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Traité de Nantes 19 Janvier 1498

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Articles accordés par Louis XII, touchant les privilèges, droits, etc. de la Bretagne
(3p. 466-467).

Articles accordés par Louis XII, touchant les privilèges, droits, etc. de la Bretagne

« Loys, par la grace de Dieu Roy de France. Savoir faisons à tous présens & advenir, comme ce jourd’huy en traitant, accordant & concevant le mariage qui présentement a esté fait & accordé entre nous de nostre part, & nostre trés-chère & très-amée cousine la Royne Anne Duchesse de Bretaigne de la sienne, plusieurs points & articles ayent esté accordés entre nous & elle, & iceux mis & redigez par escript, desquels articles & convencions avons accordé deux lettres seulement estre faictes, l’une contenant les choses particulières des personnes de nous & nostredite cousine & des enfans qui yssiront de nous deux selon les Lettres & Contrats sur ce faits & passez, & cestes touchant les choses concernans le gouvernement, administracion, droits, libertez, prééminences, Offices & Officiers dudit pays, tant en fait de l’Eglise, de la Justice, noblesse, que generalité dudit pays, & desquels articles & convencions la teneur s’ensuit. C’est à sçavoir que en tant que touche de garder & conduire le pays de Bretaigne & les subgets d’icelui en leurs droits, libertez, franchises, usaiges, coustumes & stilles tant au fait de l’Eglise, de la Justice, comme Chancellerie, Conseil, Parlement, Chambre des Comptes, Trésorerie generalle, & autres de la Noblesse & commun peuple, en maniere que aucune nouvelle loi ou constitution n’y soit faite, fors en la maniere accoustumée par les Roys & Ducs prédecesseurs de nostredite cousine la Duchesse de Bretaigne ; que nous voullons, entendons, accordons, & promettons garder & entretenir ledit pays & subgets de Bretaigne en leursdits droits & libertez, ainsi qu’ils en ont joui du temps des feux Ducs prédecesseurs de nostredite cousine. Item, & que en tant que touche de ne muer ne changer les Offices ne Officiers que nostredite cousine a mis & instituez esdits Offices en sondit pays depuis le trespas de feu nostre trés-cher Seigneur & cousin le Roy Charles VIII. de ce nom (que Dieu absoille) mary & espoux de nostredite cousine, & de ratifier & confermer iceulx Offices & Officiers, ensemble les autres choses faites par nostredite cousine durant icelui temps, sans ce qu’il soit besoin en lever autres Lettres, for la lettre de ce présent Traité ; nous voulons, accordons, promettons, ratifions & confermons lesdites choses. Item, en ce que touche que quant vaccation d’iceux Offices adviendra par mort, forfacture ou autrement, qu’il soit sur ce pourveu ausdits Offices à la nomination de nostredite cousine, & que lesdites Lettres en soient scellées en Bretaigne, nous en sommes contens & en accorderons bien nous & nostredite cousine. Item, que en tant que touche que és impositions des fouaiges & autres subsides levez & ceuillis oudit pays de Bretaigne, les gens des Estats dudit pays soient convoquez & appellez en la fourme accoustumée, & que les subgets d’icelui pays ne soient tirez hors icelui en premiere instance, ne autrement que de Barre en Barre, & en cas de ressort du Parlement de Bretaigne & en deni de droit & dénegation de justice, en la maniere accoustumée du temps des Ducs prédecesseurs de nostredite cousine ; nous sur ce voulons & entendons, accordons & promettons les y entretenir, pour en user en la fourme accoustumée d’ancienneté. Item, que en tant que touche que en nos guerres que pourrions cy-aprés faire hors dudit pays de Bretaigne, que les Nobles d’icelui pays ne soient subgets à nous servir hors dudit pays, fors en cas d’extrême nécessité, ou qu’il y ait sur ce consentement de nostredite cousine & des Estats dudit pays ; nous sur ce voulons & entendons ne tirer lesd. Nobles hors dudit pays, sans grande & extrême nécessité. Item, que entant que touche de nous nommer & intituler Duc de Bretaigne és choses qui concerneront le fait dudit pays, & de continuer la monnoye d’or & d’argent soubs le nom & tiltre de nous & de nostredite cousine ; nous sur ce voulons, entendons & accordons, & promettons de ainsi le faire & de y faire par maniere que les droits de la couronne de France & de la Duché de Bretaigne seront gardez d’une part & d’autre ; & pour ce faire y feront commis, tant de nostre part que la part de nostredite cousine & pays de Bretagne bons & notables personnaiges pour le tout bien dresser en façon que les droits de Bretaigne seront gardez. Item, & entant que peut toucher que s’il advenoit que de bonne raison il y eut quelque cause de faire mutacions, particulierement en augmentant, diminuant ou interpretant lesdits droits, coustumes, constitucions ou establiffements ; que ce soit par Parlement & Affemblées des Estats dudit pays, ainsi que de tout temps est accoustumé & que autrement ne soit fait ; nous voulons et entendons que ainsi se fasse, appellez toutes voyes les gens des trois Estats dudit pays de Bretaigne. Item, que entant que touche que les Benefices de quelque estat qu’ils soient, en ensuivant les droits dudit pays, soient baillez aux gens d’icellui pays de Bretaigne, & que autres n’y soient receus à les avoir par Lettres de naturalité ne autrement, fors par la nomination de nostredite cousine ; en ayant regard au grant nombre des Nobles dudit pays qui ont accoustumé de vivre & d’estre entretenus