Utilisateur:Epigeneticist/Histoire des animaux-tome3

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LIVRE HUITIÈME



CHAPITRE PREMIER

Des actes et de la vie des animaux ; comparaison des animaux et de l’homme ; dans son enfance, l’homme n’est guère qu’un animal ; gradation des êtres ; passage presque insensible des uns aux autres ; animaux équivoques qui sont presque des plantes ; l’éponge ; gradation analogue dans les fonctions de la vie ; la plante ne fait que se reproduire ; quelques animaux en sont là également ; apparition de la sensibilité ; production et alimentation des jeunes.


§ 1[1]. Tout ce qui concerne l’organisation entière des animaux et leur reproduction est tel qu’on vient de le voir. Leurs actes, et leur genre de vie, avec leurs caractères et leurs modes d’alimentation, n’offrent pas moins de différence. Dans la plupart des animaux autres que l’homme, il se montre aussi des traces des facultés diverses de l’âme, qui se manifestent plus particulièrement dans l’espèce humaine. Ainsi, la facilité à se laisser dompter et la résistance sauvage, la douceur et la méchanceté, le courage et la lâcheté, la timidité et l’audace, la colère et la ruse, sont dans beaucoup d’entre eux autant de ressemblances, qui vont même jusqu’à reproduire la pensée et l’intelligence, comme nous l’avons dit en traitant des parties de l’animal. § 2[2]. Tantôt la différence est du plus au moins des animaux à l’homme, ou de l’homme à bon nombre d’animaux, certaines de ces qualités prédominant dans l’homme et certaines autres prédominant, au contraire, dans l’animal. Tantôt la différence porte sur une simple analogie ; et par exemple, ce que l’art et la science sont dans l’homme, telle autre faculté naturelle du même genre remplit le même office chez les animaux. § 3[3]. Ces rapprochements sont surtout frappants quand on regarde ce que sont les enfants, et cette période de la vie humaine. En eux, on voit déjà comme les traces et les germes des qualités qu’ils doivent avoir plus tard. Mais à ce moment, l’âme de l’enfant ne diffère en rien, on peut presque dire, de celle des animaux ; et par conséquent, il n’y a rien de faux à supposer qu’il y a, dans le reste des animaux, des choses qui sont, ou identiques, ou voisines, ou analogues à celles qu’on observe dans l’homme.

§ 4[4]. Ainsi, la nature passe, par des degrés tellement insensibles, des êtres sans vie aux animaux, que la continuité nous cache la commune limite des uns et des autres, et qu’on ne sait auquel des deux extrêmes rapporter l’intermédiaire. Après la classe des êtres inanimés, vient d’abord celles des plantes ; et entre les plantes, les unes comparées aux autres semblent participer davantage à la vie. Mais cette classe entière d’êtres paraît presque animée comparativement à d’autres corps, en même temps qu’elle paraît presque inanimée quand on la compare à la classe des animaux. § 5[5]. D’ailleurs, ainsi qu’on vient de le dire, le passage des plantes aux animaux est si bien sans lacune que, pour certains êtres qu’on trouve dans la mer, ou est embarrassé de savoir si ce sont des animaux ou des plantes. Ces êtres poussent sur d’autres corps, auxquels ils s’attachent ; et quand on les en sépare, ils périssent pour la plupart ; par exemple, les pinnes s’attachent à des corps étrangers, et les solènes, une fois détachés, ne peuvent plus vivre. § 6[6]. On peut ajouter que, d’une manière générale, la classe tout entière des testacés ressemble beaucoup à des plantes, si on la compare aux animaux qui se meuvent et qui marchent. Et quant à la sensibilité, il n’y en a aucune apparence chez quelques-uns de ces êtres ; chez d’autres, elle y est à peine tracée. Les uns ont un corps dont la nature est charnu, comme ceux qu’on appelle les téthyes et les acalèphes, ou orties de mer. L’éponge produit absolument l’effet d’une plante. Mais toujours c’est, par une différence très légère, que les uns comparés aux autres semblent avoir de plus en plus la vie et le mouvement.

§ 7[7]. La même gradation se retrouve dans les actes et les fonctions de la vie. Les plantes ne semblent pas avoir d’autre fonction que de reproduire un être semblable à elles ; et c’est ce qu’on voit dans toutes les plantes qui viennent de graine. De même, il y a des animaux où l’on ne peut découvrir absolument aucune autre fonction que celle de se reproduire. C’est même là ce qui fait que ces fonctions sont communes à tous ces êtres. § 8[8]. Mais dès que la sensibilité se manifeste, la vie des animaux présente les plus grandes différences, en ce qui regarde, soit l’accouplement, qui leur cause un si vif plaisir, soit la parturition, soit l’alimentation des petits. Les uns, aux saisons marquées, se reproduisent simplement comme des plantes, par les moyens spéciaux à chacun deux. D’autres s’occupent, en outre, d’élever leurs petits, avec la plus grande peine : mais une fois cette œuvre achevée, ils se séparent d’eux et n’ont plus la moindre relation. D’autres encore qui sont plus intelligents, et qui semblent avoir plus de mémoire et plus de propension à la société, restent avec leurs petits. § 9[9]. Ainsi, une partie de leur vie s’applique à tout ce qui amène la reproduction des jeunes ; et une autre partie consiste à nourrir les petits et à les élever. Tous leurs soins et toute leur existence se partagent entre ces deux fonctions. La nourriture donnée aux petits diffère surtout par les matières qui la composent ; car c’est de cette nourriture que chaque animal tire tout son développement marqué par la nature ; or ce qui est dans l’ordre de la nature plaît toujours ; et tous les animaux recherchent le plaisir qui leur est naturel.


CHAPITRE II

Division de la plupart des animaux en terrestres et en aquatiques ; trois nuances distinctes ; les animaux amphibies ; organisation très extraordinaire du dauphin et des cétacés à évent ; difficulté de cette classification ; définition plus précise de ce qu’on doit entendre par animal aquatique ; c’est surtout celui qui respire dans l’eau et qui y trouve sa nourriture ; le cordyle et sa constitution particulière ; nature étrange des amphibies ; influence considérable du moindre changement dans le corps de l’animal ; exemple de la castration ; prévoyance de la nature.


§ 1[10]. On peut diviser encore les animaux selon les lieux qu’ils habitent ; les uns vivent sur terre, les autres vivent dans l’eau. § 2[11]. Ici, la différence peut être de trois sortes. D’abord les uns aspirent l’air ; puis, les autres aspirent l’eau ; ce qui fait qu’on appelle les uns des animaux terrestres, et les autres des animaux aquatiques. D’autres qui ne reçoivent ni l’air ni l’eau, mais qui, par leur organisation naturelle, trouvent le suffisant mélange de refroidissement dans l’un de ces deux éléments, s’appellent encore terrestres et aquatiques, bien qu’ils ne respirent pas l’air et ne reçoivent pas l’eau. D’autres enfin sont appelés aquatiques ou terrestres, parce qu’ils trouvent leur nourriture, ou passent leur vie, dans l’un ou l’autre de ces éléments. Car beaucoup d’animaux qui respirent l’air et qui ont leurs petits sur terre, tirent leur subsistance des lieux aquatiques, et passent la plus grande partie de leur existence dans l’eau. Ces animaux sont les seuls, entre tous, qui semblent jouir des deux existences à la fois ; et l’on peut indifféremment les classer parmi les animaux terrestres, ou parmi les animaux aquatiques.

§ 3[12]. Parmi les animaux qui respirent l’eau, il n’en est pas un qui marche sur terre, ou qui vole dans l’air, ou qui tire sa pâture de la terre. Au contraire, parmi les animaux qui marchent sur le sol et qui aspirent l’air, il y en a beaucoup qui tirent leur nourriture de l’eau ; et quelques-uns en ont tellement besoin qu’ils ne peuvent plus vivre quand ils en sont isolés et privés : par exemple, les tortues qu’on appelle tortues de mer, les crocodiles, les hippopotames et les phoques ; et parmi les animaux plus petits, les tortues de terre et l’espèce des grenouilles. Tous ces animaux suffoquent, s’ils restent quelque temps sans respirer. Ils font leurs petits et les élèvent sur la terre à sec, ou du moins sur le bord de la terre sèche ; mais leur vie se passe dans l’eau.

§ 4[13]. Le plus singulier de tous les animaux, c’est le dauphin et ceux qui peuvent lui ressembler, parmi les êtres qui habitent les eaux, et aussi le plus singulier parmi les cétacés, constitués ainsi que le sont la baleine et les autres poissons à évent, comme elle. § 5[14]. Il n’est pas facile de classer uniquement chacune de ces espèces, ni parmi les animaux terrestres, ni uniquement parmi les animaux aquatiques, si l’on doit classer comme animaux terrestres ceux qui aspirent l’air, et comme animaux aquatiques ceux qui naturellement aspirent l’eau. Les cétacés à tuyau participent en effet de ces deux classes. Ils respirent l’eau et la rejettent par leur évent ; et ils respirent l’air par un poumon. Ils ont en effet cet organe, et ils respirent par là. Aussi, le dauphin, quand il se trouve pris dans les filets, ne tarde pas à être suffoqué, faute de respiration. Hors de l’eau, il vit encore fort longtemps, grondant et gémissant, ainsi que le font tous les animaux qui respirent. Enfin, quand le dauphin dort, il met son museau hors de l’eau, afin de pouvoir respirer. § 6[15]. Comprendre ces mêmes animaux dans les deux divisions à la fois, aquatique et terrestre, ce serait absurde, puisque ce sont deux classes contraires. Mais tâchons de définir l’animal aquatique encore plus précisément. Il y a des animaux qui aspirent l’eau et qui la rejettent par la même cause qui fait que les animaux qui respirent aspirent l’air et le rejettent ; c’est pour se rafraîchir. D’autres animaux en font autant, non plus pour respirer, mais pour se procurer leur nourriture, parce que, ne la pouvant trouver que dans le liquide, il leur faut nécessairement tout à la fois aspirer ce liquide, et, après l’avoir aspiré, le rejeter par un organe spécial. § 7[16]. Ceux donc des animaux qui se servent de l’eau pour respirer, comme les autres se servent de l’air, ont des branchies ; d’autres, qui sont des animaux pourvus de sang, ont un tuyau, parce qu’ils prennent le liquide pour se nourrir. Il en est encore de même pour les mollusques et les crustacés, qui ne reçoivent l’eau qu’en vue de leur nourriture. § 8[17]. Il faut classer dans cette seconde espèce d’animaux aquatiques, à cause de l’organisation de leur corps et à cause de leur genre de vie, tous ceux qui, aspirant l’air, vivent néanmoins dans l’eau, ou tous ceux qui aspirent le liquide et ont des branchies, et qui vont à terre pour y prendre leur pâture. On ne connaît jusqu’à présent qu’un seul animal ainsi organisé ; c’est celui qu’on nomme le Cordyle. Il n’a pas de poumon, mais des branchies ; il marche sur terre, et il y prend sa nourriture. Il est quadrupède, comme étant, par nature, fait pour marcher.

§ 9[18]. On dirait que la nature de tous ces animaux a été en quelque sorte renversée, de même qu’on voit quelques animaux mâles avoir l’air de femelles, et des femelles avoir l’air de mâles. Il suffit d’une différence légère, dans de très petits organes, pour que des animaux offrent une différence considérable dans la constitution générale de leur corps. § 10[19]. Ceci se voit avec pleine évidence sur les animaux qu’on châtre ; la partie qu’on mutile est très petite, et l’animal passe sur-le-champ à la nature de la femelle. De ce fait, on peut conclure avec certitude que, dans la constitution première de l’animal, il suffit du plus mince changement matériel, qui est d’origine, pour faire ou une femelle ou un mâle ; et si ce rien est enlevé complètement, cela suffit pour que l’animal ne soit plus ni l’un ni l’autre. § 11[20]. Par conséquent aussi, l’animal peut devenir terrestre et aquatique, dans les deux sens, à la suite d’un changement dans les parties les plus ténues. Tels animaux deviennent des animaux terrestres ; tels autres deviennent aquatiques ; les uns ne peuvent pas avoir les deux existences ; les autres peuvent les avoir toutes deux, parce que, dans leur organisation, ils ont, dès leur naissance, participé quelque peu de la matière dont ils font plus tard leur nourriture ; car tout ce qui est naturel aux animaux est fait pour leur plaire, ainsi qu’on l’a déjà remarqué plus haut.


CHAPITRE III

Conséquences de la division générale des animaux ; leur constitution et leur manière de vivre ; les testacés se nourrissent de la partie potable de l’eau de mer ; expérience qui prouve la réalité de cette partie potable ; testacés immobiles ; les acalèphes ; leur nourriture ; testacés mobiles, carnivores et herbivores ; tortues de mer ; leurs mâchoires puissantes ; les langoustes ; leur nourriture ; leur marche ; leurs guerres avec les polypes et les congres, et aussi entre elles ; les mollusques, les petits calmars et les seiches ; leur nourriture.


§ 1[21]. Les animaux se divisent en aquatiques et terrestres, à trois points de vue différents : l’un, parce qu’ils aspirent l’air ou l’eau ; l’autre, parce que leurs corps sont constitués d’un certain mélange ; et le troisième, parce qu’ils se nourrissent de certaine manière. La vie de chacun d’eux est la suite de ces mêmes divisions. Ainsi, c’est à leur constitution et à leur mode de se nourrir que se rapportent certains faits, selon que ces animaux aspirent l’air ou l’eau ; pour tels autres faits, ce n’est qu’à leur constitution et à leur manière de vivre toutes seules qu’ils se rapportent. § 2[22]. Ainsi ceux des testacés qui ne se meuvent point se nourrissent de la partie potable de l’eau de mer. Cette partie potable est filtrée dans les parties solides de leur corps, parce que la coction la rend plus légère que l’eau de mer, et que l’eau potable retrouve sa première composition. Qu’il y ait dans l’eau de mer une portion qui soit potable, et qu’elle puisse en être isolée, c’est ce dont on ne saurait douter ; et l’on a pu s’en convaincre déjà par l’expérience suivante. Si l’on fait un petit vase de cire bien légère, et que l’axant bien fermé pour qu’il reste vide, on le fasse descendre au fond de la mer, il suffit d’une nuit et d’un jour pour qu’il se remplisse d’une certaine quantité d’eau : et cette eau est potable.

§ 3[23]. Les acalèphes (ou orties de mer) se nourrissent des petits poissons qui leur tombent dans la bouche, laquelle est placée au milieu de leur corps, ainsi qu’on peut le voir sur les plus grandes. Les acalèphes (ou orties de mer) ont, comme les huîtres, un canal par où la nourriture est éliminée au dehors. Ce canal est placé en haut ; car l’acalèphe est en quelque sorte la partie charnue de l’intérieur des huîtres, et c’est le rocher qui lui sert de coquille. Les lépades, au contraire, se détachent du rocher où elles vivent, et vont chercher leur pâture. § 4[24]. Ceux des testacés qui se meuvent sont tantôt carnivores, et ils se nourrissent de petits poissons comme la pourpre, qui mange de la chair et qu’on prend avec des amorces de ce genre ; tantôt ils se nourrissent des plantes que la mer produit. § 5[25]. Les tortues de mer se repaissent de coquillages. Aucun animal n’a des mâchoires aussi fortes, puisque quel que soit l’objet qu’elles saisissent, serait-ce une pierre ou toute autre matière aussi dure, elles le brisent et le dévorent. Elles sortent aussi de l’eau pour manger de l’herbe ; mais elles souffrent beaucoup ; et souvent même elles périssent, lorsque, étant à terre, elles sont toutes desséchées par les rayons du soleil, et qu’elles ne peuvent plus se replonger aisément dans l’eau. § 6. Les crustacés se nourrissent de la même façon ; ils mangent aussi de tout ; pierres, bois, algues, excréments même, ils mangent tout ce qui se présente, comme font les crabes de rochers ; et ils mangent aussi de la chair. § 7[26]. Les langoustes ont raison même de très gros poissons ; et il arrive entre ces animaux de singulières péripéties. Ainsi, les polypes sont plus forts que les langoustes, tandis qu’ils ne craignent pas les huîtres ; et les langoustes craignent si bien les polypes que, si dans le même filet elles les sentent près d’elles, la peur les tue. Mais les langoustes sont, à leur tour, plus fortes que les congres ; car à cause de l’aspérité générale des langoustes, les congres ne peuvent les enlacer. Les congres dévorent les polypes, qui ne peuvent jamais les saisir, parce que leur peau est trop lisse. D’ailleurs, tous les mollusques sont carnivores.

§ 8[27]. Les langoustes se nourrissent des petits poissons auxquels elles donnent la chasse, autour de leurs nids. C’est dans les hautes mers qu’elles s’établissent aux lieux les plus inégaux, et les plus pierreux, qu’elles puissent trouver. C’est là qu’elles se plaisent à nicher. Quand elles ont saisi quelque proie, elles la portent à leur bouche avec leur double pince, comme le font les crabes. § 9[28]. Les langoustes marchent naturellement en avant, lorsque aucune crainte ne les trouble, et elles jettent leurs cornes de côté ; mais dès qu’elles ont quelque peur, elles vont à reculons ; et elles se défendent de loin. Elles se battent aussi les unes contre les autres à la manière des béliers, levant leurs cornes et se frappant. Parfois aussi, on les voit se rassembler entre elles et former un vrai troupeau. Voilà comment vivent les crustacés. § 10[29]. Parmi les mollusques, les petits calmars et les seiches s’emparent même de gros poissons. Les polypes ramassent surtout des coquillages, dont ils tirent la chair pour s’en nourrir ; aussi, ceux qui en font la pèche reconnaissent le lieu de leur retraite aux coquilles qui l’entourent. D’ailleurs, il n’est pas vrai que les polypes mangent leur propre corps, ainsi qu’on le prétend : mais ce qui est vrai, c’est qu’il y en a qui ont les pattes dévorées par les congres.


CHAPITRE IV

De la nourriture des poissons ; tous ils dévorent leurs œufs ; poissons carnivores et herbivores : ils se dévorent tous les uns les autres ; certains poissons mangent de la vase : le boniton ; le muge : autres exemples ; seul poisson qui rumine à la façon des quadrupèdes ; manière spéciale dont les cétacés saisissent leur proie en se renversant ; les anguilles : leur nourriture ; manière de les conserver dans les viviers : il faut toujours de l’eau très pure ; anguilles du Strymon : les anguilles vivent encore plusieurs jours hors de l’eau ; il faut beaucoup d’eau pour garder les anguilles : durée de leur vie. Résumé sur la nourriture des poissons.


§ 1[30]. Tous les poissons se nourrissent de leurs œufs aux époques régulières où ils en ont. Mais pour le reste de leur nourriture, ils n’ont pas tous la même. Tantôt, ils ne sont que carnivores, comme les sélaciens, les congres, les serrans, les thons, les loups, les sinodons, les bonitons, les orphos et les murènes. Les surmulets se nourrissent d’algues, d’huîtres et de vase ; et ils sont carnivores aussi. Les capitons se nourrissent de vase ; le Dasquille se nourrit de vase ou de fiente. § 2[31]. Le scare (ou perroquet de mer) se nourrit d’algues, ainsi que la Queue-noire ; la saupe se nourrit d’algue en même temps que de fiente ; elle mange encore du Prasium ; et c’est aussi le seul poisson qu’on amorce avec de la coloquinte. § 3[32]. Tous les poissons se dévorent entre eux, surtout les congres ; il faut excepter le muge. Le capiton et le muge sont les seuls à n’être point carnivores ; et la preuve, c’est qu’on n’a jamais trouvé rien de pareil dans le ventre de ceux qu’on prend, et qu’on ne se sert jamais pour les amorcer de chair d’animaux, mais de pâte. Le muge de toutes espèces se nourrit d’algues et de sable. § 4[33]. Des deux capitons, l’un, qu’on appelle quelquefois la grosse-lèvre, vit près de terre ; l’autre s’en éloigne ; c’est le Péréas, qui ne se nourrit que de la mousse que lui-même produit. Aussi est-il toujours vide. Les bonitons mangent la vase ; c’est ce qui les rend lourds et dégoûtants ; ils ne mangent jamais les autres poissons ; et comme ils ne vivent que dans la vase, ils sortent souvent de l’eau, pour se laver de l’ordure. § 5[34]. Aucun autre poisson ne mange son frai ; aussi pullulent-ils ; mais quand ils sont gros, les autres poissons, et surtout l’acharnas, les dévorent. Le muge est le plus vorace des poissons : il est insatiable ; son ventre est toujours gonflé ; aussi ce poisson n’est bon que quand il est à jeun. Quand il a peur, il cache sa tête, croyant cacher ainsi le reste de son corps. Le sinodon est carnivore, et il mange les mollusques. Ces poissons, ainsi que le serran, laissent souvent tomber leur estomac par la bouche, quand ils poursuivent de plus petits poissons, parce que l’estomac de ces poissons est près de la bouche, et qu’ils n’ont pas d’oesophage.

§ 6[35]. Ainsi qu’on l’a dit plus haut, il y a des poissons qui ne sont que carnivores, comme le dauphin, le sinodon, la dorade, les sélaciens-poissons, et les mollusques. Il est aussi des poissons qui, pour la plupart, se nourrissent de boue et d’algues, de mousse et de ce qu’on appelle le Caulium, et d’autres plantes marines, comme le font le phycis, le goujon et les saxatiles. Le phycis ne mange en fait de chair que celle des carides ou squilles. § 7[36]. Souvent, nous le répétons, les poissons se dévorent entre eux ; les plus grands mangent les plus petits ; et ce qui prouve bien qu’ils sont carnivores, c’est qu’on emploie de la viande pour les amorcer. Le capiton, le thon et le loup mangent presque toujours de la chair ; mais ils mangent aussi des algues. Le sarge mange le surmulet, quand celui-ci vient à sortir de la boue, dans laquelle il s’enfouit ; le sarge se jette alors sur le surmulet, et le saisit en empêchant les poissons plus faibles d’en faire autant que lui. Le poisson qu’on appelle le scare (ou poisson-perroquet) est le seul qui semble ruminer à la façon des quadrupèdes. § 8[37]. Les plus gros poissons font la chasse aux plus petits, en les saisissant dans le sens direct où sont leurs bouches et où ils nagent ; mais les sélaciens, les dauphins et tous les cétacés ne peuvent saisir leur proie qu’en se renversant sur le dos, parce qu’ils ont la bouche en dessous. Cela fait que les plus petits leur échappent davantage ; autrement, il y en aurait bien peu ; car la rapidité du dauphin et sa capacité de manger sont vraiment inimaginables.

§ 9[38]. Quelques espèces d’anguilles, en petit nombre et dans quelques lieux seulement, se nourrissent de limon et de tout ce qu’on leur jette. Mais la plupart se nourrissent d’eau douce. Aussi, les éleveurs d’anguilles ont bien soin d’avoir l’eau la plus pure possible, se renouvelant sans cesse, arrivant et sortant, dans leurs viviers, et de les sabler pour y garder les anguilles. En effet, elles sont très vite suffoquées, quand l’eau n’est pas bien pure, parce qu’elles n’ont que de petites branchies ; et les pêcheurs le savent si bien qu’ils troublent l’eau quand ils vont à la chasse aux anguilles. § 10[39]. Dans le Strymon, on les prend vers l’époque des Pléiades, parce qu’à cette époque l’eau est troublée jusqu’au fond, et que la vase est soulevée par les vents contraires qui règnent alors. Sans ces conditions, il vaut mieux pour les pêcheurs ne rien faire. Les anguilles mortes ne surnagent pas et ne remontent pas à la surface, comme la plupart des poissons, parce qu’elles ont le ventre très petit. Quelques-unes ont de la graisse ; mais la plupart n’en ont pas. § 11[40]. Hors de l’eau, les anguilles qu’on en a tirées vivent encore cinq ou six jours. Par les vents du nord, elles vivent davantage ; si le vent est au sud, elles vivent moins. Quand on les transfère des étangs dans le vivier par la chaleur, elles ne tardent pas à mourir ; mais par le froid, elles ne meurent pas. C’est qu’elles ne peuvent supporter les changements trop forts ; et par exemple, si en les transportant on les plonge dans l’eau froide, elles meurent souvent toutes en masse. § 12[41]. Elles sont suffoquées si on les nourrit dans une trop petite quantité d’eau, accident qui d’ailleurs arrive également aux poissons d’autres espèces. Ils étouffent aussi quand on les laisse toujours dans la même eau, qui n’est pas assez abondante. Il en est de même des animaux qui respirent et qui sont suffoqués quand l’air qui les environne est en quantité trop petite. § 13[42]. Il y a des anguilles qui vivent des sept et huit ans. Les anguilles d’eau douce se dévorent les unes les autres ; et elles mangent aussi des herbes, des racines, et tout ce qu’elles trouvent dans la vase. Elles mangent surtout durant la nuit ; et le jour, elles se retirent dans le fond de l’eau.

§ 14.[43]. Voilà donc ce qu’il en est de l’alimentation des poissons.


CHAPITRE V

De la nourriture des oiseaux ; les oiseaux qui ont des serres sont carnivores ; oiseaux de nuit qui ont des serres et qui sont carnivores ; oiseaux qui se nourrissent de larves et de vers ; oiseaux qui mangent les épines ; oiseaux qui se nourrissent de moucherons ; les pics, creusent les arbres avec leur bec et vivent de ce qu’ils trouvent dans le bois ; oiseaux qui se nourrissent d’herbes et de fruits ; exemples divers d’oiseaux habitant la Grèce ; oiseaux aquatiques, palmipèdes, ou à pieds divisés ; les hoche-queues ; les halcyons ; les corneilles de mer ; oiseaux de rivières et de marais ; oiseaux omnivores ; les oiseaux se dévorent entre eux, mais non dans la même espèce ; les oiseaux en général boivent peu ; quelques-uns ne boivent pas du tout.


§ 1[44]. Tous les oiseaux qui ont des serres sont carnivores ; et ils ne peuvent pas avaler de grain, même quand on le leur met dans le bec en boulette. Tels sont, par exemple, les aigles de toutes les espèces, les milans, et les deux espèces d’éperviers, celui qui chasse les pigeons et le Spidzias, qui sont très différents en grosseur. Telle est aussi la buse. La buse est à peu près de la grandeur du milan, et on la trouve partout. § 2[45]. On peut citer encore l’orfraie et le vautour. L’orfraie est plus grosse que l’aigle, et sa couleur est cendrée. On distingue deux espèces de vautours : l’une, qui est petite et plus blanchâtre ; l’autre, qui est plus grande et d’une couleur plus cendrée.

§ 3[46]. Quelques oiseaux de nuit ont également des serres, par exemple, le hibou, le chat-huant, le grand-duc. Le grand-duc ressemble au chat-huant par sa forme ; et en grandeur, il n’est pas plus petit que l’aigle. L’effraie, la chouette et le petit-duc ont aussi des serres. L’effraie est plus grande qu’un coq ; et la chouette s’en rapproche. Ces deux oiseaux donnent la chasse aux pies. Le petit-duc est moins gros que le chat-huant. Ces trois oiseaux se ressemblent beaucoup entre eux, et ils sont tous carnivores. Il y a quelques oiseaux qui, sans avoir de serres, n’en sont pas moins carnivores, comme l’hirondelle.

§ 4[47]. Certains oiseaux se nourrissent de larves d’insectes, le pinson, le moineau, le Batis, le verdier et la mésange, par exemple. Il y a trois espèces de mésanges : la mésange-pinson, qui est la plus grande, de la grosseur d’un pinson en effet ; la mésange de montagne, ainsi appelée parce qu’elle vit dans les montagnes ; elle a une longue queue ; et la troisième espèce, qui ressemble aux deux premières, mais qui est la plus petite de toutes. § 5[48]. On peut citer encore le bec-figue, la huppe-noire, le bouvreuil, le rouge-gorge, l’épilaïs, l’œstros et le roitelet. Ce dernier est un peu plus gros qu’une sauterelle ; il a une huppe rouge, et en tout c’est une petite bête charmante et bien faite. Il y a aussi, parmi les carnivores, l’oiseau qu’on appelle la Fleur, qui est de la grandeur d’un pinson ; puis le pinson de montagne, qui, de forme et de grosseur, se rapproche beaucoup du pinson ordinaire, si ce n’est qu’il est bleuâtre sur le cou et qu’il vit dans les montagnes. Enfin, on peut compter dans cette classe le troglodyte, le spermologue.

§ 6[49]. En général, tous les oiseaux de ce genre et ceux qui s’en rapprochent, se nourrissent de larves, ou exclusivement, ou du moins en grande partie. D’autres oiseaux mangent des épines, tels que l’épinier, le Thraupis ou briseur, et celui qu’on nomme le bonnet-d’or. Tous ces oiseaux se contentent d’épines, et ils ne mangent, ni les larves, ni rien de vivant. Ils dorment aussi dans les épines, de même qu’ils y trouvent leur nourriture.

§ 7[50]. D’autres oiseaux encore se nourrissent de moucherons, qu’ils peuvent attraper en les chassant et qui sont leur pâture principale ; par exemple, la Pipô (le pic) qui a deux espèces, la grande et la petite, appelées quelquefois toutes les deux le Perce-arbres. Ces deux pics se ressemblent entre eux ; et ils ont un cri pareil, si ce n’est que le plus grand a aussi une voix plus forte. Tous deux se nourrissent en volant contre les arbres. § 8[51]. Il y a encore le pic-vert. Le pic-vert est de la grosseur d’une tourterelle ; et il est tout à fait vert. Il frappe et creuse les arbres avec une violence extrême ; il se nourrit surtout de ce qu’il trouve dans leur bois. Il a une voix énorme. On le rencontre principalement dans le Péloponnèse et les contrées voisines. Un autre oiseau qu’on appelle le Gobe-mouche, est plus petit et de la grosseur d’une mésange ; il est de couleur cendrée, et il est moucheté. Sa voix est faible, et c’est aussi un oiseau qui creuse le bois des arbres.

§ 9[52]. Il est d’autres oiseaux qui vivent de fruits et d’herbes : par exemple, le petit ramier, le ramier, le pigeon, le vineux, la tourterelle. Le ramier et le pigeon se montrent en tous temps. La tourterelle ne paraît qu’en été ; elle disparaît en hiver pour se blottir. C’est surtout à l’automne qu’on voit le vineux, et qu’il se fait prendre. Le vineux est un peu plus gros que le pigeon ordinaire, et un peu plus petit que le petit ramier. On le prend le plus facilement au moment où il boit de l’eau, qu’il avale avec avidité. Les oiseaux de cette espèce viennent dans nos contrées, en ayant déjà leurs petits. Tous les autres, y arrivant en été, y font leurs couvées, qu’ils nourrissent presque tous avec des petites bêtes vivantes, si l’on en excepte l’espèce des colombacés.

