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Romans à lire et romans à proscrire/Adam (Juliette)

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L’abbé
Revue des lectures (p. 66-67).

Madame Edmond Adam, de son nom de jeune fille Juliette Lamber, née en 1836, femme de lettres « salonnière », fondatrice de la Nouvelle Revue.

Ses nouvelles, esquisses et romans sont pleins de charmantes descriptions et traversés de souffle patriotique : Mon village ; Récits d’une paysanne ; Voyage autour du Grand Pin (paysages de Cannes) ; Dans les Alpes ; La Sainte Russie ; Impressions françaises en Russie. Mme Adam est une amante de la nature.

Elle est souvent appelée « la grande française », elle a, en effet, d’après ses mémoires récemment parus (Roman de mon enfance et de ma première jeunesse ; Mes premières armes ; Mes illusions ; Nos souffrances, etc., etc.), rendu de grands services à son parti et à son pays, en faisant aimer la République, — une République française libérale — et en faisant aimer la France aux étrangers. Son infatigable apostolat patriotique a joué, dans le triomphe qui couronne la grande guerre, un rôle admirable.

Ce qui caractérise l’ensemble de son œuvre, c’est la doctrine païenne et antichrétienne, qu’on a appelée assez improprement le néo-hellénisme. « L’hellénisme, dit Jules Lemaître, est, pour les hommes d’aujourd’hui, un rêve de vie naturelle et heureuse, dominée par l’amour et la recherche de la beauté surtout plastique, et débarrassée de tout soin ultra-terrestre. Ce rêve passe, à tort ou à raison, pour avoir été réalisé jadis par les Hellènes… » Mais peu importe, le néo-hellénisme est païen ; et Mme Adam, qui en est devenue l’apôtre, est païenne. « Je suis païenne, dit-elle elle-même[1] et c’est ce qui me distingue des autres femmes ». « Le paganisme de Mme Juliette Lamber, ajoute Jules Lemaître, est au fond une protestation passionnée contre ce qu’il y a, dans la croyance chrétienne, d’hostile au corps et à la vie terrestre, d’antinaturel et de surnaturel, et pour préciser encore, contre le dogme du péché originel et de ses conséquences… »

Ceci, on le sait, c’est Madame Adam d’hier. Hier, elle adorait Zeus ; aujourd’hui, elle adore Jésus. Hier, elle invoquait Pallas-Athéné ; aujourd’hui, elle invoque Jeanne d’Arc. En 1913, Madame Adam s’est convertie : elle a écrit Chrétienne, roman par lettres, livre sain et réconfortant pour les gens du monde.

  1. Dans Laide et dans Païenne, livre très hardi qui scandalisa le Gil Blas et le Voltaire.