Tableau des îles de la mer Blanche

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GRÈCE.


TABLEAU


DES


ÎLES DE LA MER BLANCHE[1],


AVANT ET DEPUIS L’INSURRECTION GRECQUE[2].




OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES.


La plupart des îles de l’Archipel, au nombre de 32 principales, forment l’apanage du capitan-pacha ; elles sont désignées dans le tableau suivant sous le nom de khass (apanage particulier).

Chaque île forme un cadilyk ou nahiïè (canton judiciaire), dans lequel est censé résider un cadi ou un naïb, qu’on nomme chaque année pour entrer en fonctions le 1/13 mars. Partout où il y a des musulmans, la justice ne peut être exercée et rendue que par un juge musulman ; mais ailleurs, le cadi même ne prononce que sur l’avis des Kodja-bachis et des supérieurs ecclésiastiques grecs, en conformité de certains priviléges (ahd-namè), concédés à l’époque de la conquête des îles, ou de leur soumission à la puissance ottomane. C’est ce que prouve le Bérat ci-après[3], qui fut accordé par Murad iii, en 1580, à plusieurs îles de l’Archipel, à l’instar des priviléges déjà octroyés à Scio, par Sultan Suleïman.

Avant 1812, époque du traité de Bucharest entre la Sublime Porte et la Russie, les Grecs pouvaient être revêtus du titre d’agas et de vaïvodes ; ils achetaient cette faveur au poids de l’or, et en abusaient d’ordinaire. Depuis, la Porte a interdit ces choix, non sans y avoir mûrement réfléchi ; elle a voulu que désormais il n’y eût que des musulmans dans ces places.

L’aga préside le conseil des primats ; ces magistrats, nommés annuellement par la communauté, règlent et répartissent les impôts, et sont chargés de tous les détails de l’administration intérieure ; ils terminent aussi la plupart des affaires civiles et contentieuses, dont au besoin on forme appel à l’amirauté de Constantinople et au tribunal du grand-vézir. Le drogman de l’arsenal exerce sur eux une grande influence, et en retire beaucoup d’argent en cadeaux volontaires ou extorqués par la crainte.

Il n’a pas été possible de recueillir des renseignemens positifs sur les sommes que paie chaque île ; originairement les impositions consistaient en services personnels ou en prestations en nature. Depuis long-temps, elles ont été converties en argent par forme d’abonnemens. Elles représentent la dîme des terres, la capitation ou kharatch, la taxe pour les matelots, les voiliers et les moutons, l’impôt sur les vins, et les redevances pour certaines autorités dans la dépendance immédiate desquelles l’île se trouve placée.

Les îles qui forment l’apanage du capitan-pacha composent l’Eïalèti-derïa (province maritime). Ce vézir exerce pourtant encore une grande autorité sur les îles en général ; elles sont soumises à lui fournir des matelots ; et ainsi que dans tout le littoral de l’Europe et de l’Asie, à la distance d’une heure et demie du rivage, les bouyourouldys (ordonnances) de S. A. y ont force de loi.

Les grandes îles et la Morée sont divisées également en kadilyks (cantons judiciaires) ; elles contiennent, en outre, un certain nombre de dotations ou fiefs militaires, héréditaires ou viagers, connus sous les noms de Ziamet, Timar, Kylidj et Khassé.

Le revenu du Ziamet est de 20,000 aspres et au-dessus ; celui du Timar, au-dessous de 20,000 et au-dessus de 5,000 ; celui du Kilidj de 2, 3, 4 et 5,000 aspres ; celui du Khassé est au-dessous de 2,000 aspres. Ces fixations ont été déterminées primitivement, et sont consignées dans les registres du cadastre, rédigé à l’époque, soit de la conquête, soit de la soumission des contrées où ces fiefs ont été constitués.


BÉRAT IMPERIAL,


accordé en 1580 par sultan murat iii, aux îles de naxie, andros, paros, santorin, milo et syra, comme renouvellement de leurs priviléges ou capitulations[4].


(Thougra[5].)

« Par cette marque unique et sublime, cet écrit très-élevé et ce diplôme impérial qui brille par la grâce et la protection du vrai Dieu, et où se manifeste la souveraineté du monde, nous ordonnons ce qui suit :

« Aujourd’hui ont comparu devant ma Sublime Porte Jérôme Sommaroupa, Barthélemi Clambis et Michel Pangalo, chrétiens, députés de la part des îles nommées Naxos, Andros, Paros, Santorin, Milo et Syra, lesquels ont exposé que, sous le règne fortuné de sultan Suleyman, mon aïeul (sur qui soit la très-haute miséricorde de Dieu), les habitans desdites îles s’étaient soumis à notre empire lors de l’expédition du capitaine Dratan bey[6] (Dragut ou Barberousse) contre elles, et que ces peuples, en vertu d’un sublime privilége impérial, avaient choisi parmi eux un chrétien pour les gouverner en notre nom, suivant l’ancien usage ; que ce bey chrétien[7] mourut, après avoir occupé ce poste pendant plusieurs années, et laissa le duché au juif Joseph, qui gouverna sans trouble et à la satisfaction générale ; et qu’aujourd’hui ledit Joseph étant mort, il a été envoyé dans ces îles un sandjak-beghi et un cadi[8].

« En conséquence, à l’instar des nobles capitulations qui ont été accordées, en signe de faveur, au peuple de l’île de Chio, nous octroyons les présentes, dont la teneur suit :

» 1o Les peuples susdits paieront la capitation (kharatch) suivant la règle observée jusqu’à nos jours.