§ 10[53]. De tous les oiseaux, peut-on dire, les uns trouvent leur nourriture sur la terre, où ils marchent ; les autres la trouvent sur les bords des cours d’eau et des marais, où ils vivent ; d’autres encore, sur les bords de la mer. Les oiseaux palmipèdes passent presque toute leur vie dans l’eau même ; ceux qui n’ont que les doigts simplement divisés vivent sur les bords de l’eau. De ces derniers, quelques-uns vivent de ce qu’ils prennent dans l’eau en y plongeant ; d’autres vivent d’herbes aquatiques, s’ils ne sont pas carnivores. § 11[54]. Quelques oiseaux vivent au bord des marais et des rivières, tels que le héron et le héron blanc. Ce dernier est plus petit que l’autre ; et il a le bec large et long. On peut citer aussi la cigogne et la mouette, qui est de couleur cendrée, le Schoinilos, le Cincle, et le cul-blanc. Ce dernier est le plus grand de ces petits oiseaux, et il est de la grosseur d’une grive. Tous, ils hochent leur queue. Il y a encore le Scalidris. Cet oiseau est de plusieurs couleurs ; mais l’ensemble de son corps est de couleur cendrée. § 12[55]. Les halcyons sont aussi des oiseaux aquatiques, ou se tenant sur le bord des eaux. Ou en distingue deux espèces : l’une, qui perche et chante sur les roseaux ; l’autre, qui est sans voix. Cette dernière est plus grande. Les deux espèces ont le dos bleu foncé. Puis, il y a le roitelet. L’halcyon et le Kéryle habitent les bords de la mer. Les corneilles s’y repaissent aussi de tous les poissons que la mer rejette ; car la corneille est un animal omnivore.

§ 13[56]. D’autres oiseaux de ce genre sont la mouette blanche, le kepphos, le plongeon, l’oiseau des rochers et des trous. Parmi les palmipèdes, les plus lourds habitent le long des rivières et des marais : le cygne, par exemple, le canard, le phalaris, le colymbe ; puis la sarcelle, qui ressemble au canard, mais qui est un peu plus petite. Puis encore, l’oiseau qu’on appelle le corbeau aquatique ; il est à peu près de la grosseur de la cigogne, bien qu’il ait les pattes plus courtes. D’ailleurs, il est palmipède, et il nage ; sa couleur est noire. De tous les oiseaux de cette classe, il est le seul qui niche sur les arbres et qui y fasse ses petits. § 14[57]. Puis, il y a encore la grande-oie, et la petite-oie, qui va en troupe ; l’oie-renard, la chèvre d’eau et le pénélops. L’aigle marin se tient habituellement sur le bord de la mer ; et il fait la chasse aux oiseaux de marais.

§ 15[58]. Beaucoup d’oiseaux sont omnivores, et ils mangent les autres oiseaux, comme le reste. Ceux qui sont pourvus de serres mangent les animaux de toute sorte dont ils peuvent s’emparer, et prennent aussi les oiseaux. Seulement, ils ne se mangent pas les uns les autres dans la même espèce, différents en cela des poissons, qui bien souvent se dévorent les uns les autres dans leur même espèce. En général, tous les oiseaux, quels qu’ils soient, boivent peu. Ceux qui ont des serres ne boivent point du tout, si ce n’est, parmi eux, quelques espèces en petit nombre, et qui encore ne boivent presque point. De ces oiseaux, c’est la cresserelle qui boit le plus. On a vu aussi le milan boire quelquefois, mais très peu.


CHAPITRE VI

De la nourriture des serpents ; ils sont omnivores ; ils boivent peu ; ils aiment excessivement le vin ; manière de prendre les vipères ; déglutition particulière du serpent ; efforts qu’il fait et mouvements qu’il accomplit pour avaler la proie engloutie ; cause de ces mouvements ; les araignées et les serpents peuvent rester très longtemps sans manger ; exemple des serpents chez les droguistes.


§ 1[59]. Les animaux à peau écailleuse, tels que le lézard et les autres quadrupèdes de ce genre, et les serpents, sont omnivores ; ils se nourrissent de chair ; mais ils mangent aussi de l’herbe. Il n’y a pas d’animal plus glouton que le serpent. Tous ces animaux boivent peu, ainsi que tous ceux qui ont le poumon spongieux. Tous les ovipares ont, en général, un poumon qui est spongieux et qui a peu de sang : § 2.[60]. Les serpents aiment excessivement le vin ; et aussi, pour faire la chasse aux vipères, on dépose, dans les haies, des vases et des coquilles où l’on met du vin. On prend alors les vipères, qui sont ivres. Les serpents étant carnivores, ils sucent l’animal qu’ils ont pris et le rejettent tout entier par l’issue inférieure. Il y a d’autres animaux qui en font autant : par exemple, les araignées : mais les araignées sucent l’animal qui est dehors, tandis que les serpents le sucent dans leur ventre. § 3.[61]. Le serpent prend donc tout ce qu’il trouve et ce qui s’offre à lui. Il mange des petits oiseaux, des petites bêtes, et il avale les œufs. Quand le serpent a saisi une proie, il la retire à lui jusqu’à ce qu’arrivant au bout il puisse se dresser tout droit ; il se ramasse alors sur lui-même et se rapetisse autant qu’il peut, de telle sorte que, le corps s’étendant de nouveau, la proie qui a été engloutie descende en bas. Le serpent est obligé de faire ce mouvement, parce que son oesophage est long et étroit.

§ 4[62]. Les araignées et les serpents peuvent rester très longtemps sans manger, et c’est ce qu’on peut observer sur les serpents que nourrissent les marchands de remèdes.


CHAPITRE VII

Des quadrupèdes vivipares carnivores ; les loups, dit-on, mangent de la terre, quand ils ne trouvent pas mieux ; carnivores mangeant de l’herbe pour se purger ; l’hyène ; sa crinière ; elle attaque les hommes et les chiens ; son vomissement ; elle déterre les cadavres ; l’ours est omnivore ; sa passion pour le miel ; sa lutte contre divers animaux et contre le taureau ; il se dresse sur ses deux pieds ; le lion ; sa manière de manger ; ses excréments ; odeurs très fortes qu’il exhale ; quadrupèdes vivant sur le bord des eaux courantes ou stagnantes ; le castor, la loutre, le latax.


§ 1[63]. Parmi les quadrupèdes vivipares, tous ceux qui sont sauvages, et qui ont les dents aiguës, sont carnivores. Peut-être doit-on excepter les loups, qui, dit-on, quand ils sont par trop affamés, mangent de la terre, les seuls à se nourrir ainsi entre tous les animaux. Les carnivores ne mangent jamais d’herbes, si ce n’est quand ils sont malades, comme le font les chiens qui, en mangeant de l’herbe, se font vomir et se purgent. Les loups qui vont seuls se jettent sur les hommes et les dévorent plutôt que les loups qui chassent en troupe. § 2[64]. Le carnivore que l’on appelle, tantôt le Glanos, tantôt l’hyène, est à peu près de la grosseur du loup. Il a une crinière dans le genre du cheval ; mais les poils qu’il a sur toute la longueur du dos sont plus rudes et plus fournis que ceux du cheval. L’hyène suit les hommes pour les surprendre et leur fait la chasse ; elle poursuit les chiens ; et elle vomit à peu près comme les hommes. Elle déterre les cadavres, tant elle aime à manger cette chair putréfiée.

§ 3[65]. Quant à l’ours, il est omnivore ; ainsi, il mange des fruits, et il monte sur les arbres, où, grâce à la souplesse de son corps, il peut grimper ; il aime également les légumes. Il dévore le miel après avoir brisé les ruches, où sont les essaims. Il mange les crabes et les fourmis, en même temps qu’il mange de la chair. Il est assez fort pour attaquer non seulement les cerfs, mais aussi les sangliers, s’il peut les surprendre, et même les taureaux. Il s’élance de front contre le taureau, et il se précipite sous lui ; puis, quand le taureau essaye de le frapper, il lui saisit les cornes dans ses pattes, qui l’embrassent, lui mord les épaules avec sa gueule et le terrasse. L’ours peut marcher, quelque peu de moments, en se tenant tout droit sur ses deux pieds. Avant de manger la chair dont il se repaît, il la laisse pourrir.

§ 4[66]. Le lion est carnivore, comme le sont tous les quadrupèdes sauvages qui ont les dents aiguës (en forme de scie). Il mange avec avidité, et il avale des morceaux entiers sans les déchirer. Il reste des deux et trois jours sans manger ; et il le peut sans peine, après s’être repu outre mesure. Le lion boit peu ; il ne rend ses excréments qu’à de rares intervalles ; et il ne les fait que tous les trois jours, ou selon que cela se trouve. Ses excréments sont secs et très durs, comme ceux du chien. Il lâche des vents extrêmement puants ; et son urine a une très forte odeur. Aussi, les chiens flairent-ils les arbres où le lion s’est arrêté ; car il urine en levant la patte, absolument comme le font les chiens. Il dépose aussi une odeur violente sur ce qu’il mange en respirant dessus ; et quand on ouvre un lion, l’odeur qu’exhalent ses viscères est insupportable.

§ 5[67]. Il y a quelques quadrupèdes sauvages qui se nourrissent de ce qu’ils trouvent, sur le bord des cours d’eau et des marais. Pas un ne vit sur les bords de la mer, si ce n’est le phoque. Les quadrupèdes de ce genre sont l’animal qu’on appelle le castor, le sathérion, le satyrion, la loutre et celui qu’on nomme Latax. Ce dernier animal est plus large que la loutre, et il a des dents puissantes. Il sort de nuit ; et souvent, il coupe avec ses dents les arbustes qui croissent sur le bord des eaux. La loutre aussi mord les hommes, et ne lâche sa proie, à ce que l’on dit, que quand elle entend les os craquer. Le latax a le poil dur, et ce poil tient une sorte de milieu entre celui du phoque et celui du cerf.


CHAPITRE VIII

De la manière de boire des divers animaux ; laper, humer, happer ; animaux à long cou ; animaux frugivores et herbivores ; le cochon ; sa passion pour les racines ; engraissement rapide du cochon ; procédés pour l’engraisser ; méthode des Thraces ; aliments ordinaires du cochon ; il se vautre dans la boue ; utilité de son repos ; poids qu’il perd à l’échaudage.


§ 1[68]. Les animaux qui ont les dents aiguës (en forme de scie), boivent en lapant ; il y en a aussi qui, sans avoir les dents ainsi disposées, n’en lapent pas moins, comme le font les rats. Ceux qui ont les dents égales et continues, comme les chevaux et les bœufs, boivent en aspirant, et hument le liquide. L’ours ne hume pas ; et il ne lape pas non plus ; il happe. Parmi les oiseaux, la plupart hument l’eau ; cependant ceux qui ont un long cou s’y reprennent à plusieurs fois, en élevant la tête. Le porphyrion seul happe l’eau. § 2[69]. Les animaux à cornes, domestiques ou sauvages, et ceux qui n’ont pas les dents aiguës, sont tous frugivores et herbivores, si ce n’est quand ils sont trop pressés de la faim. Il faut excepter le cochon, qui ne mange ni herbe ni fruit, mais qui aime les racines plus qu’aucun autre animal, parce que son groin est naturellement fait pour cette besogne. Le cochon est aussi de tous les animaux celui qui s’accommode le plus aisément de toute espèce de nourriture. § 3[70]. C’est aussi l’animal qui profite et s’engraisse le plus rapidement, eu égard à sa grosseur. Il suffit de soixante jours pour l’engraisser. Les gens qui spéculent sur cette opération, en les prenant maigres, savent combien le cochon profite rapidement. Avant de l’engraisser, on le fait jeûner trois jours entiers ; c’est, du reste, le même procédé qu’on adopte pour tous les animaux qu’on veut engraisser, et qu’on fait jeûner d’abord. Après ces trois jours, les engraisseurs de cochons leur donnent une nourriture abondante. § 4[71]. En Thrace, on les engraisse en leur donnant à boire le premier jour ; puis on reste, d’abord, un jour sans leur donner à boire ; puis deux jours, puis trois, puis quatre, et ainsi de suite jusqu’à sept jours. Le cochon s’engraisse avec de l’orge, du maïs{i}, des figues, des glands, des poires sauvages, des concombres. Ce qui engraisse le plus le cochon, ainsi que tous les autres animaux qui ont le ventre chaud, c’est le repos ; mais le cochon s’engraisse aussi beaucoup en se vautrant dans la boue. Il faut d’ailleurs les nourrir selon leur âge. Le cochon sait se défendre même contre le loup. Du poids que le cochon a de son vivant, il en perd la sixième partie en poils, en sang et autres matières de ce genre. Les truies, qui allaitent, maigrissent comme tous les autres animaux quand ils élèvent leurs petits. Voilà ce que nous avions à dire du cochon.


CHAPITRE IX

Des bœufs et de leur nourriture, grains et fourrages ; moyens divers de les engraisser, quand ils sont vieux ; procédé pour employer leurs cornes et soulager leurs maux de pieds ; particularités sur les vaches Pyrrhiques de l’Épire.


§ 1[72]. Les bœufs se nourrissent tout à la fois de grains et de fourrage. On les engraisse en leur donnant des flatueux, tels que les orobes et les fèves concassées ; et aussi, en leur donnant les feuilles de fèves. Un autre moyen d’engraisser les plus vieux, c’est de leur faire des incisions à la peau et de les insuffler, avant de leur donner leur nourriture. On peut aussi les engraisser avec de l’orge, soit en la laissant entière, soit en la pilant. § 2[73]. On peut encore leur donner des aliments sucrés, comme des figues, des raisins secs, du vin et des feuilles d’ormeau. Ce qui contribue le plus à les engraisser, c’est la chaleur du soleil, et aussi les lavages chauds. § 3[74]. Pour les jeunes bœufs, on peut faire de leurs cornes tout ce que l’on veut, en les enduisant de cire. On soulage aussi leurs maux de pieds en recouvrant leurs cornes de cire, de poix, ou d’huile. Quand on fait voyager les troupeaux par la gelée blanche, ils en souffrent plus que de la neige. § 4[75]. Les vaches grandissent davantage quand on retarde de plusieurs années leur accouplement. Aussi, dans l’Épire, on garde les vaches qu’on appelle les Pyrrhiques jusqu’à l’âge de neuf ans sans les laisser approcher du taureau ; et de là, le nom qu’on leur donne d’Apotaures ; c’est pour les faire grossir. Ces vaches qui sont, à ce qu’on dit, au nombre de quatre cents environ, appartiennent aux rois du pays. On dit aussi qu’elles ne peuvent pas vivre dans d’autres climats, malgré les divers essais qu’on a pu tenter.


CHAPITRE X

De la nourriture des chevaux, des mulets et des ânes ; influence de la boisson sur ces animaux ; choix de leurs aliments ; les bœufs aiment l’eau pure ; les chevaux et les chameaux aiment l’eau trouble ; sobriété du chameau.


§ 1[76]. Les chevaux, les mulets et les ânes mangent des grains et de l’herbe. Ce qui les engraisse plus que tout le reste, c’est ce qu’ils boivent ; car les bêtes de somme ont d’autant plus d’appétit à ce qu’elles mangent qu’elles ont bu davantage ; la boisson qui leur a été la plus agréable est aussi celle qui les fortifie le plus. Le lieu où le breuvage leur est le moins désagréable est aussi celui qui leur convient le mieux. § 2[77]. La pitance, quand elle est fraîche et pleine, leur rend le poil lisse ; quand il s’y trouve des parties trop dures, elle ne leur fait pas de bien. La première coupe de l’herbe de Médie leur fait du mal, ainsi que l’eau corrompue qui se mêle au fourrage, parce qu’elle a une mauvaise odeur de bouc. § 3[78]. Les bœufs ne cherchent à boire que de l’eau bien pure. Le goût des chevaux est le même que celui des chameaux ; et le chameau trouve plus de plaisir à boire de l’eau bourbeuse et épaisse ; il ne boit jamais dans les rivières avant d’en avoir troublé l’eau qu’il y prend. Le chameau peut d’ailleurs rester sans boire quatre jours de suite ; mais ensuite, il absorbe une quantité d’eau énorme.


CHAPITRE XI

De la nourriture de l’éléphant ; quantité de solide et de liquide qu’il lui faut ; durée de son existence.


§ 1[79]. L’éléphant mange en un seul repas jusqu’à neuf médimnes macédoniens ; mais une si grande quantité de nourriture n’est pas sans danger. En général, six ou sept médimnes au plus lui suffisent ; cinq, si c’est de la farine. Il leur faut cinq Maris de vin ; et le Maris contient six cotyles. On a constaté qu’un éléphant avait bu en une fois jusqu’à quatorze mesures macédoniennes d’eau ; et le soir, il en put boire encore huit autres. § 2.[80]. Si beaucoup de chameaux vivent environ trente ans, et quelques-uns même bien davantage, puisqu’il y en a qui vont à cent ans, l’éléphant vit deux cents ans, à ce qu’on assure ; et il va même jusqu’à trois cents, dit-on encore.


CHAPITRE XII

De la nourriture des moutons et des chèvres ; leur manière de brouter ; emploi utile du sel pour les faire boire et les engraisser ; les eaux du nord leur valent mieux que celles du midi ; manière de juger de la force des moutons et des chèvres ; laines avariées.


§ 1[81]. Les moutons et les chèvres se nourrissent d’herbes ; mais les moutons mangent en restant sur place et sans bouger ; les chèvres au contraire changent de place à tout moment, et ne mangent que le sommet des tiges. § 2[82]. C’est surtout la boisson que prennent les moutons qui les engraisse ; aussi, pendant l’été, leur donne-t-on du sel tous les cinq jours, un médimne de sel par cent bêtes. Avec ce soin, on rend le troupeau plus gras, en même temps qu’il se porte mieux. Aussi, leur donne-t-on du sel avec beaucoup d’autres choses ; et par exemple, on mêle du sel à la paille qu’ils mangent. La soif les fait alors boire davantage ; et à l’automne, on saupoudre de sel les concombres dont on les nourrit. § 3[83]. Les brebis ont alors plus de lait ; et quand on les fait sortir à midi, elles boivent davantage le soir. Lorsqu’on leur donne du sel avant qu’elles ne mettent bas, leurs mamelles s’allongent et descendent. La feuille d’olivier, soit cultivé, soit sauvage, le pissenlit, la paille de toute espèce, engraissent les moutons ; mais tous ces aliments, saupoudrés d’eau salée, les engraissent encore bien mieux. Ce qui aide plus encore à les engraisser, c’est de les soumettre à un jeûne préalable de trois jours. § 4[84]. En automne, les eaux exposées au nord leur valent mieux que les eaux qui sont au midi : et les pâtures du soir leur sont surtout favorables ; au contraire, les longues marches et les fatigues les font maigrir. Les bergers savent reconnaître les bêtes qui sont les plus fortes en ce que, durant l’hiver, les unes gardent le givre et que les autres ne le gardent pas. Celles qui ne sont pas robustes s’en débarrassent en le secouant. § 5. Pour toutes les espèces de quadrupèdes, la chair est moins bonne quand les bêtes paissent dans des marécages, que quand elles paissent dans des lieux plus hauts. Les moutons à queue large supportent mieux le froid que les moutons à queue longue ; et ceux qui ont la laine claire, mieux que ceux qui l’ont épaisse. Les moutons qui ont la laine en flocons souffrent beaucoup de l’hiver. Les moutons sont plus sains que les chèvres ; mais les chèvres sont plus robustes que les moutons. Quand des moutons ont été dévorés par des loups, leurs toisons, la laine qu’on en recueille, et même les vêtements qu’on en tire, sont bien plus sujets que les autres il la vermine.


CHAPITRE XIII

De la nourriture des insectes selon qu’ils ont des dents, ou une langue seulement ; insectes omnivores, sanguinivores ; insectes qui se nourrissent du suc des plantes et des fruits ; délicatesse de l’abeille.


§ 1[85]. Parmi les insectes, ceux qui ont des dents mangent de tout ; ceux qui n’ont qu’une langue, ne peuvent vivre que de liquides, où ils puisent, à l’aide de cet organe, les sucs qu’il leur faut. De ces derniers, les uns mangent de tout, en ce sens qu’ils goûtent toutes les saveurs, comme le font les mouches. D’autres boivent du sang, comme le taon et la grosse mouche ; il en est d’autres qui se contentent de sucer les plantes et les fruits. L’abeille est le seul insecte qui ne se pose jamais sur aucune ordure ; elle ne fait sa nourriture que des choses qui ont une saveur douce ; et l’eau qui leur est la plus agréable est celle qui jaillit la plus pure.

§ 2[86]. Telle est donc la manière dont, en général, les animaux prennent la nourriture qui leur convient.


CHAPITRE XIV

Objets divers des actions des animaux ; leurs migrations, selon les saisons, elles sont plus ou moins lointaines, grues de Scythie allant jusqu’aux sources du Nil en Égypte ; les Pygmées ; migrations des pélicans ; bon ordre de leur voyage ; migrations des poissons, des petits oiseaux ; les espèces faibles parlent toujours les premières ; erreur sur la pierre que porteraient les grues pour se lester ; les ramiers, les bisets, les tourterelles, les colombes ; les cailles ; ruses des chasseurs pour les prendre ; oiseaux divers ; le hibou, oiseau bavard et imitateur ; manière de le saisir ; oiseaux du même genre ; le perroquet, oiseau de l’Inde : oiseaux allant par troupes.


§ 1.[87]. Les actions diverses des animaux ont pour objets : l’accouplement, la production des petits, la recherche de la nourriture, qui doit être suffisamment abondante, le froid et le chaud, et enfin les migrations, suivant les saisons de l’année. Tous les animaux en effet sentent le changement du froid et de la chaleur, par leur organisation même ; et tout comme, dans l’espèce humaine, certains peuples se retirent dans des maisons en hiver, tandis que d’autres, disposant de vastes contrées, vont chercher la chaleur en hiver et le froid en été, de même aussi ceux des animaux qui peuvent changer de lieux ne manquent pas de le faire. § 2[88]. Ainsi, tandis que les uns restent dans les climats dont ils ont l’habitude, parce qu’ils y trouvent tout ce qu’il leur faut, les autres changent de demeures, fuyant à l’approche de l’hiver, et vers l’équinoxe d’automne, les rives du Pont et les régions froides ; et après l’équinoxe du printemps, revenant des climats chauds vers les plus froids, par crainte des chaleurs brûlantes. § 3[89]. Dans ces migrations, les uns viennent de lieux voisins ; d’autres viennent de toute extrémité, peut-on dire. Par exemple, les grues se transportent de la Scythie dans les marais de la Haute-Égypte, d’où sort le Nil. C’est le pays où habitent les Pygmées, auxquels elles font la guerre ; car les Pygmées ne sont pas du tout une fable, et il existe réellement une race d’hommes, comme on l’assure, de très petite taille, ainsi que leurs chevaux, et qui passent leur vie dans des cavernes.

§ 4[90]. Les pélicans aussi se déplacent. Ils s’envolent des bords du Strymon vers ceux de l’Ister, où ils vont faire leurs petits. Ils émigrent en troupes serrées, les premiers attendant les derniers, parce que, au passage des montagnes, les derniers ne peuvent plus être vus par ceux qui les précèdent. § 5[91]. Les poissons font les mêmes migrations, les uns, sortant du Pont bu y retournant, les autres quittant en hiver la haute mer pour se rapprocher de la terre, où ils recherchent la chaleur ; et dans l’été, retournant des bords de la terre dans les hautes eaux, où ils peuvent trouver plus de fraîcheur. Parmi les oiseaux, ceux qui ne sont pas très forts descendent, en hiver et par les gelées, dans la plaine, afin d’y avoir plus chaud ; et l’été venu, ils retournent à la montagne pour éviter les chaleurs qui les brillent. § 6[92]. Ce sont toujours les espèces les plus faibles qui commencent l’émigration les premières, afin d’éviter l’un ou l’autre excès de température. Ainsi, les maquereaux partent avant les thons ; et les cailles devancent les grues. Les unes émigrent dans le mois de Boédromion les autres, dans le mois de Moemactérion. Toutes les espèces sont toujours plus grasses quand elles reviennent des climats chauds : et c’est ainsi que les cailles sont plus grasses à l’automne qu’au printemps. Il se trouve que c’est à la même époque que l’émigration a lieu, soit des climats chauds, soit des climats froids. C’est aussi à l’époque du printemps que toutes ces espèces sont plus portées à l’accouplement, et quand elles reviennent des contrées chaudes.

§ 7[93]. Ainsi qu’on vient de le dire, ce sont les grues, parmi les oiseaux, qui émigrent d’une extrémité de la terre à l’autre. Elles volent en prenant le vent. Mais ce qu’on dit de leur prétendue pierre est faux. On assure en effet qu’elles prennent une pierre pour se lester, laquelle pierre serait bonne à éprouver l’or, quand par hasard une grue en laisse tomber une de son bec. § 8[94]. Les ramiers et les bisets émigrent et ne passent pas l’hiver dans nos contrées, non plus que les hirondelles et les tourterelles. Mais les colombes n’émigrent pas ; et elles restent dans nos pays. Les cailles s’en vont comme les tourterelles ; et s’il en reste quelques-unes, c’est qu’elles se trouvent dans des lieux bien exposés au soleil. § 9[95]. Les grands ramiers et les tourterelles s’assemblent en troupes, soit lorsqu’elles arrivent, soit quand la saison du départ est venue de nouveau. Quand les cailles sont de passage, et que le temps est beau ou que règne le vent du nord, elles s’accouplent et jouissent du beau temps ; mais le vent du midi leur est défavorable, parce qu’elles ne volent pas très-bien, par ce vent qui est humide et lourd. Aussi, les chasseurs les traquent-ils par les vents du midi, et jamais par le beau temps. Si les cailles volent mal, c’est à cause du poids de leur corps, qui est relativement très-gros ; et elles volent en poussant des cris que leur arrache la fatigue. § 10[96]. Quand les cailles viennent dans nos climats, elles n’ont pas de chefs qui les conduisent ; mais quand elles nous quittent, elles ont pour les diriger et partir avec elles la glottis, la mère-caille, le hibou, et le cychrame, qui même les appelle durant la nuit. Aussi, quand les chasseurs entendent son cri, ils savent que les cailles ne restent plus dans le pays. § 11[97]. La mère-caille se rapproche beaucoup, par la forme, des oiseaux de marais, ainsi que la glottis, dont la langue peut sortir du bec sur une grande longueur. Le hibou ressemble aux chouettes, et il a autour des oreilles des plumes en forme d’ailes. Parfois, on l’appelle le corbeau de nuit. C’est un oiseau bavard et grand imitateur de ce qu’il voit faire ; aussi, pendant qu’il imite la danse d’un chasseur qui danse devant lui, un autre chasseur vient par derrière et le prend, tout comme on fait pour la chouette.

§ 12.[98]. En général, tous ces oiseaux qui sont pourvus de serres ont le col très-court, une langue très-large, et ils sont imitateurs. L’oiseau de l’Inde, qu’on nomme le perroquet, et dont on dit qu’il a la langue de l’homme, est un de ces oiseaux. On ne peut le faire taire quand il a bu du vin. Les oiseaux qui vont en bandes sont ; la grue, le cygne, le pélican et la petite-oie.


CHAPITRE XV

Des migrations des poissons ; les poissons sont meilleurs sur les côtes ; poissons des côtes, poissons de haute mer ; bonté relative du poisson suivant les localités ; poissons de la Crête ; poissons des étangs maritimes, Alopéconnèse et Biston ; poissons qui entrent dans le Pont-Euxin et qui en sortent ; causes de ces migrations ; influence du vent sur l’entrée et la sortie de ces poissons ; observations particulières sur le trichias ; c’est le seul qui remonte le cours du Danube et qui redescende dans l’Adriatique ; migrations des thons dans le Pont-Euxin ; migrations des Ryades, qui ne voyagent que de jour et qui s’arrêtent du solstice d’hiver au printemps ; migrations des colias et d’autres poissons dans le Pont-Euxin. — Résumé.


§ 1[99]. Ainsi qu’on vient de le dire, les poissons émigrent, tantôt de la haute mer vers la terre, tantôt de la terre vers la haute mer, pour fuir l’excès du froid ou celui de la chaleur. Les poissons qui vivent près de terre valent mieux que ceux des eaux profondes, parce qu’ils trouvent sur les bords une pâture plus abondante et meilleure ; car là où le soleil darde ses rayons, toutes les plantes poussent plus nombreuses, meilleures et plus tendres, comme on le voit dans les jardins. C’est ainsi que l’algue noire pousse près de terre, tandis que l’autre algue ressemble aux plantes sauvages. § 2[100]. On peut ajouter que les lieux qui avoisinent la terre ont, bien plus que la haute mer, un équilibre complet de chaud et de froid ; et c’est là ce qui fait que la chair des poissons vivant dans ces parages a plus de consistance ; la chair des poissons de haute mer est aqueuse et molle. Les poissons des côtes sont le sinodon, le kantharos ou scarabée, l’orphos, la dorade, le muge, la trigle ou surmulet, la grive, le dragon, le callionyme, le goujon et tous les saxatiles. Les poissons de haute mer sont la pasténague, les sélaciens, les congres blancs, le serran, le rouget et le glaucus. Les phagres, les scorpions, les congres noirs, les murènes, les coucous marins tiennent des deux ; ils sont à la fois des côtes et de la haute mer. § 3[101]. Suivant les lieux, il y a de grandes différences pour ces divers poissons. Ainsi, sur les côtes de la Crète, les goujons et les saxatiles sont plus gras ; le thon redevient meilleur après le lever de l’Arcture, parce que, dans cette saison, il n’est plus tourmenté par les moucherons, qui le rendent beaucoup moins bon en été. On trouve une quantité de poissons dans les étangs que forme la mer : la saupe, la dorade, le surmulet, et la plupart des autres poissons de côtes. Les bonitons s’y trouvent aussi, comme on le voit près d’Alopéconnèse ; et c’est de même encore que dans l’étang de Biston, on rencontre presque toutes les espères de poissons. § 4[102]. Il y a très peu de Colias qui remontent jusque dans le Pont-Euxin ; ils passent l’été dans la Propontide ; ils y frayent, et ils viennent passer l’hiver dans la mer Égée. Les thons femelles, les pélamydes et les bonitons émigrent dans le Pont au printemps ; et ils y restent l’été, comme le font aussi presque tous les poissons rapides (Ryades) et ceux qui vont par troupe. La plupart vont par troupe ; et les troupes ont toujours un chef.

