Une Campagne de vingt-et-un ans/Chapitre X

La bibliothèque libre.
Librairie de l’Éducation Physique (p. 89-98).


x

LE CONGRÈS DE LA SORBONNE



Du reste, avant de « populariser » il fallait « internationaliser ». J’en avais depuis longtemps le sentiment et j’étais résolu à tenter l’aventure. Quand et comment cette nécessité s’associa-t-elle dans mon esprit avec l’idée du rétablissement des Jeux Olympiques, je ne saurais le dire. Il fallait internationaliser parce qu’en France l’émulation venue du dehors est la seule qui agisse de façon efficace et durable. Qu’on y regarde de près, les ressorts français sont presque toujours au nombre de trois : le besoin, la mode, la concurrence étrangère. Le besoin, il sera long à créer en matière de sport ; il faudra une lente accoutumance à travers plusieurs générations. La mode a chez nous des royautés aussi despotiques qu’éphémères ; certes son concours avait été précieux au début ; mais la chose avait fait long feu ; plus d’espoir de ce côté. Restait la concurrence étrangère. Là était l’avenir. Il fallait organiser les contacts entre notre jeune athlétisme français et les nations qui nous avaient précédés dans la voie de la culture musculaire. Il fallait assurer à ces contacts une périodicité et un prestige indiscutables. Les instituer dans ces conditions ne revenait-il pas à restaurer l’olympisme ?

Ce terme m’était familier. Rien dans l’histoire ancienne ne m’avait rendu plus songeur qu’Olympie. Cette cité de rêve consacrée à une besogne strictement humaine et matérielle dans sa forme, mais épurée et grandie par la notion de la patrie qui possédait là, en quelque sorte, une usine de forces vitales — dressait sans cesse devant ma pensée d’adolescent ses colonnades et ses portiques. Bien avant de songer à extraire de ses ruines un principe rénovateur, je m’étais employé en esprit à la rebâtir, à faire revivre sa silhouette linéaire. L’Allemagne avait exhumé ce qui restait d’Olympie ; pourquoi la France, ne réussirait-elle pas à en reconstituer les splendeurs ? De là au projet moins brillant mais plus pratique et plus fécond de rétablir des Jeux, il n’y avait pas loin, dès lors surtout que l’heure avait sonné où l’internationalisme sportif paraissait appelé à jouer de nouveau son rôle dans le monde.

Le 25 novembre 1892, à l’occasion du « jubilé » de l’Union des Sports athlétiques dont j’ai parlé plus haut, une conférence en trois parties avait eu lieu à la Sorbonne ; « les exercices physiques dans l’antiquité, au moyen-âge et dans le monde moderne » en formaient le sujet. Je terminai mon tiers de conférence (MM. Georges Bourdon et Jusserand s’étaient chargés des deux autres) par les paroles suivantes : « Exportons des rameurs, des coureurs, des escrimeurs : voilà le libre-échange de l’avenir et, le jour où il sera introduit dans les mœurs de la vieille Europe, la cause de la paix aura reçu un nouvel et puissant appui. Cela suffit pour encourager votre serviteur à songer maintenant à la seconde partie de son programme ; il espère que vous l’y aiderez comme vous l’avez aidé jusqu’ici et qu’avec vous il pourra poursuivre et réaliser, sur une base conforme aux conditions de la vie moderne, cette œuvre grandiose et bienfaisante : le rétablissement des Jeux Olympiques ». Je m’étais attendu à des critiques, à de l’hostilité mais le projet ne fut pas même relevé ; « qu’avez vous donc voulu dire en parlant de rétablir les Jeux Olympiques ? me demandèrent à la sortie quelques personnes… On ne comprenait pas le sens d’un pareil anachronisme ; on pensait que j’avais employé une locution symbolique. Je dus me rendre compte que, faute de s’être longtemps promenés comme moi en esprit autour de l’exèdre d’Hérode Atticus et du tombeau de Pelops, mes auditeurs plaçaient les Jeux Olympiques dans leur musée mental au même niveau que les mystères d’Éleusis ou l’oracle de Delphes ; choses mortes qui ne peuvent revivre qu’à l’Opéra.

