Une femme romanesque

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Calmann Lévy, éditeur (p. 1-154).


UNE
FEMME ROMANESQUE


I

Je voudrais vous montrer mon héroïne, telle que je la vis, — sans l’embellir de la poésie de mes rêves, — sans la déflorer par les douloureuses blessures de la réalité.

Stéphanie avait trente-deux ans. Dans le pays, chacun savait son âge. Elle était mariée depuis dix ans, et cependant on disait encore, comme si c’eût été d’hier : « Elle était bien jolie le jour de son mariage. »

Au fait, pourquoi pas ? Son nez busqué, son menton un peu fort, n’empêchaient pas qu’elle n’eût des traits réguliers et un visage sympathique… Mais c’était l’expression de ce visage, surtout, qui devait être délicieuse, à en juger par ce qui demeurait encore, malgré les dix années de la vie uniforme, froide et lourde d’une toute petite ville de province.

En province, dans un centre de population de six ou huit mille âmes, les années sont-elles de six mois ou de dix-huit ? — Voilà ce que je me suis souvent demandé ; certes, elles sont plus courtes que les années des capitales, si la capacité s’en mesure aux événements et aux émotions dont elles sont remplies ; mais comme elles sont plus longues, si on les évalue à la puissance de l’empreinte qu’elles marquent sur les visages !

On dit — et cela semble naturel — que les émotions et les agitations vieillissent avant l’âge : comment donc voyons-nous les hommes politiques, rompus par la lutte ardente des plus grands intérêts, conserver jusqu’à quatre-vingt-deux ans la jeunesse d’un lord Palmerston ? des artistes, sur la brèche, depuis un demi-siècle, produire, à quatre-vingts ans passés, la musique fraîche et pimpante d’un Auber ! — Comment voyons-nous tant de ces femmes du monde, brûlées depuis l’adolescence jusqu’à l’âge mûr au feu des lustres, épuisées par les veilles, harassées par les obligations constantes d’une vie de parade, plus jeunes, à cinquante ans, que tant de femmes de province à trente-cinq ? Les ressorts humains, physiques et moraux, seraient-ils comme des engrenages qui se conservent par l’action et qui se détruisent par la rouille ? Les femmes seraient-elles des plantes de serre chaude qu’une température à haute pression fait fleurir et conserve, et que l’atmosphère tempérée de la province arrête dans leur essor, étiole ou atrophie dans leur épanouissement ?

Donc, Stéphanie avait trente-deux ans, deux enfants et un mari, notaire. Sur son front, à ses tempes, des plis marqués témoignaient qu’en passant, le temps, ce rude sculpteur, appuyait son ciseau d’une main ferme et impitoyable ; et, par un singulier contraste, dans ses yeux brillait, avec un éclat étrange, l’incompressible flamme de la jeunesse. Ses joues étaient couperosées ; mais sa voix argentine et fraîche avait les inflexions d’une voix de jeune fille. Parfois elle semblait accablée sous le poids d’une mélancolie sans espoir, parfois elle avait des éclats de gaieté comme un enfant.

Elle se coiffait tout simplement, en longs bandeaux lisses rejoignant le chignon pour faire un gros nœud. D’ailleurs avait-elle les cheveux blonds ou bruns ? les yeux bleus ou noirs ? Lecteur, je ne vous en dirai rien : devinez. — Je vous ai prévenu qu’on l’avait trouvée bien jolie, le jour de son mariage, et que sa beauté résidait surtout dans l’expression de sa physionomie. Mettez, si vous voulez, qu’elle avait les cheveux châtains, les yeux à reflets changeants et lumineux, les dents blanches, les lèvres écarlates, les mains fines et la taille souple… Au vrai, je ne m’en souviens pas.

Pourtant, lorsque je la vois repasser dans mes souvenirs, c’est comme quelque chose de gracieux et de sympathique : non comme une beauté, mais comme un charme, et, certainement, il y a dix ans, c’eût été, pour tout le monde, la femme la plus remarquable d’Aubeterre.

D’ailleurs, elle dessinait, elle était musicienne, elle appartenait à une famille riche et elle avait été élevée au couvent, à Angoulême. Que l’on me demande comment et pourquoi elle se trouvait exilée dans un chef-lieu de canton et mariée à un notaire, je répondrai que toutes les filles bien élevées ne peuvent pas habiter Paris, Lyon, Marseille ou Bordeaux, ni même Blois, Poitiers ou Clermont… et qu’un brave notaire, muni d’une bonne étude, est regardé par toutes les familles comme un parti sortable. Stéphanie aurait peut-être pu épouser un négociant de Lhoumeau, le faubourg commerçant d’Angoulême, un propriétaire campagnard, un avoué, un huissier, etc… Mais pourquoi pas un notaire ? Il vaut mieux être le premier dans un village que le second à Rome, pensait César.