§ 5[103]. Ce qui attire tous ces poissons dans le Pont-Euxin, c’est le besoin de se nourrir ; la pâture y est pour eux plus abondante et meilleure, à cause des eaux douces que cette mer reçoit. Les poissons voraces sont, dans cette mer, plus petits qu’ailleurs ; on n’y trouve guère que le dauphin et le phocène ; le dauphin y est petit, tandis que, en sortant du Pont, on en voit sur-le-champ de très grands. § 6[104]. Ce n’est pas seulement pour la pâture que les poissons viennent dans le Pont ; c’est aussi pour le frai. Les lieux y sont très favorables à la ponte ; l’eau potable et l’eau moins saumâtre nourrissent mieux les petits. Une fois la ponte faite, et une fois les petits devenus grands, les poissons s’en retournent aussitôt après le lever de la pléiade. Si le vent du sud règne en hiver, ils sont plus lents à sortir ; ils sortent, au contraire, plus vite par le vent du nord, attendu que ce vent les aide à nager. Les jeunes, qu’on prend alors dans les eaux de Byzance, sont plus petits, parce qu’ils n’ont pas séjourné beaucoup dans le Pont. § 7[105]. On voit aisément tous les autres poissons sortir ou entrer ; mais le trichias est le seul qu’on prend quand il entre, et qu’on ne voit jamais sortir. Quand, par hasard, on en prend un près de Byzance, les pêcheurs ne manquent pas de purifier leurs filets, parce que d’habitude le poisson ne sort pas du Pont-Euxin. Cela tient à ce que, seuls entre tous, ces poissons remontent le cours de l’Ister, et que, là où ce fleuve se divise, ils descendent dans l’Adriatique. Une preuve de ce phénomène, qui est ici tout le contraire de l’autre, c’est qu’on ne prend jamais de trichias qui entrent dans l’Adriatique, et qu’on en prend qui en sortent.

§ 8[106]. Les thons entrent dans le Pont, en ayant la terre à droite, et ils en sortent en l’ayant à gauche. On explique ce changement en disant, avec quelques personnes, que les thons voient mieux de l’œil droit et que leur vue est naturellement mauvaise. Les poissons qui sont très rapides (les Ryades) ne voyagent que de jour ; ils s’arrêtent la nuit ; et c’est alors qu’ils mangent, s’il ne fait pas de lune ; si, au contraire, il y en a, ils continuent leur voyage et ne se reposent pas. Quelques marins prétendent qu’ils ne bougent plus dès qu’est arrivé le solstice d’hiver ; et ils s’arrêtent là où il les surprend, jusqu’à l’équinoxe. § 9[107]. On prend des Colias quand ils entrent dans le Pont ; on n’en prend presque jamais qui en sortent. Les plus délicats sont ceux de la Propontide, avant le frai.

Quant aux autres poissons qui vont en troupes, ou les pèche plutôt à leur sortie du Pont ; et c’est alors qu’ils sont les meilleurs. Quand ils entrent dans le Pont, ceux qu’on prend le plus près du rivage sont les plus gras ; et plus on s’en éloigne, plus ils sont maigres. Souvent quand le vent du sud s’oppose à leur sortie, ils se joignent, pour sortir, aux Colias et aux maquereaux ; et on les prend au-dessous de Byzance plutôt qu’aux environs de cette ville.

§ 10[108]. Voilà ce que nous avions à dire sur les déplacements et les migrations des animaux.


CHAPITRE XVI

De la retraite des animaux terrestres analogue à la migration ; le but est le même : se garantir du froid et de la chaleur extrêmes ; retraite des testacés ; époques de la retraite selon les saisons ; retraite des insectes ; exception pour les insectes domestiques ; retraite des abeilles ; observations décisives ; durée de leur retraite ; lieux où en général les animaux choisissent leurs retraites.


§ 1[109]. Le temps de la retraite est bien aussi, pour les animaux terrestres, quelque chose comme les migrations ; en hiver, ils se hâtent de chercher un abri retiré, qu’ils ne quittent qu’à l’époque de la saison plus chaude. C’est également pour se garantir, et pour éviter les excès des deux saisons, qu’ils se retirent. Parfois, c’est le genre tout entier qui fait cette retraite ; parfois, dans un même genre, tels individus se retirent, tandis que d’autres ne se retirent pas. § 2[110]. Tous les testacés se retirent sans exception, comme on le voit pour les testacés marins, les pourpres, les buccins et tous les animaux de cet ordre. Seulement, pour ceux de ces animaux qui sont détachés et libres, leur retraite est plus évidente ; et alors on les voit se cacher, comme les peignes, tandis que les autres, comme le limaçon de terre, se couvrent d’une croûte à la surface. Au contraire, pour ceux qui ne sont pas détachés, on ne voit pas leur changement. § 3. [111]. La saison où les animaux se retirent n’est pas la même pour tous. Ainsi, les limaçons se cachent en hiver ; les pourpres et les buccins se cachent dans la canicule, pendant une trentaine de jours ; les peignes se cachent aussi durant le même temps. La plupart des testacés se cachent également, et pendant les grands froids, et pendant les grandes chaleurs.

§ 4[112]. Presque tous les insectes font retraite, si ce n’est ceux qui vivent dans les habitations de l’homme, et aussi ceux qui meurent sans arriver à une seconde année. Les insectes se retirent durant l’hiver ; mais les uns se retirent pour plus longtemps ; les autres ne se retirent que dans les jours les plus froids : par exemple, les abeilles, qui elles aussi se retirent. Ce qui le prouve, c’est qu’alors elles ne goûtent point à la nourriture placée devant elles ; et si l’une d’elles vient à sortir de la ruche, on peut voir qu’elle est transparente, et se convaincre qu’elle n’a rien dans l’estomac. L’inertie dure pour les abeilles depuis le coucher de la Pléiade jusqu’au printemps. § 5[113]. Les animaux se font des retraites en se cachant dans des endroits chauds, ou dans ceux où ils ont aussi l’habitude d’aller dormir.


CHAPITRE XVII

De la retraite des animaux qui ont du sang, et une peau écailleuse, serpents, lézards, crocodiles ; de la retraite des poissons ; exemples divers ; retraite des thons en hiver ; les poissons sont plus délicats pendant leur retraite ; retraite des Primades dans la vase ; quelques détails sur ce poisson ; retraite de quelques autres poissons dans le sable ou le limon ; la retraite a lieu généralement en hiver ; quelques poissons se retirent en été ; l’âne marin et la dorade ; observations dans les eaux du Bosphore, qui sont bouleversées vers l’équinoxe d’automne.


§ 1.[114]. Même parmi les animaux qui ont du sang, il en est beaucoup qui se retirent : par exemple, ceux qui ont la peau écailleuse, serpents, lézards, stellions, crocodiles de rivières, qui se retirent pendant les quatre mois les plus rudes de l’hiver, et qui, durant tout ce temps, ne mangent rien. Les autres serpents se retirent dans le sol ; mais les vipères se cachent sous des pierres. § 2[115]. La plupart des poissons se retirent aussi ; et c’est ce qu’on voit de la manière la plus certaine pour l’hippoure et le coracin, qui se retirent durant l’hiver. Ce sont là, d’ailleurs, les seuls poissons qu’on ne prend jamais qu’à des époques de l’année très régulières et toujours les mêmes, tandis que l’on prend les autres poissons presque en tout temps. La murène, l’orphôs et le congre se retirent. Les saxatiles se retirent par couples, mâles et femelles, de même qu’ils se réunissent ainsi pour faire leurs petits, témoin les grives d’eau, les merles d’eau et les perches. § 3.[116]. Les thons se retirent en hiver dans les bas-fonds, et c’est surtout après cette retraite qu’ils sont les plus gras ; leur pêche commence au lever de la Pléiade et dure jusqu’au coucher de l’Arcture, au plus tard ; le reste de l’année, ils se tiennent tranquilles dans leur retraite. On en prend quelques-uns à l’époque de leur retraite, comme aussi d’autres espèces de poissons qui se retirent, parce qu’ils se mettent en mouvement quand le lieu où ils sont est échauffé par quelques beaux jours, qui surviennent inopinément. Ils se risquent alors à sortir quelques instants de leur retraite, pour aller se repaître ; ce qui leur arrive aussi dans les pleines lunes. § 4[117]. Les animaux qui font retraite sont généralement les plus délicats à manger. Mais les primades se blottissent dans la vase. Ce qui l’indique bien, c’est qu’on n’en prend pas durant ce temps, ou que celles qu’on prend ont toujours le dos couvert de limon, et les nageoires toutes pleines de bourbe. Vers la saison du printemps, les poissons se méfient en mouvement, et ils se rendent vers la terre pour s’y accoupler et pour poudre. On prend les femelles pleines ; et c’est à ce moment qu’elles semblent le plus à point. A l’automne et en hiver, elles sont moins bonnes. C’est alors aussi que les mâles paraissent être remplis de laite. § 5. Tant qu’elles n’ont que des œufs petits, elles sont difficiles à prendre ; mais quand leurs portées sont plus grosses, on en prend en quantité, parce qu’alors elles ont l’oestre qui les tourmente.

§ 6[118]. Il y a des poissons qui se retirent dans le sable ; d’autres, dans le limon, ne laissant sortir que leur bouche. La plupart se retirent durant tout l’hiver uniquement ; mais les crustacés, les poissons saxatiles, les raies et les sélaciens ne se retirent que dans les jours les plus froids ; la preuve, c’est qu’on n’en prend jamais dans les jours où il gèle. § 7[119]. Il y a bien aussi quelques espèces de poissons qui se retirent en été, le glaucus, par exemple, qui, dans la chaleur, se retire pendant soixante jours environ. L’âne marin et la dorade se retirent aussi. Ce qui semblerait prouver que l’âne marin se retire très longtemps, c’est qu’on n’en prend qu’à de très longs intervalles. Une autre preuve qui atteste que les poissons se retirent aussi en été, c’est que la pêche s’en fait au coucher des constellations, et surtout au coucher de l’étoile du Chien. A cette époque, la mer paraît toute bouleversée, ce qu’on peut observer mieux qu’ailleurs dans le Bosphore. La vase remonte à la surface, et les poissons sont portés sur les eaux. On prétend encore qu’en agitant à plusieurs reprises le fond de l’eau, ou prend plus de poissons, dans le même filet, la seconde fois que la première. Quand il est tombé de fortes pluies, on aperçoit une foule d’animaux, ou qu’on n’avait jamais vus, ou que du moins on n’avait vus que très rarement.


CHAPITRE XVIII

De la retraite des oiseaux ; erreur à ce sujet ; ils ne se retirent pas tous dans les climats chauds ; pas de distinction entre les oiseaux à ongles recourbés ou les oiseaux à ongles droits ; cigogne, merle, tourterelle, alouette, ramier, milan, chouette.


§ 1.[120]. Il y a beaucoup d’oiseaux qui se retirent ; et ce n’est pas toujours pour émigrer dans les climats chauds, comme on le suppose ordinairement. Mais les uns, vivant dans des lieux voisins de ces climats, comme les milans et les hirondelles, émigrent dans les contrées plus chaudes ; les autres, qui en sont plus loin, ne migrent pas ; et ils se cachent. On a trouvé bien souvent des hirondelles tout amaigries dans des trous, et vu des milans sortir de ces mêmes trous, quand ils se montrent pour la première fois de l’année. § 2[121]. Les oiseaux à ongles recourbés ou à ongles droits se retirent indistinctement ; ainsi la cigogne et le merle, la tourterelle et l’alouette se retirent. On s’accorde à reconnaître que le fait est certain surtout pour la tourterelle ; car personne, pour ainsi dire, ne peut se vanter d’avoir jamais vu une tourterelle en hiver. Quand la tourterelle commence sa retraite, elle est fort grasse ; et bien que, durant la retraite, elle perde ses plumes, elle n’en conserve pas moins toute sa graisse. § 3.[122]. Parmi les ramiers, quelques-uns se retirent ; quelques autres ne se retirent pas ; mais ils émigrent en même temps que les hirondelles. La grive et l’étourneau se cachent ; et parmi les oiseaux à serres recourbées, le milan et la chouette se cachent durant un petit nombre de jours seulement.


CHAPITRE XIX

De la retraite des vivipares quadrupèdes : les ours ; on ignore la vraie cause de leur retraite ; ils y deviennent très gras, tout en n’y mangeant quoi que ce soit ; influence de ce jeûne sur leurs intestins ; le loir, le rat blanc du Pont ; animaux qui font peau neuve ; les serpents se dépouillent deux fois par an ; explication de ce changement ; dépouillement chez les insectes : dépouillement chez quelques poissons : les langoustes, les écrevisses et les cancres ; dépouillements répétés deux ou plusieurs fois par an.


§ 1[123]. Parmi les vivipares et les quadrupèdes, les porcs-épics et les ours se retirent. On ne peut pas faire le moindre doute que les ours sauvages ne se retirent ; mais on ne sait pas bien si c’est pour éviter le froid, ou pour toute autre cause. Durant ce temps, les mâles et les femelles engraissent excessivement, au point de ne plus pouvoir bouger qu’avec peine. § 2. C’est aussi vers ce temps que la femelle met bas ; et elle reste cachée jusqu’au moment où elle peut faire sortir ses petits oursons. C’est ce qu’elle fait au printemps, trois mois environ après le tropique. Sa retraite est d’au moins quarante jours. Sur ces quarante jours, on prétend qu’il y en a deux fois sept dans lesquels l’ours ne bouge pas du tout. Après ces quatorze jours, il reste dans sa retraite ; mais il s’y meut, et il est éveillé. Personne n’a jamais pris une ourse qui fût pleine ; ou du moins, c’est là un fait extrêmement rare. § 3.[124]. Durant tout ce temps, il est certain que les ours ne mangent pas du tout, puisqu’ils ne sortent pas ; et quand alors on en prend, on leur trouve toujours l’estomac et les entrailles tout vides. On prétend même que, ne prenant aucune nourriture, les entrailles de l’ours se soudent presque entièrement ; et de là vient que l’ours, à peine sorti de sa retraite, va manger de l’arum, pour séparer l’intestin et lui rendre sa largeur. Le loir se retire dans le tronc des arbres, et alors il y devient fort gras. Le rat blanc du Pont a la même retraite.

§ 4[125]. Parmi les animaux qui se retirent, il y en a qui dépouillent ce qu’on appelle leur vieille peau ; c’est la peau la plus superficielle, et l’enveloppe de tous les organes essentiels. Si l’on ne sait pas précisément quelle est la cause de la retraite de l’ours, parmi les animaux terrestres et vivipares, ainsi que nous venons de le dire, on sait que la plupart des animaux à peau écailleuse changent de peau, quand en effet leur peau est molle, et qu’elle n’est pas de la nature de l’écaille, comme l’est la carapace de la tortue ; on se rappelle que la tortue et l’émys sont de la classe des peaux-écailleuses. On peut citer, parmi les animaux qui changent de peau, parce que leur peau est molle, le stellion, le lézard et surtout les serpents. § 5[126]. C’est au printemps qu’ils se dépouillent, quand ils sortent de leur cachette ; et ils se dépouillent une seconde fois, à l’automne. Les vipères se dépouillent aussi de leur vieille peau au printemps et à l’automne ; et il n’est pas exact, comme quelques-uns l’affirment, que cette espèce de serpents soit la seule qui ne change pas de peau. § 6[127]. Quand les serpents se dépouillent, c’est d’abord par les yeux que commence toujours le dépouillement ; et si l’on ne connaît pas le fait, on croirait qu’ils deviennent aveugles. Des yeux, le dépouillement s’étend à la tête, qui paraît blanche avant le reste du corps. En une nuit et un jour, la vieille peau se détache tout entière, à partir de la tête jusqu’à la queue. Le dépouillement se fait du dedans au dehors ; et le serpent se dépouille, comme les foetus se débarrassent de leurs chorions.

§ 7[128]. C’est encore de la même manière que ce changement de peau se fait chez les insectes, qui se dépouillent aussi, comme la silpha, l’empis et les coléoptères tels que le kantharos. Tous se dépouillent après leur naissance : et de même que dans les vivipares, c’est le chorion qui se déchire, et que c’est l’enveloppe dans les larvipares, de même la chose se passe dans les abeilles et les cri-cri. Les cigales, une fois dépouillées, vont se mettre sur des oliviers ou sur des roseaux. Elles sortent en brisant leur enveloppe ; et en laissant échapper un peu de liquide, elles se mettent à voler et à chanter presque aussitôt.

§ 8[129]. Dans les poissons de mer, les langoustes et les écrevisses se dépouillent, tantôt au printemps, d’autres fois à l’automne, après la ponte. Quelquefois, on a pris des langoustes qui avaient les parties voisines du tronc encore toutes molles, parce que l’écaille y était déjà rompue, tandis que les parties inférieures étaient encore dures, parce que l’écaille n’y était pas rompue comme en haut. § 9[130]. C’est que les langoustes ne se dépouillent pas comme les serpents. Elles se retirent pendant cinq mois. Les crabes cancres dépouillent aussi leur vieille peau ; tout le monde en est d’accord pour ceux qui ont la peau molle. On prétend encore que les cancres qui ont la peau comme les huîtres se dépouillent également : par exemple, les maïas et les Vieilles. Quand les cancres se sont dépouillés, leurs coquilles deviennent tout à fait molles ; et ils ont alors grand-peine à marcher. Ces animaux, d’ailleurs, se dépouillent, non pas une fois, mais plusieurs fois dans l’année.

§ 10[131]. Voilà donc ce qu’il y avait à dire sur les animaux qui se retirent sur les époques et les conditions de leur retraite et sur le moment où ils changent de peau.


CHAPITRE XX

De l’influence des saisons sur les animaux ; les oiseaux aiment la chaleur ; les poissons aiment la pluie ; erreur d’Hésiode sur l’aigle, qu’il fait boire : les oiseaux boivent très peu ; altération de leurs plumes quand ils sont malades ; influence de la pluie et des eaux douces sur les poissons ; quelques exceptions ; poissons qui ont une pierre dans la tête ; le muge, le capiton et le myrinos sont rendus aveugles par la pluie, et ils s’en trouvent fort mal ; lac près de Nauplie d’Argolide ; exemples divers de la Dorade, de l’Acharnas et du Coracin ; lieux favorables aux poissons par leur végétation et par leur exposition, soit au nord, soit au midi ; l’oestre des thons et des espadons ; les thons aiment beaucoup la chaleur ; temps propices à la pêche ; il n’y a pas de maladies contagieuses dans les poissons de mer ; il n’y en a pas non plus dans les poissons d’eau douce ; quelques-unes de leurs maladies spéciales ; action du bouillon-blanc sur les poissons ; pécheurs Phéniciens ; différents procédés de pêche ; pêche des pourpres ; fraude pour les faire peser davantage ; les peignes roux de l’Euripe Pyrrhéen ; les bivalves et les univalves, — Résumé.


§ 1[132]. Les animaux ne se trouvent pas également bien de toutes les saisons, ni de tous les excès de la température. La santé et la maladie diffèrent pour eux selon les saisons, dans les espèces différentes ; et en général, il n’y a pas de conditions qui soient indistinctement communes à tous. Ainsi, les oiseaux aiment les grandes chaleurs, à la fois pour leur santé générale et pour leurs pontes ; et on le voit bien pour les ramiers, par exemple. Pour les poissons, à l’exception de quelques-uns, ce sont de grandes pluies qui leur conviennent. Au contraire, ce qui nuit aux uns et aux autres, ce sont, pour les oiseaux, des années pluvieuses, et pour les poissons, des années brûlantes. § 2.[133]. C’est que, d’une manière toute générale, boire beaucoup fait mal aux oiseaux. Ceux qui ont des serres ne boivent, pour ainsi dire, pas du tout, ainsi qu’on l’a déjà remarqué. Il semble qu’Hésiode a méconnu ce fait, puisque, dans le récit du siège entrepris par Ninus, il raconte que l’aigle qui était en tête des augures avait bu. Les autres oiseaux boivent ; mais ils boivent peu, ainsi que tous les animaux qui ont le poumon spongieux et qui sont ovipares. § 3[134]. Quand les oiseaux sont malades, on le voit sur-le-champ à leur plumage ; leurs plumes sont tout en désordre, et elles n’ont plus la même disposition que quand l’animal est en pleine santé.

§ 4.[135]. Comme on vient de le dire, la plus grande partie des poissons s’arrangent mieux des années pluvieuses, parce qu’alors ils trouvent une nourriture plus abondante ; mais, en général, la pluie leur convient, de même qu’aux plantes de la terre : et c’est ainsi que l’on a beau arroser les légumes, ils profitent toujours davantage par la pluie. Les roseaux qui naissent dans les étangs subissent le même effet ; et ils ne se développent presque pas tant qu’il n’y a pas de pluie. § 5[136]. Ce qui prouve cette influence sur les poissons, c’est que la plupart émigrent pour passer l’été dans le Pont-Euxin, parce que l’eau y est plus douce, à cause des rivières que cette mer reçoit, et dont les eaux apportent toujours une nourriture abondante. Il y a même beaucoup de poissons qui remontent les rivières, et qui se trouvent fort bien dans leurs eaux et dans les étangs qu’elles forment, comme le boniton et le muge. Les goujons deviennent très gras dans les rivières ; et, en général, ce sont les régions où il y a le plus de lacs qui ont les poissons les meilleurs.

§ 6[137]. De toutes les eaux, celles qui conviennent le mieux à la plupart des poissons sont les pluies d’été, et aussi, lorsque le printemps, l’été et l’automne ont été pluvieux, et que l’hiver a été serein et beau. Pour tout dire en un mot, quand l’année a été bonne pour les hommes, la plupart des poissons s’en trouvent également bien. Ils se trouvent fort mal dans les lieux froids ; et en hiver, ceux qui souffrent le plus sont les poissons qui ont une pierre dans la tête, tels que le chromis, le loup, la sciaena et le phagre. Cette pierre est cause qu’ils sont gelés par le froid, et ils périssent. § 7[138]. Si la pluie est bonne pour la plupart des poissons, il en est tout autrement pour le muge, le capiton, et le poisson qu’on appelle quelquefois le marinos. Quand les pluies sont par trop abondantes, la plupart de ces poissons en sont très vite aveuglés. C’est surtout en hiver que les capitons souffrent de ce mal ; leurs yeux deviennent tout blancs ; ceux qu’on pèche alors sont très maigres : et ils ne tardent pas à périr complètement. Mais ce n’est peut-être pas l’excès de pluie qui leur fait tant de mal ; c’est plutôt le froid. C’est ainsi que, dans bien des endroits, et notamment dans un lac qui est près de Nauplie d’Argolide on a pris, par un hiver rigoureux, une quantité de capitons aveugles ; et bon nombre aussi de ceux qu’on y a péchés avaient des yeux tout blancs. § 8[139]. La dorade souffre aussi de l’hiver : mais c’est de la chaleur que souffre l’acharnas, qui en devient tout maigre. C’est peut-être le coracin qui, à l’opposé de tous les poissons, profite le plus des années sèches ; et cela tient à ce que la sécheresse coïncide presque toujours avec la chaleur. § 9[140]. Selon aussi que les poissons vivent naturellement près de terre ou dans la haute mer, les différents lieux leur sont favorables, sous ces deux aspects différents. Ceux qui vivent dans les deux conditions y profitent également, dans l’une et dans l’autre. Il y a aussi des lieux privilégiés où ils réussissent à merveille ; mais en général, on peut dire que les lieux où il y a beaucoup d’algue leur conviennent le mieux. Ceux qu’on y pêche sont plus gras, même quand ce sont des poissons qui vivent en tous lieux, quels qu’ils soient. Les poissons qui mangent des algues en trouvent en abondance dans ces parages ; et ceux qui sont carnivores y trouvent des poissons en plus grande quantité.

§ 10[141]. L’exposition des lieux fait encore une grande différence, selon qu’ils sont au nord ou au midi. Les poissons longs se plaisent davantage dans les endroits exposés au nord ; et dans un même lieu, on prend plus de poisson long en été, dans les parties nord, que de poisson large. Les thons et les espadons sont tourmentés par l’oestre vers l’époque où la canicule se lève ; tous deux ont alors, auprès des nageoires, cette espèce de larve qu’on appelle oestre, assez semblable à un scorpion, et de la grosseur d’une araignée. Ces oestres leur causent une si vive douleur que parfois l’espadon saute hors de l’eau, presque autant que le dauphin ; ce qui fait qu’assez souvent ils bondissent dans les barques. § 11[142]. De tous les poissons, les thons sont ceux qui aiment le plus la chaleur ; ils viennent, pour la trouver, jusque sur le sable des côtes, où ils se chauffent ; et ils se tiennent à la surface de l’eau. Les tout petits poissons échappent aux grands, qui les laissent pour en poursuivre de plus gros ; mais en recherchant la chaleur, ils détruisent en masse les œufs et le frai, et ils anéantissent ainsi tout ce qu’ils touchent.

§ 12[143]. Le moment le meilleur pour prendre le poisson, c’est au lever du soleil et après qu’il est disparu ; ou, d’une manière générale, à son lever et à son coucher. C’est là, dit-on, les vrais coups de filets ; aussi est-ce à ce moment que les pêcheurs lèvent leurs engins, parce que c’est surtout à ces instants de la journée que les yeux des poissons les trompent le plus ; dans la nuit, ils restent en repos ; et ils voient mieux à mesure que la lumière devient plus forte. § 13[144]. Il ne semble pas que les poissons soient exposés à des maladies contagieuses, comme le sont souvent exposés les humains, et, parmi les animaux quadrupèdes, les chevaux, les bœufs, et quelques autres espèces, soit domestiques, soit sauvages. Cependant, ils sont malades aussi à leur manière ; et la preuve qu’en donnent les pêcheurs, c’est qu’on en prend quelquefois de très maigres et qui sont tout pareils à des malades et absolument décolorés, au milieu d’autres poissons nombreux et gras de la même espèce, qu’on a pêchés en même temps qu’eux.

§ 14[145]. Voilà ce qu’on observe sur les poissons de mer.

§ 15[146]. Quant aux poissons de rivières et d’étangs, il n’y a jamais non plus de contagion parmi eux ; mais quelques-uns ont des maladies spéciales ; par exemple, dans la canicule, le glanis, qui nage en haut de l’eau, y est atteint par les rayons de l’astre ; et les coups de tonnerre violents l’étourdissent. La carpe éprouve aussi cet effet, mais moins vivement. Les glanis dans les bas-fonds sont piqués par le dragon-serpent, et ils meurent en quantité. § 16[147]. Un ver qui se produit dans le baléros et le tilon les force de remonter à la surface, et les rend malades ; le poisson, remontant à la surface de l’eau, y meurt, sous la chaleur qui le tue. La chalcis est sujette à un mal violent ; des poux qui se développent en nombre considérable sous ses branchies, la font périr. Aucun autre poisson n’est exposé à un mal de ce genre. § 17[148]. Les poissons meurent du bouillon-blanc ; et voilà pourquoi on leur fait la chasse en jetant de cette plante dans les cours d’eau et dans les marais ; les Phéniciens pêchent même ainsi les poissons de mer. § 18[149]. On fait encore deux autres espèces de pêche. Comme, en hiver, le poisson fuit les eaux profondes des rivières, car alors l’eau douce est très froide, on fait un fossé qui de la terre sèche va jusqu’à l’eau ; on recouvre ce fossé de branchages et de pierres, et l’on en fait une sorte de goulot, qui a sa sortie sur la rivière ; quand il gèle, on y prend des poissons à la nasse. On fait une autre pêche, été comme hiver également. On construit au milieu de l’eau une enceinte avec des broussailles et des pierres, et on n’y laisse qu’une bouche, où l’on dépose une nasse ; et l’on y prend le poisson en enlevant les pierres.

§ 19.[150]. Les testacés aiment en général les années pluvieuses, et tous s’en trouvent bien, si ce n’est les pourpres. On peut s’en convaincre en mettant des pourpres à l’embouchure d’une rivière ; dès qu’elles ont goûté de l’eau douce, elles meurent le jour même. Cependant, la pourpre vit encore cinquante jours après qu’on l’a sortie de l’eau ; elles se nourrissent mutuellement les unes les autres d’une algue et d’une mousse qui se forment sur leurs coquilles. Ce que les pêcheurs leur jettent pour les nourrir n’est, dit-on, qu’un moyen de les grossir pour les faire peser davantage.

§ 20[151]. Les grandes chaleurs sont nuisibles à tous les autres poissons, en les faisant maigrir et en les rendant moins bons. C’est surtout dans ces conditions que les peignes deviennent roux. Dans l’Euripe Pyrrhéen, les peignes manquèrent un jour absolument, non pas seulement à cause de l’engin dont les pêcheurs s’étaient servis pour les racler, mais aussi à cause des chaleurs excessives. Ce qui fait que les autres testacés se trouvent bien des années pluvieuses, c’est qu’alors l’eau de mer devient moins salée. Le froid empêche qu’on n’en trouve dans le Pont-Euxin, non plus que dans les rivières qui s’y jettent, si ce n’est quelques rares bivalves ; car les univalves gèlent encore plus aisément par les grands froids.

§ 21[152]. Voilà ce qu’on avait à dire de l’action des saisons sur les animaux aquatiques.


CHAPITRE XXI

Du porc et de ses trois maladies : l’esquinancie, les écrouelles, mal de tête et flux de ventre ; manières de soigner ces maladies ; traitement de l’esquinancie ; le grêlon ; description de cette maladie spéciale au cochon ; parties du corps où le grêlon se produit ; âge où le porc en peut être atteint ; nourriture du cochon ; elle doit être variée, comme pour tous les autres animaux ; effets divers de leurs aliments ; effets des glands sur les truies pleines, et aussi sur les brebis.


