Aller au contenu

Traduction de la Septante et du Nouveau Testament/Ruth

La bibliothèque libre.
Traduction de la Septante et du Nouveau Testament
La Sainte Bible de l'Ancien Testament d’après les Septante et du Nouveau Testament d’après le texte grec par P. GIGUET - tomes 1 à 4, 1872.djvuPoussielgue (p. 689-698).
◄  Juges
I Samuel  ►


RUTH

CHAPITRE I

1. Du temps des juges, il y eut une famine sur la terre ; et un homme partit de Bethleem en Juda, pour aller aux champs de Moab, lui, et sa femme et ses deux fils.

2. Le nom de l’homme était Elimelech, et le nom de sa femme Noémi, et les noms de ses deux fils, Maalon et Chélaïon, Ephrathéens[1] de Bethléem en Juda. Ainsi, ils allèrent aux champs de Moab et ils y demeurèrent.

3. Or, Elimelech, le mari de Noémi, mourut, et elle resta veuve avec deux fils.

4. Et ils épousèrent des femmes moabites : l’une se nommait Orpha, la seconde se nommait Ruth, et ils passèrent là dix années.

5. Et tous les deux moururent aussi : Maalon et Chélaïon, la femme resta ainsi privée de son mari et de ses deux fils.

6. Alors, elle se leva avec ses deux brus, et elles s’en allèrent des champs de Moab, parce qu’elles y avaient appris que le Seigneur avait visité son peuple pour lui donner du pain.

7. Elle quitta donc le lieu où elle était, et ses deux brus avec elle ; elles se mirent en route pour retourner en la terre de Juda.

8. Et Noémi dit à ses deux brus : Allez, retournez chacune en la maison de votre mère ; que le Seigneur soit miséricordieux envers vous comme vous l’avez été pour nos morts et pour moi.

9. Que le Seigneur vous l’accorde, et vous retrouverez l’une et l’autre la maison d’un époux. Puis, elle les baisa, et elles élevèrent la voix, et elles se prirent à pleurer.

10. Et elles lui dirent : Nous irons avec toi chez ton peuple.

11. Mais Noémi dit : Allez-vous-en, mes filles. Pourquoi viendriez-vous avec moi ? Ai-je encore en mes entrailles des fils qui puissent être vos époux ?

12. Allez-vous-en, mes filles, parce que je suis trop vieille pour être avec un mari, et que du reste j’ai dit : Quand même je pourrais prendre un mari et enfanter des fils,

13. Les attendriez-vous jusqu’à qu’ils soient devenus hommes ; et, poux eux, vous abstiendriez-vous d’être avec des maris ? Ne venez point, mes filles ; car j’ai bien de la peine à votre sujet, parce que la main du Seigneur s’est appesantie sur moi.

14. Et elles élevèrent la voix et elles pleurèrent encore ; Orpha baisa sa belle-mère, et elle s’en retourna chez son peuple ; mais Ruth suivit Noémi.

15. Et Noémi dit à Ruth : Vois, ta sœur retourne à son peuple et à ses dieux ; fais comme elle, et accompagne ta sœur.

16. Et Ruth dit : Ne me parle plus de m’éloigner de toi et de t’abandonner, parce qu’où tu iras, j’irai ; où tu demeureras, je demeurerai ; ton peuple est mon peuple, ton Dieu est mon Dieu ;

17. Où tu mourras, je mourrai, et c’est là que je serai ensevelie ; que le Seigneur me punisse, et qu’il me punisse encore si je te quitte ; car la mort seule nous séparera.

18. Voyant donc sa ferme volonté de partir avec elle, Noémi cessa de lui parler.

19. Elles marchèrent toutes deux jusqu’à ce qu’elles arrivassent à Bethléem ; et, dès qu’elles furent entrées à Bethleem, toute la ville fut en rumeur à leur sujet, et les femmes dirent : N’est-ce point Noémi ?

20. Et elle leur dit : Ne m’appelez point Noémi (belle) ; appelez-moi Mara (amère), parce que le Tout-Puissant m’a remplie d’amertume.

21. Pleine je suis partie, et vide me renvoie le Seigneur. Pourquoi m’appelleriez-vous Noémi, puisque le Seigneur m’a humiliée et que le Tout-Puissant m’a accablée de maux ?

