Traité des sièges et de l’attaque des places/39

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AVIS PARTICULIER
Sur l’attaque des places irrégulières, contenant
huit exemples.

Attaque d’un ouvrage à corne sur la capitale d’un bastion.

premier exemple.

De tous les dehors ajoutés à la fortification, aucun n’égale en mérite les ouvrages à corne bien placés ; non sur le milieu des courtines comme on le fait communément, mais sur les capitales des bastions, dont ils embrassent les faces entières. En cet état, leurs longs côtés sont défendus du canon des courtines à feu rasant ; Mérite des ouvrages à corne sur les capitales des bastions.
Pl. 20 et 21.
les mêmes côtés par deux demi-lunes collatérales et , qui leur donnent des flancs fichans de 40 à 50 toises chacun, qu’on ne leur peut ôter, parce que la tête de cet ouvrage voit de revers sur l’attaque de ces pièces, et les soutient jusqu’à ce que l’on s’en soit rendu maître.

Or supposé la place bien revêtue, l’ouvrage à corne ou sa demi-lune avec les deux d’à-côté aussi revêtues, leurs fossés profonds et revêtus, et le tout environné d’un chemin couvert bien conditionné, il est certain que ce serait une des plus grandes perfections qu’on pût donner à la fortification ; car il ne faut pas moins de cérémonies pour se rendre maître de ce seul ouvrage, que pour le front du corps de la place bien bastionné ; et même quand il est pris, la place demeurant en son entier, il faut faire nouvelle procédure et recommencer par attaquer la place par le dedans de la gorge, qui est toujours un pays fort difficile.

Parallèle des difficultés de l’attaque des ouvrages à corne, sui­vant qu’ils sont situés sur les bas­tions ou sur les cour­tines. Pour juger de son mérite par rapport à ceux qu’on érige sur les courtines, il est à savoir que pour s’en pouvoir rendre maître, il faut prendre son chemin couvert 1, sa demi-lune 2, l’ouvrage à corne 3, avec toutes les traverses 4, les deux demi-lunes collatérales 5 et 6, ce qui ne vous mène qu’à un bastion 7, que vous êtes après obligé d’attaquer par les deux faces avec beaucoup d’incommodité ; cependant tout cela ne produit que l’équivalent d’une attaque ; et voilà 5 pièces à prendre pour y parvenir, compris le chemin couvert y sans compter les retranchemens intérieurs de cet ouvrage, qui méritent encore considération.

Mais quand ces ouvrages à corne sont situés sur le milieu des courtines, comme ceux de la planche 22, on n’a que le chemin couvert 1 à prendre, la demi-lune de sa tête 2, la corne 3, avec les traverses 4, et quelquefois une demi-lune 5, qui pour l’ordinaire est petite et disgraciée par les supériorités que l’élévation du rempart de la corne prend sur elle. Tout cela ne fait que 4 pièces à prendre : cependant la prise de cet ouvrage vous mène aux deux bastions 6 et 7, avec bien plus d’aisance et de commodité, que la première corne ne fait à l’unique bastion 7 de la planche 20 : d’où résulte que les ouvrages à corne placés sur les capitales prolongées des bastions, sont en tout et partout préférables à ceux des courtines ; ce qui soit dit en faveur de la fortification moderne.

Où de telles pièces se trouveront, on fera bien d’éviter autant qu’on le pourra de les attaquer ; mais où on sera nécessité de le faire, il faut s’y prendre comme au corps de la place, et y employer les tranchées, places d’armes, cavaliers, batteries à ricochet, de même que partout ailleurs. La planche 20 montre la meilleure figure qu’on puisse donner à cet ouvrage, Attaque des ouvrages à cornes sur les capitales des bastions. et à même temps la disposition de ses attaques, le prolongement de ses capitales, et celle des batteries à ricochet ; elle montre enfin les attaques, telles qu’elles se peuvent conduire en terrain uni.

Comme elles n’ont rien que de semblable aux attaques que nous avons déjà instruites, non plus que les descentes et passages de fossés, nous n’en dirons rien de plus particulier jusqu’à la prise de la corne ; mais quand on en sera maître, il faudra loger 3 ou 4 pièces de Pl. 21. canon sur chacun des deux demi-bastions, et 6 ou 8 sur le milieu de la courtine pour être employées,

1o Contre les retranchemens et traverses du dedans,

Et 2o contre le bastion même, dont il faudra battre les défenses ; et si on pouvait le plonger assez bas, le battre en brèche ; sinon occuper son chemin couvert à l’ordinaire et y établir des batteries, comme il est proposé aux endroits et de la planche 21, pour faire brèche aux deux faces, dans le temps qu’on travaillera aux passages de leurs fossés.

Pl. 21. Pendant que la tranchée fera chemin par le dedans de l’ouvrage à corne, on marchera aux demi-lunes collatérales 5 et 6, dont la prise suivra celle de ce grand ouvrage, à quelques jours près. La planche 21 montre la disposition de ces attaques depuis le chemin couvert jusqu’à la place, de même que la situation des batteries intérieures, et les ruptures et rasemens de rempart à faire, pour faciliter le chemin du canon aux batteries du chemin couvert.

second exemple.