§ 1[153]. Parmi les quadrupèdes, les porcs sont sujets à trois maladies. L’une s’appelle le branchos (esquinancie) ; et dans cette maladie, c’est surtout sur les mâchoires et sur les bronches que se porte l’inflammation. Elle se montre aussi sur toute autre partie du corps, assez souvent au pied, et parfois aussi à l’oreille. L’organe attaqué et tout ce qui l’avoisine se sèche et se pourrit, jusqu’à ce que l’inflammation soit parvenue au poumon ; et alors, l’animal meurt. Les progrès de la maladie sont rapides ; et le porc cesse de manger dès qu’elle commence, quelque faible qu’elle soit au début. Dès que les porcherons s’en aperçoivent au moindre symptôme, ils n’ont pas d’autre remède que d’amputer l’organe entier qui est atteint. § 2[154]. Les deux autres maladies du porc s’appellent toutes les deux du même nom de craura (écrouelles). L’une consiste en une douleur et une pesanteur de tête, auxquelles les porcs succombent presque toujours ; l’autre est un flux de ventre. Cette seconde maladie paraît être incurable ; on soigne l’autre en mettant du vin sous le groin de l’animal, et en le lui frottant avec ce vin. Mais il est bien difficile de conjurer cette maladie ; et le porc est perdu en trois ou quatre jours. § 3[155]. Quant au branchos (esquinancie), c’est surtout quand l’été est prospère et fécond et que les animaux sont très gras, qu’il éclate. Il est bon alors de leur donner des mûres, et de les faire baigner à grande eau et à l’eau chaude ; il est bon aussi de les saigner sous la langue. § 4.[156]. Les porcs, dont la chair est aqueuse, ont comme des grêlons aux jambes, au cou et aux épaules : ces sortes de grêlons viennent surtout dans ces parties. Tant qu’il y en a peu, la chair reste douce et bonne : quand les grêlons se multiplient, elle devient huileuse et perd son goût. On reconnaît sans peine que les porcs ont ces grêlons, parce qu’ils se produisent plus particulièrement au bas de la langue ; et quand on arrache à l’animal quelques soies sur le front, ces poils viennent avec un peu de sang. Lorsque les grêlons se produisent aux pieds de derrière, l’animal ne peut rester un instant tranquille. § 5. Les porcs, d’ailleurs, n’ont pas de grêlons, quand qu’ils ne se nourrissent que de lait. On guérit le grêlon en donnant de la tipha (du seigle), qui est, en même temps, pour les porcs un très bon aliment. Ce qui les engraisse et les nourrit le mieux, ce sont les pois et les figues. En général, il ne faut pas leur donner une nourriture uniforme ; et il est bon de la varier. Le porc aime à la changer, comme tous les autres animaux ; tels aliments, dit-on, les gonflent ; tels autres leur font de la chair ; tels autres, de la graisse. On dit aussi que les glands leur sont très agréables, mais qu’ils rendent la chair huileuse ; et que, si les truies en mangent par trop, quand elles sont pleines, elles avortent. Le même accident se produit sur les brebis, pour lesquelles cet effet des glands est encore bien plus aisé à constater. Le porc est, d’ailleurs, à notre connaissance, le seul animal qui ait le grêlon.


CHAPITRE XXII

Des maladies des chiens ; la rage, l’esquinancie et la goutte ; l’homme mordu par le chien ne contracte pas la rage ; le chameau ; l’éléphant ; les maladies des bœufs ; la goutte et l’écrouelle ; leur traitement.


§ 1[157]. Les chiens peuvent avoir trois maladies : la rage, l’esquinancie et la goutte. La rage les rend furieux ; et quand ils mordent, tous les animaux mordus par eux contractent la rage, excepté l’homme. Sauf l’homme, la maladie de la rage emporte tout ce que les chiens ont mordu, comme elle les emporte eux-mêmes. § 2.[158]. L’esquinancie tue également les chiens ; et il est bien rare qu’ils réchappent de la goutte. La rage prend aussi les chameaux. Quant aux éléphants, on prétend qu’ils ne sont pas sujets aux autres maladies, mais qu’ils ont seulement des vents qui les font beaucoup souffrir.

§ 3[159]. Les bœufs qui vivent en troupeaux ont deux maladies, la goutte d’abord, et ce qu’on appelle chez eux, la craura (écrouelle). Leurs pieds enflent quand ils sont atteints de la goutte ; mais ils n’en meurent pas ; et ils ne perdent même pas leurs sabots ; on les leur fortifie, en les frottant de bitume chaud. Dans la craura, le souffle devient chaud à courts intervalles ; en fait, la craura est pour le bétail ce que la fièvre est pour l’homme. Les symptômes de la maladie sont les oreilles tombantes et une répugnance pour la nourriture. L’animal succombe vite, et quand on ouvre l’animal, on trouve les poumons pourris.


CHAPITRE XXIII.

Des maladies des chevaux, selon qu’ils sont en liberté, ou à l’écurie ; la goutte et ses symptômes ; la colique, le tétanos, l’orge, la nymphe ; symptômes de ces maladies ; autres maladies du cheval, la cardialgie, la cystite ; parasites redoutables aux chevaux, le staphylin, la mygale, la chalcis ; le cheval est sujet à presque toutes les maladies de l’homme ; la sandaraque lui est fatale ; la mauvaise odeur d’une lampe qui s’éteint fait avorter les juments ; l’hippomane ; contes débités à ce sujet ; le cheval se plaît dans les prés marécageux ; il aime à boire son eau trouble ; le bœuf est tout le contraire.


§ 1.[160]. Les chevaux qui ne sont pas en pâture sont exempts de toutes les maladies sauf la goutte. Ils en souffrent beaucoup ; et parfois, ils en perdent leurs soles ; mais quand ils les ont perdues, ils les refont vite ; et en même temps que l’une tombe, l’autre se reforme en dessous. § 2[161]. Le symptôme de la maladie, c’est le tressaillement du testicule droit, ou bien un petit creux et une sorte de ride qui se forme un peu au-dessous du milieu des naseaux. § 3[162]. Les chevaux qu’on nourrit à l’écurie sont sujets aux maladies les plus nombreuses. D’abord, ils prennent la colique. Ce qui annonce la maladie, c’est qu’ils ramènent les jambes de derrière sous les jambes de devant, et qu’ils les en rapprochent presque à les choquer. Quand le cheval, après être resté plusieurs jours sans manger, devient furieux, on le soulage en lui tirant du sang et en lui ouvrant la veine. § 4[163]. Le cheval a aussi le tétanos ; dans cette affection, le symptôme consiste en ce que toutes les veines, la tête, le cou, sont excessivement tendus, et que l’animal a les jambes toutes droites et raides. Les chevaux deviennent encore purulents. Ils sont également exposés à une autre maladie, qu’on appelle « faire de l’orge ». Voici comment elle se manifeste : le voile du palais devient mou ; et la respiration devient brûlante. Ces maladies sont incurables à tous les soins ; et il faut qu’elles s’apaisent d’elles-mêmes. § 5[164]. Les chevaux sont encore atteints de cette affection qu’on appelle la nymphe, qui les prend quand ils entendent le son de la flûte ; et de cette autre affection de baisser les yeux et de regarder en bas. Si l’on monte une bête qui est dans cette disposition, elle se met à tourner sur elle-même, jusqu’à ce que quelqu’un vienne à l’arrêter. Le cheval malade baisse toujours la tête, même quand il a la rage ; et ce qui indique cette maladie, c’est qu’il abaisse les oreilles vers la crinière et qu’il les redresse ensuite : il a des défaillances, et il est haletant.

§ 6[165]. D’autres maladies incurables du cheval, c’est d’abord la cardialgie, qui se manifeste par la palpitation des flancs. C’est ensuite le déplacement de la vessie, qu’on reconnaît à l’impossibilité d’uriner, qui fait que l’animal lève les pieds et les hanches. Le cheval est aussi très malade, s’il avale un staphylin, insecte de la grosseur d’une sphondyle. § 7[166]. La morsure de la mygale fait du mal au cheval, comme à toutes les autres bêtes de trait ; et elle produit des pustules. La morsure est encore plus dangereuse si la mygale était pleine ; les pustules crèvent en ce cas ; mais autrement, elles ne crèvent pas. Une autre morsure qui tue les chevaux, ou du moins les fait beaucoup souffrir, c’est celle de la bête qu’on appelle tantôt la chalcis, tantôt la zignis. Elle ressemble aux petits lézards, et sa couleur est celle des serpents aveugles. § 8[167]. D’une manière générale, les gens dont c’est la pratique assurent que le cheval a presque toutes les maladies de l’homme, de même, que les moutons en sont également atteints. La sandaraque est un poison qui tue les chevaux, et généralement les bêtes de somme ; on donne ce poison dans de l’eau, où on l’a fait dissoudre. L’odeur d’une lampe qui s’éteint suffit pour faire avorter une jument ; et quelquefois, le même accident se produit chez des femmes enceintes.

§ 9[168]. Voilà ce que nous savons des maladies des chevaux. Quant à l’excroissance qu’on appelle l’Hippomane, elle se produit, comme on l’a déjà dit, sur les poulains : les juments lèchent cette excroissance, et la font disparaître en finissant par la manger. Mais toutes les fables qu’on débite à ce sujet ne sont guère que les inventions des femmes, et des gens qui se livrent aux incantations. Ce dont on convient davantage, c’est que les juments rejettent ce qu’on appelle le Pôlion, avant de mettre bas leur poulain.

§ 10.[169]. Les chevaux reconnaissent le hennissement des chevaux contre lesquels ils ont antérieurement combattu. Ils se plaisent dans les prés et dans les marécages, parce qu’ils aiment l’eau trouble, et que quand l’eau qu’ils y trouvent est pure, ils la piétinent avant de la boire, et s’y baignent après avoir bu. Le cheval est essentiellement un animal qui aime à se baigner et qui aime l’eau ; et c’est bien là aussi ce qui constitue la nature de l’Hippopotame. Le bœuf est tout l’opposé du cheval ; et si l’eau n’est pas pure, fraîche et sans mélange, il se refuse à la boire.


CHAPITRE XXIV

L’âne n’a qu’une seule maladie, appelée la mélide ; elle se déclare surtout à la tête, où elle n’est pas mortelle ; elle l’est au poumon ; l’âne ne supporte pas le froid.


§ 1[170]. Les ânes n’ont guère qu’une seule maladie ; elle s’appelle la mélide. Elle se déclare d’abord à la tête de l’animal, et il lui sort par les naseaux un liquide épais et roussâtre. Si le mal tombe sur le poumon, la bête en meurt. Mais quand l’affection n’est qu’à la tête, elle n’est pas tout d’abord mortelle. § 2[171]. L’âne est un des animaux qui supportent le moins bien le froid ; et de là vient qu’on ne trouve pas d’ânes, ni dans le royaume du Pont, ni en Scythie.


CHAPITRE XXV

Des maladies des éléphants : ce sont surtout des vents ; l’éléphant avale de la terre et des pierres : diarrhée des éléphants ; remèdes divers : boisson de l’huile : ses effets ; moyen d’en faire boire aux éléphants qui n’en veulent pas.


§ 1.[172]. Les éléphants n’ont que des maladies qui consistent dans des vents : et alors, ils ne peuvent rendre, ni leur excrément liquide, ni celui du ventre. Lorsque l’éléphant mange de la terre, il en est tout affaibli, si cette nourriture n’est pas continuelle ; s’il s’y habitue, il ne s’en trouve pas plus mal. Parfois même, il avale des pierres. § 2[173]. L’éléphant est sujet aussi à être pris de diarrhée ; dans cette affection, on le guérit en lui donnant à boire de l’eau chaude, et à manger du foin aspergé de miel. Ces deux remèdes arrêtent la diarrhée. Quand la bête est fatiguée par des insomnies, on la guérit en lui frottant les épaules avec un mélange de sel, d’huile et d’eau chaude. Si ce sont les épaules qui souffrent, on soulage l’éléphant en y appliquant de la chair de porc, qu’on a fait rôtir. § 3[174]. Il y a des éléphants qui boivent de l’huile : d’autres n’en veulent pas boire. On prétend que, si quelque morceau de fer est resté dans le corps d’un éléphant, l’huile l’en fait sortir, pour ceux qui en boivent ; et pour ceux qui n’en boivent pas, on fait une décoction de racine qu’on leur fait boire dans de l’huile.

§ 4. Telles sont donc les maladies qui affectent les quadrupèdes.


CHAPITRE XXVI

Des maladies des insectes, et spécialement des abeilles ; bêtes qui détruisent leurs gâteaux de cire, et rendent les essaims malades : la rouille des fleurs nuisible aux abeilles ; effet de l’huile sur les insectes.


§ 1[175]. Les insectes se portent bien en général quand la saison reste pareille à celle où ils naissent, et que l’année est tout entière, comme le printemps, humide et chaude. § 2[176]. Dans les essaims d’abeilles, il se trouve des petites bêtes qui détruisent les gâteaux de cire, et notamment une larve qui file comme une araignée, et qui détruit leurs gâteaux. On l’appelle, tantôt le cléros, tantôt le pyrauste. Il produit dans le gâteau un petit animal tout pareil à lui, et qui est comme une petite araignée. L’essaim tout entier en devient malade. § 3.[177]. Une autre petite bête ressemble au papillon qui vole autour des lampes. Cet animal produit et dépose dans le gâteau un tas de duvet ; les abeilles n’osent pas le piquer de leurs dards, et il n’y a que la fumée qui puisse le chasser. Il se présente aussi, dans les essaims, des chenilles qu’on appelle des tarières, et dont les abeilles ne savent pas non plus se défendre. § 4[178]. Ce qui plus que tout le reste rend les abeilles malades, c’est la rouille qui atteint les fleurs ; et ce sont, en outre, les années sèches qui leur sont fatales. Tous les insectes meurent si on les frotte d’huile ; et si on leur en met une goutte sur la tête et qu’on les expose au soleil, ils périssent à l’instant.


CHAPITRE XXVII

De l’influence des climats sur les animaux, sur leur taille et la durée de leur existence ; différences très marquées entre des lieux très voisins ; exemples divers ; une rivière, un chemin qui sépare des cantons suffisent à faire de grandes différences ; citation de Ctésias ; Inde, Syrie, Libye, citation d’Homère ; l’Égypte comparée à la Grèce ; explication de ces différences ; de l’influence de la température ; lézards d’Arabie ; serpents monstrueux de Libye ; lions d’Europe ; comparaison de l’Europe et de l’Asie ; monstres de Libye ; explication des accouplements entre espèces différentes ; chiens croisés de Laconie, chiens croisés de l’Inde.


§ 1[179]. En général, les animaux varient selon les climats ; ainsi, de même que quelques-uns ne vivent pas du tout, dans certaines contrées, de même dans certaines contrées, où ils peuvent vivre, ils sont plus petits ; leur vie y est plus courte, et ils ne s’y portent pas bien. Quelquefois, ces différences sont sensibles dans des régions très rapprochées les unes des autres ; et, par exemple, en certains endroits de la Milésie fort voisins entre eux, il y a des cigales dans ceux-ci ; il n’y en a point dans ceux-là. § 2[180]. Dans l’île de Céphalonie, une rivière sépare deux cantons, l’un où l’on trouve la cigale, et l’autre où elle ne se trouve plus. Dans la Pordosélène, un chemin seulement sépare les cantons où en deçà il y a des belettes ; et où au delà, il n’y en a point. En Béotie, il y a beaucoup de taupes aux environs d’Orchomène, tandis que dans la Lébadie, qui en est toute voisine, il n’y en a point ; et si l’on en apporte, elles ne veulent point y fouiller la terre. § 3[181]. A Ithaque, les lièvres ne vivent pas, si l’on en apporte et qu’on les y lâche ; mais on les trouve bientôt morts sur la côte, tournés vers l’endroit d’où on les a apportés. En Sicile, on ne voit pas de fourmis-cavalières ; et jadis à Cyrène, il n’y avait pas de grenouilles coassantes. § 4[182]. On ne trouverait pas dans la Libye entière, ni un sanglier, ni un cerf sauvage, ni une chèvre sauvage. Dans l’Inde, à ce que prétend Ctésias, d’ailleurs si peu digne de foi, on ne trouve, ni porc, ni sanglier ; et tous les animaux qui n’ont pas de sang et qui ont des écailles y sont d’une grandeur démesurée. Dans le Pont-Euxin, on ne trouve, ni de mollusques, ni de testacés, si ce n’est en quelques endroits et en très petit nombre. Au contraire, dans la mer Rouge, tous les testacés sont énormes. § 5[183]. En Syrie, les moutons ont des queues larges d’une coudée ; et les chèvres y ont des oreilles longues d’une palme et de quatre doigts ; quelques-unes même les ont traînantes jusqu’à terre. Les bœufs, ainsi que les chameaux, y ont des crinières au sommet des épaules. En Lycie, on tond les chèvres, comme ailleurs on tond les moutons. En Libye, les béliers qui ont des cornes les ont en naissant ; et ce ne sont pas les mâles seulement, comme le dit Homère ; ce sont aussi les autres. Dans le Pont, du côté de la Scythie, c’est tout le contraire ; et les béliers y sont sans cornes. § 6[184]. En Égypte, certains animaux, comme les bœufs et les moutons, sont plus grands que dans la Grèce ; certains autres sont plus petits : les chiens, les loups, les lièvres, les renards, les corbeaux, les éperviers : D’autres encore y sont de la même grosseur à peu près : les corneilles, par exemple, et les chèvres. On explique ces différences par celle de la nourriture, abondante pour les uns, difficile et rare pour les autres, tels que les loups et les éperviers ; presque nulle pour les carnivores, parce que les petits oiseaux y sont peu nombreux ; et aussi pour les lièvres et pour tous les animaux qui ne sont pas carnivores, parce que les fruits n’y durent pas longtemps, ni ceux des arbres, ni ceux des arbustes.

§ 7[185]. Dans bien des contrées, c’est la température seule qui est cause de ces variétés ; et c’est ainsi qu’en Illyrie, en Thrace, en Épire, les ânes sont petits, et qu’il n’y en a même plus eu Scythie et dans la Celtique, parce que ces animaux supportent mal le froid. On trouve en Arabie des lézards qui ont plus d’une coudée de long ; les rats domestiques y sont plus grands que les rats des champs. Leurs pattes de devant ont la longueur d’une palme ; celles de derrière ont à peine la longueur de la première phalange du doigt. § 8.[186]. En Libye, les serpents sont, à ce qu’on rapporte, d’une grosseur dont on ne peut se faire une idée. Des navigateurs prétendent avoir trouvé dans ces parages, où ils avaient abordé, de nombreux squelettes de bœufs, qui, évidemment, avaient été dévorés par des serpents ; et que remontés dans leur barque, ils y avaient été poursuivis par ces serpents, qui avaient précipité quelques matelots dans la mer, en renversant le canot. § 9[187]. Il y a plus de lions en Europe qu’en Asie ; et on ne les trouve en Europe que dans la région comprise entre l’Achéloüs et le Nessus. Dans l’Asie, il y a des panthères ; en Europe, il n’y en a pas. Généralement, les animaux farouches sont en Asie plus farouches qu’en Europe ; mais en Europe, ils ont tous plus de courage. C’est en Libye que les animaux présentent les formes les plus diverses ; et de là, le proverbe qui dit que la Libye produit toujours quelque monstre nouveau. C’est que là, en effet, les animaux se rassemblent près des petits cours d’eau du pays, par suite de la sécheresse, faute de pluie ; les bêtes d’espèces dissemblables s’y rencontrent ; et l’accouplement y devient fécond, si le temps de la gestation est le même, et si la disproportion de taille n’est pas trop grande. § 10[188]. Ils s’adoucissent les uns à l’égard des autres, parce qu’ils sont toujours pressés du besoin de boire ; car, au contraire des autres animaux, ils ont besoin de boire plus en hiver qu’en été. En effet, comme les pluies ne viennent guère pendant l’été, ils perdent l’habitude de boire en cette saison ; et même les rats du pays meurent quand ils viennent à boire.

§ 11.[189]. Il y a encore d’autres animaux qui naissent du mélange de races différentes ; et c’est ainsi qu’à Cyrène les loups s’accouplent aux chiennes, et qu’ils produisent. Les chiens de Laconie viennent d’un renard et d’un chien. On assure aussi que les chiens de l’Inde viennent d’un tigre et d’une chienne, non pas au premier croisement, mais à la troisième génération ; car le produit du premier accouplement est encore une bête fauve. On conduit les chiennes ; et on les attache, dans un lieu bien désert ; mais beaucoup sont dévorées par les tigres, avant qu’il ne s’en trouve un qui soit poussé par le désir ardent de s’accoupler.


CHAPITRE XXVIII

De l’influence des lieux sur le caractère des animaux ; ceux des montagnes sont plus sauvages et plus courageux que ceux des plaines ; sangliers de l’Athos ; de l’influence des lieux sur la morsure des animaux ; scorpions du Pharos et de Carie ; des morsures des serpents de tous les pays ; l’aspic de Libye ; serpent du Silphium ; prétendu contrepoison ; salive de l’homme ; serpent sacré ; petit serpent de l’Inde.


§ 1[190]. Les lieux produisent de grandes différences dans le caractère des animaux ; et par exemple, les contrées montagneuses et rudes agissent tout autrement que les contrées de plaine et d’accès facile. Les animaux sont, dans les montagnes, d’un aspect plus sauvage ; et ils y sont plus courageux, comme on le voit bien pour les sangliers de l’Athos. Pas un des mâles des vallées basses ne serait de force à lutter même contre les femelles de la montagne. § 2[191]. La différence des contrées en apporte aussi une très grande dans les morsures des animaux. Ainsi, dans la région du Pharos et dans quelques autres régions, les scorpions ne sont pas dangereux ; mais dans d’autres lieux et dans la Carie notamment, ils sont aussi nombreux et aussi grands que redoutables ; l’homme ou la bête qu’ils piquent en meurent toujours. Leur morsure tue les sangliers, qui ne sentent absolument en rien les morsures des autres animaux ; et ce sont surtout les laies de couleur noire que les scorpions attaquent. Les sangliers qui ont été piqués rendent leur mort encore plus rapide, en allant se jeter dans l’eau. § 3[192]. Les morsures des serpents diffèrent beaucoup les unes des autres. Ainsi, l’aspic est un serpent de la Libye, dont on tire un poison qui putréfie, et dont la morsure est mortelle. Le silphium cache souvent un petit serpent dont la morsure a pour contrepoison, à ce qu’on prétend, une pierre qu’on prend au tombeau d’un des anciens rois ; on la fait tremper dans du vin, qu’on se hâte de boire. Dans quelques parties de l’Italie, la morsure des simples stellions est également mortelle.

§ 4[193]. Tous les animaux à venin ont la morsure d’autant plus dangereuse qu’ils se sont dévorés les uns les autres : par exemple, la vipère ayant mangé un scorpion. Pour la plupart de ces morsures, la salive de l’homme est un puissant contrepoison, il existe un tout petit serpent, qu’on appelle le serpent sacré, qui fait fuir devant lui les plus gros serpents. Il n’a pas plus d’une coudée de long, et il paraît comme velu. Tout ce qu’il a mordu se pourrit, et la plaie s’étend circulairement. Il y a encore dans l’Inde un petit serpent, qui est le seul contre la morsure duquel les indigènes n’aient pas de remède.


CHAPITRE XXIX

Influence de la gestation sur la chair des animaux ; exemples des testacés et des poissons ; changements selon les saisons ; dans la couleur et le goût des poissons ; influence de l’âge sur les poissons et sur les thons destinés à être salés ; thon d’une grosseur extraordinaire ; observations sur les poissons de rivière et d’étang ; en général, les mâles valent mieux que les femelles.


§ 1[194]. La gestation fait encore une différence dans la bonne qualité des animaux, ou dans leur qualité mauvaise. Ainsi, les testacés, comme les peignes et tous les coquillages et les crustacés, valent mieux durant la gestation, ainsi qu’on le voit pour l’espèce des langoustes. Les testacés ont aussi une gestation, quoiqu’on n’en ait jamais vu aucun s’accoupler et pondre, comme on l’observe pour les crustacés. Les femelles des mollusques sont d’un goût plus délicat quand elles sont pleines ; tels sont les petits calmars, les seiches et les polypes. § 2[195]. Presque tous les poissons sont bons au début de la gestation ; mais à mesure qu’elle avance, les uns sont bons, les autres ne le sont pas. Ainsi, la maenis est très bonne quand elle est pleine. La forme de la femelle est plus arrondie ; le mâle est plus long et plus large. A l’époque où commence la gestation de la femelle, on voit les mâles prendre une couleur noire et se tacheter ; et c’est alors qu’ils sont les moins bons à manger. C’est alors aussi qu’on leur donne parfois le nom de Boucs. § 3[196]. Les poissons qu’on appelle les grives, les merles et la squille, changent également de couleur selon les saisons, comme on le voit sur quelques oiseaux. Au printemps, ils sont noirs ; et le printemps une fois passé, ils redeviennent blancs. La phycis change aussi de couleur ; le reste de l’année, elle est blanche ; mais au printemps, elle est toute tachetée. C’est le seul des poissons de mer qui fasse un nid, à ce qu’on assure, et qui pond dans les nids qu’il a préparés. § 4[197]. La maenis, ainsi qu’on vient de le dire, et la smaris changent de couleur ; de blancs qu’étaient d’abord ces poissons, ils muent en été et redeviennent noirs. Ce changement est surtout visible aux nageoires et aux branchies. La femelle du coracin est surtout délicate quand elle est pleine, comme la maenis. Le muge et le loup, et presque tous les autres poissons à écailles, sont mauvais pendant la gestation. Il y en a peu qui, comme le glaucus, soient également bons, que les femelles soient pleines ou ne le soient pas. § 5[198]. Les vieux poissons ne sont pas bons ; et les thons eux-mêmes en vieillissant ne sont plus bons, même pour les salaisons, parce qu’ils perdent beaucoup de leur chair. C’est bien le même effet qui se produit sur les autres poissons. On reconnaît qu’ils sont vieux à la grandeur et à la dureté de leurs écailles. On a pris une fois un vieux thon qui ne pesait pas moins de quinze talents ; la largeur de sa queue était de deux coudées et une palme.

§ 6[199]. Les poissons de rivière et d’étang sont surtout délicats quand, après la ponte et l’émission de la laite, ils se sont refaits en se nourrissant. Quelques-uns sont bons dans la gestation, comme la saperdis ; d’autres ne valent rien alors, comme le glapis. Dans toutes les espèces, les mâles sont meilleurs que les femelles ; mais le glanis femelle vaut mieux que le glanis mâle. Dans les anguilles aussi celles qu’on prend pour des femelles sont plus délicates ; mais malgré ce nom, ce ne sont pas des femelles, et elles ne diffèrent absolument qu’à la vue.


LIVRE NEUVIEME.



CHAPITRE PREMIER

Des mœurs des animaux ; affections de l’âme auxquelles ils participent ; différences que produit le sexe, sensibles surtout dans l’espèce humaine ; les femelles sont toujours plus douces et plus dociles ; chiens de Laconie et de Molossie ; croisements utiles ; les femelles sont moins courageuses et plus rusées ; caractère de la femelle, elle est plus sensible, plus jalouse, plus découragée, plus effrontée et plus fausse ; caractère de l’homme, plus brave, plus actif, plus généreux ; influence du sexe jusque chez les mollusques ; exemple de la seiche mâle et de la seiche femelle.


§ 1[200]. Les mœurs des animaux nous sont moins connues et moins observables quand leur existence est plus cachée et plus courte, que quand leur existence est plus longue. Les animaux ont naturellement une certaine faculté de participer à toutes les affections que l’âme peut éprouver, la prudence et l’audace, le courage et la lâcheté, la douceur et la cruauté, et tous les autres sentiments analogues. § 2[201]. Il y en a même qui sont, dans une certaine mesure, susceptibles d’apprendre et de s’instruire, tantôt les uns par les autres, tantôt sous la main de l’homme, pourvu qu’ils aient le sens de l’ouïe, et non seulement tous ceux qui entendent les sons, mais ceux qui peuvent percevoir les différences des signes et les distinguer. § 3[202]. Dans toutes les espèces où il y a mâle et femelle, la nature a établi à peu près les mêmes dissemblances dans le caractère des femelles comparé à celui des mâles. C’est ce qu’on peut observer le plus clairement possible sur l’espèce humaine, sur les espèces un peu grandes, et sur les quadrupèdes vivipares. Le caractère de la femelle est toujours plus doux ; elle s’apprivoise plus vite ; elle souffre plus aisément l’attouchement de nos mains, et elle est plus docile à s’instruire. § 4[203]. Ainsi, les chiennes de Laconie sont de bien meilleure nature que les chiens mâles. La race des chiens de Molossie ne l’emporte pas sur les espèces qu’on trouve ailleurs pour nous aider à la chasse ; mais pour surveiller et suivre le bétail, ils se distinguent par leur courage à combattre les bêtes fauves, aussi bien que par leur grandeur. Les individus nés de croisements de chiens de Molossie et de chiens de Laconie tiennent des deux races un courage rare, et une prodigieuse ardeur au travail.

§ 5[204]. Les femelles ont généralement moins de courage que les mâles, sauf dans l’espèce de l’ourse et de la panthère, où la femelle semble être plus courageuse. Dans toutes les autres espèces, les femelles sont plus douces, plus perfides, moins franches et plus pétulantes ; elles sont aussi plus soucieuses de nourrir leurs petits. Pour les mâles, c’est tout le contraire. Ils sont plus braves, plus sauvages, plus simples dans leurs allures et moins rusés. § 6[205]. On peut trouver la trace de tout cela dans la totalité des animaux, pour ainsi dire ; mais ces phénomènes sont plus sensibles chez les animaux qui ont un caractère plus prononcé ; et par-dessus tous les autres, chez l’homme, parce que la nature de l’homme est achevée, de telle façon que toutes ces affections sont beaucoup plus frappantes en lui. § 7[206]. Ainsi, la femme est bien plus que l’homme disposée à la pitié ; elle pleure bien plus aisément ; elle est aussi plus jalouse que lui et plus portée à se plaindre ; elle aime davantage à injurier et à chercher querelle ; la femme est en outre plus facile à se décourager, et plus rebelle que l’homme à l’espérance ; elle est plus effrontée et plus fausse. Elle se laisse tromper plus aisément ; et elle a plus de rancune, On peut ajouter encore que, dans les animaux, la femelle est plus éveillée que le mâle et plus paresseuse ; et en général, qu’elle a plus de peine à se mettre en mouvement ; elle mange moins. Mais, ainsi qu’on vient de le dire, le mâle a plus de ressources pour secourir les autres ; il est plus brave ; et l’on peut voir, jusque dans les mollusques, que, si une seiche est atteinte d’un coup de trident, le mâle vient au secours de la femelle, tandis que la femelle s’enfuit dès que le mâle est frappé.


