Subirons nous, hélas ! le poids mort des années
XVII
Subirons-nous, hélas ! le poids mort des années
Jusqu’à n’être plus rien que deux tranquilles gens
Qui se donnent d’inoffensifs baisers d’enfants
Le soir, quand le feu flambe aux creux des cheminées ?
Nos meubles chers nous verront-ils à pas très lents
Nous traîner du foyer jusqu’au bahut de hêtre
Nous appuyer au mur pour gagner la fenêtre
Et sur des sièges lourds tasser nos corps branlants ?
Si telle un jour doit s’affirmer notre ruine,
Et la torpeur dans nos cerveaux et dans nos bras,
Malgré le sort méchant nous ne nous plaindrons pas
Et retiendrons nos pleurs captifs en nos poitrines.
Car nous conserverons quand même encor nos yeux
Pour regarder le jour dont la nuit est suivie,
Et l’aube et le soleil illuminer la vie
Et faire de la terre un objet merveilleux.