» 2o Ils seront exempts des droits de gabelles et d’awariz (impositions accidentelles) de la part du gouvernement, ainsi que des autres angaria (corvées). S’il y passe des adjemoglans, ces militaires seront payés au mois[9], et n’auront à exiger aucun droit des bouchers[10] ; ils jouiront en pleine liberté de la possession de leurs églises[11].

» 3o À la mort d’un habitant, on pourra librement l’enterrer dans les cimetières des îles, et les juges (musulmans) du lieu ne pourront exiger aucun argent à titre de resmi (droit d’usage), ni les traiter d’une manière contraire à la justice.

» 4o Lorsqu’ils voudront rétablir et réparer leurs églises, personne ne pourra s’y opposer.

» 5o Ils paieront la dîme de leurs vignes, jardins et champs ensemencés, comme il était d’usage de la payer dès le principe.

» 6o Personne ne pourra être dépossédé de ses biens, ni être exposé à les voir sortir de ses mains. Si quelqu’un fait, en mourant, un testament pour léguer ses biens et ses propriétés, l’héritier pourra en prendre possession sans que le bèïtulmaldji[12] ou le cadi puissent l’inquiéter.

» 7o Tous les actes faits et passés avant la conquête, et jusqu’à ce jour, suivant les rites et usages du pays, sont maintenus.

» 8o Si quelqu’un veut revenir sur des affaires passées et décidées, elles seront revues entre eux, sans que les juges musulmans puissent s’en mêler.

» 9o Les juges (musulmans) ne pourront prélever que les droits fixés par la loi, sans rien exiger de plus,

» 10o S’il s’élève entre les insulaires quelque différend, et s’ils demandent de leur plein gré qu’il soit réglé, suivant leurs coutumes, par leurs concitoyens, les juges (musulmans) ne pourront s’y opposer ; au contraire, ils y devront consentir et appuyer la décision.

» 11o Comme il est nécessaire qu’il soit fait des recherches exactes, pour ne point prêter foi à de faux témoignages, quand la somme dépassera 500 aspres[13], on ne pourra poursuivre sans Sened ou Hudjet (titres écrits et vérifiés), et sur simple témoignage.

» 12o Ils ne paieront sur la soie, sur le vin et autres denrées, aucune douane qu’ils n’eussent déjà payée antérieurement.

» 13o L’emini ou bèïtulmaldji ne pourra prétendre à l’héritage de ceux qui mourront en pays étranger ; mais ceux qui se trouveront près d’eux auront la faculté de le recueillir.

» 14o Les chrétiens desdites îles ne seront point forcés d’embrasser la religion musulmane ; ils le pourront seulement de leur plein gré ; et s’ils voulaient contracter mariage avec des musulmanes, de tels actes ne seraient point permis, comme étant contraires à la loi.

» 15o On ne pourra empêcher personne de sortir pendant la nuit pour ses affaires, s’il porte une lumière ou un fanal.

» 16o Si quelqu’un veut se rendre au trône de la justice[14] pour y faire juger un procès, on ne pourra s’y opposer.

» 17o Les habitans des îles susdites pourront porter leurs costumes nationaux.

» 18o Ceux qui recueillent les impositions dites angaria (corvées) ne pourront exiger des insulaires que ce que la loi et la justice ont fixé ; ils ne pourront leur extorquer ni présens, ni vivres, pour eux ou pour leurs chevaux.

» 19o Si une femme chrétienne voulait épouser un musulman, ce mariage ne serait pas permis si elle n’avait pas embrassé la religion musulmane.

» 20o Si quelque malfaiteur commet une action contraire à la justice et aux lois, il sera poursuivi et puni suivant la loi.

» 21o Les débiteurs seront mis en prison et à la chaîne, mais le geolier ne pourra les priver du boire et du manger.

» 22o S’il arrive quelque affaire grave dans lesdites îles, le sandjak-beghy et le cadi seront tenus d’en faire eux-mêmes un examen attentif ; ils ne devront point prêter l’oreille aux malveillans et aux faux témoins, et aucune autre personne ne pourra suivre et examiner cette affaire.

» 23o Dans les lieux de ces îles où il sera nécessaire de maintenir des postes d’observation, on ne pourra obliger à ce genre de service que ceux qui doivent le faire suivant l’ancien usage.

» 24o On n’aura pas le droit d’envoyer des janissaires (yaçaktchis-gardes) à ceux qui ne sont pas obligés d’en avoir près d’eux pour leur sûreté.

» 25o Si les habitans desdites îles étaient inquiétés en masse ou individuellement par le sandjak-beghi, par le cadi ou par les personnes de leur suite, et qu’ils voulussent en porter plainte à ma Sublime Porte, personne ne se permettrait de les empêcher, ni sur terre, ni sur mer.

» 26o Si quelque insulaire afferme ses biens immeubles à un autre, il ne pourra exiger rien de plus que le prix qui aura été convenu entre eux.

» 27o Enfin, après avoir entendu leurs prières, nous avons rendu la présente ordonnance impériale pour qu’ils jouissent des priviléges selon la teneur et dans les termes ci-dessus, et nous leur avons accordé, par une grâce spéciale de notre grandeur suprême, cette noble et généreuse capitulation.

» Nous voulons dès aujourd’hui et pour l’avenir que personne ne s’oppose à notre justice, à nos lois, à nos ordres, ni à ce décret souverain et juste.

» Si quelqu’un ose contrarier leur exécution, qu’on le fasse connaître par un arzouhal (requête) à ma Sublime Porte, afin qu’il soit fait réparation à qui de droit. Que tous sachent donc qu’ils doivent prêter foi et soumission à cet ordre suprême, et observer avec un soin et une exactitude irréprochables tous les articles ci-dessus.