CHAPITRE II

Des causes de guerre entre les animaux ; la nourriture et l’habitation sont les principales ; luttes acharnées des phoques ; les carnassiers sont en lutte avec tous les autres ; les soins de l’homme adoucissent beaucoup les animaux ; les crocodiles d’Égypte ; nombreux exemples d’animaux qui sont en guerre ; oiseaux, serpents, quadrupèdes ; quelques espèces vivent en paix ; combats furieux des éléphants les uns contre les autres ; grande différence de courage entre les éléphants ; emploi que les Indiens en font à la guerre ; force prodigieuse des éléphants, renversant des murailles et brisant des palmiers ; chasse à l’éléphant avec des éléphants apprivoisés ; docilité ordinaire de l’éléphant ; moyen de le dompter. — Résumé.


§ 1[207]. Toutes les fois que les animaux habitent les mêmes lieux et qu’ils tirent leur vie des mêmes substances, ils se font mutuellement la guerre. Si la nourriture est par trop rare, les bêtes, même de race semblable, se battent entre elles. C’est ainsi que les phoques d’une même région se font une guerre implacable, mâle contre mâle, femelle contre femelle, jusqu’à ce que l’un des deux ait tué l’autre, ou ait été chassé par lui ; les petits se battent avec non moins d’acharnement. § 2[208]. Tous les animaux sont en guerre avec les carnivores, qui mutuellement sont, eux aussi, en guerre avec tous les autres, puisqu’ils ne peuvent vivre que d’animaux. C’est de là que les devins tirent leurs augures de désunion ou d’union entre les humains, prenant les animaux qui se battent entre eux pour signe de désunion ; et pour signes d’union, ceux qui vivent en bon accord les uns avec les autres.

§ 3[209]. Il serait bien possible qu’une nourriture constamment abondante adoucit singulièrement, à l’égard de l’homme, les animaux qu’il redoute aujourd’hui, parce qu’ils restent sauvages, et que les animaux s’adoucissent également ainsi les uns à l’égard des autres. Le soin qu’on a des animaux en Égypte le prouve clairement ; comme la nourriture leur est donnée sans leur manquer jamais, les plus sauvages eux-mêmes vivent côte à côte, comme le reste. Ils s’apprivoisent par les soins qu’on en a ; et par exemple, en quelques endroits le crocodile s’apprivoise avec le prêtre qui est chargé de le nourrir. On peut voir les mêmes faits se reproduire dans d’autres pays, et dans quelques-uns de leurs cantons.

§ 4[210]. L’aigle et le serpent sont ennemis, parce que l’aigle se nourrit de serpents. L’ichneumon et la phalange sont en guerre, parce que l’ichneumon pourchasse les phalanges. Dans les oiseaux, les tachetés, les alouettes, les pies, le verdier, sont ennemis les uns des autres ; car ils se mangent mutuellement leurs œufs. La corneille et la chouette se battent. Comme, au milieu du jour, la chouette ne voit pas très clair, la corneille vient lui prendre ses œufs, qu’elle dévore ; et la nuit, c’est la chouette qui dévore les œufs de la corneille. L’une est plus forte pendant le jour ; l’autre est plus forte pendant la nuit. § 5[211]. La chouette n’est pas moins en guerre avec l’orchile, qui vient aussi lui manger ses œufs. Dans le jour, tous les petits oiseaux volent autour de la chouette ; et l’on dit que c’est pour l’admirer ; mais en volant autour d’elle, ils lui arrachent les plumes ; aussi, les oiseleurs prennent-ils les petits oiseaux de toute espèce au moyen de la chouette, qui les attire. § 6[212]. L’oiseau surnommé le Sénateur, la belette et la corneille sont en guerre, parce que le sénateur et la belette mangent les œufs de la corneille et ses petits. La tourterelle et la Pyrallis sont ennemis, parce que le lieu où elles trouvent à se nourrir et leur mode de vivre sont les mêmes. Le pic-vert, le Libyen, le milan et le corbeau se font la guerre, parce que le milan ravit au corbeau toutes les proies qu’il peut faire, et que le milan est le plus fort par ses serres et par son vol. C’est donc encore la pâture qui rend ces oiseaux hostiles les uns aux autres.

§ 7[213]. Les oiseaux qui tirent leur nourriture de la mer, ne sont pas entre eux des ennemis moins acharnés : par exemple, le Brenthos, le goéland et la harpé. La buse, le crapaud (grenouille de haie) et le serpent se battent, parce que la buse se nourrit des deux autres. La tourterelle et le verdier sont en guerre ; et c’est le verdier qui tue la tourterelle. Au contraire, c’est la corneille qui tue l’oiseau qu’on nomme le typan. L’ægolie et les autres oiseaux pourvus de serres dévorent le calaris ; et la guerre est entre eux tous. § 8[214]. Elle règne aussi entre le stellion et l’araignée, parce que le stellion la dévore. Il y a guerre encore entre la pipone et le héron, dont la pipone mange les œufs et les petits. L’ægithe et l’âne se font la guerre, et voici comment. L’âne, en passant près des buissons, y frotte ses plaies pour se gratter ; en s’y roulant, et en se mettant à braire, il fait tomber les œufs et les petits, qui, tout effrayés, sortent du nid. L’ægithe, pour repousser le dommage qu’il souffre, vole sur l’âne et lui pique ses plaies. § 9[215]. Le loup fait la guerre à l’âne, au taureau et au renard. Comme il est carnivore, il se jette sur les bœufs, les ânes et les renards. Le renard et le busard n’ont pas d’autre motif de guerre. Le busard est carnivore, et il a des serres ; il fond sur le renard ; et en le frappant, il lui fait des plaies dangereuses. Le corbeau est l’ennemi du taureau et de l’âne, qu’il frappe en volant sur eux, et il leur crève les yeux. § 10[216]. L’aigle fait la guerre au héron ; il l’attaque avec ses serres ; et le héron meurt dans la lutte. L’émerillon est en guerre avec l’ægype ; la crex y est avec le pic-vert, le merle et le verdier, que quelques personnes, trop amies des fables, font naître des cendres d’un bûcher. La crex les poursuit tous, ainsi que leurs petits. La sitte et le trochile font la guerre à l’aigle, dont la sitte brise les œufs ; pour se venger, et aussi comme carnassier, l’aigle est en guerre avec tous les oiseaux.

§ 11[217]. L’anthos est en guerre avec le cheval, parce que le cheval le chasse des pâturages. L’anthos qui se nourrit d’herbes a une taie sur les yeux, et il y voit mal ; mais il imite le hennissement du cheval, qu’il effraye en volant sur lui ; et il le chasse, jusqu’à ce que le cheval le saisisse et le tue. D’ailleurs, l’anthos vit sur le bord des rivières et dans les marais ; il a une belle couleur, et il se nourrit aisément de tout. § 12[218]. L’âne est l’ennemi du côlôte, qui vient dormir dans sa mangeoire, et qui l’empêche de manger en lui entrant dans les naseaux. Il y a trois espèces de hérons, le cendré, le blanc, et celui qu’on appelle l’étoilé. Le héron cendré a de la peine à s’accoupler, et à pondre ; il crie à ce moment, et le sang lui sort par les yeux, à ce qu’on dit, quand il s’accouple ; la femelle fait ses œufs irrégulièrement et en souffrant beaucoup. Le héron fait la guerre à tous les animaux qui lui peuvent nuire : à l’aigle, qui l’enlève ; au renard, qui le mange dans la nuit ; à l’alouette, qui lui vole ses œufs.

§ 13[219]. Le serpent est en guerre avec la belette et le cochon ; avec la belette, quand ils sont tous deux dans le même trou ; car ils ont la même nourriture ; et le cochon mange les serpents. L’émerillon est l’ennemi du renard ; il le frappe de son bec et lui arrache les poils ; il tue ses petits, grâce aux serres dont il est pourvu. Au contraire, le corbeau et le renard s’entendent aisément, parce que le corbeau est hostile à l’émerillon, et que contre lui il prend la défense du renard. § 14[220]. L’ægype et l’émerillon sont les ennemis l’un de l’autre, parce qu’ils sont tous deux des oiseaux pourvus de serres. L’ægype et le cygne font la guerre à l’aigle ; et c’est souvent le cygne qui a le dessus. Il n’y a pas d’espèce d’oiseaux qui se tuent entre eux plus que les cygnes. Il y a des animaux qui sont réciproquement dans une guerre perpétuelle ; d’autres ne sont en guerre que dans certains cas, comme y sont les hommes. Ainsi, l’âne et le pinson (épinier) sont ennemis, parce que les épiniers se nourrissent d’épines, et que c’est aussi des jeunes pousses de l’épine que l’âne se nourrit. § 15[221]. L’anthos, le pinson (épinier) et l’ægithe sont ennemis ; et l’on prétend même que le sang de l’ægithe et de l’anthos ne peuvent pas se mélanger. La corneille et le héron sont amis, comme le sont le schoinion, l’alouette, le laédos et le pic-vert. Le pic-vert vit le long des rivières et dans les lieux bien fourrés, tandis que le laédos ne recherche que les rochers et les montagnes, et ne quitte pas son habitation, où il se plaît. Le piphinx, la harpé et le milan sont amis, ainsi que le renard et le serpent, qui tous deux se cachent en terre, et ainsi que le merle et la tourterelle.

§ 16[222]. Le lion et le thôs sont d’implacables ennemis, parce que, étant l’un et l’autre carnassiers, ils se nourrissent des mêmes proies. Les éléphants se battent furieusement entre eux, et ils se frappent avec leurs défenses. Le vaincu est soumis à un rude esclavage ; et il ne peut souffrir le cri de son vainqueur. On ne saurait croire jusqu’à quel point les éléphants diffèrent en courage les uns des autres. A la guerre, les Indiens emploient les femelles aussi bien que les mâles, quoiqu’elles soient plus petites et beaucoup moins braves. L’éléphant a la force de renverser des murailles, en les frappant de ses défenses énormes ; il appuie aussi son front sur les palmiers jusqu’à ce qu’il les ait courbés ; et alors, en les foulant aux pieds, il les fait tomber sur terre, de toute leur longueur. § 17[223]. Voici d’ailleurs comment on fait la chasse à l’éléphant. Des gens montés sur des éléphants apprivoisés et courageux poursuivent les autres ; et quand ils les ont rejoints, ils les font frapper par les éléphants qu’ils montent, jusqu’à entier accablement. Alors, un conducteur monte dessus et les dirige à l’aide de sa faux. L’éléphant, du reste, ne tarde pas à s’apprivoiser, et il obéit bien vite. Tant que le conducteur reste monté sur sa bête, tous les éléphants qu’il mène sont doux et dociles ; mais une fois qu’il a mis pied à terre, quelques-uns demeurent toujours dociles ; mais les autres cessent de l’être ; et pour dompter ceux qui sont rebelles, on leur lie les jambes de devant avec de fortes cordes, qui les font tenir tranquilles. D’ailleurs, on fait la chasse aux éléphants qui sont déjà grands, aussi bien qu’aux jeunes.

§ 18[224]. Voilà donc comment les animaux dont on vient de parler sont en paix ou en guerre, selon les besoins de leur nourriture, ou selon leur genre de vie.


CHAPITRE III

Des guerres des poissons ; espèces qui s’attroupent ; espèces qui vivent par paires ; espèces ennemies qui se réunissent à certaines époques ; poissons mutilés par d’autres ; les plus forts dévorent les plus faibles.


§ 1[225]. Parmi les poissons, les uns se réunissent en troupes, et vivent en paix les uns avec les autres ; mais ceux qui ne vivent pas en troupes, sont ennemis. Tantôt c’est pendant la gestation, tantôt c’est après la ponte, que les poissons se réunissent. Voici, d’une manière toute générale, quelques espèces qui s’attroupent : les thons, les maenides, les goujons, les bogues, les sauriens, les coracins, les sinodons (dentales), les surmulets, les sphyrènes, les anthias, les élégins, les épis, les sargins, les aiguilles, les mécons, les teuthies, les ioulides, les pélamydes, les maquereaux, les colias, etc. § 2[226]. Dans ces espèces, quelques-unes vivent non seulement en troupes, mais, en outre, par paires. Tous les poissons s’accouplent ; mais ils ne vont par troupes qu’à certains moments, comme on vient de le dire, soit quand ils pondent, soit après qu’ils ont jeté leur frai. Le loup et le muge, qui sont d’implacables ennemis, se réunissent néanmoins les uns aux autres, à certaines époques. § 3[227]. Bien des fois, ce ne sont pas uniquement les individus de même espèce qui se réunissent, mais tous ceux qui ont une nourriture pareille ou analogue, pourvu que cette nourriture soit très abondante. On voit fréquemment des muges et des congres dont la queue est enlevée, jusqu’à l’orifice d’où sortent les excréments, et qui n’en vivent pas moins. Le muge est mangé ainsi par le loup ; et le congre, par la murène. C’est que les plus forts font la guerre aux plus faibles et les dévorent.

§ 4[228]. Voilà pour les poissons de mer.


CHAPITRE IV

Du caractère du mouton ; c’est le plus bête de tous les quadrupèdes ; preuves de sa stupidité ; sottise des chèvres ; elles réellement au froid moins bien que les moutons ; effet du tonnerre sur les moutons et surtout sur les brebis ; soins des bergers ; disposition des moutons et des chèvres durant le sommeil.


§ 1[229]. Ainsi qu’on l’a dit plus haut, le caractère des animaux diffère en lâcheté et en douceur, en courage, en docilité, en intelligence, ou en stupidité. Ainsi, l’on a bien raison de trouver que le mouton a un caractère aussi doux que stupide. De tous les quadrupèdes, c’est le plus bête. Il s’en va dans les landes désertes, sans y rien chercher ; et souvent en plein hiver, il sort de l’étable. S’ils sont surpris par une bourrasque de neige, ils ne veulent pas bouger, à moins que le berger ne les pousse ; et ils se laissent mourir, à moins qu’il n’emporte les mâles, que suit alors le reste du troupeau. § 2[230]. Si l’on prend une chèvre par l’extrémité de sa barbiche, qui est une sorte de chevelure pour elle, toutes les autres s’arrêtent comme en extase, et se mettent à regarder celle-là. Par le froid, les moutons dorment dehors plus volontiers que les chèvres, parce que les chèvres dorment plus tranquillement et aiment à se rapprocher de l’homme ; c’est que les chèvres supportent le froid plus difficilement que les moutons. § 3[231]. Les bergers dressent les moutons à se réunir en courant, quand le bruit du tonnerre se fait entendre ; car si une brebis reste en arrière, sans rejoindre les autres, au moment où il tonne, elle avorte si elle est pleine. Aussi, voit-on le troupeau accourir habituellement à l’étable quand il fait du tonnerre. Les taureaux eux-mêmes, quand, dédaignant le troupeau, ils vont à l’aventure, sont surpris par les bêtes fauves qui les tuent. Les moutons et les chèvres se couchent en se serrant les uns contre les autres, selon les affinités d’espèces ; si l’on en croit les bergers, les chèvres ne se couchent plus nez à nez, après que le soleil a tourné, mais elles se séparent et s’éloignent l’une de l’autre.


CHAPITRE V

De l’habitude des vaches de vivre de compagnie ; une seule entraîne toutes les autres ; affection singulière et dévouement des juments pour les poulains.


§ 1[232]. Les vaches paissent de compagnie, et selon l’habitude qu’elles ont contractée entre elles ; si l’une se met à vagabonder, les autres la suivent. Aussi, les gardiens, s’ils trouvent celle-là, se mettent tout de suite à chercher toutes les autres. § 2[233]. Quand, parmi les juments paissant au même pâturage, l’une vient à périr, les autres se chargent d’élever son poulain. C’est que, en général, le cheval paraît être un animal très susceptible d’affection ; et souvent on voit des juments stériles enlever des poulains à leurs mères pour les adopter ; mais elles les laissent périr faute de lait pour les nourrir.


CHAPITRE VI

Des mœurs du cerf ; prudence de la biche pour sauvegarder ses petits ; sa manière de mettre bas ; retraites qu’elle choisit dans des lieux inaccessibles ; leçons qu’elle donne à ses faons ; le mâle, quand il perd son bois, se retire aussi dans les plus épais fourrés ; croissance successive du bois ; après six ans, il tombe chaque année ; lierre attaché aux cornes d’un cerf ; cerf se guérissant avec des escargots ; manière de prendre les biches, en jouant de la flûte ou en chantant.


§ 1[234]. Parmi les quadrupèdes sauvages, le cerf paraît être un des plus prudents. D’abord, la femelle fait ses petits sur le bord des chemins, parce que les bêtes fauves ne viennent pas les y chercher, crainte des hommes. Puis, après qu’elle a mis bas, elle se hâte de ronger le chorion ; elle court ensuite manger du séséli, et elle revient à ses petits, aussitôt qu’elle en a mangé. Enfin, elle conduit ses faons à des retraites, où elle les habitue à se sauver en cas de danger. C’est d’ordinaire une roche escarpée, qui n’a qu’un seul accès, et où l’on assure qu’elle sait se défendre contre toutes les attaques. § 2[235]. Le mâle, de son côté, quand il s’alourdit, et c’est en automne qu’il devient si gras, ne se montre plus ; il change de retraite, comme s’il sentait qu’à cause de sa graisse il sera plus aisément pris. Il va, pour perdre son bois, dans les endroits les plus difficiles à atteindre et à reconnaître ; et de là, le proverbe si usité : « C’est là que les cerfs perdent leur bois ». On dirait qu’ils ont garde de se laisser voir à un moment où ils ont perdu leurs armes. On prétend que personne encore n’a trouvé la corne gauche d’un cerf, parce qu’il la cache, comme s’il savait qu’elle peut servir à faire un remède. § 3[236]. A un an, les cerfs ne poussent pas encore de cornes ; à cette époque, il n’y en a qu’un léger commencement, par manière de signe ; et ce bois est alors court et velu. Ce n’est qu’à deux ans qu’ils ont des cornes droites comme des pieux ; et alors on appelle ces cerfs des piquets. La troisième année, ils poussent deux branches ; la quatrième année, le bois est plus rude ; et il croît toujours ainsi, jusqu’à six ans. § 4[237]. A partir de cette époque, les cornes repoussent toujours les mêmes ; et l’on ne peut plus distinguer l’âge de la bête à ses cornes. Mais on peut reconnaître les vieux cerfs à deux signes : les uns n’ont plus de dents ; les autres n’en ont que quelques-unes ; et les défenses ne repoussent plus. On appelle Défenses les parties du bois qui penchent en avant, et qui servent à la bête pour se défendre. Les vieux cerfs n’ont plus ces parties ; et les cornes, en se développant, montent tout droit. Le bois tombe tous les ans, et il tombe vers le mois de Thargélion. § 5[238]. A l’époque où le cerf perd son bois, il se cache, ainsi qu’on vient de le dire, pendant le jour ; et il se réfugie dans des fourrés épais pour se préserver des mouches. Durant tout ce temps, ils paissent la nuit dans les fourrés où ils sont ; et ils y restent jusqu’à ce que les cornes soient repoussées. Elles poussent d’abord comme dans une peau ; et, à ce moment, elles sont velues. Quand elles sont plus grandes, l’animal s’expose au soleil pour les mûrir et les sécher. § 6[239]. Enfin, quand l’animal ne sent plus de douleur en frottant son bois contre les arbres, il quitte les lieux qui l’abritaient, prenant courage, parce qu’il a maintenant de quoi se défendre. On a saisi un jour un cerf d’Achaïe qui avait sur son bois un lierre touffu et tout vert ; sans doute, le lierre s’y était implanté, quand les cornes étaient encore toutes tendres, comme il se serait attaché à un arbre en pleine verdure.

§ 7[240]. Un cerf, mordu par une araignée-phalange ou par quelque autre insecte de ce genre, va chercher des escargots, qu’il mange. Un tel breuvage serait peut-être bon aussi pour les hommes ; mais il serait d’un goût repoussant. Dès qu’une femelle a mis bas, elle dévore aussitôt le chorion, qui serait bien difficile à lui prendre ; car elle le saisit avant qu’il ne tombe par terre. Le chorion passe pour être un remède utile. § 8[241]. On prend les biches en jouant de la flûte et en chantant ; et elles se laissent charmer par le chant. Un des deux chasseurs, qui se réunissent, chante ou joue de la flûte devant l’animal, sans se cacher ; l’autre, qui est par derrière le cerf, le frappe quand son camarade lui fait signe que c’est le moment. Tant que la biche dresse ses oreilles, elle entend à merveille ; et il n’est pas possible de la surprendre ; mais du moment qu’elle les baisse, elle n’entend plus rien, et on la surprend.


CHAPITRE VII

De l’instinct et des ruses des animaux ; manœuvres de l’ourse pour sauver ses petits, les chèvres de Crète, cherchant le dictame ; chiens mangeant de l’herbe pour se guérir ; ruses de la panthère ; l’ichneumon se couvrant de poussière ; le trochile nettoyant pour sa pâture la gueule du crocodile, qui le ménage ; la tortue mangeant de l’origan, et la belette mangeant de la rue ; le serpent-dragon avalant du suc de laitue ; cigognes pansant leurs blessures ; belette étouffant les oiseaux ; les hérissons sentent à l’avance les changements de temps ; parti utile qu’un Byzantin avait su tirer de cette observation.


§ 1[242]. Lorsque les ourses fuient devant le chasseur, elles poussent leurs petits devant elles ; et elles les portent, en les prenant dans leur gueule. Si elles sont sur le point d’être prises, elles grimpent sur les arbres. En sortant de leurs tanières de retraite, ce que font tout d’abord les petits, c’est de manger de l’arum, ainsi que nous l’avons déjà dit ; et ils rongent du bois, comme pour faire pousser leurs dents. § 2[243]. Une foule d’autres quadrupèdes savent aussi fort prudemment soulager leurs maux. On prétend que les chèvres sauvages de Crète, quand elles sont percées d’une flèche, se mettent à chercher le dictame, qui paraît avoir la propriété de faire sortir le fer de la plaie. Les chiens malades savent se faire vomir en allant manger de certaine herbe. § 3[244]. Quand la panthère a par hasard avalé le poison qu’on appelle « la mort aux panthères », elle cherche des excréments humains, qui la doivent guérir, remède qui, au contraire, tue les lions. Les chasseurs le savent si bien qu’ils suspendent à un arbre de ces excréments dans un vase, pour que la bête ne s’en aille pas au loin ; car la panthère, sautant après le vase et espérant l’atteindre, meurt à la peine. On assure encore que, sachant que son odeur attire d’autres animaux, elle se cache pour les chasser ; et quand ils approchent, elle les surprend, y compris même des cerfs. § 4[245]. Quand l’ichneumon d’Égypte voit le serpent nommé l’aspic, il ne cherche pas à l’attaquer avant d’avoir appelé à son aide d’autres ichneumons ; pour se garantir des coups et des morsures, ils se couvrent de boue, en se trempant d’abord dans l’eau, et en se roulant ensuite dans la poussière. Lorsque le crocodile ouvre la mâchoire, les trochiles accourent, en volant, lui nettoyer les dents. Le trochile y trouve à manger ; et le crocodile, à qui cela fait du bien, le reconnaît et ne lui fait pas de mal ; quand le trochile veut sortir, le crocodile remue le cou de manière à ne pas le mordre. § 5[246]. La tortue, si elle avale une vipère, va manger de l’origan, et l’on a constaté le fait, de cette façon : quelqu’un qui avait vu une tortue faire plusieurs fois la même chose, et qui après avoir avalé l’origan pouvait retourner à une autre vipère, arracha l’origan, et la tortue, privée de ce remède, mourut bientôt. Quand la belette doit lutter contre un serpent, elle mange d’abord de la rue, dont l’odeur est détestée du serpent. Le serpent-dragon, quand il est malade en automne, avale du suc de laitue sauvage ; et c’est là un fait qui a été fréquemment observé. § 6[247]. Quand les chiens ont des vers, ils mangent du blé en herbe. Les cigognes et d’autres oiseaux savent, s’ils ont reçu quelque blessure dans le combat, y appliquer de l’origan. Bien des gens ont vu la fouine, se battant contre un serpent, le saisir au cou. La belette aussi montre de l’intelligence dans sa manière de tuer les oiseaux ; elle les étouffe, comme le loup étrangle les moutons. C’est surtout aux serpents chasseurs de rats que la belette fait la guerre, parce qu’elle-même se nourrit aussi de rats.

§ 7[248]. Bien des fois, on a pu observer que les hérissons privés sentent les changements de vents, selon qu’ils soufflent du nord ou du midi ; les uns changent alors les ouvertures des trous qu’ils se font en terre ; les autres, qui vivent dans nos maisons, passent d’un mur à l’autre. Aussi, rapporte-t-on qu’une personne de Byzance qui avait observé cet instinct du hérisson, s’était fait une réputation en prédisant le temps à coup sûr. Le putois est à peu près de la grosseur d’un des plus petits chiens de Malte. Son pelage velu, sa forme, son ventre blanc en dessous et la méchanceté de son caractère, le rapprochent de la belette. On l’apprivoise très aisément ; mais il ravage les ruches d’abeilles, dont il aime beaucoup le miel. Il mange aussi les oiseaux, comme les chats. On prétend que la verge de cet animal est osseuse, et qu’elle est un remède excellent contre la strangourie. On la racle pour la donner aux malades.


CHAPITRE VIII

De l’industrie des animaux, souvent pareille à celle de l’homme ; l’hirondelle et son nid merveilleusement construit ; soins de l’hirondelle pour nourrir et élever proprement ses petits ; des mœurs du pigeon ; sollicitude du mâle pour les petits, et ses violences contre sa femelle ; union habituelle des pigeons, sauf de rares exceptions ; humeur batailleuse des pigeons ; leur manière de boire ; durée de la vie des ramiers ; seule infirmité que la vieillesse leur donne ; oiseleurs crevant les yeux aux appeaux ; en général, les mâles vivent plus longtemps que les femelles ; exceptions pour les moineaux ; migrations des tourterelles ; migrations singulières des pinsons.


§ 1[249]. On peut observer, en général, dans les manières de vivre des animaux beaucoup d’actes qui ressemblent à la vie même de l’homme ; et c’est dans les petits animaux, plutôt encore que dans les grands, qu’on peut voir la sûreté de leur intelligence. Ainsi, dans les oiseaux, on pourrait citer tout d’abord la façon dont l’hirondelle fait son nid. Elle suit les mêmes règles que nous suivrions pour mêler la paille à la boue, entrelaçant cette boue dans des brindilles de bois ; et si la boue lui manque, elle se baigne dans l’eau, et va rouler ses ailes dans la poussière. § 2[250]. Elle construit son nid absolument comme des hommes le feraient, mettant d’abord en dessous les matériaux les plus durs, et proportionnant la grandeur du nid à la sienne. Le mâle et la femelle prennent le même soin des petits ; elle donne à chacun d’eux leur pâture, distinguant, comme si elle en avait l’habitude, celui qui l’a reçue le premier, afin de ne pas lui en donner deux fois. Dans les premiers temps, c’est elle qui rejette leur fiente hors du nid ; mais quand ils sont plus grands, elle leur apprend à se tourner en dehors pour fienter. § 3[251]. On peut faire des observations toutes pareilles sur les pigeons, qui présentent des faits analogues. Ils ne s’accouplent jamais à plusieurs, et ils ne cessent leur union que quand l’un des deux est devenu veuf ou veuve. Au moment de la ponte et de la douleur qu’elle cause, la sollicitude du mâle et ses colères sont vraiment étonnantes. Si la femelle met quelque paresse à entrer dans le nid pour y pondre, il la bat et la force à entrer. Une fois que les petits sont nés, il va chercher de la terre salée, qu’il mâchonne, et il l’introduit dans le bec des petits qu’il ouvre, leur apprenant ainsi à manger. Quand les petits vont sortir du nid, le mâle recommence à cocher. § 4[252]. C’est là d’ordinaire l’union des pigeons entre eux ; cependant, il y a des femelles, même parmi celles qui ont des mâles, qui s’accouplent avec d’autres. Cet oiseau est du reste batailleur ; ils se battent entre eux : et il en est qui s’introduisent de force dans le nid de leurs voisins ; mais c’est rare. Loin du nid, ils se battent moins ; mais auprès du nid, ils se battent jusqu’à la mort. § 5[253]. Les pigeons, les ramiers et les tourterelles ont cette particularité de ne relever la tête, en buvant, que quand ils ont assez bu. La tourterelle et la femelle du ramier n’ont jamais chacune que le même mâle ; et elles n’en acceptent pas d’autre. Le mâle et la femelle couvent également tous les deux. On ne distingue guère la femelle et le mâle que par l’examen des viscères intérieurs.

§ 6[254]. Les ramiers vivent très-longtemps, puisqu’on en a vu de vingt, vingt-cinq et trente ans, parfois même de quarante. A mesure qu’ils vieillissent, leurs ongles s’allongent ; mais les gens qui les élèvent les leur coupent. Il ne paraît pas que la vieillesse leur cause d’autre infirmité, du moins autant qu’on peut le voir. Les tourterelles et les pigeons auxquels les éleveurs crèvent les yeux, pour en faire des appeaux, vivent encore huit ans. Les perdrix vivent à peu près quinze ans. Les ramiers et les tourterelles font toujours leur nid dans les mêmes endroits.

§ 7[255]. Généralement, les mâles vivent plus de temps : mais on assure que, dans les oiseaux dont nous venons de parler, c’est le mâle qui meurt avant la femelle, et l’on s’appuie sur l’observation des oiseaux élevés dans les maisons, comme appeaux. On dit encore que les mâles, parmi les moineaux, ne vivent qu’un an ; on en donne pour preuve qu’à l’époque du printemps, on n’en voit jamais qui aient tout d’abord les plumes noires du dessous du cou, tandis qu’ils les ont plus tard ; ce qui démontre qu’il n’en reste pas un de l’année précédente. On prétend encore que les femelles des moineaux vivent plus que les mâles, attendu qu’on en prend 614 avec des jeunes, et qu’on reconnaît celles-là aux bords du bec, qui sont plus durs. Les tourterelles vont vivre en été dans les climats froids, et en hiver dans les climats chauds. Au contraire, les pinsons cherchent, l’été, les climats chauds, et en hiver, les climats froids.


