Sonnets (Fuster)/La Caverne

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Librairie Nouvelle ; Librairie Universelle (Anthologie Contemporaine. vol. 38) (p. 5).


LA CAVERNE



Au flanc de la montagne abrupte, où rien ne croît,
Mais qui dort tristement en sa morne attitude,
Il est une caverne, inaccessible et rude,
Dont l’air est ténébreux et dont le sol est froid.

Seul osant s’y cacher, l’aigle en est le seul roi :
Pourtant il s’y hasarde avec inquiétude,
Sans y crier jamais, car cette solitude
A des échos profonds qui vous glacent d’effroi.

Je sais un cœur, si grand, si ténébreux, si vide,
Que rien n’y parle plus, ni le désir avide,
Ni les rêves jaloux, ni les espoirs meurtris.

Et tout, même l’amour, y doit faire silence,
Car la plus faible voix, troublant ce vide immense,
L’emplirait pour jamais de lamentables cris.