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Traité additionel relatif à Cracovie, son territoire et sa constitution entre les cours de Russie, d’Autriche et de Prusse

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TRAITÉ ADDITIONEL
RELATIF
À CRACOVIE, SON TERRITOIRE ET SA
CONSTITUTION
ENTRE
LES COURS DE RUSSIE, D’AUTRICHE ET DE PRUSSE.


w Warszawie w Drukarni Rządowéy Roku 1815.

Nous ALEXANDRE Premier, par la Grace de Dieu Empereur et Autocrateur de toutes les Russies, de Moscovie, Kiovie, Vlodimirie, Novogorod, Czar de Casan, Czar d’Astracan, Roi de Pologne, Czar de Sibérie, Czar de la Chersonése-Taurique, Seigneur de Plescau et Grand-Duc de Smolensko, de Lithuanie, Volbynie, Podolie et de Finlande, Duc d’Estonie, de. Livonie, de Courlande et Sémigalle, de Samogitie, de Bialostock, Carelie, Twer, Jugorie, Permie, Wiatka, Bolgarie et d’autres ; Seigneur Grand-Duc de Novogorod inférieur, de Czernigowie, Résan, Polock, Rostow, Jaroslaw, Bélo-Osérie, Udorie, Obdorie, Condinie, Witepsk, Mstisław, Dominateur de tout le côté du Nord, Seigneur d’Iverie, de la Cartalinie, de la Géorgie et de la Cabardie, Prince héréditaire et Souverain des Princes de Czircassie, Gorski, et autres, Successenr de Norwége, Duc de Schleswick-Holstein, de Stormarie, de Dittmarsen, d’Oldenburg etc. etc. etc. Savoir faisons par ces présentes, que d’un commun accord entre Nous, Sa Majesté l’Empereur d’Autriche, Roi de Hongrie et de Bohème, et Sa Majesté le Roi de Prusse, Nos Plénipotentiaires respectifs en vertu des pleinpouvoirs, qui leur ont été donnés, ont conclu et signé à Vienne le 21 Mai5 Avril de l’année présente un traité qui est mot pour mot de la teneur suivante :

Au nom de la trés-Sainte et indivisible Trinité.

Sa Majesté l’Empereur de toutes les Russies, Sa Majesté l’Empereur d’Autriche, et Sa Majesté le Roi de Prusse, voulant donner suite à l’Article de Leurs Traités respectifs, qui concerne la neutralité, la liberté et l’indépendance de la ville de Cracovie et de son territoire, ont nommé pour le remplir leurs intentions bienveillantes à cet égard savoir : Sa Majesté l’Empereur de toutes les Russies le Sieur André Comte de Rasumoffsky, son Conseiller privé actuel, Chevalier des ordres de St. André et de St. Aléxandre-Newski, Grand-Croix de celui de St. Vlodimir et son prémier Plénipotentiaire au Congrès ; Sa Majesté l’Empereur d’Autriche le Sieur Clément-Venceslas Lothaire Prince de Metternich-Winnebourg-Ochsenhausen, Chevalier de la Toison d’or, Grand-Croix de l’ordre Royal de St. Étienne de Hongrie, Chevalier des ordres de St. Andre, de St. Aléxandre-Newski et de St. Anne de la première Classe, Grand-Cordon de la légion d’honneur, Chevalier de l’ordre de l’Éléphant, de l’ordre Suprème de l’Annonciade, de l’aigle noir, de l’aigle rouge, des Séraphins de Suède, de St. Josephe de Toscane, de St. Hubert, de l’Aigle d’or de Würtenberg, de la fidélité de Báde, de St. Jean de Jerusalem, et de plusieurs autres, Chancelier de l’ordre Militaire de Marie Thérèse, Curateur de l’Academie des beaux arts, Chambellan, Conseiller intime actuel de Sa Majesté l’Empereur d’Autriche, Roi de Hongrie et de Bohême, Son Ministre d’État des Conferences et des affaires Étrangères, son Plénipotentiaire au Congrès ; et Ta Majesté le Roi de Prusse, le Prince de Hardenberg son Chancelier d’État, Chevalier du grand Ordre de l’aigle noir, de l’aigle rouge, de celui de St. Jean de Jerusalem et de la Croix de fer de Prusse, de ceux de St. André, de St. Aléxandre-Newski et de St. Anne de la prémière Classe de Russie, Grand Croix de l’ordre Royal de St. Étienne de Hongrie, Grand-Aigle de la légion d’honneur, Chevalier de l’ordre de St. Charles d’Espagne, de l’ordre Suprème de l’Annonciade, de l’ordre des Séraphins de Suède, de celui de l’Elephant de Dannemarc, de l’aigle d’or de Würtenberg, et de plusieurs autres, Son prémier Plénipotentiaire au Congrés : les quels après avoir échangé leurs Pleinpouvoirs trouvés en bonne et due forme, ont conclu, signé et arrêté les articles suivans.