CHAPITRE IX

Des oiseaux qui ne font pas de nids, mais seulement un trou dans la poussière du sol ; de la ponte et de l’incubation des cailles et des perdrix ; ruse de la perdrix pour écarter le chasseur de sa nichée ; nombre d’œufs que fait la perdrix ; caractère très-mauvais de la perdrix ; les mâles empêchent la femelle de couver afin de s’accoupler avec elle ; efforts de la perdrix pour sauver ses œufs du mâle et des chasseurs ; combats acharnés des mâles entre eux ; le vainqueur coche le vaincu, ce qui arrive aussi dans les cailles et les coqs ; manèges des perdrix sauvages mâles, selon que l’appeau est femelle ou mâle ; tentatives réitérées des mâles pour s’en approcher ; jalousie des mâles qui restent à distance ; lascivité excessive des perdrix et des cailles.


§ 1[256]. Les oiseaux pesants ne se font pas de nids, parce qu’un nid n’est pas utile à des oiseaux qui volent si mal, comme les cailles, les perdrix et tous ceux qui leur ressemblent. Mais ils font dans la poussière un creux sur un endroit uni, ne pondant jamais ailleurs ; et ils se cachent sous quelque épine ou quelque matière analogue, pour repousser les attaques des éperviers et des aigles ; cela fait, ils y pondent et y couvent. Dès que les petits sont débarrassés de la coquille, ils les chassent, parce qu’ils sont hors d’état de leur apporter, à cause de leur vol, la pâture nécessaire. § 2[257]. Les cailles et les perdrix se reposent en réunissant leurs petits sous elles, comme le font les poules. Elles ne pondent pas et ne couvent pas toujours à la même place, de crainte qu’on ne découvre leur retraite, si elles y demeuraient trop longtemps. Quand le chasseur tombe sur le nid, la perdrix se roule, en se sauvant, comme si elle allait se laisser prendre ; elle l’attire par l’espoir de la saisir, pour donner le temps à la nichée de s’échapper ; après ce manège, elle s’envole et rappelle les petits auprès d’elle. La perdrix n’a pas moins de dix œufs, et parfois elle en a jusqu’à seize. § 3[258]. La perdrix est d’ailleurs, ainsi qu’on l’a dit, un oiseau malicieux et rusé. Au printemps, les mâles s’en vont de la troupe en chantant et en se battant, par paire avec la femelle que chacun d’eux a prise. Mais comme les mâles sont très-lascifs, pour empêcher la femelle de couver, ils dispersent les œufs et les brisent, quand ils les trouvent. La femelle les défend comme elle peut, et elle se sauve pour aller pondre ailleurs. Souvent, il arrive que, pressée de pondre, elle dépose ses œufs au hasard, pourvu que le mâle soit hors de portée ; et afin de les sauver tous en masse, elle n’y revient pas. Si quelque chasseur la voit, elle l’éloigné de ses œufs, comme pour ses petits, en se jetant encore devant lui, jusqu’à ce qu’elle l’ait mis hors de voie. § 4[259]. Une fois que la femelle couve après avoir pu se sauver, les mâles poussent des cris et se battent entre eux. C’est à ce temps qu’on les appelle des veufs. Le mâle vaincu, en se battant, suit son vainqueur et ne se laisse cocher que par lui. Si un mâle est vaincu, il est coché par le second ou par tout autre, en cachette du vainqueur. Les choses ne se passent pas ainsi dans toute l’année, mais seulement à certaines époques. § 5[260]. Il en est de même des cailles ; et parfois aussi, on peut faire ces observations sur les coqs. Dans les temples où l’on nourrit des coqs sans leurs femelles, tous les coqs viennent successivement cocher le nouveau venu. De même, les perdrix domestiques cochent les perdrix sauvages, les pillent et les maltraitent de toutes façons. § 6[261]. Le chef des perdrix sauvages se précipite en criant au-devant de celle qui sert d’appeau, comme pour la combattre ; si le premier champion est pris dans les filets, un autre s’avance pour lutter, en poussant les mêmes cris. Voilà ce qu’ils font si c’est un mâle qui sert d’appeau ; mais si c’est une femelle qui chante et que le chef des mâles sauvages lui réponde en criant, aussitôt tous les mâles se réunissent pour le frapper, et ils l’éloignent de la femelle, parce qu’il va à la femelle au lieu de venir à eux ; alors, celui-là se retire en silence, de peur qu’un autre qui entendrait son cri ne vienne combattre contre lui. § 7[262]. Quelquefois aussi, il arrive, au dire de gens qui en ont été les témoins, que le mâle qui s’approche de la femelle la force à se taire, de peur que, si les autres mâles l’entendaient, il ne fût forcé à se battre contre eux. Mais ce n’est pas seulement un chant qu’a la perdrix ; elle peut encore siffler et produire plusieurs autres espèces de sons. § 8[263]. Souvent, une femelle occupée à couver quitte ses œufs, quand elle voit le mâle s’approcher de la perdrix d’appeau, et elle va se présenter à lui pour se faire cocher par lui, et le détourner de la femelle qui sert à la chasse. Les perdrix et les cailles ont une telle ardeur pour l’accouplement qu’elles se jettent sur les perdrix et les cailles d’appeau, et se posent sur leur tête.


CHAPITRE X

De quelques autres oiseaux qui nichent à terre tout en volant bien ; l’alouette, la bécasse, etc. ; du pic, qui frappe les chênes, pour en faire sortir les vers dont il fait sa nourriture ; ses ongles très-forts ; trois espèces de pics ; il perce si bien les arbres qu’il finit par les faire tomber ; adresse d’un pic apprivoisé pour briser et manger une amande.


§ 1[264]. Telles sont donc les observations qu’on a pu faire sur l’accouplement et la chasse des perdrix, et sur le reste de leur détestable caractère. Ainsi qu’on l’a dit, elles font leurs petits à terre, comme nichent aussi les cailles et quelques autres oiseaux, parmi lesquels on peut encore compter l’alouette, la bécasse, avec la caille, qui ne nichent pas sur les arbres, mais sur le sol. § 2[265]. Au contraire, le pic, frappeur de chênes, ne niche point à terre. Il frappe les chênes pour en faire sortir les larves et les vers, et les saisir avec sa langue, qui est large et longue. Il grimpe très-vite sur les arbres, et en tous sens, même la tête en bas, comme le font les stellions. Il a des ongles plus forts que ceux des geais, et la nature les lui a donnés pour qu’il pût se cramponner solidement aux arbres ; et c’est en y enfonçant ses ongles qu’il peut y marcher si sûrement. § 3[266]. Il y a une espèce de pic plus petit que le merle, et qui a quelques petites taches rougeâtres. Une autre espèce est un peu plus grosse que le merle ; et une troisième espèce n’est qu’un peu plus petite que la femelle du coq. § 4[267]. Le pic niche sur les arbres, comme on vient de le dire ; et bien que ce soit sur tous les arbres, c’est particulièrement sur les oliviers. Il mange les fourmis et les larves qu’il tire des arbres. On assure qu’en cherchant ces larves, il creuse si bien les arbres qu’il finit par les faire tomber. Un pic apprivoisé plaçait une amande dans la fente d’un morceau de bois et l’y ajustait de manière qu’elle pût recevoir son coup ; puis au troisième coup de bec, il la brisait, et il mangeait la partie tendre de l’intérieur.


CHAPITRE XI

Des grues et de leur intelligence dans leurs migrations, dans la marche de leurs volées, dans leur vigilance à terre ; intelligence des pélicans pour faire ouvrir les coquillages qu’ils mangent.


§ 1[268]. Les grues montrent aussi de l’intelligence dans une foule de choses. Leurs migrations sont très-lointaines ; et elles élèvent prodigieusement leur vol pour voir au loin. Quand il y a des nuages et qu’elles craignent un mauvais temps, elles volent à terre pour s’y arrêter. Elles ont aussi la prudence de se donner un chef ; et elles placent à la queue de la volée quelques grues qui sifflent, pour qu’on les entende en tête. Quand elles s’arrêtent, toutes se mettent à dormir, la tête cachée sous l’aile, se tenant sur une seule patte alternativement ; maïs le chef, qui a la tête à l’air, observe et voit les choses ; et s’il s’aperçoit de quelque danger, il donne le signal par un cri. § 2[269]. Les pélicans, qui vivent sur le bord des rivières, avalent des coquillages, gros et lisses ; et quand ils les ont échauffés dans la poche qui est en avant de leur estomac, ils les rejettent, pour que, ces coquillages s’ouvrant alors, ils puissent manger la chair qui s’y trouve.


CHAPITRE XII

Des demeures des oiseaux sauvages ; causes de leur construction ; intelligence de certains oiseaux ; stupidité des autres ; l’épervier ; la chasse que font les oiseaux de proie n’est pas la même dans toutes les saisons ; le vautour ; opinion d’Hérodore, père de Bryson, le sophiste ; retraites des vautours ; ils ne font qu’un ou deux œufs au plus ; le roitelet.


§ 1[270]. Les demeures des oiseaux sauvages sont calculées pour qu’ils puissent à la fois y vivre, et y élever leurs petits en sûreté. Les uns aiment beaucoup leur progéniture et la soignent passionnément ; les autres sont tout le contraire. Ceux-là sont pleins d’adresse pour se procurer tout ce qu’il faut à leur existence ; ceux-là ne savent rien faire. § 2[271]. Il en est qui font leurs demeures dans des ravins, dans des trous, dans des rochers, comme l’oiseau qu’on appelle l’oiseau des ravins (charadrios). Il est fort laid de couleur et de chant ; il ne se montre que la nuit ; et il se cache de jour. L’épervier niche aussi dans les lieux les plus escarpés. Tout carnassier qu’il est, il ne mange pas le cœur des oiseaux dont il fait sa proie. Quelques personnes l’ont observé sur la caille et sur la grive ; d’autres ont fait la même observation sur d’autres oiseaux. § 3[272]. Il y a aussi de grands changements dans la manière dont chassent les oiseaux de proie ; et ils ne chassent pas leur proie en été absolument comme en hiver. On prétend quelquefois que jamais personne n’a vu, ni les petits, ni le nid d’un vautour ; et c’est ce qui fait qu’Hérodore, le père de Bryson, le sophiste, soutenait que les vautours doivent venir de quelque région étrangère et fort élevée, puisqu’on les voit, disait-il, arriver tout à coup en foule, sans que personne sache d’où ils partent. C’est qu’en effet le vautour pond dans des lieux inaccessibles ; et qu’il n’est pas indigène dans beaucoup de pays. Il ne fait qu’un œuf, ou deux tout au plus.

§ 4[273]. Quelques oiseaux habitent les montagnes et les forêts, comme la huppe et le Brenthos, Ce dernier oiseau se nourrit aisément partout, et il chante. Le roitelet se cache dans les fourrés et dans les grottes ; il est difficile à prendre et prompt à fuir, parce qu’il est très-craintif ; d’ailleurs, il se nourrit sans peine, et il est assez industrieux. On l’appelle le Sénateur et le Roi ; aussi, prétend-on que l’aigle lui fait la guerre.


CHAPITRE XIII

Des oiseaux vivant aux bords des eaux ; le cinele ; sa conformation vicieuse ; des oiseaux palmipèdes ; quelques oiseaux fissipèdes vivent aussi sur le bord de l’eau ; l’anthos ; le catarrhacte ; le cygne ; son caractère plein de douceur ; sa lutte contre l’aigle ; son chant ; témoignages des navigateurs ; la cymindis ; citation d’Homère ; la hybris ; ses combats contre l’aigle ; combats furieux des grues entre elles.


§ 1[274]. Certains oiseaux vivent sur le bord de la mer, par exemple, le Hoche-queue (cincle). Il est rusé et très-difficile à attraper ; mais une fois pris, on l’apprivoise fort aisément. On peut le trouver mal fait, parce qu’il n’est pas maître du mouvement des parties postérieures de son corps. § 2[275]. Tous les oiseaux palmipèdes vivent aux bords de la mer, des rivières et des lacs, parce que la nature elle-même cherche ce qui est convenable à chacun des êtres. Beaucoup d’oiseaux fissipèdes vivent aussi près des eaux et des étangs. Ainsi, l’anthos vit auprès des rivières ; il est d’une couleur superbe, et il trouve partout sa nourriture. § 3[276]. Le catarrhacte habite le bord de la mer ; et quand il plonge, il reste sous l’eau à peu près le temps qu’il faudrait à l’homme pour parcourir la longueur d’un plèthre. C’est un oiseau un peu plus petit que l’épervier.

§ 4[277]. Les cygnes sont des palmipèdes, vivant sur le bord des fleuves et des marécages, où ils trouvent facilement à vivre ; ils sont de mœurs douces, pleins de tendresse pour leurs petits, et ils deviennent très-vieux. Quand l’aigle est le premier à attaquer, le cygne en est vainqueur et le repousse ; mais il ne commence jamais la guerre. Les cygnes chantent ; et ils chantent surtout quand leur mort approche. Ils volent jusqu’en haute mer ; et des navigateurs, qui allaient en Libye, ont rencontré en mer des troupes de cygnes qui chantaient d’une voix lamentable ; ils en ont vu quelques-uns mourir sous leurs yeux. § 5[278]. La Cymindis se montre très-rarement, parce que cet oiseau habite les montagnes ; il est de couleur noire, et de la grosseur d’un épervier, du genre qu’on appelle Tue-pigeon ; il est de forme allongée, et il est maigre. C’est en Ionie, qu’on le nomme Cymindis ; et Homère en fait mention dans l’Iliade :

Les dieux l’appellent Chalcis,

Et les hommes l’appellent Cymindis.

§ 6[279]. La Hybris, que l’on confond quelquefois avec le Ptynx, ne se montre pas de jour, parce qu’elle a une mauvaise vue ; et elle chasse la nuit, comme chassent également les aigles. Elle lutte aussi contre l’aigle avec tant de fureur que souvent les bergers les prennent vivants tous les deux à la fois. Elle ne pond que deux œufs, et elle niche dans les rochers et dans les cavernes. § 7[280]. Les grues aussi se battent si furieusement entre elles que les deux qui se battent se laissent prendre, toutes vivantes, par les pâtres qui surviennent. La grue ne pond également que deux œufs.


CHAPITRE XIV

De la pie ; ses cris très-variables ; nombre de ses œufs ; son nid de crin et de laine ; sa prévoyance ; les grues et les méropes nourris, dit-on, par leurs petits dans leur vieillesse ; description du mérope ; nombre de ses œufs ; singularité de son nid ; le verdier ; on nid fait aussi de crin et de laine ; nid charmant du serin ; nid du Cinnamome ; manière des gens du pays de se procurer de la cannelle.


§ 1[281]. La kitta change beaucoup ses cris, et l’on peut dire qu’elle en a tous les jours un nouveau. Elle pond en général neuf œufs ; elle bâtît son nid sur les arbres, avec du crin et de la laine. Pour la saison où les glands ne donnent plus, elle en fait provision, en les cachant. § 2[282]. On répète communément que les grues sont nourries à leur tour par leurs petits. On raconte aussi que les méropes sont nourris par leurs petits, non pas seulement quand ils sont vieux, mais dès le moment que les jeunes sont capables de le faire. Le père et la mère restent dans le nid pour ne plus le quitter. La couleur des ailes de l’oiseau est jaune en dessous, et le dessus est bleuâtre comme chez les halcyons ; l’extrémité de l’aile est rouge. Le mérope pond six ou sept œufs, à l’automne ; et il les dépose dans les lieux escarpés, où la terre est molle. Il y descend jusqu’à quatre coudées de profondeur. § 3[283]. Le verdier, ainsi appelé parce que le dessous de son corps est verdâtre, est de la grosseur de l’alouette ; il fait quatre ou cinq œufs. Il compose son nid avec de la consoude, qu’il arrache jusqu’à la racine, et il le tapisse de crin et de laine. C’est ce que font aussi le merle et la pie, qui emploient les mêmes matériaux pour leur nid, à l’intérieur. Le nid de la mésange est bâti non moins artistement. Entrelacé comme il l’est, on le prendrait pour une pelote de lin, et l’oiseau n’y laisse qu’une petite ouverture.

§ 4[284]. Les gens du pays affirment que l’oiseau nommé le Cinnamome apporte aussi, on ne sait d’où, la matière appelée de ce nom, et qu’il en compose son nid. Il le place sur des arbres et dans les branches les plus hautes. Les indigènes font tomber ce nid à coup de flèches garnies de plomb, et ils recueillent le Cinnamome de celui que l’oiseau a apporté.


CHAPITRE XV

De l’halcyon ; sa grosseur ; ses couleurs ; son bec ; description de son nid, de forme sphérique allongée ; construction très-solide et très-industrieuse de ce nid ; sa résistance ; son étroite ouverture ; il est fait avec des arêtes de poisson ; nombre des œufs de l’halcyon ; sa nourriture ; il s’accouple durant toute sa vie.


§ 1[285]. L’halcyon n’est pas beaucoup plus gros qu’un moineau ; sa couleur est mélangée de bleu, de vert et de pourpre tendre. Ce mélange est répandu sur tout son corps, ses ailes, son cou, sans que nulle part aucune de ces couleurs soit isolée § 2[286]. Son bec est jaunâtre, long et mince. Telle est la forme de l’oiseau. Son nid ressemble tout à fait à ce qu’on appelle boules marines et écume de mer, si ce n’est que la couleur est différente et qu’elle tire sur le roux. La forme se rapproche beaucoup de celle d’une courge, dont le col est allongé ; la dimension est celle d’une grosse éponge, cette dimension étant d’ailleurs plus grande ou plus petite. § 3[287]. Ces nids sont recouverts d’une sorte de toiture ; et ils ont la partie solide très-serrée, ainsi que l’intérieur. En le frappant avec un fer aigu, on ne le brise pas du premier coup ; mais si, en le frappant ainsi, on le presse avec la main, le nid se réduit en morceaux, comme taboulé marine. L’ouverture en est étroite et ne laisse qu’une entrée resserrée, de telle sorte que, si la mer renverse le nid, l’eau n’y peut pas pénétrer. Les trous en ressemblent beaucoup à ceux de l’éponge. § 4[288]. On ne sait pas au juste de quoi l’halcyon compose son nid. Ce qui semble le plus vraisemblable, c’est qu’il est fait avec les arêtes de l’Aiguille ; car l’halcyon vit de poisson. Il remonte aussi les rivières. Ses œufs sont généralement au nombre de cinq. Il peut s’accoupler durant toute sa vie ; et il commence à quatre mois.


CHAPITRE XVI

De la huppe et de son nid ; son plumage ; de la mésange ; sa fécondité ; sa langue sans pointe, comme celle du rossignol ; l’oiseau des marais ; le foulon ; la crex ; la sitte ; la chouette et ses habitudes ; son intelligence ; le certhius ; les épiniers et leur vie difficile.


§ 1[289]. La huppe fait son nid presque en entier avec de la fiente humaine ; elle change de plumage été et hiver, comme presque tous les oiseaux sauvages. § 2[290]. La mésange est l’oiseau, dit-on, qui a le plus d’œufs. Quelques personnes prétendent que c’est l’oiseau appelé la Tête-noire qui en fait le plus, toutefois après le moineau de Libye. On a vu la mésange avoir jusqu’à dix-sept œufs. Parfois même, elle en a plus de vingt, et toujours en nombre impair, à ce qu’on dit. Elle fait aussi son nid dans les arbres, et elle se nourrit de larves. § 3[291]. Une particularité de la mésange, qu’elle partage avec le rossignol, c’est que, contrairement au reste des oiseaux, elle n’a pas de pointe à la langue. § 4[292]. L’Ægithe vit de tout ; il fait beaucoup de petits ; et il boite d’une patte. Le Chlorion est facile à instruire ; et il est industrieux à trouver sa vie. D’ailleurs, il vole mal, et il a une vilaine couleur.

§ 5[293]. L’éléa (l’oiseau des marais) se nourrit aussi aisément qu’aucun autre oiseau ; en été, il se met dans un lieu exposé au vent, et à l’ombre ; en hiver, il choisit une place en plein soleil, et il regarde de tous côtés, perché sur les roseaux qui croissent au bord des marais. Il est d’ailleurs tout petit ; mais il a la voix assez forte. § 6[294]. L’oiseau qu’on appelle le gnaphalos (le Foulon) a également une forte voix ; il a une belle couleur ; il se nourrit sans difficulté ; et il est d’une jolie forme. C’est sans doute un oiseau étranger ; car on ne le voit que rarement dans les pays où il ne naît pas. § 7[295]. La Crex est d’un naturel batailleur ; elle est pleine d’intelligence pour tout ce qui regarde sa nourriture ; mais sa vie est du reste assez misérable. L’oiseau qu’on nomme la Sitte est aussi d’un naturel belliqueux ; mais elle se laisse facilement prendre ; elle devient domestique, et on la nourrit sans peine. On l’appelle la pharmacienne, parce qu’elle a beaucoup de connaissance. Elle fait beaucoup d’œufs ; elle élève soigneusement ses petits, et elle vit de ce qu’elle trouve en frappant les arbres. § 8[296]. L’aegolios (la chouette) ne sort que la nuit pour chercher sa nourriture ; elle ne paraît presque jamais dans le jour ; et elle fait sa demeure des rochers et des cavernes, où elle se plaît également. Elle a beaucoup d’intelligence et d’industrie pour se procurer sa subsistance. Un tout petit oiseau nommé le Certhius est d’un naturel hardi, et il habite dans les arbres, où il vit de vers. Il est fort intelligent pour trouver sa nourriture ; et sa voix est très-claire. Les épiniers sont au contraire des oiseaux qui ont beaucoup de peine à vivre ; leur couleur est aussi très-laide ; mais ils ont une voix retentissante.


CHAPITRE XVII

Du héron et de ses trois espèces ; la première espèce de héron noir ; le héron blanc ; et le héron étoile, le plus paresseux de tous ; la phoyx, qui se nourrit surtout d’yeux d’oiseaux.


§ 1[297]. Parmi les hérons, le noir, ainsi qu’on l’a déjà dit, souffre beaucoup dans l’accouplement ; il est d’ailleurs industrieux ; il sait apporter la pâture au nid, et il chasse volontiers, s’exerçant dans le jour. Sa couleur est vilaine ; et il a toujours le ventre relâché. Quant aux deux autres espèces sur les trois que l’on compte, le héron blanc est d’une couleur superbe ; il s’accouple sans douleur. Il niche et il pond volontiers sur les arbres ; il se nourrit dans les marais, les lacs, les plaines et les prairies. Le héron étoilé est surnommé le Paresseux ; et la fable le fait descendre anciennement d’esclaves ; conformément à son surnom, il n’y a pas d’oiseau plus paresseux que lui. § 2[298]. Voilà donc la vie des hérons. L’oiseau qu’on appelle la phoyx se distingue de tous les autres en ce qu’elle se nourrit presque uniquement d’yeux d’oiseaux ; aussi est-elle en guerre avec la harpe, qui recherche la même nourriture.


CHAPITRE XVIII

Du merle et de ses deux espèces ; l’une noire, et l’autre blanche, à Cyllène en Arcadie ; le laïus ; la grive et ses trois espèces ; l’oiseau bleu de Nisyros ; il vit dans les pierres ; il a les pattes très-courtes.


§ 1[299]. Il y a deux espèces de merles : l’un, qui est noir et qu’on trouve partout ; l’autre, qui est à demi blanc et à peu près de la même grandeur ; il a aussi à peu près le même chant. Ce dernier se trouve à Cyllène en Arcadie ; et on ne le rencontre absolument que là. Le laïus, parmi les merles, ressemble au merle noir ; il est un peu plus petit ; il fait ses demeures des rochers et des tuiles ; il n’a pas le bec rouge, comme le merle. § 2[300]. La grive est de trois espèces. D’abord, celle qui se nourrit de gui, et qui ne mange que du gui et de la résine ; celle-là est de la grosseur d’une pie. Une autre espèce qu’on appelle la Chevelue, a un cri perçant, et elle est grosse comme le merle. La troisième enfin est celle qu’on appelle llias ; c’est la plus petite des trois, et c’est la moins mouchetée.

§ 3[301]. Un oiseau de roches qu’on appelle l’oiseau bleu, se montre surtout dans l’Ile de Nisyros ; et il demeure dans les pierres. Il est un peu plus petit que le merle, et un peu plus gros que le pinson ; il a les pattes grandes (noires) ; il grimpe le long des rochers ; et tout son corps est bleuâtre. Son bec est mince et long ; ses pattes sont aussi courtes que celles de la Pipô (du Pic).


CHAPITRE XIX

Quelques détails sur divers oiseaux ; le chlorion, la tête-molle, le pardalus, le collyrion ; des trois espèces de geais ; geais palmipèdes de Lydie et de Phrygie ; les deux espèces d’alouettes ; l’ascalope, l’étourneau ; les ibis d’Egypte ; les uns, blancs ; les autres, noirs ; leur’répartition singulière dans les parties diverses de l’Egypte ; les ducs et leurs deux espèces, le duc-perpétuel et le duc de passage ; époque à laquelle ils paraissent ; ignorance où l’on est de leur reproduction.


§ 1[302]. Le chlorion a le corps entier tout jaune. Quand il fait froid, on ne le voit plus ; et c’est surtout vers le solstice d’été qu’il se laisse voir. Il s’en va au lever de l’Arcture. Il est de la grosseur de la tourterelle. § 2[303]. L’oiseau nommé Tête-molle se perche toujours au même endroit ; et c’est là qu’on le prend. Voici sa forme : il a la tête forle et presque cartilagineuse ; il est un peu plus petit qu’une grive ; son bec est très-fort, petit et rond ; toute sa couleur est cendrée ; il marche bien ; mais il vole mal. On le prend à l’aide d’une chouette. § 3[304]. Il y a encore le Pardalos, qui vit habituellement en troupe, et qu’on ne voit jamais seul. Il est entièrement de couleur cendrée, de la même grosseur à peu près que ceux dont on vient de parler ; il marche bien, et il ne vole pas trop mal. Sa voix est forte ; sans être grave. § 4[305]. Le Collyrion a la même nourriture que le merle, et sa grosseur est celle des précédents ; c’est surtout en hiver qu’on peut le prendre. Mais tous ces oiseaux sont visibles en tout temps, comme le sont aussi le corbeau et la corneille, qui sont habitués à demeurer près des villes ; car on voit ces derniers oiseaux dans toutes les saisons ; ils ne migrent pas et ne se retirent jamais.

§ 5[306]. Il y a trois espèces de geais. L’un, qu’on appelle le Coracias, est gros comme une corneille ; et son bec est rouge. L’autre est celui qu’on surnomme le Loup ; et enfin, le petit geai, dit le Moqueur. Il y a même une autre espèce de geai en Lydie et en Phrygie ; mais celui-là est palmipède. § 6[307]. Les alouettes sont de deux espèces : l’une, qui marche sur terre, a une crête ; l’autre vit en troupe et n’est jamais isolée, comme la première. Elle est pourtant de la même couleur, bien qu’elle soit un peu plus petite ; elle est sans crête ; et c’est celle qu’on mange. L’ascalopas (la bécasse) se prend dans les vergers avec des filets ; elle est de la grosseur d’une poule. Son bec est long ; sa couleur se confond avec celle de l’attagen. Elle court, et même elle court très-vite. Elle se familiarise assez bien avec l’homme. L’étourneau est moucheté ; et il est a peu près gros comme le merle. § 7[308]. Les ibis d’Égypte sont de deux espèces : l’une, qui est blanche, et l’autre, qui est noire. Les ibis blancs se trouvent dans toute l’Egypte, si ce n’est à Péluse ; il n’y en a pas de noirs dans le reste de l’Egypte ; mais c’est à Péluse seulement qu’on les rencontre.

§ 8[309]. Les ducs se montrent en toutes saisons ; et on les appelle ducs-perpétuels ; on ne les mange pas, parce qu’ils sont répugnants au goût. Il y en a d’autres qui se montrent quelquefois à l’automne ; mais ce n’est que pour un ou deux jours, tout au plus. Ils sont bons à manger, et ils sont très-réputés. Ils ne diffèrent des ducs surnommés perpétuels qu’en un point, à savoir qu’ils sont gras. Mais de plus, ils sont muets, tandis que les autres ont un cri. On ne sait, point du tout d’où ils viennent ; tout ce qu’on sait, c’est qu’ils paraissent avec l’arrivée du zéphyr ; et c’est ce que tout le monde peut voir.


CHAPITRE XX

Du coucou et de son singulier naturel ; il pond dans le nid d’autres, oiseaux et leur laisse élever ses petits ; ceux-ci tuent les petits avec lesquels ils sont élevés ; explications diverses données à ce sujet ; cet abandon que le coucou fait de ses petits tient à sa lâcheté ; il ne saurait pas les défendre.


§ 1[310]. Le coucou, ainsi qu’on l’a dit ailleurs, ne fait pas de nid ; mais il pond dans le nid d’autres oiseaux, surtout dans celui des ramiers, dans ceux de la fauvette et de l’alouette à terre, et dans le nid de l’oiseau appelé chloris, sur les arbres. Il ne fait qu’un œuf et ne le couve pas lui-même ; mais c’est l’oiseau dans le nid duquel il a déposé son œuf qui le fait éclore, et qui nourrit le petit. § 2[311]. On ajoute même que, dès que le petit coucou est assez fort, l’oiseau chasse ses propres petits, qui meurent de cette violence. D’autres prétendent que c’est la femelle nourricière du coucou qui lui donne à manger ses propres petits, tués par elle, parce que, dit-on, le petit coucou lui paraît si beau, qu’elle dédaigne sa progéniture. Ces faits sont, pour la plupart, attestés unanimement par des gens qui les ont vus de leurs propres yeux. § 3[312]. Mais si l’on est d’accord sur ces faits-là, on ne l’est pas autant sur la manière dont périssent les petits de l’oiseau qui accueille le coucou ; les uns disent que c’est le coucou lui-même qui vient manger les petits de l’autre oiseau, qui a couvé son œuf ; les autres assurent que le petit du coucou, étant de beaucoup le plus gros, accapare avant les autres petits toute la nourriture apportée, de telle façon que ces petits meurent de faim ; enfin, que le petit du coucou, étant le plus fort, tue ceux avec qui on l’élève. § 4[313]. On peut trouver que le coucou montre une sorte d’intelligence en élevant ainsi ses petits. Comme il connaît très-bien sa propre lâcheté, et qu’il se sent incapable de défendre sa couvée, il se débarrasse en quelque sorte de ses petits, comme s’ils n’étaient pas les siens, pour les sauver d’une mort certaine ; car il n’y a pas d’oiseau qui soit plus lâche que celui-là ; il se laisse plumer par les oisillons les plus chétifs, qui le font fuir devant eux.