Cette découverte me rendit prudent. Impossible de présenter le plan à l’opinion tout de go car, au lieu de se regimber, elle se contenterait d’en sourire. Il y avait dans nos cartons unionistes une proposition émanant d’Adolphe de Palissaux et tendant à la convocation d’un congrès international pour l’étude des questions d’amateurisme. Nous reprîmes, lui et moi, ce projet, et au cours de 1893 nous en fîmes admettre le principe par l’Union. Je rédigeai le programme préparatoire que je présentai au Comité le 1er  août 1893. Le Congrès était fixé à juin 1894. Son titre était : « Congrès International de Paris pour l’étude et la propagation des principes d’amateurisme ». Trois commissaires avaient charge de le préparer : C. Herbert, secrétaire de l’Amateur Athletic Association pour l’Angleterre et ses colonies ; W. M. Sloane professeur à l’Université de Princeton pour le continent américain et moi-même pour la France et l’Europe continentale. Le programme imprimé en français et en anglais comprenait huit numéros dont les sept premiers avaient trait aux divers problèmes soulevés par la définition de l’amateur, les disqualifications et requalifications, le pari, etc… Le huitième était ainsi conçu : « De la possibilité du rétablissement des Jeux Olympiques. Dans quelles conditions pourraient-ils être rétablis ? » Ainsi se dissimulait modestement l’idée qui était destinée à dominer bientôt toutes les autres et à devenir tout le congrès à elle seule.

Elle apparaissait déjà plus explicite dans la circulaire en date du 15 janvier 1894 que j’adressai aux sociétés françaises et étrangères. W. M. Sloane
le professeur w. m. sloane
de l’université de princeton
« Il importe avant tout, y était-il dit, de conserver à l’athlétisme le caractère noble et chevaleresque qui l’a distingué dans le passé, afin qu’il puisse continuer de jouer efficacement dans l’éducation des peuples modernes le rôle admirable que lui attribuèrent les maîtres Grecs. L’imperfection humaine tend toujours à transformer l’athlète d’Olympie en un gladiateur de cirque. Il faut choisir entre deux formules athlétiques qui ne sont pas compatibles. Pour se défendre contre l’esprit de lucre et de professionnalisme qui menace de les envahir, les amateurs, dans la plupart des pays, ont établi une législation compliquée pleine de compromis et de contradictions ; trop souvent d’ailleurs, on en respecte la lettre plus que l’esprit. Une réforme s’impose et, avant que de l’entreprendre, il faut la discuter. Les questions qui ont été mises à l’ordre du jour du Congrès ont trait à ces compromis et à ces contradictions des règlements amateuristes. Le projet que mentionne le dernier paragraphe serait l’heureuse sanction de l’entente internationale que nous cherchons, sinon encore à réaliser, du moins à préparer. Baron de Courcel
le baron de courcel
Président du Congrès
Le rétablissement des Jeux Olympiques sur des bases et dans des conditions conformes aux nécessités de la vie moderne mettrait en présence, tous les quatre ans, les représentants des nations du monde et il est permis de croire que ces luttes pacifiques et courtoises constituent le meilleur des internationalismes ».

Ces lignes, comme je viens de le dire, sont de janvier 1894 ; je revenais d’Amérique. Après un séjour à Chicago, je m’étais rendu en Californie, puis en Louisiane ; j’avais ensuite résidé à Washington et enfin passé trois semaines à Princeton près de mon ami Sloane lequel avait assemblé à la fin de novembre à l’University-Club de New-York les personnes qu’il jugeait le mieux qualifiées pour nous seconder dans notre entreprise. Intéresser d’emblée l’athlétisme américain, il n’y fallait pas songer. Je venais de m’en convaincre au cours de ma tournée ; la réunion de New-York acheva de nous le démontrer. D’ailleurs, en ce temps-là, il y avait état de guerre sourde entre les Universités et l’Amateur Athletic Union ; l’est et l’ouest se méconnaissaient, ne se donnant le mot que pour ignorer le sud… je parle exercices physiques bien entendu. Seulement, si nous ne pouvions espérer l’appui de l’Amérique, il fallait du moins sa neutralité ; il fallait que l’opinion s’y accoutumât à entendre parler du rétablissement possible des olympiades. Ce résultat fut acquis grâce à l’ingénieuse activité de Sloane. Lui seul fut, en toute cette affaire, mon conseil et mon confident. Herbert se borna à me transmettre des adresses de sociétés anglaises et coloniales auxquelles envoyer les circulaires ; la partie technique du programme l’intéressait quelque peu ; il ne voyait rien de viable ni d’utile dans le mouvement olympique. Encore moins y voyait-on rien de semblable autour de lui. Une réunion qui devait avoir lieu à Londres au mois de février 1894 pour discuter la question, sous la présidence de Sir John Astley, tourna en un dîner intime donné au Sports Club et auquel assistèrent une demi-douzaine de personnalités du monde des sports. À Paris j’étais bien libre. Nul ne m’aidait mais nul ne m’entravait non plus. Dans ces conditions, l’incertitude se prolongea. Impossible de rien augurer de ce congrès. Nulle part ne se manifestait le moindre enthousiasme et pourtant, grâce au soin que j’avais eu de m’y prendre si à l’avance, tout le monde était prévenu en temps voulu.