» Donné à Constantinople, dans les derniers jours de la lune de Chaaban, l’an 998 de l’hégire[15]. »


remarques sur les changemens et innovations qui ont altéré successivement les priviléges accordés aux insulaires de l’archipel.

L’article 2 de ces capitulations établit des exemptions formelles des droits de gabelle, etc.… Néanmoins les îles étaient soumises à des impositions très onéreuses, ordinaires et extraordinaires, sur le vin, sur les brebis, c’est-à-dire sur les troupeaux, pour les marins qu’elles devaient fournir à la flotte ottomane, pour l’entretien du bâtiment chargé de transporter l’eau dont elle avait besoin, et quelquefois pour les gabiers des vaisseaux de guerre. À cela il faut encore joindre le revenu particulier du capitan-pacha, ceux du drogman de la flotte, et des autres subalternes turcs et grecs. Les tchaouchs de l’arsenal se faisaient aussi payer très-cher toutes les fois qu’ils s’y rendaient pour l’exécution de quelque ordre. Ces mubachirs sont une des plaies de l’empire ottoman, et leurs exactions deviennent partout une cause de mécontentement et de ruine.

L’art. 5 a essuyé aussi beaucoup d’altérations ; on payait une dîme à la Porte, mais les Vénitiens en touchèrent aussi quelque chose jusqu’en 1669, époque de la prise de Candie. Ce tribut singulier, dont on ne trouve point aujourd’hui l’origine, dut naturellement cesser avec la grande influence de la république dans les mers du Levant.

Ce fut alors que la Porte envoya dans les îles des tahrirdjis (commissaires du cadastre ou estimateurs), qui réglèrent cet impôt sur la base d’un aspre par mesure de terre (un arpent environ). Santorin, par exemple, payait de cette façon près de 4,000 piastres de dîme, y compris les biens ecclésiastiques et ceux des évêques des deux rites, plus 3,000 piastres pour la capitation, le droit de mouture, etc.

On observa cette règle durant un assez grand nombre d’années. Mais bientôt l’avidité de quelques riches insulaires les porta à solliciter du capitan-pacha la ferme des impôts, qu’ils payaient par anticipation ; par ce moyen, ils obtenaient le titre de vaïvode, avec le fâcheux avantage de pressurer leurs compatriotes pour pouvoir faire face à leurs engagemens et appuyer leurs intrigues. C’est surtout depuis la guerre de 1769, entre les Turcs et les Russes, que les impositions ont pris un accroissement considérable, et à l’époque de l’insurrection de 1821, Santorin payait jusqu’à 40,000 piastres pour la dîme seule, sans les autres dépenses : toutes réunies, elles formaient une masse de 80,000 piastres fournies par une population de 15,000 ames.

L’article 11 est un de ceux dont l’altération a causé le plus de maux. Des malveillans et des plaideurs de mauvaise foi, s’appuyant tantôt sur l’article 8 et l’article 10, et d’autres fois sur l’article 16, avaient recours à l’amirauté ou au tribunal du grand-vézir, et forçaient leurs adversaires de se rendre à Constantinople à leurs frais et périls, pour y être jugés de nouveau. Les sentences des primats grecs, et même celles des cadis ou naïbs, y étaient cassées à force d’argent et d’intrigues, et les nouvelles décisions l’étaient à leur tour par les mêmes moyens, aussitôt qu’on déposait les autorités qui les avaient rendues. L’esprit de chicane et de tracasserie a peu de théâtre aussi actif que celui des îles de l’Archipel. Naxie particulièrement en est infecté ; les procès y sont interminables.

Mêmes réflexions pour l’art. 20. Les coupables, absous par la protection chèrement vendue des officiers de l’amirauté et du drogman de l’arsenal, reparaissaient triomphans dans leur île, et se livraient encore à de nouveaux excès.


observation générale.

Les Turcs n’ont jamais entretenu de garnison dans les îles de l’Archipel, qui n’ont pour habitans que des chrétiens. Le tableau suivant, auquel nous avons annexé le travail ci-dessus comme pièce justificative, fait connaître ce qui existe à cet égard, et donne un ensemble aussi exact que possible de leur état antérieur à l’insurrection, et postérieur même, pour celles qui sont restées soumises à la Porte Ottomane.


TABLEAU


DES


ÎLES DE LA MER BLANCHE,


AVANT ET DEPUIS L’INSURRECTION GRECQUE.

DÉSIGNATION
DES ÎLES PAR LEURS NOMS,
vulgaire, ancien et turc
[16].
FORMES
DE LEUR ADMINISTRATION,
et autorités desquelles elles dépendent spécialement.
POPULATIONS. PRINCIPALES PRODUCTIONS
NATURELLES ET INDUSTRIELLES.
OBSERVATIONS.
THASSO, anciennement Thassos, en turc, Thâchos.
Waïwodalyk. Pour les Grecs, administration municipale dirigée par des primats annuels.
Turque Grecque
Bois de construction pour le commerce, vins, blés, etc.
Insurgée d’abord ; aujourd’hui soumise et paisible.
SAMOTHRAKI, (Samothrace, Sèmendérek).
Agalyk, dépendant du Sandjak de Bigha, qui dépend lui-même de l’amirauté de Constantinople. Municipe grec.
Turque Grecque Miel, cire, maroquins, etc. Étrangère à l’insurrection de 1821.
IMBRO (Imbros, Imrouz}. Id. Turque Grecque Id. Id.
LIMNO (Lemnos, Limno, Limni).
Waïwodalyk, résidence d’un pacha en temps de guerre. Municipe grec
Turque Grecque
Blé, vin, coton, huile, soie, terre sigillée, sources chaudes et alumineuses, etc.
Kara — Muhammed — Pacha, ex-grand-amiral en 1822, après la mort d’Ali-Pacha, qui périt le 19 juin devant Scio, a été envoyé à Lemnos pour y commander.
TENEDO (Tenedos, Boztcha-Adaci).
Waïwodalyk, dépendant de Bigha et de l’amirauté. Municipe grec.
»[17] Grecque
Vins.
La forteresse est commandée par un Serdar.
SKIATHO (Sciathos, Echkiatos).
SKOPELO (Scopelos, Ichkopelos).
Khass dépendant du grand-amiral. Administration municipale républicaine pour les Grecs qui y sont maîtres.

