Rythmes pittoresques/Effet de soir

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Rythmes pittoresquesAlphonse Lemerre, éditeur (p. 24-25).

EFFET DE SOIR



À J.-H. Rosny.


Et je revis le vieux jardin oublié,
Ingratement oublié, depuis les jours clairs et monotones — d’enfance.
Mais ce ne furent point les souvenirs de ce gris matin —
Si gris et pourtant si clair —
Que je retrouvais au fuyant des allées
De ce vieux jardin oublié.

Sur un royal couchant les marronniers étendaient
Leur tapisserie de haute lice.

Ce furent des Midis déments les démentes heures
Et les espérantes Envolées des jours proches —
Si lointains ! —

Qui se levaient ainsi que des Ombres maudites
De leurs tombeaux
Et je crus entendre leurs connues antiennes, —
Menteuses antiennes. —
Mais c’était seulement un crapaud
Qui radotait.
 
Rythmes endormis dans les branches,
Gazon morose !
Heure pleurante comme une veuve,
Contagieuse douleur
Des choses !

Or tandis que j’allai dans tout ce paysage,
Par les Ténèbres conquis ;
Je vis, seules rayonnantes, comme des étoiles tombées —
Comme des étoiles sur le gazon morose, —
Apparition tranquille :
De blanches Chrysanthèmes.