Sur mon Bordel des Muses (Stances)

La bibliothèque libre.


Les Libertinage au XVIIe siècle
Texte établi par Frédéric Lachèvre (Les Œuvres libertines de Claude Le Petitp. 109-110).


Tout fout maintenant sur Permesse
Et les pucelles d’Helicon
S’en font donner dedans le con
Aussi bien que dessus la fesse,
Phœbus mesme les fout pour rien.
Par prudence afin que son bien
N’entre point en d’autres familles,
Dieu nous garde d’en juger mal,
Mais lorsqu’on a foutu ses filles,
On peut bien foutre son cheval.

Pégaze est de belle encolure,
Il est bien fait et bien fourny,
Il est de couillons bien muny.
Il a la croupe large et dure.
Je ne prends point dans ce calcul
L’intérêt du con ny du cul,
De la putain ny du bardache,
Mais je croy qu’on fait plus de mal
De foutre neuf sœurs à la lâche
Que de chevaucher un cheval.


Mais que dis-je ? Je ne vois goutte
De censurer un immortel
Qui se fout du péché mortel,
Et qui n’en fait point, quoy qu’il foute.
Jupin là-haut comme un pourceau,
Outre sa sœur et son oiseau,
Se fout de tout tant que nous sommes ;
D’autres en seroient châtiés,
Mais dans les sottises des hommes
Les Dieux sont privilégiés.

Fous doncques à perte d’haleine
Phœbus, grand Dieu de Carnaval,
Fous tes Muses et ton cheval,
Fous les poissons de ta fontaine.
Diables et Dieux qui m’escoutez,
Branlez, boujaronnez, foutez,
Sans crainte que jamais j’en gronde ;
Foutez tout, mais souffrez aussi,
Si vous foutez dans l’autre monde
Que nous foutions dans celuy-ci.