N. B. Ces deux îles, avec celles de Célidroni, Piperi, du Diable, et quatre ou cinq autres plus petites, formant un groupe séparé à l’entrée du golfe de Salonique et de celui de Volo, ont toujours été un repaire de forbans.

» Grecque
Toutes ces îles, en général assez peuplées, produisent des vins, de la soie, des bestiaux, etc., et sont très-fertiles, pour la plupart.
Elles se sont insurgées dès le commencement des troubles.
SAINT-GEORGE DE SKYRA (Scyros, Ichkiros).
Khass apanage du Capitan pacha, administration municipale et républicaine.
» Grecque
Grains, coton, fruits, vins, etc.
Insurgée.
ÉGINE (Ægina, Eghinè). Id. » Grecque
Soie, fruits, oranges, citrons, vin, olives, orge, etc.
Id.
COLOURI (Salamine, Kolouri). Id. » Grecque
Poix pour l’amirauté, forêts de pins, blés, bestiaux, etc.
Id.
POROS (Sphoria, Poros). Id. » Grecque
Citrons, oranges, vins (sur le territoire d’Argos), navigation active et riche, anciens pirates.
Insurgée ; couvent de moines grecs.

HYDRA, (Aristera, Tchamlidja).
Khass, apanage du grand-amiral ; administration municipale très-privilégiée ; aucun Turc dans l’île ; population d’origine albanaise ; excellens marins, très-actifs, très-hardis. La puissance de cette île date des trente dernières années, après le voyage du capitaine Ghini en France, dans l’année 1794.
» Grecque
Rocher stérile sans eau, sans productions, que cette île tire du continent voisin ; mais elle est enrichie par un commerce immense, long-temps fait sous pavillon russe. Marine marchande très-belle et d'une forte construction. Ses habitans étaient les meilleurs marins de la flotte ottomane, et l’île en fournissait un certain nombre à l’amirauté de Constantinople où ils étaient traités avec une sorte de prédilection par les Capitans-pachas.
Boulevard de l’insurrection de 1821.

N. B. Elle n’a pas été cependant la première à lever l’étendard de l’indépendance. Ce sont les Ipsariotes qui ont commencé les hostilités contre les Turcs.

SPEZZIA, (Tiparenus, Soulidja).
Khass, même observation.
» Grecque Id. Id.
ZIA ou ZEA, (Ceos, Murted-Adaci).
Khass, municipe comme Égine.
» Grecque
Vins, soie, vallonée, etc.
Insurgée.
ANDRO, (Andros, Andra).

Ces trois îles forment chacune un agalyk, sous la dépendance immédiate de l’Hôtel des Monnaies de Constantinople. L’administration municipale est la même que dans les autres îles voisines, mais spécialement protégée. Ces îles faisaient jadis partie des fiefs d’une illustre famille de la magistrature ottomane, à l’extinction de laquelle l’Hôtel des Monnaies en fit l'achat. Tine et Syra ont des évêques latins. Il y avait à Andros un vicaire latin et des terres qui dépendaient d’un canonicat catholique abandonné depuis assez long-temps, Andros n’ayant plus d’habitans catholiques latins.
Catholique 2/5. Grecque.
Pour les trois îles, vins, fruits secs, blé, orge (les céréales ne suffisent pas é la consommation des habitans) ; miel, cire, huile, citrons, oranges, bestiaux, entre autres des porcs. Pépinière de serviteurs et de servantes pour les Francs de Constantinople et de Smyrne, etc.
Tino produit de la soie que l’on tricotte. — Il sort de cette île un grand nombre de menuisiers et d’ébénistes assez habiles.


Miel, chèvres et cochons, mines de fer abandonnées.
Insurgée.
Tine. Insurgée ; soixante-six villages ou hameaux ; 28 à 30,000 habitans. Soumise et cédée aux Turcs en 1718, en même temps que la Morée et la Sude, etc. (traité de Passarowitz).
Syra. Soumise par les insurgés depuis 1823 ; avant l’insurrection, 6,000 âmes. Aujourd’hui la population a augmenté du double environ, depuis qu’un commerce d’entrepôt considérable y a attiré beaucoup de Grecs et d’étrangers ; nommée autrefois le Paris de l’Archipel. Elle a un évêque catholique et un curé grec.
TINO, (Tenos, Istendil).

Grecque 3/5.
SYRA, (Syros, Chira). Catholique 9/10. Grecque 1/10.
THERMIA, (Cythnus, Thermiïè).
Khass ; administration municipale républicaine.
» Grecque.
Orge, soie, vins, fruits, miel, cire, bestiaux, laine, etc. Eaux thermales salines ; l’île en a pris son nom.
Insurgée.