Aux approches du printemps, toutes sortes de difficultés surgirent. La première vint de l’Union des Sociétés de gymnastique. M. Sansbœuf m’avait prévenu dès le principe que, si des Allemands Michel Gondinet
m. michel gondinet
Président du Racing club de France
y participaient, les délégués désignés par son Union se retireraient du congrès ! Je ne devais pas m’en étonner ; après tout il restait en agissant ainsi fidèle à sa ligne de conduite. De mon côté, je ne pouvais admettre que les Allemands fussent tenus à l’écart d’une pareille manifestation. Mais le cas ne se présenta pas. Malgré les efforts personnels que je fis près de l’attaché militaire de l’ambassade d’Allemagne qui n’était autre que M. de Schwartzkoppen, je ne pus obtenir aucune indication sur les sociétés allemandes aptes à être conviées ; celles auxquelles j’écrivis au hasard ne répondirent même pas. Un appel publié dans un journal sportif de Berlin n’amena aucune adhésion et M. de Podbielski que l’on m’avait représenté comme fort intéressé aux manifestations athlétiques, se borna à un accusé de réception aussi banal que possible. C’était le moment pourtant où certains clubs d’outre-Rhin marquaient un désir de se rencontrer avec les clubs français. Le Strassburger football Club (allemand, non alsacien) avait, le 25 janvier 1894, proposé à G. Raymond un match avec le Racing Club et deux jours plus tôt le baron von Reiffenstein m’avait écrit de Londres dans le même sens au nom d’athlètes berlinois. M. de Reiffenstein participa au Congrès ; il représenta l’Allemagne à lui seul et, n’étant point délégué officiel, M. Sansbœuf n’en prit point ombrage.

Par contre M. Cuperus avec qui nous avons depuis fait la paix, s’offusqua de l’invitation adressée en sa personne à l’Union des Sociétés belges de Gymnastique. Non content de nous écrire que sa Fédération « a toujours cru et croit encore que la gymnastique et les sports sont deux choses contraires et a toujours combattu ces derniers comme incompatibles avec ses principes », il organisa contre notre entreprise une vigoureuse propagande dans les milieux gymnastiques d’Europe, propagande à laquelle M. Callot, en sa qualité d’ancien président des Sociétés françaises de gymnastique, riposta énergiquement. Cela n’empêcha pas du reste les Fédérations italienne et espagnole non plus que les Sociétés de gymnastique de Saint-Pétersbourg et d’Athènes, de se faire représenter. Quant à la Suède, elle était de tous les pays, y compris la France, celui où sans contredit l’idée olympique trouvait le plus de faveur. À la date du 28 mai, Viktor Balk, m’annonçant l’arrivée des lieutenants Bergh et de Drakenberg, réclamait déjà pour Stockholm l’honneur d’abriter une des futures olympiades. En même temps que des délégations de sociétés, je cherchais des adhésions de membres d’honneur. Je chargeai mon ami Ch. Waldstein qui dirigeait alors les fouilles d’Argos de saisir de la question la famille royale de Grèce et je conserve le petit billet jauni écrit sous sa tente d’archéologue le 15 avril et dans lequel il m’annonce que le roi et les princes viennent de le visiter et qu’il a fait connaître au prince royal mon projet, lui demandant d’être membre d’honneur du congrès. Le duc de Sparte accepta ainsi que le roi des Belges, le prince de Galles, le prince royal de Suède, le duc d’Aumale et nombre d’hommes politiques. « Balfour accepte, m’écrivait mon ami Jusserand le 22 mai. Il exprime quelque scepticisme sur la partie olympique du programme mais, quant au reste, il trouve que c’est fort intéressant. »