CHAPITRE XXI

De l’adresse des cypsèles à construire leurs nids pour les soustraire aux hommes et aux bêtes ; de l’oiseau appelé tette-chèvre ; sa manière de téter les chèvres ; récits peu croyables à ce sujet ; des corbeaux ; leur vigilance à n’être en chaque pays que dans le nombre qui peut s’y nourrir ; expulsion des jeunes ; entente singulière des corbeaux dans certaines circonstances.


§ 1[314]. Les apodes, appelés aussi des cypsèles, ressemblent beaucoup à l’hirondelle, ainsi qu’on l’a déjà dit. Ce n’est pas sans peine qu’on les distingue de l’hirondelle, à cette seule différence qu’ils ont la patte couverte de plumes. Ils nichent dans des poches de forme allongée, qu’ils construisent avec de la boue, et dont l’ouverture est juste ce qu’il leur faut pour y passer. Ils font ces nids fort étroits dans les pierres et dans les creux, pour échapper aux bêtes ou aux yeux de l’homme. § 2[315]. L’oiseau qu’on appelle le Tette-chèvre (engoulevent) se tient dans les montagnes ; il est un peu plus gros qu’un merle, et un peu moins qu’un coucou. Il pond deux ou trois œufs tout au plus. Il est d’un naturel lent et paresseux. Il vole à côté des chèvres pour les téter, et c’est de là que lui vient le nom qu’il porte. On prétend qu’après qu’il a tété une chèvre, la mamelle s’atrophie et que la chèvre devient aveugle. Le Tette-chèvre n’a pas une bonne vue dans le jour ; mais la nuit, il y voit bien.

§ 3[316]. Les corbeaux ne vont que deux à deux dans les cantons peu fertiles, qui ne fourniraient pas de nourriture suffisante à un nombre plus grand. Dès que leurs petits sont en état de voler, ils les chassent d’abord du nid ; et ensuite, ils les expulsent du canton qu’ils habitent. Le corbeau pond quatre ou cinq œufs. A l’époque où les hôtes de Médias périrent à Pharsale, on vit tout à coup l’Attique et le Péloponnèse désertés par tous les corbeaux, qui disparurent, comme s’ils s’étaient avertis mutuellement, et qu’ils eussent eu connaissance de quelque avis échangé entre eux.


CHAPITRE XXII

De l’aigle et de ses espèces très-nombreuses ; le pygargue ; ses demeures ; son courage ; l’aigle plangos ; citation d’Homère ; l’aigle noir, le plus petit et le plus fort de tous ; l’aigle-cigogne ; sa lâcheté ; ses aliments ; aigles de mer ; aigles-francs, les seuls oiseaux dont la race soit absolument pure ; ce sont les aigles les plus grands ; heures de la journée où l’aigle se livre à la chasse ; dans sa vieillesse, son bec se recourbe jusqu’à le faire mourir de faim ; fable à ce sujet ; prévoyance de l’aigle ; provisions pour ses petits ; son nid toujours placé dans des lieux élevés ; vaste espace nécessaire à un couple d’aigles ; il soupèse sa proie avant de l’emporter ; sa façon de chasser les lièvres ; causes de ses précautions ; le seul oiseau que les hommes aient divinisé ; longévité de l’aigle.


§ 1[317]. Les aigles sont de plusieurs espèces. L’un qu’on appelle le pygargue fréquente les plaines et les bois, et les environs des villes. On le surnomme encore quelquefois le Tueur-de-faons. Il vole aussi sur les montagnes et dans les forêts, se fiant à son courage. Les autres espèces d’aigles ne se montrent que bien rarement dans les plaines et dans les bois. § 2[318]. Une seconde espèce d’aigle est celui qu’on nomme le Plangos ; il est en effet le second en grosseur et en force. Il fréquente les halliers, les vallons et les lacs. On le surnomme aussi le Tueur-de-canards, et le Morphnos. C’est de celui-là que veut parler Homère, quand il raconte la sortie de Priam. § 3[319]. Un autre aigle est de couleur noire, le plus petit, et, cependant, le plus fort de tous. Il n’habite que les montagnes et les forêts. On l’appelle indifféremment l’aigle noir et le Tueur-de-lièvres ; c’est le seul aigle qui nourrisse ses petits, et qui les garde jusqu’à ce qu’ils sortent du nid. Son vol est rapide ; il est solitaire, superbe, sans aucune crainte, belliqueux ; et sa voix, toujours forte, ne tourne jamais au gémissement et à la plainte. § 4[320]. Une autre espèce a des ailes tachetées de noir et la tête blanche ; c’est le plus grand de tous les aigles. Ses ailes sont très-peu étendues ; son croupion est allongé. Il ressemble assez à un vautour ; on l’appelle la cigogne-de-montagnes, et aussi le sous-aigle. Il habite les bois. Il a toutes les mauvaises qualités des autres aigles, sans en avoir aucune des bonnes. Il se laisse prendre et poursuivre par des corbeaux et des oiseaux aussi faibles. Son vol est lourd ; il vit d’aliments misérables et se nourrit de charognes. Il a toujours faim ; il crie sans cesse et se plaint toujours.

§ 5[321]. Une autre espèce d’aigles sont ceux qu’on appelle aigles de mer. Ils ont un cou long et gras, des ailes recourbées, et un croupion très-large. Ils habitent la mer et ses rivages ; mais souvent aussi, ne pouvant porter la proie qu’ils ont saisie, ils sont entraînés au fond de l’eau. § 6[322]. Les aigles qu’on appelle aigles-francs forment une autre espèce. On prétend que c’est le seul de tous les biseaux dont la race soit parfaitement pure. Toutes les autres espèces d’aigles, d’éperviers, et d’oiseaux plus petits, sont issues de mélanges, où se sont commis une foule d’adultères réciproques. Cet aigle-là est le plus grand de tous ; il est même plus gros que l’orfraie, et de moitié plus gros que les autres aigles. Il est de couleur rousse. Il se montre aussi rarement que l’oiseau appelé le Cymindis.

§ 7[323]. Le moment de la journée où l’aigle fait son travail de chasse et où il vole, c’est depuis l’heure du déjeuner des hommes jusqu’au soir. Le matin, il reste en repos, jusqu’à l’heure où nos marchés s’emplissent. A mesure que les aigles vieillissent, leur bec s’allonge, la partie supérieure se recourbant de plus en plus ; et ils finissent par mourir de faim. On raconte à ce sujet une fable qui nous apprend que c’est là une punition de l’aigle, qui, étant jadis homme, avait violé l’hospitalité envers celui qu’il avait reçu. § 8[324]. Ils font, pour leurs petits, des provisions de nourriture, quand il y en a de trop, parce qu’il ne leur est pas facile de s’en procurer tous les jours, et que quelquefois le dehors ne leur fournit absolument rien. Quand ils voient quelqu’un se préparer à surprendre leur nid, ils le frappent à coups d’ailes et le déchirent de leurs serres. D’ailleurs, ils ne font pas leurs nids dans des lieux plats, mais au contraire dans des endroits fort élevés, spécialement dans des roches inaccessibles, parfois aussi sur un arbre. § 9[325]. L’aigle nourrit ses petits jusqu’à ce qu’ils soient capables de voler ; alors, il les chasse du nid, et il les éloigne à de grandes distances, tout à l’entour. Une seule paire d’aigles occupe en effet un vaste espace, et c’est pour cela qu’ils empêchent les autres de se faire une demeure près d’eux. § 10[326]. L’aigle ne chasse jamais dans les environs de son nid ; mais c’est toujours au loin, s’y envolant d’un seul trait. Quand il a chassé et qu’il a surpris une proie, il la dépose et ne l’emporte pas sur-le-champ. Si le poids lui en paraît trop lourd, il l’abandonne. Il ne prend pas non plus les lièvres tout à coup ; mais il les laisse d’abord courir dans la plaine. Il ne fond pas tout droit sur le terrain, mais peu à peu, et en faisant un grand cercle, qu’il réduit successivement. Il prend ces deux précautions pour n’être pas lui-même surpris à terre. § 11[327]. Il se pose en général sur un point élevé, parce qu’il ne s’envolerait de terre que lentement. D’ailleurs, il vole très-haut pour embrasser l’espace le plus loin possible. Aussi, est-ce le seul oiseau dont les hommes aient fait un oiseau divin. Comme tous les autres oiseaux à serres recourbées, l’aigle ne se repose pas sur les rochers, parce que la dureté de la pierre serait un obstacle à la courbure des ongles. Il chasse les faons, les lièvres, les renards, et tous les jeunes animaux qu’il est assez fort pour saisir. L’aigle vit longtemps ; et ce qui le prouve, c’est que son nid reste très-longtemps le même.


CHAPITRE XXIII

D’un oiseau de Scythie de la grosseur de l’outarde ; sa manière d’élever ses petits ; des oiseaux de nuit, chassant aux crépuscules du soir et du matin ; de l’orfraie, qui élève les petits de l’aigle, en même temps que les siens ; causes de la cruauté de l’aigle envers ses petits ; de l’aigle de mer ; sa vue perçante ; il dresse ses petits à regarder le soleil ; sa manière de chasser les oiseaux de mer.


§ 1[328]. On trouve en Scythie une espèce d’oiseaux qui sont de la grandeur de l’outarde. Cet oiseau fait deux petits. Il ne les couve point, en se mettant dessus ; mais après les avoir placés sous une peau de lièvre ou de renard pour les cacher, il les quitte ; et il les surveille du haut d’un arbre, tout le temps qu’il n’est pas en chasse ; si l’on vient pour les prendre, il les défend, et frappe l’agresseur à coup d’ailes, comme le font les aigles. § 2[329]. Les chouettes, les chats-huants ou corbeaux de nuit, et tous les autres oiseaux qui, comme ceux-là, ne voient pas durant le jour, se procurent leur pâture en chassant la nuit. Ce n’est pas précisément durant la nuit entière qu’ils se livrent à la chasse, mais au crépuscule du jour et avant l’aube du matin. Ces oiseaux chassent les souris, les lézards, les sphondyles, et autres animaux aussi petits. § 3[330]. L’oiseau qu’on nomme le vautour (orfraie) soigne beaucoup ses petits ; il se procure facilement sa vie, et leur apporte une pâture abondante ; il est fort doux, et il élève, en même temps que ses petits, les petits de l’aigle, qu’il recueille, quand l’aigle les chasse de son nid ; car l’aigle les en chasse prématurément, lorsqu’ils ont encore besoin qu’on les nourrisse et qu’ils sont trop faibles pour voler. § 4[331]. Il semble bien que l’aigle ne repousse ainsi sa couvée que par une sorte de jalousie égoïste. Il est d’un naturel jaloux ; il est très-vorace, et très-avide de proie ; quand il prend de la nourriture, il lui en faut énormément. Il devient ennemi de ses petits à mesure qu’ils grandissent, parce qu’alors ils sont en état de manger, et il les écarte avec ses pattes. Les petits de leur côté se disputent la place dans le nid et leur part de nourriture. L’aigle alors les expulse en les frappant ; les petits poussent de grands cris, et c’est à ce moment que l’orfraie les recueille. L’orfraie a une taie sur les yeux, qui sont d’ailleurs très-mauvais.

§ 5[332]. L’aigle de mer a, au contraire, la vue la plus perçante. Quand ses petits sont encore sans plumes et tout jeunes, il les force à regarder le soleil en face ; et, quand il y en a un qui résiste, il le frappe et le tourne vers le soleil ; celui des deux dont les yeux pleurent les premiers, l’aigle le tue et n’élève que l’autre. Cet aigle demeure aux bords des mers, et il vit en chassant les oiseaux qui les fréquentent, ainsi qu’on l’a déjà dit. Il les surprend un à un ; et il les attend, quand ils reviennent à la surface de l’eau. Aussi, quand l’oiseau, en sortant de l’eau, aperçoit l’aigle, qui le guette, il se replonge aussitôt, par la peur qu’il en a, et il va reparaître plus loin à la surface ; l’aigle, qui a la vue excellente, continue à voler jusqu’à ce que l’oiseau étouffe, et qu’il le saisisse à l’instant où il reparaît sur l’eau. L’aigle se garde d’attaquer les oiseaux quand ils sont en troupes, parce qu’alors la bande le repousse à coups d’ailes, en le couvrant d’eau. § 6[333]. Les kepphes sont pris au moyen de la mousse des eaux ; comme ils la recherchent avidement, on les prend en leur en jetant. Leur chair est, en général, de bon goût ; il n’y a que leur croupion qui sente la marée ; ils deviennent fort gras.


CHAPITRE XXIV

Des éperviers et de leurs nombreuses espèces ; on en compte jusqu’à dix ; manières diverses dont l’épervier chasse le pigeon ; instinct du pigeon pour échapper ; chasse en Thrace de compte à demi entre les hommes et les éperviers ; autres récits sur les loups marins et les pécheurs du Palus-Mœotide.


§ 1[334]. Parmi les éperviers, le plus fort est la buse, ou Triorchis ; le second en vigueur est l’émerillon ; et le troisième est le busard. L’autour, l’épervier-Tue-pigeons, et le Pternis sont des variétés. Les éperviers qui ont le corps plus large se nomment des sous-buses. Il y a encore les émouchets et les spizias ; il y a aussi les éperviers lisses, et ceux qui chassent les grenouilles de haie. Ce sont ceux-là qui trouvent le plus aisément leur pâture ; et ils volent près de terre. § 2[335]. On prétend qu’il y a dix espèces d’éperviers au moins, qui présentent toutes d’assez grandes différences. Ainsi, les uns fondent sur le pigeon, qui est à terre, et l’emportent, et ne le touchent pas quand il vole. D’autres chassent le pigeon quand il est perché sur un arbre ou tout autre objet ; mais ils ne le prennent, ni quand il est à terre, ni quand il est perché. D’autres enfin ne l’attaquent, ni quand il est à terre, ni quand il est perché ; ils n’essayent de le prendre que quand il vole. § 3[336]. On assure aussi que les pigeons savent reconnaître ces diverses espèces d’éperviers, quand l’épervier vole vers eux ; si c’est un de ceux qui chassent en l’air, ils ne bougent pas du lieu où ils se trouvent ; mais si l’épervier qui fond sur eux est un de ceux qui frappent à terre, ils ne l’attendent pas, et ils se hâtent de prendre leur vol.

§ 4[337]. Dans cette partie de la Thrace qui se nommait jadis la Cédripole, dans la chasse au marais, les hommes sont de compte à demi avec les éperviers. Les chasseurs battent avec des perches les roseaux et les buissons pour faire lever les petits oiseaux ; les éperviers, arrivant d’en haut, fondent sur eux, et les oisillons épouvantés se rejettent vers la terre, où les hommes les tuent à coups de bâton. Ils partagent alors le butin, en en jetant une partie aux éperviers, qui la saisissent avidement. § 5[338]. On raconte encore que, dans le Palus-Mοtide, les loups marins sont familiers avec les hommes qui y font la pêche ; si on ne fait pas une part aux poissons, ils rongent les filets, quand on les étend sur le sol pour les faire sécher.

§ 6[339]. Voilà ce qu’on avait à dire de l’habileté des oiseaux.


CHAPITRE XXV

De l’intelligence et de l’industrie de certains animaux et spécialement des poissons à se procurer leur vie ; la grenouille de mer et sa manière de prendre les petits poissons ; la torpille et sa faculté d’engourdir ce qu’elle touche, même des hommes ; la pasténague, l’âne de mer, la plie, la lime, etc. ; l’anthias, et les pêcheurs d’épongés ; le serpent de mer ; la scolopendre et sa manière de se débarrasser des hameçons ; les renards-marine ; habileté des bonitoos à se défendre ; intelligence des poissons d’eau douce ; le glanis mâle et son attachement extraordinaire pour ses petits ; des poissons carnivores ; des poissons ovipares ; la seiche se défend en répandant sa liqueur noire, qui la cache ; le polype, quoique peu intelligent, sait se ménager des provisions ; courte durée de la vie des polypes ; ils sont annuels ; des conques et de la cuirasse qu’elles se forment ; admirable adresse du nautile, pour descendre au fond de l’eau et remonter a la surface, où il marche à la voile ; on ignore comment il se reproduit, et s’il peut vivre sans coquille.


§ 1[340]. On peut observer aussi, dans les animaux de mer, bien des traits d’industrie et d’intelligence relatifs à la vie de chacun d’eux ; et par exemple, on peut regarder comme vrai tout ce qu’on raconte de la grenouille-marine appelée le Pêcheur, et de la torpille. § 2[341]. Ainsi, cette grenouille a, au devant des yeux, des filaments suspendus, de la grosseur d’un cheveu, dans leur longueur, et arrondis par le bout. C’est une sorte d’appât placé en avant de chaque œil. Aussi, après s’être cachée dans les sables ou les boues, qu’elle trouble de bas en haut, elle tient ses filaments tendus ; et quand un petit poisson vient à s’y heurter, elle les retire à elle jusqu’à ce qu’elle ait porté la proie à sa bouche. § 3[342]. La torpille commence par engourdir les poissons qu’elle doit prendre, grâce à la faculté particulière qu’elle possède dans la bouche ; et de cette façon, elle les saisit et les mange. Cachée dans le sable et la vase, elle prend les poissons qui nagent au-dessus d’elle, en aussi grand nombre qu’elle en engourdit. C’est là un fait que quelques personnes ont observé de leurs propres yeux. § 4[343]. La pasténague se cache aussi, mais ce n’est pas tout-à-fait de même. Ce qui démontre que ces poissons se procurent ainsi leur proie, c’est qu’on en a péché, qui avaient des muges dans le corps, bien que les muges soient les plus vifs de tous les poissons, et qu’eux en soient les plus lents. Ce qui le démontre encore, c’est que, quand on pêche une grenouille de mer qui n’a plus ces appendices filamenteux, elle est plus maigre ; et quant à la torpille, il est certain qu’elle peut engourdir même des hommes. § 5[344]. L’âne marin, la grenouille de mer, la plie et la lime s’enfouissent aussi dans le sable ; quand ils s’y sont bien cachés, ils tendent, comme des bâtons tout droits, les appendices qu’ils ont près de la bouche, et que les pêcheurs appellent des bâtonnets. Les tout petits poissons qui s’en approchent, les prennent pour des brins de fucus, dont ils se nourrissent.

§ 6[345]. Dans les eaux où il y a un anthias, on peut être sûr qu’il n’y a pas de poisson redoutable ; aussi, les pêcheurs d’épongés usent de cet indice, pour savoir le lieu où ils doivent plonger ; et ils appellent les anthias des poissons sacrés. C’est de même que là où il y a des limaçons, on peut être sûr qu’il n’y a, ni porcs, ni perdrix, parce que les perdrix et les porcs les font disparaître en les mangeant. § 7[346]. Le serpent de mer se rapproche beaucoup du congre par la couleur et par la conformation ; seulement, il est plus écourté, et plus fort. Quand on le prend et qu’on le lâche, il s’enfouit à l’instant dans le sable, en y faisant un trou avec son museau ; car il a la bouche plus pointue que les serpents. § 8[347]. Lorsque le poisson qu’on nomme la scolopendre a avalé un hameçon, il retourne ses intestins de dedans en dehors, jusqu’à ce qu’il se soit débarrassé de l’hameçon ; puis il fait rentrer ses intestins. Les scolopendres de mer sont attirées par la viande grillée, tout comme les scolopendres de terre. Ce n’est pas du reste avec la bouche qu’elles mordent ; mais tout leur corps est piquant, lorsqu’on le touche, comme celui des orties de mer.

§ 9[348]. Quand les poissons appelés renards-marins sentent qu’ils ont avalé un hameçon, ils s’en débarrassent à peu près aussi bien que les scolopendres ; ils remontent d’ordinaire vivement vers la ligne, et ils la rongent. En certains parages, on les prend à des hameçons nombreux, qu’on descend dans des eaux courantes et profondes. § 10[349]. Quand les bonitons voient approcher quelque poisson dangereux, ils se réunissent en masse ; les plus gros nagent tout autour en cercle ; et, si l’ennemi attaque l’un d’eux, ils le défendent. Les bonitons ont des dents très-fortes ; et on les a vus souvent entraîner au fond des eaux d’autres poissons, et même une lamie.

§ 11[350]. Parmi les poissons d’eau douce, le glanis mâle a un soin vraiment extraordinaire de ses petits. La femelle s’en va, après avoir pondu ; mais le mâle, là où s’est réunie la plus forte partie de la ponte, surveille les œufs, auprès desquels il reste, ne faisant pas d’autre fonction utile que d’éloigner les autres petits poissons, pour qu’ils ne détruisent pas son frai, en le dispersant. Il continue cette vigilance durant quarante et cinquante jours de suite, jusqu’à ce que les petits devenus plus gros puissent échapper aux autres poissons. Les pêcheurs découvrent l’endroit où le glanis garde ainsi ses œufs, parce qu’en éloignant les poissons, il bondit sur l’eau, et qu’il fait entendre un bruit et un grognement. § 12[351]. Il aime si vivement ses œufs que, quand ils sont placés sous des racines profondes, les pêcheurs, venant des deux côtés, peuvent les resserrer de plus en plus dans un cercle étroit, sans que le glanis abandonne son frai. S’il est jeune et novice, il est bien vite pris à l’hameçon ; il ne quitte pas pour cela ses petits ; et d’un coup de ses dents très-fortes, il brise tous les hameçons et les détruit.

§ 13[352]. Tous les animaux aquatiques, soit qu’ils nagent, soit qu’ils restent en place, se nourrissent dans les lieux où ils naissent, ou dans des lieux analogues, parce que la pâture propre à chacun ne se trouve que dans ces lieux-là. Ce sont les carnivores qui sont les plus errants. Du reste, presque tous les animaux aquatiques sont carnivores, sauf un très-petit nombre, tels que le muge, la saupe, le surmulet et le chalcis. Le poisson appelé la phôlis jette une bave mousseuse, dont elle s’enveloppe, et qui lui fait comme une couverture. § 14[353]. Parmi les testacés et les apodes, c’est le peigne qui a le plus de mouvement et qui s’éloigne le plus, en se fiant à ses propres forces. La pourpre, au contraire, ne s’éloigne que d’une très-faible distance, ainsi que tous les animaux qui lui ressemblent. En hiver, les poissons migrent de l’Euripe de Pyrrha et en sortent, sauf le goujon, à cause de la rigueur du froid, qui se fait sentir davantage dans l’Euripe ; au printemps, ils y reviennent, dès qu’ils peuvent. § 15[354]. D’ailleurs, on ne trouve dans l’Euripe, ni le scare, ni l’alose, ni aucun poisson à arêtes, non plus que les chiens de mer, ni les épiniers, ni les langoustes, ni les polypes, ni les bolitènes, ni les autres de même espèce. Des poissons qui naissent dans l’Euripe, le goujon-blanc ne va jamais en pleine mer.

§ 16[355]. C’est au printemps que les poissons ovipares sont dans toute leur vigueur, jusqu’au moment où ils pondent leurs œufs ; pour les vivipares, c’est au contraire, à l’automne ; et avec eux, les muges, les surmulets et les poissons de cet ordre. Dans les parages de Lesbos, tous les poissons de haute mer, aussi bien que ceux de l’Euripe, viennent pondre dans l’Euripe. Ils s’accouplent en automne et pondent au printemps. Les sélaciens se mêlent indistinctement, mâles et femelles, dans l’automne, pour s’accoupler ; mais quand le printemps est venu, ils vont séparément jusqu’à la ponte ; et pendant l’accouplement, on en prend souvent qui sont encore conjoints. § 17[356]. La seiche est le plus rusé des mollusques ; c’est le seul d’entre eux qui se sert de sa liqueur noire pour se cacher ; elle ne s’en sert pas uniquement quand elle a peur, comme le polype et le calmar, qui ne jettent leur liqueur noire que quand ils sont effrayés. D’ailleurs, tous ces animaux ne jettent jamais toute leur liqueur en une seule fois ; et elle se reforme, après qu’ils l’ont jetée. § 18[357]. Comme on vient de le dire, la seiche emploie souvent sa liqueur en vue de se cacher ; et après s’être montrée en avant du nuage qu’elle forme, elle y rentre. Mais elle chasse aussi avec ses longs appendices, non pas seulement de petits poissons, mais souvent jusqu’à des muges. Le polype est peu intelligent ; car si l’on plonge la main dans l’eau, il n’hésite pas à s’en approcher. Mais il est fort ménager ; il rassemble dans la retraite, où il fait sa demeure, tout ce qu’il peut ; et quand il a mangé les parties qui sont les plus propres à le nourrir, il rejette les coquilles, les téguments et les écailles des crabes, et les arêtes des petits poissons. Pour s’emparer des poissons qui sont sa proie, il change sa couleur, et il prend celle des rochers qu’il côtoie. Il en change également quand il a peur. § 19[358]. Quelques personnes assurent que la seiche en fait autant ; et qu’elle modifie sa couleur, selon celle des lieux où elle vit ; mais il n’y a que la raie qui ait cette faculté, et qui change de couleur, comme le polype.

§ 20[359]. La plupart des polypes ne vivent pas même d’une année sur l’autre. Par sa nature, le polype tend à se dissoudre et à se fondre ; et on peut bien le voir par ce seul fait que, quand on le presse, il rend toujours quelque chose, jusqu’à ce qu’enfin il soit réduit à rien. Les femelles éprouvent surtout cet effet après la ponte ; elles deviennent comme étourdies, et ne sentent pas que le flot les emporte ; rien n’est plus facile que de les prendre en plongeant la main ; elles deviennent toutes glaireuses ; et, dans leur inertie, elles ne peuvent plus chasser leur proie. Les mâles deviennent aussi durs que du cuir, et ils sont visqueux. § 21[360]. Une preuve que les polypes ne vont pas à deux ans, c’est qu’après l’éclosion des petits polypes, en été et vers l’automne, il est bien difficile de voir encore un grand polype ; et que c’est un peu avant cette époque que les polypes sont les plus gros. Dès qu’ils ont pondu leurs œufs, le mâle et la femelle vieillissent et s’affaiblissent tant, dit-on, qu’ils se laissent dévorer par de petits poissons, qui viennent les arracher de leurs retraites ; ce que les polypes ne souffriraient jamais dans une autre saison. On ajoute que les petits et jeunes polypes, après qu’ils sont nés, n’éprouvent rien de pareil, et qu’ils sont plus forts que les gros. § 22[361]. Les seiches n’atteignent pas non plus la seconde année. Le polype est le seul des mollusques qui aille à sec en sortant de l’eau ; il marche sur les endroits raboteux, et il évite ceux qui sont tout unis. C’est un animal assez fort dans toutes les parties du corps, sauf le cou, organe où il est très-faible, pour peu qu’on le presse.

Voilà ce qu’il y avait à dire des mollusques.

§ 23[362]. Quant aux conques, on prétend que les conques lisses et les conques raboteuses se forment, autour d’elles, une sorte de cuirasse très-dure, qu’elles rendent d’autant plus grande qu’elles grandissent elles-mêmes ; et qu’elles en sortent comme d’une retraite et d’une maison, qu’elles se construisent. § 24[363]. Le polype nautile est remarquable à la fois par sa nature, et aussi, par tout ce qu’il fait. Ainsi, il vogue à la surface de la mer, après être parti du fond de l’eau. Il s’élève d’abord en retournant sa coquille, afin de remonter plus aisément et de l’avoir vide en naviguant ; puis, arrivé à la surface, il la redresse. Entre ses tentacules, il a une sorte de tissu qui ressemble à celui que les palmipèdes ont entre leurs doigts. Seulement, chez les palmipèdes, cette membrane est épaisse, tandis que, dans le nautile, elle est aussi mince qu’une toile d’araignée. Dès qu’il fait un peu de vent, elle lui sert de voile ; et ses tentacules rapprochés et descendus lui font un gouvernail. A la moindre alerte, il plonge dans la mer, en remplissant d’eau sa coquille. § 25[364]. Du reste, on n’a pu faire encore aucune observation précise sur la reproduction et la croissance de ce polype. On peut croire qu’il ne vient pas d’accouplement, et qu’il pousse comme tant d’autres coquillages. On ne sait pas non plus s’il peut vivre détaché de sa coquille.


CHAPITRE XXVI

De l’intelligence et de l’industrie des insectes ; fourmis et abeilles ; guêpes et frelons ; des araignées et des phalanges ; nombreuses espèces d’araignées, les psylles, les loups ; troisième espèce d’araignée plus habile que toutes les autres ; sa manière d’ourdir sa toile avec chaîne et trame ; procédés de sa chasse ; la femelle seule travaille ; le mule partage la proie ; deux autres espèces d’araignées, tissant une toile épaisse ; explication de la production du fil par l’araignée ; erreur de Démocrite ; l’araignée attaque des animaux beaucoup plus gros qu’elle ; sa guerre aux petits lézards. — Résumé.


§ 1[365]. Parmi les insectes, et l’on pourrait presque dire, parmi tous les animaux sans exception, les plus laborieux, ce sont les fourmis et les abeilles, après lesquelles on peut nommer les frelons et les guêpes, et tous les insectes de même ordre que ceux-là. On peut observer encore qu’entre les araignées, il y en a quelques-unes qui sont plus remarquables que d’autres et plus habiles aussi à trouver leur vie. Tout le monde a pu voir également les fourmis travailler à la surface du sol ; on a pu voir comment toutes suivent, sans le moindre écart, toujours le même chemin, et comment elles déposent et thésaurisent leurs provisions. Elles travaillent même de nuit, quand il fait pleine lune.