Attaque d’un ouvrage à cor­ne érigé sur une courtine.
Pl. 22 et 23.
Soit une tête de place, dont l’attaque a été résolue, bâtie sur le bord d’une rivière de 80 ou 100 toises de large, avec un pont dessus fait de bateaux ou sur pilotis, soutenu à la tête par une espèce de dehors ou petit fort , et le front attaqué de cette place renforcé par un ouvrage à corne, fait comme le figuré 3, et la tranchée supposée avancée jusqu’à la troisième place d’armes. Nous reprendrons les attaques pour les conduire à leur fin, suivant l’ordre ci-devant prescrit pour la disposition générale des attaques, dont il ne faut jamais s’éloigner jusqu’à la prise de la corne, ce qui se fait comme à un front de place ; quoi fait, il faudra établir des batteries sur les demi-bastions de la même corne, comme à la ci-devant proposée du premier exemple, et percer dans l’ouvrage par les angles rentrans de la courtine et des flancs, etc. ; et de là marcher en avant vers les traverses 4, comme il est figuré au plan.

À mesure qu’on se rend maître de la tête de cette corne 3, on doit couler le long des chemins couverts de ses longs côtés, continuer la tranchée vers les bastions, se dirigeant par les capitales ; on s’approchera des angles du chemin couvert, dont on se pourra emparer fort peu après la prise de la corne. Le surplus se doit conduire à l’ordinaire. Pl. 22. marquent les places des batteries à ricochet, à prendre de l’autre côté de la rivière ; une tranchée qui va chercher le fort ; et des batteries de çà et de là pour tirer au pont et le couper ; le surplus de ces attaques tombant dans la conduite ordinaire, n’a pas besoin de plus grande explication.

Attaques d’une place où il y a fausse braie.
Pl. 24 et 25.

troisième exemple.

S’il était question de l’attaque d’une place où il y eût fausse braie qui est une défense double, Propriété des fausses braies.basse et rasante, très-contraire au passage du fossé de la place, on pourra la rendre inutile par l’effet du ricochet qui est leur grand destructeur, et par les batteries du chemin couvert qui les enfilent de revers et de plongée, de sorte qu’on les fait aisément abandonner ; mais comme l’ennemi y peut revenir de temps en temps, et faire abandonner le passage du fossé avec grande perte pour peu qu’on y demeure ; le mieux est d’en précautionner la tête par cette montagne de fascines, dont il est parlé aux passages des fossés, planche 12, à quoi il faut ajouter l’usage toujours prêt des bombes et des pierres.

Pl. 24. Fortification à fausse braie.

et Deux ricochets qui l’enfilent et la plongent à même temps. Les batteries du chemin couvert , pl. 25, peuvent encore l’enfiler.

et Batteries de front.

Pl. 25. et Passages du fossé, auxquels la fausse braie pourrait nuire, si elle n’était pas contenue par les ricochets et autres batteries.

Attaques d’une vieille place qui n’est flan­quée que par des tours couvertes de dehors de terre ou revêtus, à fossés secs ou pleins d’eau.
Pl. 26 et 27.

quatrième exemple.

Quand on attaque de vieilles places, dont les corps ne sont flanqués que par des tours à revêtement terrassé et fondé sur berme, comme il s’en rencontre assez communément, qui, ayant de bons fossés, sont d’ailleurs environnées de dehors qui suppléent assez bien au défaut des bastions ; on attaque celles-ci par tranchées et batteries, comme les autres, auquel cas les ricochets, places d’armes et sapes y peuvent être d’usage comme aux autres places.

Soit donc un front de place attaqué comme le plus faible, ayant ses remparts à l’ordinaire environnés d’un bon fossé tout autour et d’une ceinture de dehors, disposés comme il en faudra diriger les attaques à l’ordinaire, y employant les trois places d’armes, les lignes de direction, batteries, sapes et tranchées, ainsi qu’à toutes les autres.

Il y a beaucoup de vieilles places qui sont fortifiées de la sorte et qui ne laissent pas d’être assez bonnes ; mais cette bonté ne va pas bien loin, car si le fossé est sec et les dehors de terre non revêtus, de grosses batteries bien placées les mettent bientôt en désordre par la rupture de leurs fraises et palissades, et par le déchirement de leur gazonnage et de leur haie vive, s’ils en ont.

Rarement après le chemin couvert perdu, et les descentes et passages des fossés avancés, les garnisons attendent une insulte générale, notamment si le corps de la place est fort endommagé et ouvert ;Pl. 26. c’est pourquoi il faut aussi se prolonger sur les batteries à ricochet et battre en brèche de celles des places d’armes Faiblesse des dehors en terre à fossés secs.
Pl. 27.
à même temps qu’on travaille aux passages des fossés La défense de ces dehors de terre à fossés secs, est fort dangereuse quand les batteries des assiégeans font bien leur devoir ; car, croisant de toutes parts, il n’y a guère de fraises ni de palissades qui n’en soient rompues.