Article I.

La ville de Cracovie avec son territoire sera envisagée à perpetuité, comme cité libre, indépendante et strictement neutre, sous la protection des trois hautes Parties Contractantes.

Article II.

Le territoire de la ville libre de Cracovie aura pour frontière, sur la rive Gauche de la Vistule, une ligne qui, commençant au village de Woliça, à l’endroit de l’embouchure d’un ruisseau, qui prés de ce village se jette dans la Vistule, remontera ce ruisso par Clo, Kościelniki jusqu’à Czulice, de sorte que ces villages sont compris dans le rayon de la ville libre de Cracovie. De là enlongeant les frontières des villages, continuera par Dziekanowice, Garlice, Tomaszow, Karniowice, qui resteront également dans le territoire de Cracovie, jusqu’au point où commence la limite, qui sépare le district de Krzesowice de celui d’Olkusz ; de là elle suivra cette limite entre les deux districts cités pour aller aboutir aux frontière, de la Silésie Prussienne.

Article III.

Sa Majesté l’Empereur d’Autriche voulant contribuer en particulier de son côté à ce qui pourra faciliter les relations de commerce et de bon voisinage entre la Galicie et la ville libre de Cracovie, accorde à perpétuité à la ville riveraine de Podgorze les privilèges d’une ville libre de Commerce, tels qu’en jouit la ville de Brody. Cette libérté de commerce s’étendra à un rayon de cinq cent toises, à prendre de la barriére des fauxbourgs de la ville de Podgorze. Par suite de cette concession perpétuelle, qui cependant ne doit point porter atteinte aux droits de souveraineté de Sa Majesté Impériale et Royale Apostolique, les douanes Autrichiennes ne seront établies que dans des endroits, situés au dehors du dit rayon. Il n’y sera formé de même aucun établissement militaire, qui pourrait ménacer la neutralité de Cracovie ou genér la liberté de commerce, dont Sa Majesté Impériale et Royale Apostolique veut faire jouir la ville et le rayon de Podgorze.

Article IV.

Par une suite de cette concession sa Majesté Impériale et Royale a resolu de permetre également à la ville de Cracovie d’appuyer ses ponts à la rive droite de la Vistule aux endroits, par lesquels elle a toujours communiqué avec Podgorze et d’y attacher ses bâteaux. L’entretien de la rive là où ses points seront ancrés ou amarés sera à ses fraix. Elle sera également chargée de l’entretien des ponts, ainsi que des bâteaux ou prames de passage pour la saison, où les ponts ne peuvent point être maintenus. S’il y avoit cependant à cet égard relachement, négligence ou mauvaise volonté dans le service, les trois Cours conviendroient sur des faits constatés à cet égard, d’un mode d’administration pour le compte de la ville, qui écarteroit toute espéce d’abus de ce genre pour l’avenir.

Article V.

Immédiatement après la signature du présent Traité, il sera nommé une Commission mixte composée d’un nombre égal de Commissaires et d’ingénieurs pour tracer sur le terrein la ligne de démarcation, placer les poteaux, en décrire des localités afin que dans aucun cas, il ne puisse y avoir par la suite ni difficulté, ni doute à cet égard. Les poteaux qui désigneront le territoire de Cracovie devront être numérotés et marqués aux armes des Puissances limitrophes et de celles de la ville libre de Cracovie. Les frontières du territoire Autrichien vis-à-vis de celui de Cracovie, étant formées par le Thalweg de la Vistule, les poteaux Autrichiens respectifs seront établis sur la rive droite de ce fleuve. Le rayon comprénant le territoire de Podgorze, déclaré libre pour le commerce, sera désigné par des poteaux particuliers marqués aux Armes d’Autriche avec l’inscription, Rayon libre pour le commerce, Wolny Okręg dla handlu.

Article VI.

Les trois Cours s’engagent à respecter et à faire respecter en tout tems, la neutralité de la ville libre de Cracovie et de son territoire ; aucune force armée ne pourra jamais y être introduite sous quelque prétexte que ce soit.

