Traité de la peinture (Cennini)/XXXIII

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xxxiii.00Comment on fait les charbons à dessiner bons, parfaits et tendres.

Avant d’aller plus loin il faut que je te montre comment on fait le charbon à dessiner. Aie des baguettes de bois de saule, sèches et de bonne apparence, brise les en morceaux de la longueur d’une palme, ou si tu veux de quatre doigts ; divise ces morceaux en morceaux plus minces, comme si tu fesais des allumettes, et comme des allumettes encore fais-en des paquets, après les avoir polis et aiguisés à chaque pointe comme des fuseaux. Les paquets formés, lie-les ensemble à trois endroits, dans le milieu et à chaque extrémité, avec du fil de cuivre ou du fil de fer fin. Aie un pot neuf, mets-en dedans tant que le pot soit plein, mets le couvercle et ajoutes-y de la terre glaise afin que l’intérieur ne puisse en aucune façon s’évaporer. Alors va-t-en le soir au boulanger quand il a fini son ouvrage, (c’est-à-dire quand il a fini de cuire son pain), mets ce pot dans le four et laisse-l’y jusqu’au matin. Le matin tu regarderas si tes charbons sont bien cuits ; s’ils ne l’étaient pas, tu les remettras au four jusqu’à ce qu’ils le soient. Si tu veux voir comment ils sont réussis, prends l’un d’eux et dessine ou sur parchemin, ou sur papier teinté ou panneau préparé, et si tu vois que le charbon marque bien et tient bien, il est bon ; s’il est trop cuit, le dessin ne tient pas et s’époussette en plusieurs endroits. Voici encore une autre manière de faire ces charbons. Prends une tourtière en terre cuite, couverte comme nous l’avons dit, mets-la sur le feu le soir, ayant bien couvert ce feu avec la cendre. Va-t-en au lit, le matin ils seront cuits. Par le même moyen tu peux faire des charbons grands et petits. Fais-les comme tu les voudras, il n’y a pas au monde de meilleurs charbons.