Si les fossés sont pleins d’eau, c’est autre chose : on peut attendre le passage du fossé à toutes les pièces, tant que leur communication à la place peut subsister ; mais quand elle est rompue, il est fort dangereux de les soutenir de vive force avec un gros monde ; car si elles sont vivement battues de canons et de bombes, il est difficile que les retranchemens non plus que les communications, puissent subsister ; auquel cas le plus sûr pour ceux qui défendent quand ils se voient en cet état, est de n’y hasarder que peu de monde à la fois et de ne pas attendre l’extrémité.

Il n’en est pas de même du corps de la place, s’il a un bon fossé ; comme on ne pourra l’aborder que par les comblemens et passages qu’on y fera, s’il n’y a plusieurs brèches et même d’assez Cas où la garnison peut soutenir un ou deux assauts. grandes, la garnison, selon qu’elle sera forte, pourra hasarder d’y soutenir un assaut ou deux, parce qu’on ne pourra aller à elle qu’en défilant ; mais il n’en serait pas de même s’il y avait des batteries à ricochet qui enfilassent le rempart par les deux bouts ; pour lors, il ne serait pas au pouvoir de la garnison de s’y présenter en grosses troupes, à moins d’être fréquemment traversée, ce qui ne serait pas capable d’empêcher qu’elle ne fût emportée, si les brèches étaient grandes et les assiégeans en état de s’assembler au pied des brèches avant que de monter.

cinquième exemple.

Attaques d’une place environnée de marais, et qu’on ne peut aborder que par des digues ou chaussées.
Pl. 28.
Supposons une autre place tellement environnée d’un marais qu’on ne la puisse aborder que par des chaussées

Si ce marais a quelques écoulemens, il ne faudra pas manquer de les rechercher et de le dessécher tant qu’on pourra, c’est-à-dire en tout ou en partie, et de détourner en même temps les eaux qui le nourrissent, soit ruisseaux ou rivières, ce qui se doit faire dès le commencement du siége et se fait assez facilement en pays plat. Mais si tout cela ne suffit pas et qu’on n’en puisse venir à bout, il faudra s’y prendre d’autre façon et tâcher d’aborder la place par les chaussées ; auquel cas examiner leur largeur et élévation au-dessus du marais, et le terrain sec de leur droite et de leur gauche qui les borde ; et surtout si elles sont enfilées de la place en tout ou en partie.

Si les chaussées n’ont d’élévation que celle qui est nécessaire au dessèchement des chemins, c’est-à-dire presque au niveau du marais, cela ne vaudra rien, parce qu’on ne se pourra enfoncer sans trouver l’eau.

Si la chaussée est étroite, comme de deux toises ou au-dessous, et enfilée, elle ne vaudra rien non plus, parce qu’on ne pourra s’y avancer par détours.

Si elle n’est point avoisinée par quelque pièce de terre qui puisse servir à placer du canon, il n’y aura pas moyen de rien faire.

Mais si la chaussée est de 5, 6 à 7 toises de large, sur 3, 4 à 5 pieds de haut, avec de bons talus des deux côtés ; qu’il y ait quelque pièce de terre attenante, élevée d’un pied et demi, 2 ou 5 pieds au-dessus de la superficie du marais, et que plusieurs autres chaussées pareilles concourent à la même avenue, on pourra s’en servir faute de mieux.

Il faudra d’ailleurs examiner où l’on pourra placer les batteries à ricochet et à bombes, et le faire à droite et à gauche des chaussées tant qu’on le pourra, pour n’en embarrasser la tranchée que le moins qu’il sera possible ; sinon au cas que le terrain soit si ingrat qu’on ne puisse trouver où les mettre, les placer sur les chaussées, en les faisant à redans, comme les figurées et .

Siége de Mons, 1691. Le siège de Mons a été une espèce de composé de tout cela ; car on détourna la Trouille de la place, et tant que le siège dura, on travailla à l’égout des marais qui avoisinent la sortie de cette rivière de la ville, et on marcha toujours par des avenues fort étroites. La planche 28[1] montre assez clairement le surplus de la conduite qu’on peut tenir à ces attaques, qu’il est bon d’éviter tant qu’on pourra.

Attaques d’une place située sur une hauteur qui n’est accessible que par une avenue étroite et difficile.
Pl. 29[2]
1693.
1692.
sixième exemple.