En revanche, il est entendu et expressément stipulé, qu’il ne pourra être accordé dans la ville libre et sur le territoire de Cracovie, aucun asyle ou protection à des transfuges, déserteurs au gens poursuivis par la loi, appartenans aux pays de l’une ou l’autre des trois Puissances Contractantes et que sur la demande d’extradition, qui pourra en être faite par les Autorités compétentes, de tels individus seront arrêtés et livrés sans délay, sous bonne escorte à la garde, qui sera chargée de les recevoir à la frontière.

Article VII.

Les trois Cours ayant approuvé la Constitution, qui devra régir la cité libre de Cracovie et son territoire et qui se trouve annéxée comme partie intégrante aux présents Articles, Elles prennent cette constitution sous leur garantie commune. Elles s’engagent en outre, à déléguer, chacune un Commissaire, qui se rendra à Cracovie pour y travailler de concert avec un Comité temporaire et local, composé d’individus pris de préférence parmi les fonctionnaires publics ou des personnes dont la réputation est établie. Chacune des trois Puissances choisira pour cet effet, un Candidat dans l’une des trois classes, ou de la Noblesse ou du Clergé ou du tiers. La présidence de ce Comité sera exercée par semaine et alternativement par l’un des Commissaires des trois Cours. Le sort décidera de la première présidence et le Président jouira de tous les droits et attributions attachés à cette qualité. Ce Comité s’occupera du developpement des bases constitutionelles en question et en fera l’application. Il sera chargé également de faire les prémiére nominations des fonctionnaires, de ceux s’entend, qui n’auroient pas été nommés pour le Sénat par les Hautes Parties Contractantes, qui pour cette fois-ci se sont réservées le choix de quelques personnes connues. Il travaillera également à mettre en action et en activité le nouveau Gouvernement de la ville libre de Cracovie et de son territoire. Il entrera immédiatement dans la connoissance de l’Administration actuelle et il est autorisé à y faire tous les changemens que l’utilité publique pourroit éxiger jusqu’au moment oú cet étât provisoire cessera.

Article VIII.

La Constitution de la cité libre de Cracovie et de son territoire n’adment point en sa faveur le privilège ou l’établissement de Douanes. Elle lui accorde cependant les droits de barrières et de pontenage.

Article IX.

Pour établir une régle uniforme à l’égard des droits de pontenage ou de passage à percevoir par la ville libre de Cracovie, et qui doivent être proportionnés à ses charges, il a été convenu, qu’il seroit fait un Tarif permanent et commun par la Commission citée à l’Article septième. Ce Tarif ne pourra porter que sur les charges, les bêtes de somme ou de trait, et le bétail ; jamais sur les personnes, excepté aux Époques oú le passage doit se faire en bâteau.

Les bureaux de perception seront établis sur la rive gauche de la Vistule.

La même Commission arrêtera également les principes relatifs aux Cours des Monnoies.

Article X.

Tous les droits obligations, avantages et prérogatives stipulés par les trois Hautes Parties Contractantes dans les Articles relatifs aux propriétaires mixtes, à l’amnistie, à la liberté du commerce et de la Navigation, sont communs à la cité libre de Cracovie et à son territoire.

Pour faciliter en outre l’approvisionnement de la ville et du territoire de Cracovie, les Trois Hautes Cours sont convenues de laisser sortir librement et passer sur le territoire de la ville de Cracovie, le bois de chauffage, les charbons et tous les articles de prémiére nécessité pour la consommation.

Article Xi.

Une Commission réglera dans les terres du Clergé et du fisc les droits de propriété et de redevance des paysans, de la maniére la plus propre à rélever et améliorer l’étât de ces derniers.

Article XII.

La ville libre de Cracovie conserve pour elle et sur son territoire le privilège des postes. Il est libre cependant à chacune des Trois Cours d’avoir à son gré, ou son propre bureau de poste à Cracovie pour l’éxpédition des paquets allant ou venant de leurs Étâts, ou d’adjoindre simplement au bureau des postes de Cracovie un secrétaire chargé de surveiller cette partie. Quant aux fraix d’expédition pour les lettres de passage ou de port pour l’intérieur, cet objet sera réglé d’aprés des instructions rédigées en commun par la commission citée à l’article septième.

Article XIII.