Peut-être Stéphanie se fit-elle ce raisonnement lorsqu’on lui présenta maître Audibert ; peut-être pensa-t-elle tout simplement qu’elle gênait son père, veuf depuis longues années, et qu’elle ferait bien de quitter le plus tôt possible le toit paternel pour le toit conjugal… Peut-être trouva-t-elle que, le mariage étant le but de toutes les jeunes filles, il fallait y arriver par le plus court chemin… ou bien, peut-être, ayant déjà heurté ses rêves aux écueils de la réalité, renonça-t-elle soudain aux illusions pour embrasser la vie telle qu’elle se présentait… N’importe !

Maître Audibert lui fit faire un voyage de quelques jours à Paris, pour son cadeau de noces, puis l’emmena chez lui, à Aubeterre, dans sa maison.

Maître Audibert était un bon mari ; la maison, bien que située dans la ville basse, était une jolie maison.


II


À vrai dire, maître Audibert était bien assez riche pour se faire bâtir une belle maison en pierres de taille blanches, dans la ville haute : et, si Stéphanie l’avait voulu, certainement il l’aurait édifiée, — à la grande admiration de ses concitoyens. Mais Stéphanie se gardait bien de le vouloir ! Elle aimait tant sa pittoresque maison de vieille pierre dorée au soleil, au toit plat, au jardin en terrasse surmontant la vallée de la Dronne ! sa maison bordée de vignes qui couraient en festons sur les tuiles rouges ou les murs fauves ; son jardin planté de figuiers aux larges feuilles sombres et de grenadiers aux fleurs éclatantes, et la vue magnifique qu’on avait de sa terrasse, sur la campagne, sur la rue creuse comme un torrent, sur les tours écroulées du château des d’Esparbès de Lussan, sur la crypte effondrée de l’église Saint-Jean, sur le vieux cimetière tout flambant de lierres centenaires et de clématites folles, d’herbes touffues et de fleurs sauvages.

Qui sait ? cette maison, qu’on lui montra un jour en passant, fut peut-être la seule séduction du notaire ? Pourquoi pas ? Une fois que Stéphanie eut compris qu’elle ne devait pas s’attendre à trouver dans la vie réelle ce mari des contes de fées que rêvent toutes les jeunes filles au sortir du couvent, mais un mari tout prosaïque, surveillant des vignerons, vendant des eaux-de-vie, dirigeant une papeterie ou rédigeant des formules barbares sur papier timbré ; que l’amour était un beau rêve et le mariage une grande école de résignation, qu’il fallait enfin marcher tout droit devant soi dans les sentiers battus, elle en conclut qu’au moins il ferait bon enfermer cette vie monotone dans un cadre poétique et donner à son imagination la carrière que la destinée refusait à ses espérances. Elle se dit que le choc journalier des objets extérieurs avait, après tout, une grande influence sur l’heur ou le malheur d’une existence vouée à tourner perpétuellement dans un cercle étroit, et que, là, dans cette maison ensoleillée, en regardant ce large décor où les mélancolies des ruines se mariaient aux prodigalités d’une nature luxuriante et aux gais horizons d’une fertile contrée, elle sentirait moins que partout ailleurs l’ennui lourd et la morne solitude.

Avec tant de choses, elle pourrait causer, là ! Il lui semblait voir en perspective tout un avenir d’interminables épanchements. Mais, au contraire, si elle se figurait un mari vulgaire, un mari tel que ceux qui lui avaient été présentés jusqu’alors, dans une maison sombre donnant dans une rue étroite, vis à vis une autre maison pareille… oh ! alors ! le frisson lui prenait, et elle regrettait les cloîtres uniformes qui enfermaient la cour du couvent.

Non, non ! Stéphanie ne voulait point de maison neuve dans la ville haute. Mais, une fois mariée, elle s’installa de son mieux dans la vieille maison de la famille Audibert, et s’y fit un nid simple, harmonieux et sympathique, en songeant qu’elle devait s’y tenir sa vie durant. Le grand salon à boiseries grises, qui était au rez-de-chaussée sur la terrasse, et au second sur la rue, fut meublé de vieux mais solides fauteuils en tapisserie, de rideaux de perse, de tables à jeu, de consoles et de jardinières. Dans l’embrasure de la fenêtre dont la vue était la plus vaste et la plus pittoresque, la maîtresse du logis mit sa table à ouvrage et sa bergère. Un piano occupa le panneau principal et une bibliothèque s’éleva au-dessus du piano. Une glace encadrée dans la boiserie fit face à celle de la cheminée. Une couple de portraits de famille et de jolies gravures d’après Chardin et Greuze furent çà et là suspendus aux panneaux. Un chevalet dans un coin, un pupitre à musique dans un autre, annoncèrent que la jeune femme ne comptait pas renoncer aux distractions que les arts lui permettaient de prendre.