Supposons présentement une place d’une autre espèce située sur une hauteur, qui présente pour son faible un front si élevé et dont l’avenue soit si étroite qu’on ne puisse trouver où placer le ricochet, telle à peu près qu’au front attaqué de Charleroi et du château de Namur, et qu’il est au fort Saint-Pierre de Fribourg ou au fort Saint-André de Salins, ou aux citadelles de Perpignan et de Bayonne ; on ne pourrait pas y observer toutes les règles ci-devant prescrites, ni poster des batteries à ricochet partout où il en serait besoin ; en ce cas, il faut faire en partie ce qu’on ne peut faire en tout, et en placer où on peut, car il n’y a point de place, si avantagée soit-elle, qui ne présente toujours quelque partie faible qui peut être en prise.

Si la situation est bien reconnue et le ricochet placé, il est rare qu’on ne trouve moyen d’enfiler quelqu’une des pièces attaquées ; et c’est à celle-là qu’il faut principalement s’attacher, sans toutefois cesser d’agir contre les autres par les voies ordinaires.

Des places qui ne peuvent être battues à ricochet. Quant à celles qui ne peuvent être battues à ricochet pour être trop élevées, il faut voir à quoi peut aller cette élévation à peu près ; car, si une pièce n’est élevée au-dessus de la situation du ricochet que de 5, 10,15 à 20 toises, et que la batterie soit distante de 250, 300, 350 toises, on pourra l’enfiler par plongées ; il n’y a qu’à bien régler la charge et mollir le ricochet jusqu’à ce qu’on voie entrer le boulet dans la pièce en effleurant le parapet.

Pl. 32. Soit, par exemple, la face d’un bastion attaqué élevée de 15 toises au-dessus du niveau de la batterie et ladite batterie située à 350 toises de la pièce, on voit par le coup de canon tiré de la batterie et réglé à une certaine élévation, qu’il ne laissera pas de la plonger et d’y faire son effet ; il n’y a pour cela qu’à mollir le coup, il est certain qu’on portera le boulet où on voudra.

Quand on ne pourra pas placer le ricochet directement sur l’enfilade, il faudra l’ajuster un peu plus au-dessus ou au-dessous, il ne laissera pas d’être encore bon et de faire effet, mais à la vérité moins grand que quand il est direct.

Au surplus, où la situation est tellement disgraciée qu’on ne peut pas trouver où placer ce ricochet, il faut avoir recours aux batteries directes, et les faire croiser tant qu’on peut.

Sur la rive gauche de la Moselle, près de Trarbach. Mont-Royal, ci-devant l’une des meilleures places de l’Europe, était absolument inaccessible au ricochet, de quelque côté qu’on le pût tourner.

Toutes les places qui sont situées sur des élévations plus grandes que celles que je viens de nommer, sont presque hors des atteintes du ricochet, parce que, quand il faut pointer le canon si haut, l’affût n’y peut consentir, ou il faut tellement mollir le coup, que le boulet n’a pas la force de se relever.

Contre ces sortes de places, on trouve ordinairement de l’avantage à couler le long des rampes ; on n’y est pas tant vu et le terrain y est meilleur ; mais il faut à même temps marcher par le haut ; autrement, les sorties seront fort dangereuses pour les tranchées qui se trouveront dans le bas.

septième exemple.

Attaques d’une fortification avec des tours bastionnées.
Pl. 30 et 31.
Il y a encore fort peu de places fortifiées à tours bastionnées, et, hors Landau, le Neuf-Brisach, Belfort et quelques parties de Besançon, je n’en sais point d’autres ; mais le système en étant fort bon par rapport aux siéges de ce temps-ci, il ne faut pas douter qu’on ne fortifie des places ci-après suivant ces règles, soit de notre part ou de celle des ennemis.

Quand donc il y aura lieu d’en attaquer de semblables, il faudra s’y conduire comme aux fortifiées selon l’usage ordinaire, et y employer les tranchées, places d’armes, ricochets, cavaliers de tranchée, logemens de chemin couvert et passages des fossés jusqu’à la prise Propriété essentielle des bastions détachés. des contre-gardes, desquelles le logement sera sans doute plus difficile et contesté avec beaucoup plus d’avantage de la part des ennemis, que ceux des bastions ordinaires, parce qu’étant détachées et soutenues par les retranchemens revêtus qui mettent le corps de la place en sûreté et en état de faire sa défense particulière, bien mieux que celle des bastions attachés, qui ne sont retranchés que par des parties de vieux corps de places qui passent par leur gorge, lesquelles n’ayant pas été bâties avec les mêmes vues, n’ont pas les mêmes avantages.