SERPHO, (Seriphus, Serfos).
Khass ; administration municipale républicaine.
» Grecque.
Mines d’or et d’argent anciennes et abandonnées, de fer et d’aimant à fleur de terre ; hérissée de rochers qui la rendent stérile ; chèvres, cochons, oignons excellens, un peu d’orge et de vin. Lieu d’exil au temps de l’empire romain, ainsi que Syra.
Insurgée ; port de Saint-Nicolo vaste et excellent ; écueil de Serphopoulo d’un mille de tour ; inhabité.
SIPHNOS, (Siphantus, Sifnos).
Khass ; id.
» Grecque, 7,000.
Île fertile et saine ; grains, toile de coton, soie, cotons, figues, huile, cire, marbre, mines d’or, d’argent et de plomb non exploitées.
Insurgée ; port magnifique ouvert à l’O. N.-O., résidence actuelle des pilotes qui ont dû abandonner Argentières. Rade très-vaste et très-sûre. Il y avait un évêque catholique, des latins et un couvent de capucins. Fouilles d’antiquités précieuses.
L’ARGENTIÈRE, (Cimolis, Kutchuk Dèyirmenlik).
Khass ; id.
» Grecque.
Terre-à-foulon (Cimolis), eaux thermales, stérile et ancienne, résidence des pilotes pour les stations étrangères dans l’Archipel. On y a exploité des mines d’argent, d’où elle a pris le nom d’Argentière. Un peu d’orge et de coton.
Insurgée.

Petites îles voisines :

Polino.

Antimilo.

ANAPHIA ou NANPHI, (Anaphie, Anafi).
Khass ; administration municipale.
» Grecque.
Oignons, miel et cire, peu de blé, le meilleur de l’Archipel, orge et vin, multitude de perdrix.
Anaphipoulo, écueil.
SANTORIN, (Thêra, Santorin).
Khass ; résidence d’un évêque latin. Les catholiques sont d’origine italienne pour la plupart. Ils y ont des couvens d’hommes et de femmes. Administration gréco-latine ; primats choisis dans les deux rites.
Catholique, 600 Grecque, 14,400.
Terrain volcanique ; célèbre par la naissance d’îles volcaniques à diverses époques, principalement en 1707 ; coton, orge, fruits, grand commerce de vins excellens, surtout avec Taganrok.
Insurgée ; couvens latins ; conquise par Barberousse.

AMORGO, (Amorgos, Amorghos).
Khass ; administration municipale.
» Grecque.
Vins, huiles, blés, fertile et bien cultivée, lichen propre à la peinture en rouge, et déjà connu des anciens.
Insurgée.
Écueils : Nicouria à 1 mille, bloc de marbre de 5 milles de tour ; Caloyero, Cheiro.
NIO, (Yos, Enios).
Khass. Id.
» Grecque. Blé, pilotes côtiers.
Insurgée.
SKINO, (Sicinos, Sikinos).
Khass. Id.
» Grecque.
Vins, blé, orge, coton et fruits, figues, d’où est venu le nom de l’île.
Insurgée.
Cardiotissa, écueil.
POLICANDRO, (Pholegandros, Polikandros).
Khass. Id.
» Grecque.
Vin, blé, coton (stérile et pauvre).
Insurgée.
PAROS, (Paros, Bara).
Khass. Id.
» Grecque.
Troupeaux, blé, orge, vin, fruits, et célèbre par ses marbres dont les carrières ne sont plus exploitées, port excellent, refuge des corsaires qui infestent l’Archipel.
Insurgée.
ANTIPAROS, (Antiparos, Antibara).
Khass. Id.
» Grecque.
Écueil de 16 milles de tour qui produit de l’orge, du vin et du coton, lieu célèbre par la grotte qui porte ce nom.
Insurgée.
NAXIA, (Naxos, Nakcha).
Khass. Id. Résidence d’un archevêque latin métropolitain de l’Archipel, et d'un métropolitain grec.
Devenue en 1207 la capitale d’un duché de Naxie fondé par Henri, empereur de Constantinople, en faveur de Marc Sanudo, noble vénitien, et qui se composait des îles de Paros, Antiparos, Siphante, Thermis, Milo, l’Argentière, Nanfio, Nio, Amorgos, Sikino, Polikandro et Santorin, dont ce Vénitien s’était rendu maître. Il eut vingt successeurs, dont le dernier, dépouillé par Selim ii, alla mourir à Venise dans la misère et le chagrin. Naxie fut conquise au milieu du xvie siècle par le fameux Barberousse, amiral du grand Suleïman qui accepta le tribut de l'avant dernier duc.
Catholique, 1000. Grecque, 12,000.
Huile excellente, olives, blé, fruits secs, citrons, oranges, vins de Bacchus, soie, coton, bestiaux, fromages, émeril ; habitans latins au château (Castro), fiers de leur origine européenne et noble, très-processifs aussi bien que les Grecs ; c’est la Normandie de l’Archipel. Haine invétérée des deux communions.
Insurgée.
Écueils ou îlots :
Stenosa, écueil dans l’E. N.-E.
Sinkosa, 8 milles de tour.
Raclia, 12 milles de tour.