Tout ce qui, dans la ville et le territoire libre de Cracovie, se trouvera avoir été propriété nationale du Duché de Varsovie, appartiendra à l’avenir comme telle, à la cité libre de Cracovie. Ces proprietés constitueront un des ses fonds de finances, et leurs revenus seront employés à l’entretien de l’académie, à d’autres instituts litéraires et principalement un perfectionnement des moyens d’éducation publique. Les revenus des barrières et des ponts sont destinés, par leur nature même, à l’entretien des ponts et voyes publiques, tant dans la ville libre que sur le territoire de Cracovie. L’administration sera responsable de cette partie du service public, si nécessaire aux communications et au commerce.

Article XIV.

La disposition des revenus de la ville libre de Cracovie, étant faite de manière à ce que l’excédent des fraix de l’administration soit employé aux objets indiqués dans l’Article précédent, la ville de Cracovie ne pourra point être obligée de contribuer au payement des dettes du Duché de Varsovie, et réciproquement elle n’aura aucune part aux rempoursemens, qui pourroient revenir à ce Duché. Il sera libre toutefois aux habitans de Cracovie de liquider leurs prétentions particulieres par devant la Commission qui sera chargée de régler les comptes.

Article XV.

L’académie de Cracovie est confirmée dans ses privilèges et dans la propriété des batimens et de la bibliothéque qui en ainsi que des sommes qu’elle possede en terres ou en capitaux hypothéqués. Il sera permis aux habitans des provinces polonaises limitrophes de se rendre à cette Academie et d’y faire leurs études, dés qu’elle aura pris un développement conforme aux intentions de chacune des Trois Hautes Cours.

Article XVI.

L’Évêché de Cracovie et le Chapitre de cette cité libre, ainsi que tout le Clergé séculier et régulier seront maintenus. Les fonds, dotations, immeubles, rentes ou perceptions, qui constituent leur propriété leur seront conservés. Il sera libre cependant au Sénat de proposer aux Assemblées de Decembre, un mode de répartition différent de celui qui pourroit exister, s’il étoit prouvé, que l’emploi actuel des revenus ne fut opint conforme aux intentions des fondateurs, principalement dans ce qui a rapport à l’instruction publique et à la malheureuse position du Clergé inférieur. Tout changement à faire devra passer par les mêmes formalités que l’adoption d’une loi d’Étât.

Article XVII.

La jurisdiction eclésiastique de l’Évêché de Cracovie ne devant point s’étendre sur les territoires Autrichien et Prussien, la nomination de l’Évèque de Cracovie est réservée immédiatement à Sa Majesté l’Empereur de toutes les Russies, qui pour cette fois-ci fera la priémière nomination d’après son choix. Par la suite le Chapitre et le Sénat auront le droit de présenter, chacun deux candidats parmi les quels Sa dite Majesté choisira le nouvel Évéque.

Article XVIII.

Un exemplaire des Articles ci-dessus, ainsi que de la constitution qui en fait partie principale, sera déposé solennellement par la Commission mixte désignée à l’article septième, aux Archives de la ville libre de Cracovie, comme une preuve permanente des principes généreux adoptés par les Trois Hautes Puissances en faveur de la cité et du territoire libre de Cracovie.

Article XIX.

Le présent Traité sera ratifié, et les ratifications en seront échangées dans l’espace de six jours.

En foi de quoi les Plénipotentiaires respectifs l’ont signé et y ont apposé le Cachet de leurs armes.

Fait à Vienne le 21 Mai5 Avril 1815.

(L. S.) Le Comte de Rasoumoffsky.

(L. S.) Le Prince de Metternich.

(L. S.) Le Prince de Hardenberg.

En conséquence de quoi, après avoir duement examiné ce présent traité, et la constitution mentionnée dans l’Article 7. Nous l’avons agréé, confirmé et ratifié, comme par ces présente Nous l’agréons, confirmons et ratifions dans toute sa teneur, promettant sur Notre parole Impériale pour Nous et Nos Successeurs d’observer et d’exécuter irrévocablement tout ce qui a été stipulé dans ce traité et dans la constitution mentionnée dans le 7. Article. En foi de quoi Nous avons signé de Notre Main cette Notre ratification Impériale et avons ordonné d’y apposer Notre scèau Impérial. Fait à Vienne le 27 Avril de l’an de grace 1815 et de Notre régne la 15. année.

(L. S.) —— ALEXANDRE.
Le Secrétaire d’État, Comte de Nesselrode.