Ce qu’il faut donc faire à celles-ci, sera :

Pl. 31.
Moyen de battre les flancs des tours.
1o D’employer les batteries marquées qui auront servi contre les flancs des contre-gardes pour rompre les coins de ces mêmes flancs, qui empêchent la vue de ceux des tours bastionnées, afin de les découvrir et d’en pouvoir battre le haut et le bas des mêmes canons, sans les changer de place ;

2o D’occuper entièrement le dedans des contre-gardes, en coulant par le haut et le bas de leur rempart vers le derrière de leurs flancs, et se loger sur le bord du fossé qui les sépare des tours, comme il est figuré aux endroits laissant le milieu de la pièce libre ;

Manière de faire brèche aux tours. Et 3o de raser un espace de 15 ou 18 toises de large dans la pointe de chacune des contre-gardes[3], pour donner jour au feu de cinq ou six pièces de canon marquées de la pointe du chemin couvert, dont on disposera les embrasures et plates-formes pendant qu’on sera occupé à ce rasement, qu’il faudra abaisser aussi bas que le chemin couvert, afin de pouvoir battre en sape les tours le plus bas qu’il sera possible, pour les ouvrir entièrement et les percer jusque dans le fond de leurs voûtes[4] ; et pour lors, outre que l’ouverture que le canon y fera sera de toute la capacité de la tour, il en rendra les flancs hauts et bas inutiles, et cela ira même jusqu’à rompre les petites défenses du derrière, même le pilier qui soutient le milieu de la voûte, jusqu’à la faire tomber tout-à-fait ; moyennant quoi il n’y restera que la carcasse des flancs : on pourra même, s’il y a jour, battre encore à droite et à gauche des mêmes tours, pour en chasser le canon ennemi, qui de là ne manquerait pas d’incommoder nos logemens.

Pendant que cela se fera, comme on aura occupé le terre-plein du rempart des contre-gardes, quand on sera parvenu aux flancs, il faudra percer au travers et y faire de petits logemens pour chasser l’ennemi des tenailles ; et à l’égard du dedans de la pièce, il est à présumer qu’on aura joint le bord du fossé, où étant parvenu, il y aura deux manœuvres à faire : l’une doit consister aux passages * * Marqués t.
 Pl. 31.
dudit fossé de part et d’autre des tours, et l’autre à faire des mines sous le bord du même, pour le renverser dedans et faciliter son comblement.

Cela étant exécuté à propos, on se rendra aisément maître des tours ; la place ne sera pas cependant encore ouverte, mais comme elle sera bien près de l’être, et qu’il ne restera plus de flanc aux ennemis (le plus de résistance ne servant qu’à empirer leur condition et à les faire prendre prisonniers de guerre), c’est hasard s’ils ne battent la chamade. C’est pourquoi je ne vois pas lieu de douter qu’ils ne se rendent incessamment, notamment si pendant les attaques de la contre-garde et de la tour, on a eu soin de bien tirer des bombes et des pierres dans les derrières et aux environs des tours.

Brèche à la place en cas de plus longue résistance. Que s’ils ne le faisaient pas, il faudrait s’établir dans les ruines de ces tours, s’y fortifier, et rompre les galeries de la droite et de la gauche par des fougasses, et ensuite en venir à de plus grandes mines, dont l’effet achèverait d’ouvrir la place, si l’ennemi soigneux de son salut, ne nous prévient par une prompte reddition ; sur quoi on sera pour lors en état de lui faire des conditions fort dures.

huitième exemple.

Attaques de places situées sur des hauteurs très-élevées et presque inaccessibles. Je reviens encore aux places situées sur de grandes hauteurs, parce qu’il n’a été question jusqu’à présent que des médiocres, et qu’il s’y en trouve de beaucoup plus élevées sur des sommets de montagnes et rochers presque inaccessibles, avec des escarpemens naturels ou faits à la main qui les avantagent considérablement ; ce qui mérite bien qu’on en éclaircisse le bon et le mauvais un peu plus amplement.

Il y en a qui n’ont d’accès possibles que par les avenues de leur entrée, qui sont pour l’ordinaire étroites, pierreuses et pleines de roc dont la superficie est pelée, et les abords très-peu spacieux pour des attaques, et point du tout pour les batteries à ricochet et les places d’armes, pas même pour les petits cavaliers du chemin couvert ; telle est en partie Luxembourg, et telle était Mont-Royal, la Mothe, Clermont en Argonne, Hombourg et Bitche, petites places de Lorraine très-bien fortifiées en leur temps.

Elles sont faciles à bloquer et offrent peu de res­sour­ces. De telles places sont ordinairement petites et incommodes pour les abords du commerce nécessaire à leur entretien, sujettes à manquer d’eau, très-aisées à bloquer, et de peu de ressource pour la guerre de campagne, à moins qu’elles n’aient des villes qui leur soient attachées, auxquelles elles servent de citadelles. Celles qui n’en ont point ne sont bonnes qu’à faire valoir les contributions, inquiéter les pays voisins et les armées par leurs partis ; telles étaient Hombourg, Dabo, Schonek, Faquelstein, Sainte-Anne en Comté ; et telles sont encore le château de Joux, le fort Saint-André et Château-Belin * * Autour de Salins. dans la même province, et plusieurs autres ; et telles furent encore Longwy et Clermont, Sierk, Lanstoul et Mouzon.