MICONI, (Myconos, Myknos).
Khass ; administration municipale.
» Grecque, 4000.
Vins, figues, olives, orge, soie, coton.
Insurgée ; belle rade ouverte à l’O. et à l’O N.-O. un autre port nommé Palermo.
Écueils. Prasonisi, Tragonisi, au nord.
Écueils dans la rade de Miconi. Georgionisi, Cavaronisi.
DELOS ou DILO, (Delos, Dilés).
Déserte. Refuge de forbans.
» Grecque.
Quelques troupeaux des îles voisines y sont parqués été et hiver ; tout auprès se trouve la petite Délos.
Assez connue par la fable et l’histoire grecque.
PSARA, (Psyra, Ipsara).
Khass, dépendant de l’amirauté. Administration municipale républicaine. Autrefois habitée par de pauvres pêcheurs et des pirates ; enrichie depuis 30 ans par le commerce ; ruinée et détruite en 1824. Elle avait alors de 15,000 à 20,000 habitans, mais plus de la moitié de la population était étrangère à l’île ; c’étaient pour la plupart des réfugiés de Kidonis, de Scio, etc.
» Grecque.
Terroir sec, peu fertile, dépourvu de bois. La richesse récente des Ipsariotes leur avait permis de faire de grands progrès de toute espèce ; leur île d’ailleurs était presque aussi favorisée qu’Hydra et Spezzia par l’Amirauté qui en tirait de bons marins. Le fameux Canaris était de ce nombre.
L’un des soutiens de l’insurrection. Ce sont les bâtimens Ipsariotes qui ont commencé la course contre les Turcs. Ce qui reste aujourd’hui des habitans d’Ipsara est dispersé. Ils ont voulu bâtir une ville au Pirée près d’Athènes. Le gouvernement grec a constaté ce projet par un acte qui est resté sans exécution.
NICARIA, (Icaria, Nikarié). » Grecque.
Fruits secs, vins, bestiaux ; très-boisée.
Ces sept îles ont toutes coopéré à l’insurrection. Les habitans s’occupent de la pêche des éponges, et sont d’excellens plongeurs. Les éponges fines sont expédiées dans toutes les parties du globe.
Lero et Colymno paient des impôts aux Turcs et aux Grecs.
PATHMOS, (Pathmos, Pathnos). » Grecque.
Bonneterie.
LERO, (Leros, Lero). » Grecque.
Éponges.
COLYMNO, (Calymna). » Grecque.
Éponges.
PISCOPI, (Telos, Piscopüe).
On assure qu’elle dépend du bey de Rhodes.
» Grecque.
NICERO, (Nisyros). » Grecque.
Éponges.
STAMPALIA, (Astipalalea, Istoupalüé).
On assure qu’elle dépend du bey de Rhodes.
» Grecque.
Blé, vins, moutons.

STANCHO, (Cos, Istankioï).
Waïwodalyk et Muhafyzlyk, confié d’ordinaire par la porte à quelque visir disgracié. Administration grecque moins libre que dans les khass dépendant du capitan pacha.
Turque. Grecque. Quelques juifs
Oranges, citrons, vins, fruits de toute espèce, bestiaux, beau terroir, fertile et assez bien cultivé.
Stancho a un fort où se tient le gouverneur (Muhafyz) avec la population turque de l’île. Les insurgés n’ont pu y pénétrer, ni soulever les Grecs du pays, à cause de la surveillance que les Musulmans exercent sur leurs rayas stanchiotes.
SCARPENTHO, (Carpathos, Iskarpentos).
Khass sous la dépendance du bey de Rhodes.
» Grecque.
Bestiaux, mines, marbres.
Insurgée ; soumise momentanément en 1824, mais insurgée de nouveau.
CASSOS, (Casus, Tchoban-A-dassy).
Khass sous la dépendance du beylik de Rhodes.
» Grecque.
Vins, miel, éponges.
Insurgée. Elle envoya des députés en 1824 à Khosrew pacha, qui fit un bon accueil à ces gens, dont la soumission momentanée n’était due qu’à la crainte et qui peu après rentrèrent de nouveau dans l’insurrection, comme Scarpentho et Piscopi. — Forbans.
RHODES, (Rhodus, Rodos).
Beylik dépendant de l’Amirauté. Le Bey que l’on choisit d’ordinaire parmi les principaux officiers de la flotte ottomane, est nommé par la Porte sur la présentation du Capitan Pacha. Rhodes a sous sa juridiction immédiate comme faisant partie du beylik, plusieurs îles et îlots, tels que Limonia, Carchi Simi, etc., où l’on pêche des éponges de toutes qualités. Ces petites îles n’ont pur prendre part à l’insurrection ; elles sont trop voisines de Rhodes.
L’administration grecque plus dépendante que dans les Cyclades est néanmoins aussi dans les mains des indigènes qui nomment chaque année leurs kodjas-bachis.
La population turque habite la forteresse. Les Grecs sont trois fois plus nombreux que les Turcs, les catholiques et les juifs. Quelques catholiques d’origine étrangère, et quelques juifs.
Pays sain et fertile, mais mal cultivé et surtout mal administré.
Palmiers à fruits, coton, soie très-inférieure à celle de Brousse, etc.
Huile fruits.
Il y a à Rhodes un chantier de construction, dont les ouvriers sont presque tous d’origine provençale. Il tire ses bois de la côte de la Caramanie et spécialement de Macri et de Marmarizza, qui sont vis-à-vis et très-près de l’ile.
Elle a été assiégée et conquise en 1523 par le grand Suleïman. Les catholiques y vivent sous la direction spirituelle des Soccolans de Ste-Marie de Péra.