Plus tard, la broderie sur la table à ouvrage fut remplacée par de petits bas tricotés, des brassières, des béguins. Puis, des chevaux de carton, des poupées de porcelaine et des polichinelles pailletés, qui se promenaient entre les jambes du pupitre et du chevalet, racontèrent que, dans la vieille maison, de petits enfants étaient nés.


III


Les années s’écoulèrent une à une, ne changeant pas grand’chose à cet intérieur. Une ride fine au front de la jeune femme, un jeu de patience remplaçant un chien à musique, témoignaient seulement que les printemps s’ajoutaient les uns aux autres, et que, de bébés, les enfants passaient écoliers.

Mais le piano, si souvent ouvert pendant les premiers temps du mariage, restait maintenant fermé jusqu’à une semaine tout entière. Stéphanie était absorbée par mille détails qu’elle eût été embarrassée de classer dans ses prévisions ou dans ses souvenirs. Elle se disait avec dépit : « Je ne fais rien ! » et elle n’avait pas un instant à donner au délassement, tiraillée qu’elle était, en tous sens, par ses obligations de mère et de ménagère. Le chevalet, par la même raison, restait plus abandonné encore dans son coin : servant de support à des cartons à dessin poudreux, et de patère à la capeline de madame et au chapeau de paille de monsieur.

Les journées, en province, se remplissent on ne sait comment, mais elles se remplissent. On dirait que c’est de néant. D’abord, on se demande avec angoisse comment on fera pour tuer le temps, et, peu à peu, soit qu’une sorte d’engourdissement vous dissimule la longueur des heures, soit que les infiniment petits de la vie se multiplient ou prennent des proportions imprévues, ces journées, que l’on entrevoyait longues et vides, se trouvent courtes et comblées.

Mais qu’importe ? Si elle avait eu des loisirs, Stéphanie aurait-elle donc, au bout de huit ou dix ans de ménage, répété les mêmes morceaux, reproduit les mêmes paysages à la mine de plomb ?

Sa maison, du haut jusqu’en bas, était ornée de bouquets de fleurs qu’elle avait peints et de vues du voisinage qu’elles avait prises. Maître Audibert, d’abord ravi et orgueilleux du talent de sa femme, n’y prenait plus garde à présent, et passait dix fois dans une pièce sans voir qu’un nouveau tableau y était suspendu.

Son piano, accommodé à de longs intervalles par un praticien maladroit, ne tenait plus l’accord ; et lorsqu’elle s’efforçait, malgré tout, d’en faire vibrer les touches sous ses doigts raidis, il arrivait fréquemment à maître Audibert de s’endormir et d’accompagner la musique de Donizetti, — oui, celle-là même ! — d’un ronflement monotone ! Ou bien, les enfants l’interrompaient par leurs jeux ou leurs cris ; — ou bien Thisbé, la chienne bien-aimée du notaire, qui du matin au soir, le suivait à trois pas, lorsqu’il marchait, et dormait entre ses jambes, lorsqu’il était assis, se mettait à hurler.

En vain la société d’Aubeterre, justement fière d’une jeune femme remplie de grâce et de talents, encensait-elle madame Audibert de louanges stéréotypées : Stéphanie ne se sentait plus le courage d’affronter l’indifférence morne qu’elle sentait sous les éloges des étrangers comme sous le silence de son mari.

Au bout de tout effort, la nature humaine a besoin de voir un but. « Pour qui ? » ou « Pourquoi ? » telles sont les deux questions sans cesse répétées au-devant des choses, par notre raison ou par notre instinct, et, ni à l’une ni à l’autre, Stéphanie n’entendait de réponse en son cœur.

Toutefois, si cette absence de stimulant la décourageait de poursuivre ses études et d’exercer ses talents acquis, elle ne lui faisait pas encore connaître l’énervante désespérance. C’est qu’au demeurant, comme je l’ai dit plus haut, Stéphanie était occupée, et que les soins multipliés que réclamaient son ménage et ses enfants ne lui laissaient pas le loisir de se plonger dans la contemplation de ses misères intimes.