Dans les siècles plus reculés, il y en avait une infinité d’autres (car on ne fortifiait guère que sur des hauteurs presque inaccessibles) qui ont été démolies, et la plupart abandonnées à cause de la difficulté de leurs accès ; parce que ces places ne pouvant contenir que des garnisons faibles et de peu d’entreprise, on n’y peut faire d’entrepôts ni de magasins pour les armées, à cause de leur petitesse et de la difficulté de leurs abords, toujours roides, difficiles et embarrassans pour les charrois ; mais elles sont Objet utile de ces petites places. excellentes pour contenir les pays conquis, à peu de frais, inquiéter le pays ennemi et étendre la contribution.

Les siéges plus convenables à la reddition de ces places, quand on est faible, sont des blocus de 3, 4, 5, 6, 7 et huit mois ; pendant quoi leurs munitions se consomment et leurs garnisons s’affaiblissent par la désertion. Si cela ne suffit pas pour les réduire, on prend son temps pour les attaquer. C’est ainsi que se firent les siéges de Clermont et de Mouzon, après avoir 1654 et 1653. été bloquées des cinq ou six mois.

Blocus au moyen de lignes et de forts. Quand les siéges commencent par des blocus, on saisit les avenues, on resserre les places le plus près que l’on peut, on les circonvalle quelquefois avec des lignes et des forts, quand elles sont un peu considérables ; on prend enfin toutes les mesures possibles pour empêcher qu’il n’y entre ni secours ni vivres.

De tels blocus ne se pratiquent plus guère, et, depuis le siége de Perpignan 1642.
1691.
1703, en Italie.
par le feu roi, nous n’en avons vu en France que celui de Montmélian et de Bercello en dernier lieu : si fait bien, en Allemagne, Hongrie, Transilvanie, Croatie et Dalmatie, où il s’en est fait plusieurs pendant les dernières guerres de l’empereur contre les Turcs.

Blocus par des corps médiocres. Ceux qui se font par des corps médiocres, prennent des quartiers à quelque distance de la place, d’où ils harcellent sans cesse la garnison et les habitans par des partis, et par roder tout autour ; battre l’estrade le jour et la nuit sur les avenues, pour empêcher que rien n’y entre ni en sorte.

Siéges en règle. Quand ce blocus se convertit en siége réglé, on resserre davantage la place ; et, après avoir pris toutes les précautions possibles contre les secours et fait les préparatifs nécessaires, on ouvre enfin la tranchée par des avenues plus praticables. Sur quoi on doit observer trois choses :

1o D’éviter tous les endroits inaccessibles,

2o De ne point attaquer par des rampes unies et fort roides, le long desquelles les ennemis puissent rouler de grosses pierres, bombes, barils foudroyans, chevaux de frise roulans, chariots chargés de pierres et de feux, et autres artifices ;

Et 3o de ne point attaquer par des lieux trop sujets aux plongées de la place et tout-à-fait dénués de situation qui puisse avantager les batteries et places d’armes, mais bien par les plus accessibles et où le terrain sera le moins contraire ; car il est certain qu’il n’y a point de place élevée où il n’y ait des accès plus favorables les uns que les autres.

Après donc que, par d’exactes observations, on se sera bien assuré du fort et du faible de la place et ensuite déterminé sur le choix des attaques ; il faudra faire comme aux autres places dont il a été parlé ci-devant, et y employer le couvert et le découvert, la sape, les places d’armes et les batteries directes au défaut des ricochets ; et, bien que Utilité des places d’armes. lesdites places d’armes ne puissent envelopper le front de l’attaque autant qu’il serait à désirer, il ne faut pas laisser d’en accompagner la tranchée, ne dussent-elles avoir que 50, 60 à 100 toises d’étendue, afin de pouvoir soutenir ce que l’on poussera en avant ; placer du mieux qu’il sera possible les batteries, Que les batteries soient bien placées, croisant leurs feux, et soient nombreuses. et surtout qu’elles découvrent bien ce que l’on voudra battre ; qu’elles croisent, autant qu’il sera possible, sur les défenses, et les grossir de plusieurs pièces afin qu’elles puissent faire de grands effets en peu de temps. Les batteries à bombes ou à pierres bien placées doivent être d’un bon usage contre ces petits lieux, qui étant pour l’ordinaire serrés, pierreux, pleins de roc et rocailles, sont sujets à beaucoup d’éclats. C’est à la faveur de toutes ces batteries qu’il faut pousser la tranchée jusqu’au pied du glacis, et là établir la dernière place d’armes à 14 ou 15 toises du chemin couvert, s’il y en a, pour, après qu’elle sera bien achevée et abondamment munie de tout ce qui lui fera besoin, pouvoir insulter le chemin couvert Insulte du chemin couvert. avec avantage ; s’entend, après avoir bien ruiné les défenses, labouré le haut de son parapet, et mis sa palissade dans le plus grand désordre qu’il sera possible par le canon et les bombes ; mais parce que les palissades ne se ruinent pas, à beaucoup près, si facilement par les batteries directes que par les revers et ricochets, il faudra faire de fort grands amas de fascines et de sacs à terre avant d’attaquer, tant pour fournir au logement du chemin couvert que pour en pouvoir faire jeter quantité entre les palissades et le bord du parapet, par les gens armés, afin de se faire passage.

