Toujours (Lahor)
TOUJOURS
Tout est mensonge : aime pourtant,
Aime, rêve et désire encore ;
Présente ton cœur palpitant
À ces blessures qu’il adore.
Tout est vanité : crois toujours,
Aime sans fin, désire et rêve ;
Ne reste jamais sans amours,
Souviens-toi que la vie est brève.
De vertu, d’art, enivre-toi,
Porte haut ton cœur et ta tête ;
Aime la pourpre comme un roi,
Et, n’étant pas Dieu, sois poète !
Aimer, rêver, seul est réel :
Notre vie est l’éclair qui passe,
Flamboie un instant sur le ciel,
Et va se perdre dans l’espace :
Seule la passion qui luit
Illumine au moins de sa flamme
Nos yeux mortels avant la nuit
Éternelle, où disparaît l’âme.
Consume-toi donc : tout flambeau
Jette, en brûlant, de la lumière ;
Brûle ton cœur, songe au tombeau,
Où tu redeviendras poussière.
Près de nous est le trou béant :
Avant de replonger au gouffre,
Fais donc flamboyer ton néant ;
Aime, rêve, désire et souffre !