De son mari, elle n’avait point à se plaindre ; de ses enfants, fille et garçon venant bien et donnant de bonnes espérances, elle n’avait qu’à se louer. Pourquoi donc eût-elle accusé la Providence ?

J’ai dit aussi, plus haut, qu’elle s’était mariée sans trop d’illusions et que son nid lui plaisait. Pourquoi donc se fût-elle trouvée injustement déshéritée ?

Donc, elle menait la vie tout droit, sans penser, surveillant ses lessives, qui étaient les plus blanches d’Aubeterre et qu’elle aimait à voir, de sa fenêtre, étendues dans les prés qui bordent la Dronne ; aidant à la confection des conserves et des confitures qu’elle voulait au goût de maître Audibert, et, s’il était possible, meilleures que celles de mesdames telle ou telle ; apprenant à ses enfants à lire, à compter, à solfier la gamme et à réciter des fables de La Fontaine ; cousant, pour leur entretien, autant qu’il était permis à une dame riche, de la première société de la ville et qui devait faire travailler les ouvrières ; se promenant avec eux sur le cours ou au bord de la rivière ; rendant ou recevant quelques visites, et, le soir, faisant la partie de whist ou de besigue, à moins qu’elle n’allongeât de quelques rangées de points une Page:Cadiot - Une femme romanesque Adrien Malaret L Exemple.pdf/32 Page:Cadiot - Une femme romanesque Adrien Malaret L Exemple.pdf/33 Page:Cadiot - 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— Nous venons vous surprendre dans votre cabinet de travail, monsieur Maxence…

— Peste ! dit le mari, en s’essuyant tout essoufflé, vous perchez sur les rochers comme les aigles…

Stéphanie aussi semblait essoufflée ; et pâle, les yeux voilés, elle s’était assise tout de suite, de peur de tomber.

D’abord Maxence, trompé dans ses espérances, blessé à l’improviste par l’apparition du mari de Stéphanie, eut un mouvement de dépit et de colère. Mais il ne s’abandonna pas longtemps, en aveugle, à l’impulsion de ses instincts.

— Pourquoi ? se demanda-t-il.

Car, il n’en pouvait douter… il le sentait, Stéphanie l’aimait. L’autre soir, elle était venue invinciblement attirée par l’appel de son amour… et, lorsque, en s’éloignant, elle lui avait donné la fleur de la Passion et lui avait dit : « Gage de fraternelle amitié, » il se souvenait bien que la voix de la pauvre créature était émue et que sa main tremblait… Oui, oui, il était aimé… — Alors… pourquoi ?

Il la regarda et la vit brisée, à bout de forces, retenant ses larmes et comprimant son cœur… et il comprit !

Il comprit que cette humble mère de famille, que cette obscure notaresse de chef-lieu de canton, était une héroïne, et venait de faire, en gravissant ce rocher au bras de son mari, une action sublime : qu’en se sentant éprise et invinciblement attirée au rendez-vous, elle avait, en amenant son mari là, voulu lui dire :

« Vous voyez que ce jeune homme s’est établi dans cette retraite sauvage et solitaire, en face de mes fenêtres… et, par conséquent, si le soir vous me rencontriez glissant parmi les rochers, hantant les ruines, comme un fantôme… vous sauriez, à n’en pas douter, que je vais le voir et que je suis une femme perdue. »

Et que, par cette déclaration muette, mais en même temps précise, claire et irréparable, elle s’interdisait à jamais une seconde faiblesse : elle mettait au devant de la tentation l’impossible pour barrière.

Alors, comme il avait l’âme accessible au sentiment des grandes choses, il admira l’honnête femme. Son amour s’épura en un instant. Il enveloppa Stéphanie d’un regard plein de dévouement et de respect, et lui dit :

— Merci, madame, d’être venue me voir dans le nid que je m’étais arrangé ici, — non point du tout parce que je suis un aigle, comme le dit malicieusement monsieur votre mari, mais parce que je voulais, dans cette solitude, travailler et me recueillir ; que j’aimais à voir votre maison, votre jardin et votre fenêtre, — le ciel plus près de moi, la terre en bas…

Sa voix tremblait, il ajouta :

— Je me suis dit en contemplant toutes ces choses, que la vie a ses devoirs comme ses joies, et qu’il est, à l’énergie humaine, un autre but que le plaisir… — Voulez-vous recevoir mes adieux ? Demain, je retourne chez mon père. — Mais, si vous étiez bien bonne, vous me permettriez de vous dédier mon prochain roman ?