22. Noémi et sa bru Ruth la Moabite étaient donc revenues des champs de Moab, et elles étaient entrées à Bethleem comme on commençait à moissonner les orges.

CHAPITRE II

1. Il y avait un homme connu de Noémi et de son époux ; cet homme, parent d’Elimelech, était riche, et il se nommait Booz.

2. Et Ruth la Moabite dit à Noémi : Je m’en vais aux champs, et je ramasserai des épis à la suite des moissonneurs, chez celui aux yeux de qui je trouverai grâce ; et Noémi répondit : Va, ma fille.

3. Elle partit done, et, étant arrivée, elle glana dans un champ, derrière les moissonneurs ; elle était tombée par aventure sur un endroit du champ de Booz, le parent d’Elimélech.

4. Et voilà que Booz vint de Bethléem, et il dit aux moissonneurs Le Seigneur soit avec vous ; et ils lui dirent Que le Seigneur te bénisse.

5. Et Booz dit à son serviteur, qui était placé au-dessus des moissonneurs : Qui est cette jeune fille ?

6. Son serviteur, qui était placé au-dessus des moissonneurs, répondit : C’est la jeune Moabite, qui est revenue avec Noémi du champ de Moab.

7. Elle m’a dit : Je glanerai et je recueillerai des épis derrière les moissonneurs ; et elle a glané depuis le matin jusqu’au soir, et elle n’a pas pris dans le champ un moment de repos.

8. Alors, Booz dit à Ruth : N’as-tu pas entendu, ma fille ? Ne va pas glaner dans un autre champ ; ne t’éloigne pas d’ici, et attache-toi aux pas de mes filles.

9. Les yeux fixés sur le champ où elles moissonnent, tu iras après elles ; voilà que j’ai commandé à mes serviteurs de te respecter. Et quand tu auras soif, tu iras aux vaisseaux, et tu boiras où boivent mes serviteurs.

10. Et, pour témoigner son respect, elle tomba la face contre terre, et elle lui dit : Comment ai-je trouvé grâce devant tes yeux pour que tu m’honores, moi qui suis une étrangère ?

11. Et il répondit : On m’a raconté tout ce que tu as fait pour ta belle-mère après la mort de son mari, et comment tu as quitté ton père et ta mère et le lieu de ta naissance, et comment tu es venue chez un peuple qu’auparavant tu ne connaissais pas.

12. Que le Seigneur rémunère ta bonne action ; que le Seigneur Dieu d’Israël, à qui tu es venue pour t’abriter sous ses ailes, t’accorde un salaire abondant.

13. Et elle reprit : Que je trouve, seigneur, grâce devant tes yeux, puisque tu m’as consolée, et que tu as parlé au cœur de ta servante, et je serai comme l’une de tes servantes. 14. Et Booz lui dit : Voici le moment de manger, viens ici ; tu mangeras du pain et tu tremperas ta bouchée dans le vinaigre. Ruth s’assit donc auprès des moissonneurs, et Booz lui présenta des gâteaux de farine ; elle mangea et elle fut rassasiée, et il lui en resta.

15. Ensuite, elle se leva pour glaner, et Booz donna ses ordres à ses serviteurs, disant : Laissez-la glaner au milieu des javelles et gardez-vous de la molester.

16. En apportant les épis, apportez-en pour elle, et en les jetant à terre, jetez pour elle une part de ce que vous recueillez ; elle glanera, elle mangera, et vous ne lui ferez aucun reproche.

17. Et elle glana jusqu’à la nuit, puis elle battit les épis qu’elle avait ramassés, et elle en tira près d’une me-sure d’orge[2].

18. Elle l’emporta et elle rentra dans la ville ; sa bellemère vit ce qu’elle avait recueilli, et Ruth lui donna les restes qu’elle avait rapportés des mets dont elle s’était rassasiée.

19. Et sa belle-mère lui dit : Où as-tu glané aujourd’hui, où as-tu travaillé ? Béni soit celui qui t’a accueillie. Et Ruth apprit à sa belle-mère où elle avait travaillé, et elle lui dit L’homme chez qui j’ai glané aujourd’hui se nomme Booz.

20. Et Noémi dit à sa bru : Béni soit-il, au nom du Seigneur, parce que sa miséricorde n’a manqué ni aux vivants, ni aux morts. Et Noémi ajouta : L’homme nous est proche, c’est un de nos parents.