destites choses, nous sur ce en complairons à nostredite cousine ainsi que entre nous & elle sera advisé & ordonné. Item, que entant que touche que nuls Prévosts, Capitaines ne autres n’aient Jurisdiction fors les Chancellerie, Parlement, Seneschaulx & autres ordinaires chacun en son regard comme ils avoient ou temps & du vivant desdits feus Ducs ; nous sur ce voulons, entendons, accordons & promettons de ainsi le faire en la fourme accoustumée d’ancienneté. Item, que en tant que touche certaine remonstrance déclairée esdits articles contenans que par les droits, libertez, indults & anciennes possessions dudit pays qui est lymitrophe, la nomination & présentation des Eveschez, quant vacation advient, appartient aux Princes dudit pays, mesmement de Nantes qui est l’une des principales citez & forteresses dudit pays, & qu’en usant destits droits, indults & anciennes possessions, feu nostre trés-cher Seigneur & cousin le Duc de Bretaigne François second de ce nom & pere de nostredite cousine nomma & présenta au feu Pape Innocent Maistre Guillaume Guegen Archidiacre & Chanoine de Nantes son prochain Conseiller & serviteur, & par le Chapitre d’icelle Eglise canoniquement esleu en futur Pasteur & Evesque, & depuis le trespas dudit Duc, son pere consenti & approuvé, & de nouvel (en tant que mestier estoit) nommé & présenté ; sur la provision duquel jaczoit que ledit Pape Innocent eust rescript audit feu Duc qu’il (ayant voulu que ladite nomination sortist effet) il en pourvoyeroit ledit Gueguen dudit Evesché de Nantes ; ce néantmoins en pourveut feu Maistre Robert d’Espinay, & aprés son décez Maistre Jehan d’Espinay son frere Evesque de Mirepoix, lesquels nostredite cousine disoit avoir esté & estre tous deux lors en party à elle contraire, & avoir par indus & sinistres moyens, & contre le vouloir & plaisir d’elle s’efforcé de occuper & tenir ledit Evesché de Nantes, & lesquels toujours elle eut & a à present pour suspects & non agréables ; requerant sur ce que en gardant lesdits droits, libertez, indults & possessions, voulions tant faire & tenir main envers nostre Saint Pere le Pape, Saint Siége Apostolique, & tous autres, que lesdits droits soient gardez & observez, & que ladite nomination faite par ledit feu Duc, & depuis par nostredite cousine de la personne dudit Gueguen, comme à eulx seur & féable, sortisse son plain & entier effet, en approuvant & confermant le saisissement fait par nostredite cousine du temporel dudit Evesché, à la préservation de ses droits ; Nous sur ce en escriprons vouluntiers à nostredit S. Pere & tiendrons la main à ceste fin. Item, que entant que touche que les matieres de finances, de crimes, & de Benefices finissent au Parlement de Bretaigne sans ce qu’il en soit fait ailleurs ressort, ainsi qu’il a tousjours esté accoustumé ; nous sur ce voulons, entendons, accordons & promettons de ainsi le faire & entretenir en la fourme & maniere accoustumée d’ancienneté. Item, que entant que touche que aucunes executions de mandements ne autres exploit soient faits oudit pays de Bretaigne, il soit convenu & accordé que les deux prochains Juges Royaulx & Duchaulx dessus les lieux en ayent la connoissance & comparoissent sur lesdits lieux pour en décider & faire la fin, nous voulons, entendons, accordons et promettons de ainsi le faire en ensuivant ce que en fera advisé & conclu par les gens des trois Estats dudit pays de Bretaigne ; & cependant en sera fait ainsi qu’on a accoustumé d’ancienneté. Item, & que entant que touche que pour obvier aux questions & differends qui peuvent advenir sur les marches & limites de France & de Bretaigne, il soit convenu & accordé que les deux prochains Juges Royaulx & Duchaulx dessus les lieux en ayent la connoissance & comparoissent sur lesdits lieux pour en décider et faire la fin ; nous voulons, entendons, accordons & promettons de ainsi le faire, en ensuivant ce qui en a esté par cy-devant sur ce ordonné & qu’on a accoustumé d’ancienneté. Lesquelles choses dessusdites nous avons cedit jour accordées, voulues, consenties, promises & jurées, accordons, voulons, consentons, promettons & jurons par ces présentes signées de nostre main, en foy & parole de Roy, tenir & accomplir sans venir au contre. Si donnons en mandement à tous nos Officiers, Justiciers & subgets que icelles choses cy-dessus déclarées, ils accomplissent entierement & de point en point selon leur fourme & teneur, sans y mettre ne souffrir estre mis aucun destourbier ou empeschement en quelque maniere que ce soit ; car ainsi nous plaist-il estre fait. Et afin que ce soit chose ferme & estable pour toujours, nous avons fait mettre nostre scel à ces présentes, sauf en ce & autres choses nostre droit & l’autrui en toutes Donné ou chastel de Nantes ou mois de Janvier l’an de grace 1498. & de nostre regne le premier. Ainsi signé, Loys. Par le Roy, Messeigneurs les Cardinaux de S.Pierre ad vincula, & d’Amboise, vous le Seigneur de Ravestain, le Prince d’Orenge, le Marquis de Rothelin ; les Comtes de Rohan, de Guyse, de Ligney, de Dunoys & de Rieux ; les Evesques d’Alby, de S. Brieuc, de Luçon, de Leon, de Cepte, de Cornouaille & de Bayeulx ; les Sires de Gyé & de Baudricourt Mareschaux de France, de Sens Chancellier de Bretaigne, de la Trimoille, de Chaumont, de Beaumont d’Avaugour & de Tournon ; les Abbez de Redon Vi-Chancelier de Bretaigne, & de Moustier-Ramé ; Jacques de Beaune General des Finances en Languedoc, &c. comme à l’acte précedent. Ibidem.