SAMOS, (Samos, Susam).
Malikianè ou Arpalik (apanage) du Cheïk-hul-Islam (le mufti). Elle était gouvernée par un officier choisi et nommé par l’apanagiste. Cet officier présidait aux délibérations des primats. L’administration intérieure de l’île était d’ailleurs tout-à-fait entre les mains des chrétiens qui jouissaient de beaucoup de priviléges et de liberté, que les apanagistes ont toujours respectés avec la plus grande attention.
» Grecque.
Vins, fruits de toute espèce, grains, huile, pays riche et extrèmement fertile.
L'une des premières îles insurgées.
Elle se maintient dans l’espoir d’assurer son indépendance ; menacée en 1824 d’essuyer le sort de Chio, elle s’était préparée à résister. On prétend qu’elle n’a échappé à une sanglante conquête qu’à la prière et aux démarches du Cheikh-ul-Islam, peu jaloux de voir ce riche apanage réduit à l’obéissance, à la manière de Scio et d’Ipsara.
SCIO, (Chios, Sakyz).
Apanage d’une sultane, sœur de sultan Selim iii, morte en 1824. Gouvernée par un pacha à deux queues ou un Mutecelim qui est en même temps Muhacyl (collecteur des revenus de l’apanagiste). Les soixante villes à mastic sont sous les ordres immédiats du Sakyz-Emini (l’intendant du mastic) qui recueille les redevances de cette gomme précieuse, et veille à la protection dont doivent jouir les cultivateurs du mastic. Ces villages de grands priviléges et se gouvernent par des primats que chaque village choisit annuellement.
La ville a deux primats catholiques (latins) et trois grecs. Ces derniers commandaient aux Latins, et leur faisaient faire tout ce que la communauté grecque leur prescrivait. Lois somptuaires très-sévèrement exécutées, afin de réprimer le luxe et la coquetterie des Chiotes. Les villages qui ne cultivent pas le mastic ont leurs primats séparés, et règlent leurs comptes avec le Muhacyl. Celui-ci réside au château ainsi que les autorités turques, tous les Musulmans et les Juifs. L’île de Scio est obligée de payer une redevance particulière au Capitan pacha ; elle porte le nom de Thaam ïè (pour la bouche de S. A.}.
Turcs et Juifs. Grecs et Catholiques.
Fruits de toute espèce et d'une excellente qualité, telles qu’oranges, citrons, raisin, olives et mastic.
Les Sciotes sont les meilleurs jardiniers de l’Empire ottoman ; on les recherche avec soin dans les maisons des seigneurs turcs.
L’industrie manufacturière surtout était naguère très-active, très-étendue et très-variée. Commerce considérable en étoffes d’or, d’argent, soieries de toute espèce, velours, galons. Académie florissante, etc.
Restée long-temps étrangère à l'insurrection, Scio se souleva en 1822. Plus tard elle fut prise d'assaut et horriblement saccagée. Tous les habitans qui ne purent s’enfuir, furent réduits à l’esclavage et dispersés de tous côtés par les vainqueurs. De 90 à 100,000 habitans, il ne reste aujourd’hui que 13 à 14,000 âmes. Elle commence pourtant à sortir de ses ruines, grâce à la sage administration du pacha qui la gouverne. Les villages à mastic, en général, ont été à l'abri des vexations et du sac exercés par les Osmanlis.
Scio a été cédée aux Turcs en 1540. Les Vénitiens la reprirent en 1694 à l’aide des latins, mais ils la perdirent l’année suivante. Depuis 1695 les catholiques ont perdu la prépondérance qu’ils avaient conservée jusqu’alors pendant un siècle, et les Grecs qui favorisèrent le retour des Turcs en haine des catholiques, en furent récompensés aux dépens des latins, qu’ils ont depuis maintenus dans l’abaissement et dans la contrainte.

METELIN, (Lesbos, Midilli).
Nézhâret et Muhacyllyk, c’est-à-dire gouvernée par un Intendant et un Collecteur général des revenus. Le Nazyr qui a rang de pacha à deux queues, ou qui même en a le titre, (Miri-miran) réside à Matelin. L’administration grecque est très-sévèrement surveillée par les Turcs ; elle a cependant les mêmes bases que dans les autres îles. Plusieurs forts défendent l’île qui possède de beaux ports dont les Turcs ne tirent point parti.
Turque. Grecque.
Terroir fertile, varié, riche en toute espèce de productions naturelles ; huiles, fruits, bestiaux, laines ; race de très-petits chevaux, fort estimés, semblables à ceux d’écosse.
Port Olivier ; port Panormo ; eaux thermales au fond du premier.
Restée étrangère à l’insurrection et souvent ravagée par des troupes grecques, qui y débarquent pour y enlever des troupeaux.
NÉGREPONT, (Eubæa, Egriboz corruption du mot Euripus).
Walilik. Siége d’un vézir ou pacha à trois queues qui réside dans la forteresse de Négrepont (Chalcis), capitale de l’île.
Carysto ou Guzel-hyssar (Carysthos) est le chef-lieu d’un canton gouverné par un bey héréditaire descendant des conquérans de l’Eubée, qui fut prise par les Turcs en 1469-1470. L’administration grecque est moins libre que dans les autres îles, quoique fondamentalement la même.
Turque. Grecque.
Très fertile en blé, vins, fruits de toute espèce, coton, huile, miel, bestiaux, marbre, amiante, etc., etc., une mine de houille se trouve près de Cumi. Le miel pris de Caristo qui a un goût de roses est très renommé ; il est entièrement consommé dans l’intérieur du sérail.
Les Grecs indigènes se sont révoltés dès le commencement de l’insurrection ; ils ont même serré de près Négrepont et Carysto, mais sans pouvoir s’en emparer. Le pacha et le bey de Carysto ont depuis ramené à l’obéissance les villages qui environnent les deux forteresses.
CANDIE ou KIRIT, (Creta, Kirie).
Walilik, chef-lieu d’un Eïalet (province où commande un vézir ou un pacha à trois queues), place encore très-forte. La Canée, sandjak gouverné par un pacha à trois ou à deux queues.
Retimo, autre sandjak gouverné par un pacha à deux queues.

N. B. Cette île est aujourd’hui en dépôt entre les mains du vice-roi d’Égypte et de son fils Ibrahim-Pacha, pour les dédommager des dépenses de la guerre de la Morée.