21. Et Ruth reprit : C’est sans doute pour cela qu’il m’a dit : Attache-toi aux pas de mes filles jusqu’à ce qu’elles aient achevé toute ma moisson.

22. Et Noémi dit à Ruth, sa bru : Bon, mon enfant, si tu marches avec ses filles, on ne te contrariera pas dans un autre champ.

23. Ruth s’attacha donc aux pas des filles de Booz pour glaner jusqu’à la fin de la moisson des orges et des froments.

CHAPITRE III

1. Or, comme elle était assise auprès de sa belle-mère, Noémi sa belle-mère lui dit : Fille, ne chercherai-je point pour toi le repos afin que tu sois heureuse ?

2. Maintenant, Booz, dont tu as fréquenté les filles, ne nous est-il pas connu ? Écoute : Il doit vanner cette nuit de l’orge dans son aire.

3. Lave-toi donc et te parfume, revêts-toi de ton bel habillement et monte à son aire. Ne te montre pas à l’homme qu’il n’ait fini de manger et de boire.

4. Lorsqu’il sera couché, et que tu sauras le lieu où il sera couché, tu iras, tu lèveras ce qui couvre ses pieds, tu te coucheras, et lui-même t’apprendra ce que tu auras à faire.

5. Et Ruth répondit : Je ferai tout ce que tu viens de dire.

6. Et elle se rendit à l’aire, et elle fit tout ce que sa belle-mère lui avait recommandé.

7. Et Booz mangea et il but ; son cœur fut réjoui et il alla se coucher au coin d’un tas de blé ; elle le suivit en silence et elle leva ce qui couvrait ses pieds.

8. Or, à minuit l’homme s’éveilla, et il fut saisi d’étonnement et de trouble en voyant une femme couchée à ses pieds.

9. Et il dit ? Qui es-tu ? Elle répondit : Je suis Ruth ta servante, et tu étendras ton aile sur ta servante, parce que tu es rédempteur[3].

10. Et Booz reprit : Bénie sois-tu au nom du Seigneur, ma fille, parce que tu as été bonne et miséricordieuse à la fin plus encore qu’au commencement, et que tu n’as point recherché les jeunes gens pauvres ou riches.

11. Maintenant, ma fille, n’aie point de crainte : tout ce que tu demanderas, je te l’accorderai ; car toute la tribu de mon peuple sait que tu es une femme forte.

12. Il est vrai que je suis ton parent, mais il en est un plus proche que moi.

13. Demeure ici la nuit et demain : s’il veut t’épouser, qu’il t’épouse ; mais s’il ne veut t’épouser, je t’épouserai, moi, vive le Seigneur. Couche-toi donc jusqu’à l’aurore.

14. Elle resta couchée à ses pieds jusqu’au lendemain ; puis, elle se leva avant que l’on pût se reconnaître de près, et Booz lui dit : Que personne ne sache qu’une femme est venue à mon aire.

15. Il ajouta : Soulève le manteau que tu portes ; elle le soutint, et il y versa six mesures d’orge ; il l’en chargea, et elle rentra dans la ville.

16. Et Ruth alla retrouver sa belle-mère, et celle-ci lui dit : Ma fille ! et l’autre lui raconta tout ce que l’homme avait fait pour elle.

17. Elle ajouta : Il m’a donné ces dix mesures d’orge, et il m’a dit : Tu ne rentreras pas les mains vides chez ta belle-mère.

18. Or, celle-ci dit : Ne bouge pas, fille, jusqu’à ce que tu apprennes que la chose a réussi, car l’homme n’aura pas de repos qu’il ne l’ait terminée aujourd’hui même.

CHAPITRE IV

1. Booz alla vers la porte de la ville, et après s’y être assis, il vit venir le parent dont il avait parlé ; et Booz lui dit : Approche, assieds-toi ici, homme dissimulé[4]. Et l’autre approcha et il s’assit.

2. Et Booz prit dix des anciens de la ville, et il leur dit : Asseyez-vous là. Et ils s’assirent.

3. Et Booz dit au parent le plus proche : Il y a un champ de notre frère Elimelech qui a été donné à Noémi, laquelle est revenue de Moab[5].

