Tableau de Paris/550

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CHAPITRE DL.

Sentences de police.


On a affiché derniérement une sentence de police, qui condamnoit un cabaretier à une amende, pour avoir fait manger aux Parisiens de la chair d’âne pour du veau. La sentence ajoutoit, comme coutumier du fait.

On a été obligé de préposer des hommes pour ensevelir les chevaux, parce que plusieurs aubergistes venoient couper une tranche de cheval & la vendoient pour du bœuf dans les gargotes qui peuplent les fauxbourgs.

On feroit un extrait curieux des diverses ordonnances rendues par la police ; on verroit qu’il y a une infinité de petits & incroyables délits, qui ont un caractere de nouveauté, d’audace & de bizarrerie.

C’est toujours après l’accident que vient la loi réparatrice. Le jeu subit d’une décoration ayant accroché le jupon d’une comédienne & coupé son rôle, il s’ensuivit une ordonnance de police, qui enjoint à toute actrice ou danseuse de ne paroître sur les planches d’aucun théatre sans caleçons.

L’actrice qui joue le rôle grave de Mérope ou d’Athalie, n’en est pas plus dispensée que celle qui bondit & fait des cabrioles au-dessus des têtes pressées du parterre. Cette loi s’étend depuis la salle de l’opéra jusqu’à la loge du grimacier.

La tragédienne superbe, sous ses majestueux habillemens, & déjà respectable par elle-même, doit encore se munir de ce voile caché contre les accidens ignorés & imprévus, ainsi que la saltinbanque de chez Nicolet, pour qui ce vêtement n’est pas une précaution superflue.

Excepté les actrices, les Parisiennes ne portent point de caleçons ; ils sont d’usage dans des pays plus froids. S’ils étoient adoptés à Paris, nos femmes délicates, qui aiment à courir par-tout, se préserveroient d’une infinité de maux que le froid & l’humidité leur occasionnent.