c’est-à-dire, l’an 14,810 de notre ère.
Selon lui, les déluges ne sont pas un accident, mais une suite naturelle d’un mouvement régulier, qui, changeant le point culminant des eaux dans le courant équatorial, fait envahir par la mer successivement les différens continens, etc.
Nous nous arrêtons ; ce que nous venons de dire suffit pour montrer quel a été le but de l’auteur. Nous ne jugerons pas ostensiblement son ouvrage, c’est aux savans à donner leur opinion ; mais quel que soit leur jugement, qui du reste doit servir de décision sur des matières de cette nature, l’ouvrage n’en est pas moins plein d’intérêt, et n’en mérite pas moins de fixer l’attention du public.
Ce petit ouvrage, qui offre assez d’intérêt, surtout à cette époque où les Belges fixent sur eux l’attention de l’Europe, est susceptible cependant d’un reproche, c’est de ne pas donner assez de détails sur des événemens de la plus grande importance. Nous ne dirons rien, sous le rapport du style ; le nom seul de l’auteur indique assez que c’est celui d’un étranger qui mérite de l’indulgence.
- ↑ 2 vol. in-8o.
- ↑ Levavasseur. Palais-Royal, 1830.
- ↑ Timothée Dehay, libraire, rue Vivienne, no 2 (bis). Paris, 1830.
- ↑ Rue de Provence, no 18.
- ↑ Gagniard, éditeur, quai Voltaire, no 15
- ↑ Paris, chez l’auteur, rue de Provence, no 18, Engelmann et compagnie, rue du Faubourg-Montmartre, no 6, Mongie aîné, libraire, boulevard des Italiens, no 10.
- ↑ (Prix 500 francs).