Il m’avait paru normal que M. Casimir Périer, alors chef du gouvernement, présidât le Congrès en sa qualité de ministre des Affaires Étrangères, c’est-à-dire qu’il l’ouvrit et le clôturât laissant à d’autres, bien entendu, le soin d’en diriger les débats, M. Casimir Périer me l’avait promis. Mais bientôt M. de Bourqueney, me mandant à son cabinet, m’expliqua que le premier ministre apercevait des inconvénients à une présidence si insolite et s’en inquiétait. J’obtins pourtant une nouvelle promesse. Les scrupules eurent toutefois raison de la bonne volonté de M. Casimir Périer, ce que voyant j’abandonnai la partie et me retournai vers la Jean Aicard
m. jean aicard
personnalité la plus en vue de notre diplomatie, le baron de Courcel. Je ne le connaissais pas. Jusserand m’introduisit. « Je n’imagine pas trop quelle sorte de concours je pourrais prêter à M. de Coubertin car rien n’est moins athlétique que moi en ce moment et il y a beau temps que j’ai dit : cæstus artemque repono », répondit M. de Courcel. En effet, il ne s’attendait pas à ce qui lui parut d’abord une déplorable corvée. Mais il se laissa convaincre et, jamais depuis lors, sa confiance et sa sympathie pour notre œuvre ne se sont démenties. Je regarde comme un des hasards favorables de ma vie d’avoir pu compter sur l’appui constant de cet homme exquis, synthèse vivante de l’ampleur de vues jointe au souci raffiné du détail qui distinguaient aux grandes époques la diplomatie française et revivaient en lui de la façon la plus parfaite.

Après les membres d’honneur et les délégations, il nous fallait des fêtes. J’avais décidé de ne rien demander à l’Union pour équilibrer le budget du congrès. Mais encore fallait-il que les charges de ce budget ne dépassassent pas certaines limites. À la différence de ce qui se pratique d’habitude, je voulais que la principale solennité eut lieu le premier jour pour attirer et fixer l’attention publique. L’exécution du fameux hymne à Apollon récemment découvert dans les ruines de Delphes me parut propre à rehausser magnifiquement l’éclat de la séance inaugurale. Théodore Reinach et Gabriel Fauré qui l’avaient transcrit et adapté s’y dévouèrent avec un zèle dont je leur serai toujours reconnaissant. Ce dernier réalisa des prodiges pour que la dépense totale, harpes, chœurs et soli ne dépassât pas 450 francs. Dans ce cadre admirable de l’amphithéâtre de la Sorbonne, l’impression fut immense. Les deux mille personnes présentes écoutèrent dans un religieux silence la mélodie divine qui ressuscitait pour saluer à travers l’épaisseur des âges le renouveau olympique. L’hymne fut précédé d’un magistral discours d’ouverture de M. de Courcel et d’une superbe poésie de Jean Aicard obtenue par l’intermédiaire de Madame Adam laquelle s’entremit par amitié pour moi, car elle était de ceux qui désapprouvaient qu’on « blasphémât » l’antiquité en prétendant la faire revivre. Tout autre était le sentiment de M. Michel Bréal qui suivit attentivement les travaux du Congrès, prononça au banquet de clôture un très éloquent discours et à quelque temps de là m’écrivit pour m’informer qu’il donnerait aux prochains Jeux Olympiques une « Coupe de Marathon ». Ce fut l’origine de tous les « Marathons » qui, à partir de ce moment-là, se multiplièrent dans les deux mondes.