Ce logement fait et bien établi, il faudra suivre les règles générales du mieux qu’on pourra, c’est-à-dire placer du canon sur le haut dudit parapet pour battre en brèche et faire des trous de mineurs, et travailler aux descentes, soit en perçant par dessous le chemin couvert si le fossé Difficultés de battre les flancs. Brèches par la mine. est profond, ou à ciel ouvert s’il ne l’est pas ; trouver après cela moyen de battre les flancs du canon, des bombes et des pierres, ce qui n’est pas toujours aisé.

Détails sur les siéges de Montmédy.
1657.
À Montmédy, nous ne pûmes battre le flanc de notre droite que de l’angle rentrant du chemin couvert vis-à-vis le milieu de la courtine, l’angle saillant opposé manquant d’espace, et étant d’ailleurs trop sous le feu des grenades du bastion devant lui, et trop exposé aux revers et écharpes de sa gauche ; comme ce flanc était couvert d’un petit orillon, on fut assez long-temps à le battre sans le pouvoir démonter tout-à-fait.

Il se trouve souvent que les revêtemens de ces places ont de grands escarpemens de roc au pied ; il en faut bien examiner la hauteur, pour voir si l’éboulis des brèches à canon pourrait s’élever jusqu’au défaut du roc, et s’il n’y a point de fente ou veine dans le rocher, qui puisse favoriser l’attachement du mineur, et enfin si le roc est dur, mou, à bancs rompus ou feuillus.

À Montmédy, nous trouvâmes bien un grand escarpement au pied du bastion, mais à même temps un roc fort veineux ; c’est de quoi nous nous prévalûmes assez heureusement par l’attachement du mineur. Il est aussi à remarquer que nous perçâmes dès la moitié du glacis par dessous le chemin couvert de cette place, trois descentes de fossé qui débouchèrent à même temps au niveau de son fond, ce qui nous donna moyen d’y mettre du monde pour attacher et soutenir le mineur qui, sans ce secours, n’aurait pu y tenir, parce que le canon du flanc gauche tourmentait beaucoup son logement, et nous y tua du monde avant que le flanc fût démonté. Les ennemis y jetèrent d’ailleurs une infinité de feux d’artifice, bombes et grenades qui nous firent beaucoup de peine jusqu’à ce que le mineur fût tout-à-fait enfoncé dans le roc ; c’est sur quoi il faut extrêmement se précautionner.

Stenay, 1654. À Stenay, ils allumèrent un grand feu au pied du bastion de l’attaque gauche, devant le trou du mineur, qui nous en chassa sans retour.

Sainte-Mene­hould, 1652. Au premier siége de Sainte-Menehould, les mineurs furent chassés de leur trou, et l’ennemi obligé de changer d’attaque.

Mouzon, feu allumé au pied de la brèche, 1653. Au siége de Mouzon, les assiégés allumèrent un si grand feu au pied de la brèche, qu’on fut deux jours sans en pouvoir approcher. Cela s’est vu à plusieurs autres places.

Clermont, 1654.

Pl. 32.
À Clermont, on s’y prit d’autre façon ; on attacha trois mineurs presque en même temps, l’un sous la pointe d’une grande demi-lune bâtie sur le penchant de la montagne, qui couvrait l’unique porte de cette place, et dont le revêtement était beau et très-épais, mais sans contre-forts ; c’est pourquoi les faces n’étaient point terrassées, mais seulement les flancs , , d’une épaule à l’autre, soutenus par un deuxième revêtement bâti en portion de cercle.

Les deux autres mines étaient ouvertes à moitié des glacis, les galeries étant poussées plus de 50 pieds au-dessous du chemin couvert, dont nous n’étions ni ne pouvions être les maîtres à cause de la trop grande proximité des bastions, dont le pied ne laissait que deux toises entre lui et le parapet dudit chemin couvert, sans fossé entre-deux. On pénétra plus de trente pieds sous le corps de la place ; et je me souviens que la première de ces mines devait être chargée de 1600 livres de poudre, la deuxième de 6000 livres, et la troisième du côté du bourg, poussée sous la partie appelée donjon, bien qu’il n’y en eût plus, devait l’être de 16 à 18 mille livres.

Ces mines étaient prêtes à charger, et on en prétendait de terribles effets ; mais il est sûr que celle de la demi-lune n’aurait fait qu’ouvrir le premier revêtement, et que le reste n’aurait pas suivi, parce qu’il n’y avait rien que le retranchement derrière, qui était loin et très-bien revêtu.

Il y avait beaucoup d’apparence que les deux autres auraient fait de grands escarpemens, et que les brèches n’auraient pas été accessibles. On les fit voir aux ennemis dans le temps qu’on allait les charger ; ils en eurent peur et se rendirent. S’ils avaient été bien habiles en fait de mines, ils ne l’auraient pas fait, et se seraient tirés d’affaire avec bien plus d’honneur qu’ils ne firent.