Administration grecque comme à Négrepont.
Turque, Juive. Grecque. Quelques étrangers catholiques.
Assez connue de tous temps par sa fertilité, son ancienne civilisation et par la beauté et la variété de son climat, dues à la chaîne de l’Ida qui occupe le milieu de l’île de l’E. à l’O. On y recueille une immense quantité d’huile, de fruits de toute espèce, de vins. Les savons de Candie sont renommés et recherchés dans tout l’empire ottoman ; c’est un des plus heureux climats de la Grèce.
Le commerce européen exploite plus particulièrement les huiles de Candie qu’on transporte à Marseille, à Gênes, à Livourne, etc.
Conquise par les Arabes dès les premiers siècles de l’Hégire, reprise par les Grecs, les Vénitiens, et conquise sur ces derniers par les Turcs à différentes époques ; la Canée en 1645, Retimo en 1647, Candie en 1669, la Sude, au commencement du 18e siècle, lorsque les Vénitiens perdirent la Morée cédée aux Turcs en 1718.
Insurgée en général depuis 1821 à l’exception des lieux occupés par les troupes turques. Sphakia, sur la côte méridionale de Candie, au sud de la Canée est le repaire ancien des forbans, que les Turcs ont souvent cherché à exterminer. Cette population en grande partie d’origine arabe se livre au métier de corsaire et n’a jamais pu être entièrement soumise ni aux Vénitiens ni aux Osmanlis : la nature favorise leur indépendance, dont ils n’ont jamais fait un bon usage.

CHYPRE, (Cyprus, Kybris).
Muhacyllyk, gouverné par un collecteur général, résidant à Nicosie. Cet officier est nommé par la Porte sur la présentation du capitan pacha, dans le département duquel Chypre est comprise.
L’administration grecque y est fondamentalement la même que dans les autres îles, mais plus comprimée, plus surveillée comme à Rhodes, en Candie et à Négrepont.
Turque. Grecque. Quelques étrangers catholiques.
Île malsaine, fertile, quoique peu cultivée, par la faute d’une administration avide et tyrannique, célèbre par ses excellens vins, ses cotons et beaucoup d’autres productions qu’exploite le commerce turc et étranger.
Restée étrangère à l’insurrection ; elle a été cependant le théâtre d’exécutions sanglantes en 1821. Des populations entières, quoique innocentes, ont été anéanties sous un Muhacyl qui était la créature du fameux Halet-Effendi, dont le but était d’exaspérer les Grecs et d’aliéner les Européens, en sapant peu à peu leurs priviléges dans l’empire ottoman. Cependant depuis cette époque, la tranquillité n’y a pas été troublée.


Les Turcs l’enlevèrent en 1572. Elle avait déjà été soumise aux califes arabes dans les premiers siècles de l’Hégire, époque où les Sarrasins s’étaient rendus maîtres de la Sicile, de la Sardaigne, de la Corse, des îles Baléares et de la Crête, et dominaient ainsi toute la Méditerranée.
  1. C’est ainsi que les Turcs appellent la Méditerranée, par opposition à la Mer Noire (Pont-Euxin).
  2. Nous avions reçu de Grèce une copie de ce document authentique, rédigée en septembre 1825. Il n’était pas destiné à devenir public dans l’origine ; mais puisque cette copie en a été obtenue, et qu’ainsi les presses européennes pourraient l’imprimer tôt ou tard, l’auteur nous a donné l’autorisation de le faire paraître. (N. du R.)
  3. En rapprochant ce Bérat et le tableau suivant du Bérat d’investiture du Patriarche grec de Constantinople, que nous avons déjà publié dans le 1er volume de la Revue (p. 159), nos lecteurs seront à même de juger encore mieux si on ne pouvait pas dire avec quelque fondement « que la nation grecque forme comme une immense république dans l’empire des sultans. »
  4. Cette traduction a été faite sur une copie en idiome grec vulgaire de cet acte peu connu, récemment envoyée de l’île de Santorin.
  5. Chiffre impérial contenant les mots suivans : Sultan Murat III, fils de sultan Sélim, toujours victorieux.
  6. Dans la guerre de 1530 à 1540.
  7. C’était le vingtième descendant de Marc Sanudo, noble vénitien, en faveur duquel fut créé le duché de Naxie dans l’année 1207.
  8. Ces deux officiers, civil et militaire, résidaient à Naxie, capitale du duché, et considérée encore aujourd’hui comme la métropole de l’Archipel ou des Cyclades. Ils envoyaient des agas et des naïbs (juges secondaires) dans les autres îles dépendantes de ce sandjack, soit en tournées passagères, soit à résidence fixe.
  9. Ce passage du texte est très-obscur.
  10. Ce droit se nomme kassabiïe. Les Francs n’y sont point soumis non plus.
  11. Cette dernière phrase qui établit le droit des insulaires de jouir sans trouble de leurs églises, ne peut évidemment s’appliquer qu’aux chrétiens, et non à des janissaires passagers dans les îles. Ce défaut de rédaction et la réunion de clauses sans liaisons se retrouvent souvent dans les actes de la chancellerie ottomane. On n’a pu éviter cette sorte d’amphibologie dans une traduction littérale.
  12. Officier du fisc chargé de recueillir les successions qui doivent entrer dans le trésor public.
  13. Il faut 120 aspres pour 1 piastre turque ; 500 aspres équivalent à 4 piastres, c’est-à-dire à 13 ou à 14 francs de notre monnaie actuelle.
  14. l’arz-odassi ou tribunal présidé par le grand-vézir, assisté des deux kadi-askers.
  15. Premiers jours d’octobre 1580 de la naissance de J.-C.
  16. Les îles sont classées dans ce tableau, d’après leur position topographique, à partir du nord de l’Archipel.
  17. Les Guillemets indiquent que la population manque, ou est si minime, qu’on n’a pas cru devoir la compter