La seconde des grandes fêtes du Congrès fut donnée par le Racing Club. Le 12 avril, M. Michel Gondinet m’écrivait : « Je transmettrai vendredi votre proposition au Comité du Racing. J’avais depuis longtemps la pensée de donner une fête de nuit pour célébrer le chiffre de 500 membres quand nous l’atteindrons. Mais au 21 juin, nous serons bien près de 500… » Par une soirée d’été aussi sereine que nous la pouvions espérer, la pelouse de la Croix Catelan s’embrasa de mille feux. Il y eut des courses à pied et des assauts d’armes aux flambeaux. Un feu d’artifice offert par M. Lejeune termina la fête. Des sonneries de trompes alternaient avec la musique militaire dissimulée dans les bosquets. Les spectateurs furent enthousiasmés. Un lunch au garage de la Société d’Encouragement dans l’île des Loups, un déjeuner donné par M. de Janzé au cercle de Puteaux, un championnat de Longue Paume au Luxembourg furent encore offerts aux congressistes qui, d’autre part, furent reçus au ministère de l’Intérieur par le président du Conseil M. Charles Dupuy, reçus également par M. Champoudry, président du Conseil Municipal et promenés par ses soins à travers l’Hôtel de Ville. Le banquet du dernier soir eut lieu au Jardin d’Acclimatation. J’avais espéré le donner dans le Palmarium et le prince de Wagram, président du Conseil d’administration n’y était pas hostile mais le directeur s’y opposa résolument. Il eut donc lieu dans la grande galerie et fut suivi d’une parade aux lanternes. Des discours furent prononcés par le baron de Courcel, par M. Rabier qui représentait le gouvernement et remit les palmes académiques au professeur Sloane, à MM. de Pallissaux et Marcadet, par MM. Michel Bréal, Bikelas, de Villers, Fabens et Mangeot et par moi-même.

Quelques données sur le Congrès lui-même. La séance inaugurale fut présidée par M. de Courcel, les deux séances plénières par M. de Janzé. Des commissions furent nommées ; l’une pour M. Kortz
m. kortz
alors Proviseur du lycée Janson-de-Sailly
l’étude des questions d’amateurisme eut pour président M. Michel Gondinet, délégué du Racing Club ; pour vice-présidents le professeur Sloane, délégué du New-York Athletic Club et de l’Université de Princeton et M. Todd, délégué de la National Cyclist’s Union d’Angleterre et pour secrétaire rapporteur M. A. Mangeot, délégué du Stade Bordelais ; l’autre pour l’étude des questions olympiques avec M. Bikelas, délégué de la Société Panhellénique de Gymnastique, pour président, le baron de Carayon La Tour, délégué de la Société Hippique française, pour vice-président et M. Maurice Borel, délégué de la Société de Sport de l’île de Puteaux, comme secrétaire-rapporteur. Il y avait quarante-neuf sociétés adhérentes, douze pays représentés et soixante-dix-neuf délégués.

Toutes les séances eurent lieu à la Sorbonne et furent suivies avec une grande assiduité. M. Gréard y parut fréquemment. Les délibérations furent approfondies et calmes. L’unanimité se rencontra pour décider du rétablissement des Jeux Olympiques et de la constitution du Comité International. Ainsi qu’il appert d’un article que j’avais publié dans la Revue de Paris à la veille de l’ouverture du Congrès, c’était pour 1900 qu’avec le vingtième siècle était prévue l’ouverture des modernes olympiades. Ces six années avaient paru nécessaires à la préparation d’une si grande entreprise. Au cours du Congrès l’impression se modifia : six ans, c’était bien long. Pourquoi pas — puisque Paris s’imposait en 1900 — pourquoi pas une autre ville en 1896 ? Mais alors il fallait Athènes. Après m’être enquis auprès de M. Bikelas des ressources que présentait la capitale grecque, nous résolûmes, lui et moi, de la proposer comme site initial. Je retrouve ce petit billet du délégué Hellène, daté du 19 juin : « Je ne vous ai pas vu après notre séance pour vous dire combien j’ai été touché de votre proposition de commencer par Athènes. Je regrette de ne pas avoir pu au moment l’appuyer d’une manière plus chaleureuse ». Ainsi le sort en était jeté. Nous avions deux ans devant nous pour remuer l’Hellade et lui faire accepter et réaliser un projet auquel elle ne se trouvait préparée ni en action — ni même en pensée.