Sourires pincés/IV/I

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Alphonse Lemerre (p. 41).


I

LE BÊCHEUR


Il bêche tout le jour, presque indifférent à la chaleur. De temps en temps, il passe sa manche de chemise sur son front et écrase, en riche qui s’ignore, des perles de sueur. A-t-il soif ? Il boit à même la cruche d’eau au ventre de terre brune. Il bêche, afin que plus tard les choux s’ouvrent comme de grosses roses, et que, dans quinze jours, trois semaines au plus, les petits pois s’annoncent bien. Voilà que commence à l’horizon la chute oblique du soleil. Il bêche encore, sans se douter que, s’il ôtait sa chemise et sa culotte, il serait tout pareil au petit homme nu qu’on voit bêcher sur la couverture des livres édités par Alphonse Lemerre.