Il y aurait beaucoup d’autres choses à dire sur l’attaque des places de toutes espèces, mais on n’aurait jamais fait ; car, comme il n’y en a pas une qui se ressemble de figure ni de situation, il n’y en a point qui ne nous nécessite à quelque diversité, de laquelle il faut se tirer comme on peut ; et où l’observation des règles devient impossible en tout ou en partie, il faut que le bon sens y supplée et nous tire d’affaire, mais toujours en vue de ne s’en éloigner que le moins que l’on peut. Règles gé­nérales à observer pour faire peu de fautes. Il y en a même de générales qui se peuvent observer presque partout, comme de ne se pas enfiler sans couvrir l’enfilade par des traverses ; de ne point. faire de lignes inutiles ; de marcher à la sape dès que la tranchée devient dangereuse ; d’appuyer toujours la marche de la tranchée par de bonnes places d’armes, et de placer la dernière tout contre le chemin couvert ; à quoi si vous ajoutez le bon usage des batteries de toutes espèces, on ne fera que très-peu de fautes, quelques places que l’on puisse assiéger.

  1. Tours qui flanquent l’enceinte et forment le front d’attaque.
    Dehors qui couvrent les tours.
    Avant-fossé.
    Chaussées ou chemins élevés qu’on suppose être les seuls abords de la place.
    Tranchées conduites sur la largeur des chaussées.
    Batteries à ricochet des faces et du chemin couvert de la pièce
    Idem des faces et du chemin couvert de la pièce
    Idem de la pièce
    Batteries à bombes.
    Tranchée qui occupe tout le bord de l’avant-fossé.
    Passages de l’avant-fossé.
    Cavaliers de tranchée qui enfilent le chemin couvert.
    Batteries à pierres.
    Tranchée qui occupe tout le bord du chemin couvert.
    Batteries en brèche des pièces
    Batteries contre les défenses de ces pièces.
    Passages des fossés desdites pièces.
    Logemens sur les mêmes.
    Batteries en brèche des tours
    Batteries contre les courtines.
    Passages du fossé des tours.
    Logemens sur lesdites tours.
    Nota. Que le terrain ne permettant point de sorties, il n’est point question de places d’armes.
  2. Front d’attaque.
    Petite demi-lune. chemin couvert,
    .
    Prolongement de la capitale de la tour
    Piquets sur l’alignement de cette capitale, garnis de paille ou de mèches allumées, pour servir à la conduite des attaques.
    Batteries en brèche du front d’attaque.
    Batterie à ricochet du bastion et de son chemin couvert.
    Batteries à bombes.
    Demi-places d’armes.
    Passages de fascines pour mener les canons et mortiers aux batteries.

    Le reste de ces attaques doit être comme dans les exemples ci devant.

  3. Dans la copie du Traité de l’attaque, que possède la famille Rosanbo, copie qui n’est pas signée de Vauban, qui ne porte pas de date, et qui bien certainement est postérieure à 1704, on lit : « 3o Établir sur le haut de la brèche de la contre-garde une batterie de quatre à cinq pièces de canon qui rasera les parapets de la tour, y fera brèche aisément et rasera le retranchement à la gorge ; à la droite et à la gauche de cette batterie en établir deux autres de cinq à six pièces chacune, pour opposer aux canons que l’assiégé pourra avoir sur les faces du bastion (dont la tour occupe le saillant), et pour faire brèche à ces faces. » Ce passage ne peut pas être de Vauban ; Voy. la note de la page suivante.
  4. Vauban ajoute, Deux fois 24 heures bien employées en feront l’affaire. V. dans l’Avis de 1703 sur les attaques de Landau, que cette manœuvre demande à la vérité du temps et du travail, mais qu’elle est très-possible, et qu’elle pourra être facilitée par le rehaussement de trois pieds des plates-formes des pièces ; que la manœuvre de monter du canon sur le haut du rempart des contre-gardes serait longue, difficile et très-dangereuse. Il recommandait en outre d’établir des batteries de trois pièces dans les places d’armes rentrantes, ou sur leurs parapets. On préféra cette dernière position (voy. la note de la pag. 119), et les batteries que l’on y fit, ouvrirent dans la courtine, des brèches qui intimidèrent l’ennemi et le déterminèrent à se rendre, quoique l’on n’eût pu que très-difficilement gagner ces brèches à la faveur des débris amassés dans les fossés qui étaient pleins d’eau.

    Bousmard établit de semblables batteries, et chemine dans les fossés qu’il suppose secs, mais comme il dirige l’attaque contre une contre-garde et deux demi-lunes, dans l’hypothèse d’un front de grands polygones, il est obligé de porter sur la contre-garde les batteries nécessaires pour ruiner les flancs des tours et des petits bastions collatéraux à ceux de l’attaque. Vauban néglige les flancs de ces petits bastions.