4. Et moi j’ai dit que je t’en informerais et te dirais : Prends-en possession devant ceux qui sont assis, tous anciens de notre peuple. Si tu veux racheter, rachète ; si tu ne le veux, déclare-le-moi ; je saurai qu’il n’y a plus personne qui doive racheter, et je viens après toi. Et l’autre répondit : Je rachèterai.

5. Et Booz lui dit : Le jour où tu acquerras le champ des mains de Noémi, et du consentement de Ruth la Moabite, femme du défunt, il faudra que tu la prennes aussi afin de faire revivre le nom de son mari sur son héritage.

6. Et le parent le plus proche dit : Je ne suis point capable[6] de le racheter pour moi-même, sinon au détriment de mon propre héritage ; rachète pour toi-même ce que j’ai le droit de racheter, parce que je ne puis le racheter.

7. Or, dès longtemps en Israël cette règle existait concernant les rachats et les marchés : pour confirmer toute parole, l’homme détachait sa chaussure et la donnait à son proche, qui reprenait son droit de rachat. Tel était le témoignage en Israël.

8. Le parent le plus proche dit donc à Booz : Acquiers pour toi tous mes droits de rachat. Et il dénoua sa chaussure, et il la lui donna.

9. Et Booz dit aux anciens et à tout le peuple : Vous êtes témoins aujourd’hui que j’ai acheté de Noémi tous les biens d’Elimelech et tout ce qui appartenait à Chélaïon et à Maalon,

10. Et que de plus, je prends pour ma femme Ruth la Moabite, femme de Maalon, afin de faire revivre le nom du défunt sur son héritage ; et le nom du défunt ne sera effacé ni parmi ses frères, ni dans sa tribu. Vous en êtes témoins aujourd’hui.

11. Et tout le peuple qui était près de la porte s’écria : Témoins ! Et les anciens dirent : Fasse le Seigneur que la femme qui entre dans ta maison soit comme Rachel et comme Lia, qui l’une et l’autre ont fondé la maison d’Israël, et ont été des femmes fortes en Ephratha ; que son nom demeure en Bethléem.

12. Et que ta maison ressemble à la maison de Pharès que Thamar enfanta à Juda, par la postérité que le Seigneur fera naître pour toi de cette jeune servante.

13. Booz prit donc Ruth pour sa femme et il eut commerce avec elle ; le Seigneur lui accorda de concevoir, et elle enfanta un fils.

14. Et les femmes dirent à Noémi : Béni soit le Seigneur qui ne t’a point laissé manquer d’un rédempteur, et qui veut aujourd’hui que ton nom vive en Israël.


15. Tu auras un soutien qui ranimera ton âme, qui nourrira ta vieillesse : ta belle-fille qui t’aime, et qui vaut mieux pour toi que sept fils, l’a enfanté.

16. Et Noémi prit l’enfant et elle le mit dans son sein, et elle fut pour lui comme une nourrice.

17. Et les voisins lui donnèrent un nom, disant : Un fils est né à Noémi, et ils le nommèrent Obed ; c’est lui qui fut le père de Jessé, père de David.

18. Et voici la postérité de Pharès : Pharès engendra Esron ;

19. Et Esron engendra Aram, et Aram engendra Aminadab ;

20. Et Aminadah engendra Naasson, et Naasson engendra Salmon ;

21. Et Salmon engendra Booz, et Booz engendra Obed ;

22. Et Obed engendra Jessé, et Jessé engendra David[7].

  1. L’ancien nom de Bethléem était Ephratha.
  2. Éphi.
  3. Parent le plus proche ; en cette qualité c’était à lui, selon la loi, de racheter l’héritage du défunt, d’épouser sa veuve et de faire revivre son nom.
  4. Homme qui ne dis rien du champ dont je vais te parler, au sujet duquel tu vas être mis en demeure de te prononcer.
  5. Ce champ, détenu par Noémi en vertu d’une donation, était rachetable par la famille de son mari, et le rédempteur était obligé d’épouser la veuve, qui pouvait ainsi relever le nom éteint des défunts. (Voyez Deutéron., xxv.)
  6. Assez riche pour.
  7. Le but de ce petit livre, si plein de charme, est de nous montrer la continuation de la généalogie du Messie. Les mœurs simples et pures de cette famille la rendirent digne de compter parmi les ancêtres du Fils de Dieu, et de préparer son avènement.