On conserve dans les Archives de S. Brieuc une grosse en parchemin dudit contrat & du traité fait alors pour la conservation des privileges de la Province, à la fin de laquelle on lit ce qui suit :

L’original de la Lettre de Charte cy-dessus escrit a esté aujourd’hui à instance de M. Guillaume Gedouin Procureur General de Bretagne, apparue & exhibée au Conseil du Roy & Duc en ce pays & Duché de Bretagne, laquelle y a esté vûe et lûe en Jugement, & aprés que les recorps & attestation du reverend Pere en Dieu Christophle Evesque de S. Brieuc, Messire Jehan Calloet Chantre & Chanoine de Cornouaille, Messire René du Pont Archidiacre de Ploegastel, Maistre Rolland de Sclisson Seneschal de Treguier, Maistre Jehan du Bouyer Seneschal de Cornouaille, Maistre Alain Berard Seneschal de Lamballe, Maistre Pierre Bressel, Maistre Gilles Spadut, Maistre François de Guermeur, Maistre Charles de la Motte, & autres plusieurs témoins dignes de foy, furent informez desdits signes & scellez cy apposez, a esté par lesdits gens tenans ledit Conseil icelle Lettre de Charte publiée & tenue pour publiée & commandé d’y obéir, & en bailler copie & vidimus à tous ceux & chacune qui en voudront avoir soubs le sceaux des Actes dudit Conseil, & ont déclaré autant de foy devoir estre adjouté aux copies comme à ladite Lettre originale. Donné, fait & expedié audit Conseil les causes d’icelui tenans le 19. jour du mois de Janvier l’an 1498. Collation est faite à l’original, Signé, Blanchard, & scellé d’un sceau de cire rouge.