§ 2[366]. Les araignées et les phalanges sont de plusieurs espèces. Les phalanges qui piquent en présentent déjà deux, dont l’une ressemble à celles des araignées qu’on appelle des loups. Elle est petite, tachetée, très-vive et sautillante. On les appelle des psylles. L’autre espèce de phalange est plus grosse, de couleur noire ; elle a les pattes de devant très-longues ; son mouvement est paresseux, et elle marche lentement ; elle n’est pas forte et ne saute pas. Toutes les autres araignées, qu’exposent les pharmaciens, ou ne piquent pas du tout, ou ne piquent que faiblement. § 3[367]. Une autre espèce d’araignées, ce sont celles qu’on appelle des Loups. Elle est petite, et elle ne file pas. Une seconde, plus grande que celle-ci, file une toile épaisse et mal disposée, sur terre et sur les décombres. Elle place toujours sa toile près des ouvertures ; et restant en dedans à garder les bouts de sa toile, elle attend que quelque proie y produise un mouvement, en y tombant ; et ensuite, elle fond sur elle. L’araignée tachetée file sous les arbres une toile petite et mal faite. § 4[368]. Il est une troisième espèce beaucoup plus habile que toutes celles-là, et plus remarquable. Elle fait son tissu, en tendant tout d’abord ses fils en tous sens, aux points extrêmes qu’elle a choisis. Ensuite, elle établit sa chaîne, en partant du milieu, qu’elle sait fort bien distinguer et prendre. Sur ces premiers fils, elle jette des sortes de trames ; et enfin, elle consolide et unit le tout. Elle place ailleurs sa demeure et le dépôt de son butin ; mais c’est au centre de sa toile qu’elle guette sa proie. Dès que quelque chose vient à tomber dans ses rets, et que le centre en est ébranlé, elle se hâte d’enlacer l’animal et de l’envelopper de ses fils, jusqu’à ce qu’il ne puisse plus bouger ; alors, elle l’emporte loin du centre, où elle l’a saisi. § 5[369]. Si elle se trouve avoir faim à ce moment, elle suce l’animal ; c’est là sa jouissance ; et si elle n’a pas faim, elle recommence et continue sa chasse, après avoir restauré les parties déchirées de sa toile. Si une seconde proie vient à s’y prendre, d’abord elle accourt au centre ; et de là, elle revient sur l’animal, comme la première fois. Si l’on vient à endommager sa toile, elle en recommence le tissu, soit au coucher, soit au lever du soleil, parce que c’est surtout à ces deux heures-là que les animaux s’y font prendre, en y tombant. C’est, d’ailleurs, la femelle seule qui file et qui chasse ; le mâle ne fait que partager sa proie.

§ 6[370]. Il y a deux espèces d’araignées sans poils, et faisant une toile épaisse. L’une de ces espèces est plus grande ; et l’autre, plus petite. Celle qui a les pattes plus longues fait le guet en se suspendant en bas, au bout de son fil, pour que les animaux se laissent sans crainte prendre dans la toile qui est en haut ; car cette araignée ne peut pas, à cause de sa grosseur, se bien cacher. L’autre espèce, qui a les pattes moins démesurées, se tient en haut de sa toile, après y avoir organisé une petite ouverture, où elle peut se cacher.

§ 7[371]. Les araignées peuvent produire leur toile aussitôt après leur naissance ; mais ce n’est pas en tirant les fils de leur intérieur, comme une sorte d’excrément, ainsi que le prétend Démocrite ; c’est plutôt comme une écorce qui pousserait sur tout leur corps ; ou bien, c’est comme certains animaux, le hérisson par exemple, qui lancent leurs piquants. L’araignée attaque et même enlace des animaux beaucoup plus grands qu’elle ; c’est ainsi qu’elle se jette sur de petits lézards ; et que tournant autour de leur bouche, elle les enveloppe de ses fils, jusqu’à ce que leur bouche en soit tout à fait fermée ; et alors, elle les suce tout à son aise.

§ 8[372]. Voilà ce que nous avions à dire sur ces diverses espèces d’animaux.


CHAPITRE XXVII

De différentes espèces d’insectes qui travaillent ; elles sont au nombre de neuf ; des fourmis ; prodigieuse industrie des abeilles ; le miel est leur nourriture ; construction des alvéoles, pour les abeilles, pour leurs Rois et pour les bourdons ; procédés de construction ; enduit de mytis à l’entrée de la ruche ; la poix-cire ; rôle des bourdons ; rôle des Rois ; récolte du miel ; éclosion des petits ; différentes espèces d’abeilles et des Rois ; les voleurs ; les abeilles longues ; altération et destruction des gâteaux ; guerre des ouvrières contre les voleurs et les bourdons ; guerre des petites abeilles contre les grosses ; sortie des essaims, sous la conduite des Rois ; répartition des travaux entre les ouvrières ; ennemis des abeilles, dans les oiseaux et les insectes ; du dard des abeilles ; extrême propreté des abeilles dans leur ruche ; des maladies des abeilles ; leurs précautions contre le vent ; différentes qualités de miel ; les abeilles aiment le bruit ; variations dans leur travail ; leur discipline absolue ; produit moyen d’une bonne ruche : pressentiments des abeilles pour le mauvais temps et la pluie ; soins des éleveurs. — Résumé.


§ 1[373]. Il y a un certain genre d’insectes à qui l’on ne saurait donner un seul et unique nom commun, mais qui tous, cependant, ont une forme congénère. Ce sont tous les insectes qui font des alvéoles de cire, comme les abeilles et tous ceux qui sont de forme analogue à la leur. § 2[374]. On peut en compter jusqu’à neuf espèces, dont six vivent en essaims : l’abeille, les Rois des abeilles, le bourdon qui reste parmi les abeilles, la guêpe annuelle, et enfin l’anthrène et le tenthrédon. Les trois autres espèces vivent solitaires. Ce sont le petit siren, qui est brun-gris ; le second siren, qui est plus grand, noir et tacheté ; puis le troisième, qu’on appelle le Bombyle, et qui est le plus gros de tous.

§ 3[375]. Les fourmis ne chassent aucun animal ; mais elles recueillent des choses qu’elles trouvent toutes faites ; les araignées ne produisent rien non plus, et ne font pas d’approvisionnements ; elles chassent uniquement leur nourriture. Plus tard, il sera question des genres qui viennent d’être indiqués, au nombre de neuf ; mais si les abeilles ne chassent rien non plus, elles produisent quelque chose, et elles emmagasinent. § 4[376]. C’est le miel qui est leur nourriture. On peut bien le voir quand les éleveurs d’abeilles essayent d’enlever les gâteaux de cire. Suffoquées par la fumée, qui les fait beaucoup souffrir, elles se mettent à manger du miel plus que jamais ; car en tout autre temps, on les voit en manger peu, comme si elles le ménageaient et le mettaient en réserve pour se nourrir. § 5 Elles ont encore un autre aliment ; c’est ce qu’on appelle parfois le Cérinthe, espèce de miel inférieur qui a la douceur de la figue. Elles portent le Cérinlhe sur leurs pattes, comme elles y portent la cire.

§ 6[377]. On peut observer une foule de phénomènes variés dans le travail et la vie des abeilles. Ainsi, quand on leur livre la ruche toute vide, elles construisent les cellules de cire, en y apportant les larmes de toutes les fileurs et celles des arbres, comme le saule, l’orme, et les arbres qui produisent le plus de matières visqueuses. Elles enduisent soigneusement de cette matière le plancher de la ruche, afin de se défendre des autres animaux. C’est ce que les éleveurs nomment la conisis ; les abeilles s’en servent aussi pour bâtir les entrées de la ruche, quand elles sont trop larges. § 7[378]. Elles font, en premier lieu, les cellules dans lesquelles elles doivent être elles-mêmes, puis celles où sont les Rois, et enfin celles des bourdons. Elles bâtissent en tout temps leurs propres cellules ; elles bâtissent celles des Rois, quand le couvain est très nombreux ; et celles des bourdons, seulement quand le miel annonce de devoir être fort abondant. Elles mettent les cellules des Rois tout près des leurs, qu’elles font petites ; et elles mettent celles des bourdons près de celles-là, les faisant moins grandes que les cellules des Rois. § 8[379]. Elles commencent les rangs d’alvéoles par haut, à partir du couvercle de la ruche, et elles les relient les uns aux autres par le bas, en faisant plusieurs rangées jusqu’au plancher. Les places, soit du miel, soit des essaims ou couvains, ont deux entrées ; sur un seul fond, il y a deux places comme il y a les deux bords d’une coupe à deux becs, l’une en dedans, l’autre en dehors. Là où commencent les gâteaux de cire, les jointures avec la ruche sont courtes et vides de miel ; il y en a deux ou trois rangs circulaires. Les gâteaux les plus remplis de miel sont surtout ceux qui sont enduits de cire et faits avec de la cire.

§ 9[380]. A la bouche de la ruche, le bord de l’entrée est enduit de Mitys. Cette matière, qui est d’un noir assez foncé, est comme une purification de la cire pour les abeilles, et l’odeur en est très-forte. C’est un remède contre les contusions et les plaies qui suppurent. L’enduit qui vient après celui-là est la poix de cire, moins odorant, et moins propre à des remèdes que la Mitys. § 10[381]. On prétend quelquefois que les mâles (faux-bourdons) font aussi des cellules, pour eux isolément, et dans la même ruche et dans le même gâteau que les abeilles, avec lesquelles ils partagent, mais qu’ils ne font pas cependant de miel, et qu’ils se nourrissent de celui des abeilles, eux et leurs petits. Le fait est que les mâles restent presque toujours dans l’intérieur de la ruche ; quand ils en sortent par hasard, ils s’élèvent bruyamment par groupes vers le ciel, tournant sur eux-mêmes et s’exerçant en quelque sorte ; puis, rentrant dans la ruche, ils y mangent avidement. § 11[382]. Les Rois ne sortent jamais de la ruche qu’avec l’essaim tout entier, ni pour leur nourriture, ni pour aucune autre cause. On assure que, si l’essaim vient à s’égarer, il rebrousse chemin et vole jusqu’à ce que les abeilles aient, à l’odeur, retrouvé leur chef. On ajoute même que l’essaim se charge de le porter, quand il ne peut plus voler ; et que s’il vient à mourir, l’essaim meurt avec lui. Si, par hasard, les abeilles vivent encore quelque temps après lui, et si elles font encore des cellules, elles n’y déposent plus de miel, et elles ne tardent pas à périr.

§ 12[383]. Les abeilles recueillent la cire en ratissant vivement les tiges des plantes, avec leurs pattes de devant ; elles essuient celles-là sur celles du milieu ; et les pattes du milieu s’essuient sur les parties courbes des pattes de derrière. Quand la charge est pleine, l’abeille s’envole, et l’on voit bien qu’elle porte un lourd fardeau. A chaque vol, les abeilles ne vont pas d’une fleur de certaine espèce à une fleur d’espèce différente ; mais elles vont d’une violette à une violette, sans toucher à aucune autre fleur, avant de rentrer dans la ruche. Alors qu’elles y sont rentrées, elles se secouent ; et chacune d’elles est suivie de trois ou quatre autres. § 13[384]. Il n’est pas facile de voir ce qu’est leur butin pris sur les plantes ; et on n’a pu encore surprendre le travail auquel elles se livrent. Mais on a pu se rendre compte de la récolte de la cire, qu’elles font sur les oliviers, parce que, à cause de l’épaisseur des feuilles, elles y demeurent plus longtemps sur le même point.

§ 14[385]. Après ces premiers ouvrages, les abeilles font leurs petits. Rien n’empêche que, dans le même gâteau, des petits ne se trouvent avec du miel et avec des bourdons. Tant que le chef est vivant, les bourdons, à ce qu’on dit, restent à part ; mais s’il ne vit plus, les bourdons sont produits par les abeilles dans leurs propres cellules. Ces bourdons-là sont plus courageux ; et aussi on les appelle bourdons à aiguillons, non pas qu’ils aient un dard, mais parce qu’ils voudraient bien en lancer un et qu’ils ne le peuvent pas. Les cellules des bourdons sont plus grandes. Parfois, les abeilles font ces cellules des bourdons tout à fait à part, chacune isolée ; mais le plus ordinairement, elles les font entre les cellules d’abeilles ; et voilà comment les éleveurs les séparent.

§ 15[386]. Les espèces des abeilles sont fort nombreuses, ainsi qu’on l’a déjà dit. D’abord, il y a deux espèces de chefs : l’un, qui vaut le mieux, est de couleur rousse ; l’autre est noir et plus moucheté ; il est, en grosseur, double de l’abeille travailleuse. L’abeille la plus active est petite, rondelette et mouchetée ; l’autre est longue et se rapproche de la guêpe. Une autre espèce est celle qu’on appelle le Voleur, qui est noire et a un gros ventre. Enfin, vient le bourdon, qui est le plus gros de tous ces insectes, mais qui n’a pas d’aiguillon et qui ne travaille pas. § 16[387]. Il y a grande différence entre les abeilles, selon qu’elles proviennent de celles qui picorent des plantes cultivées ou des plantes de montagnes. Celles qui naissent d’abeilles de forêts sont plus velues, plus petites, plus laborieuses et plus méchantes. Les abeilles ouvrières font leurs gâteaux de cire bien égaux, et la couverture qu’elles mettent à la surface est lisse partout. La forme de la cellule est unique ; et chacune est destinée tout entière au miel, ou aux petites abeilles, ou aux bourdons. S’il se trouve que tout cela soit réuni dans un même gâteau, il y aura à la suite un gâteau qui aura été fait tout exprès § 17[388]. Les abeilles longues font des cellules irrégulières, et le couvercle en est boursouflé, comme celui de l’anthrène ; les petits, ainsi que tout le reste, y sont placés sans ordre et comme au hasard. De ces abeilles-là, naissent les chefs mauvais, beaucoup de bourdons, beaucoup de celles qu’on appelle Voleurs ; mais elles font très-peu de miel, ou même elles n’en font pas du tout.

§ 18[389]. Les abeilles s’accouvent sur les gâteaux de cire, et elles les échauffent. Sans cette précaution, les gâteaux se perdent, dit-on, et se couvrent de toiles d’araignées. Si elles peuvent continuer à couver ce qui reste, c’est comme une cicatrice qui guérit les gâteaux ; autrement, ils sont absolument perdus. Il se forme dans les gâteaux altérés ainsi de petits vers, qui prennent des ailes et s’envolent. Quand les gâteaux ne font que tomber, les abeilles les redressent ; et elles établissent des appuis en dessous, pour qu’elles puissent y circuler ; car si elles n’y ont pas un chemin, où elles puissent aller et venir, elles ne les couvent plus ; et les toiles d’araignées les envahissent. § 19[390]. Le Voleur et le bourdon ne font rien pour leur part ; mais ils gâtent le travail des autres ; aussi, les abeilles ouvrières les saisissent et les tuent. Elles tuent également la plupart de leurs chefs, et plus particulièrement les mauvais, de peur que, devenant trop nombreux, ils ne divisent l’essaim. Elles les tuent surtout quand la ruche n’est pas très-bien fournie en petits, et qu’il n’y a pas lieu à envoyer des essaims au dehors. Dans ces circonstances, les abeilles détruisent les cellules des Rois, si elles sont déjà préparées, comme favorisant les sorties des essaims. § 20[391]. Elles détruisent même celles des bourdons, si la disette de miel est à craindre, et si les ruches n’en sont pas bien approvisionnées. C’est alors surtout qu’elles combattent pour garder leur miel contre les bourdons, qui le leur prennent ; elles chassent ceux qui restent encore, et bien souvent on les voit les expulser ainsi, au milieu de leur travail.

§ 21[392]. Les petites abeilles luttent énergiquement contre celles de la grosse espèce ; et elles font tout ce qu’elles peuvent pour les chasser des ruches. Si elles sont victorieuses, la ruche a des chances pour réussir d’une façon extraordinaire. Si ce sont les autres, au contraire, qui restent seules maîtresses, elles se livrent à leur oisiveté et ne font rien de parfaitement bien ; elles-mêmes meurent avant l’automne. Quand les abeilles ouvrières ont à en tuer d’autres, elles tâchent de faire les exécutions en dehors de la ruche ; si l’une d’elles vient à mourir, elles la mettent dehors également. § 22[393]. Les Voleurs, ainsi nommés, abîment jusqu’à leurs propres gâteaux ; ils entrent aussi, quand ils peuvent se cacher, dans les autres gâteaux étrangers ; mais si on les y surprend, ils sont mis à mort. La difficulté pour eux, c’est de se cacher ; car à chaque entrée, il y a des gardes ; et si le larron parvient à pénétrer sans être vu, il ne peut plus s’envoler, parce qu’il se remplit outre mesure, et que se roulant devant la ruche, il est bien difficile qu’il échappe. § 23[394]. Quant aux Rois, on ne les voit jamais hors de la ruche qu’avec les essaims qui sortent et sont envoyés ailleurs ; et toujours dans ces sorties, toutes les autres abeilles sont groupées et dispersées autour d’eux. Quand une de ces sorties doit avoir lieu, on entend, pendant quelques jours, dans la ruche, un son monotone et très-particulier ; et deux ou trois jours à l’avance, quelques abeilles volent autour de l’essaim. On n’a pu savoir encore si le Roi est alors au milieu d’elles ; car ce n’est pas une observation très-aisée. Quand les abeilles sont une fois réunies en masse, elles s’envolent, et les autres abeilles se séparent, chaque groupe avec son Roi. Si un groupe peu nombreux se rencontre auprès d’un groupe qui est plus considérable, les moins nombreuses se réunissent à celles qui le sont davantage ; et si le Roi qu’elles abandonnent vient à vouloir les suivre, elles le tuent.

§ 24[395]. Voilà ce qu’on sait sur la manière dont les choses se passent quand les essaims quittent la ruche et qu’ils se séparent.

§ 25[396]. Il y a des abeilles attachées régulièrement à chacun des travaux qu’elles ont à faire. Ainsi, les unes apportent le suc des fleurs ; d’autres apportent de l’eau ; d’autres polissent et dressent les gâteaux. L’eau qu’elles charrient est destinée à nourrir les jeunes, et elles n’en apportent qu’à ce moment. Elles ne se posent jamais sur de la viande ; elles ne mangent rien de cuit Elles n’ont point de temps marqué régulièrement pour le commencement de leurs travaux ; mais quand elles ont tout ce qu’il leur faut, et que la ruche entière est en santé, elles se mettent à l’ouvrage, sans regarder à une saison plus qu’à l’autre ; et tant que tout va bien, elles continuent leur labeur. § 26[397]. L’abeille travaille immédiatement, toute jeune qu’elle est, et trois jours après son éclosion, si elle a de la nourriture. Quand l’essaim est posé quelque part, il y a des abeilles qui s’en détachent pour aller aux vivres, et qui y reviennent ensuite. Dans les ruches qui sont en bon état, la production des jeunes abeilles ne discontinue que dans les quarante jours, à peu près, qui suivent le solstice d’hiver. Quand les jeunes sont déjà assez grands, les abeilles leur préparent de la nourriture et les enferment dans la cellule avec un enduit. Dès que le jeune en a la force, il rompt lui-même l’enveloppe qui le couvre, et il sort. § 27[398]. Les abeilles ouvrières nettoient les ruches, en expulsant les bêtes qui s’y introduisent et qui abîment les gâteaux ; les autres abeilles, dans leur paresse, voient avec indifférence la destruction de leurs ouvrages. Quand les éleveurs prennent les gâteaux, ils y laissent assez de miel pour que les abeilles puissent se nourrir en hiver. Si cette nourriture est assez abondante, la ruche est sauvée ; si elle ne l’est pas, les abeilles meurent en temps d’hiver ; et si c’est par le beau temps, elles désertent la ruche. § 28[399]. Du reste, été comme hiver, le miel est toujours la nourriture des abeilles. Elles y ajoutent aussi une autre espèce d’aliment, qui se rapproche de la cire pour la dureté, et qu’on appelle parfois de la sandaraque.

§ 29[400]. Les ennemis les plus redoutables des abeilles sont les guêpes, les mésanges ægithales, comme on les appelle, l’hirondelle et la mérope. Les grenouilles d’étang leur font également la chasse, quand elles viennent chercher de l’eau ; et aussi, les possesseurs de ruches ne manquent-ils pas de chasser, des étangs où viennent s’abreuver les abeilles, les grenouilles qui s’y trouvent. Ils détruisent encore les guêpiers, les hirondelles et les nids de méropes, qui sont près des ruches. Du reste, l’abeille ne craint aucun animal, si ce n’est les abeilles. Elles se battent entre elles, et aussi contre les guêpes. Hors de la ruche, elles ne s’attaquent point entre elles, et elles n’attaquent point les autres animaux ; mais près de la ruche, elles tuent tout ce qu’elles peuvent atteindre.

§ 30[401]. Une fois que les abeilles ont porté leur coup, elles en meurent, parce qu’elles ne peuvent pas faire sortir leur dard, sans faire sortir aussi leur intestin. Quand on est piqué, on se guérit avec quelques soins et en ôtant l’aiguillon de la plaie ; mais l’abeille meurt toujours de la perte de son dard. En le lançant, elles peuvent faire mourir de très-gros animaux, qu’elles piquent ; et l’on a vu plus d’un cheval mourir de piqûres d’abeilles.

§ 31[402]. Les Rois ne font pas de mal et ne piquent presque pas. Quand des abeilles meurent, les autres les emportent hors de la ruche ; car il n’y a pas d’animal plus propre que l’abeille, en toutes choses ; et elles sortent fréquemment de la ruche pour rendre leurs excréments, qui ont une odeur fort mauvaise. Ainsi qu’on l’a déjà dit, elles souffrent beaucoup de toutes les mauvaises odeurs, et même de celle des parfums, à tel point qu’elles piquent ceux qui en font usage. § 32[403]. Bien d’autres accidents peuvent faire périr les abeilles, par exemple, lorsque, les Rois étant plus nombreux qu’il ne faut, chacun d’eux essaie d’emmener ailleurs une partie de la ruche. La grenouille de haie tue aussi les abeilles, en venant souffler aux entrées de la ruche, et en prenant au vol celles qui en sortent. Elle n’a rien à redouter des abeilles ; mais l’homme chargé du soin des ruches ne manque pas de la tuer.

§ 33[404]. Nous venons de dire qu’il y a une espèce d’abeilles qui travaillent mal, et qui font des gâteaux tout raboteux. A en croire quelques éleveurs, ce sont surtout les jeunes abeilles qui font de si mauvaise besogne, à cause de leur inexpérience. Les jeunes abeilles sont celles de l’année ; celles-là ne piquent pas comme les autres ; et l’on peut transporter leurs essaims sans danger, parce qu’ils sont composés de jeunes. Quand le miel fait défaut, on expulse les bourdons, et l’on jette aux abeilles des figues et autres choses d’une saveur douce. § 34[405]. C’est à l’intérieur que travaillent les vieilles abeilles ; elles sont plus velues, précisément parce qu’elles restent dans la ruche ; les jeunes, qui sortent et rapportent la nourriture du dehors, sont plus lisses. Quand il n’y a plus de place pour pouvoir travailler, on tue les bourdons, qui se tiennent au fond de la ruche. Dans une ruche malade, on a vu quelques abeilles en sortir pour aller dans une ruche voisine, et victorieuses, dans le combat qu’elles avaient dû livrer, rapporter une provision de miel. L’éleveur les ayant tuées, les autres sortirent à leur tour et se battirent, sans faire le moindre mal à l’homme.

§ 35[406]. Les maladies qui attaquent surtout les ruches en pleine prospérité sont d’abord celle qu’on appelle le cléros. § 36[407]. Ce sont des vers fort petits qui se produisent sur le plancher de la ruche, et qui, en se développant, en recouvrent tout l’intérieur, comme d’une toile d’araignée. Les gâteaux alors se pourrissent. Une autre maladie, c’est l’inertie où tombent les abeilles, et la mauvaise odeur dont les ruches s’emplissent. Le butin des abeilles, c’est le thym ; le blanc leur vaut mieux que le rouge ; l’emplacement des ruches doit n’être pas trop chaud dans les grandes chaleurs, et il doit être chaud en hiver. Les abeilles sont surtout malades, quand elles emploient à leur travail des plantes atteintes de la rouille.

§ 37[408]. Lorsque le vent souffle par trop fort, elles portent avec elles une pierre, pour se faire un lest contre sa violence. Elles vont boire, s’il y a un cours d’eau dans le voisinage ; et elles ne boivent jamais ailleurs que là, après avoir tout d’abord déposé leur fardeau. S’il n’y a pas de cours d’eau à proximité, elles vont boire ailleurs ; et elles rejettent leur miel pour retourner aussitôt au travail. § 38[409]. Les deux saisons pour la confection du miel, ce sont le printemps et l’automne. Le miel du printemps est plus agréable et plus blanc, et, en somme, meilleur que celui de l’automne. Le miel le plus fin est celui qui provient de nouvelles cellules de matériaux tout frais. Le miel roux est le moins bon, à cause de la cellule d’où il vient et qui le gâte, comme le vase peut gâter le vin qu’il contient. Aussi, doit-on le faire sécher. § 39[410]. Quand le thym est en fleur, et que les cellules en sont pleines, le miel ne durcit pas. Le bon miel a la couleur de l’or ; le miel blanc ne vient pas de thym parfaitement pur ; mais il est efficace pour les maux d’yeux et les plaies. La partie la moins bonne du miel monte toujours à la surface, et il faut l’enlever pour trouver le miel pur, qui est au fond. § 40[411]. C’est lorsque toute la végétation est en fleur que les abeilles font la cire ; aussi, faut-il alors enlever la cire de l’alvéole ; car elles font la nouvelle immédiatement. Les plantes, où elles la recueillent sont l’atractyllis, le mélilot, l’asphodèle, le myrte, le phléos, l’agnus-castus et le sparte. Si elles emploient du thym, elles y mêlent de l’eau, avant d’en enduire la cellule. § 41[412]. Toutes les abeilles font leurs excréments, comme on l’a dit plus haut, soit en volant dehors, soit dans une seule cellule. Les petites sont aussi, comme on vient de le dire, plus laborieuses que les grandes ; elles ont des ailes toutes froissées ; elles sont de couleur noire, et comme brûlées. Celles qui sont brillantes et polies sont fainéantes, comme les femmes qui sont paresseuses.

§ 42[413]. Il semble que les abeilles aiment le bruit ; et aussi, on les rassemble, dit-on, dans la ruche en frappant bruyamment des coquilles ou des vases de terre, les uns contre les autres. Toutefois on ne sait pas du tout si elles ont la faculté de l’ouïe, ou si elles ne l’ont pas ; et si quand elles se rassemblent ainsi, c’est par plaisir ou par peur. Elles chassent également de leurs ruches celles qui ne font rien, et celles qui ne font pas d’épargne. Elles divisent le travail de la façon que nous avons expliquée ; les unes font le miel ; d’autres pondent les petits ; celles-ci produisent l’érithaque ; celles-là préparent les gâteaux ; d’autres encore portent de l’eau dans les alvéoles, et la mélangent avec le miel ; d’autres enfin vont au travail du dehors. § 43[414]. Le matin, elles dorment en silence, jusqu’à ce que l’une d’elles réveille les autres en bourdonnant deux ou trois fois ; et sur-le-champ, elles volent toutes à l’ouvrage. En rentrant, elles font d’abord grand bruit ; et petit à petit, elles en font de moins en moins, jusqu’à ce que l’une d’entre elles bourdonne. Comme pour le signal du sommeil ; et toutes alors gardent le silence à l’instant même. § 44[415]. On reconnaît la santé de la ruche au bruit énorme qu’elle fait, et au mouvement des entrées et des sorties des abeilles, parce que c’est à ce moment qu’elles font leur couvain. Elles souffrent de la faim surtout quand elles commencent à travailler, au sortir de l’hiver. Elles deviennent alors plus paresseuses, si, en récoltant la ruche, on leur a laissé moins de miel qu’il ne leur en faut ; car on doit toujours mesurer ce qu’on laisse de gâteaux à l’importance de l’essaim. Si on leur en laisse trop peu, elles travaillent avec moins de cœur ; et elles sont aussi plus paresseuses, si la provision qu’elles ont est trop forte, parce que alors elles sont moins ardentes à l’ouvrage. § 45[416]. Une ruche doit donner à l’éleveur une mesure, ou une mesure et demie, de miel ; les bonnes ruches en fournissent deux, deux et demie ; très-peu en fournissent jusqu’à trois. Comme les guêpes, ainsi qu’on vient de le dire, sont les ennemis des abeilles, les éleveurs les prennent en mettant de la viande dans un plat ; quand les guêpes s’y sont précipitées en grand nombre, on couvre le plat où elles sont prises, et on les met sur le feu pour les tuer. Quand les bourdons ne sont que quelques-uns dans la ruche, ils lui font du bien, en rendant les abeilles encore plus laborieuses.

§ 46[417]. Les abeilles pressentent le mauvais temps et la pluie. Ce qui l’indique, c’est qu’alors elles ne s’écartent pas de la ruche et ne volent pas au loin ; mais elles circulent dans l’air chaud, qu’elle leur procure. Les éleveurs en tirent ce pronostic qu’elles attendent du mauvais temps. § 47[418]. Lorsque, dans la ruche, les abeilles se pendent les unes aux autres, c’est signe que l’essaim va abandonner la ruche ; mais dès que les éleveurs s’en aperçoivent, ils aspergent la ruche de vin doux, en le soufflant dedans. Il est bon de planter autour des ruches des poiriers, des fèves, de l’herbe médique, de l’herbe de Syrie, de l’arbeille, du myrte, des pavots, du serpolet et des amandiers. Quelques éleveurs, pour distinguer leurs abeilles à la picorée, jettent dessus de la farine. Si le printemps est tardif, ou si l’été est trop sec, et s’il tombe de la rouille, les abeilles font moins de petits.

§ 48[419]. Tels sont tous les faits qu’on a pu constater sur les abeilles.


CHAPITRE XXVIII

Des guêpes et de leurs deux espèces, sauvages et non sauvages ; différences entre les unes et les autres ; des guêpes non sauvages ; leurs deux espèces, les mères et les ouvrières ; les premières vivent plus longtemps ; rôle des mères, construisant les guêpiers, y produisant d’abord les ouvrières, et ensuite les nouvelles mères ; repos des mères ; on ne sait ce qu’elles deviennent ; description des mères ; on ne sait si elles ont des aiguillons ; variétés à cet égard dans les guêpes ordinaires ; nourriture et accouplement des guêpes ; distinction des mâles et des femelles ; abondance plus ou moins grande de guêpes.


§ 1[420]. Les guêpes sont de deux espèces. Les unes, qui sont sauvages, sont très-rares. Elles restent dans les montagnes, et elles ne font pas leur nid sous terre, mais sur des arbres et des chênes. Elles sont plus grosses et plus allongées que les autres ; leur couleur aussi est plus noire ; elles sont mouchetées ; leur dard à toutes est intérieur, et elles sont plus courageuses et plus fières. La piqûre qu’elles font est aussi plus douloureuse, parce que leur aiguillon est proportionnellement plus gros que celui des autres. § 2[421]. Les guêpes de cette espèce vivent deux ans ; en hiver, on les voit s’envoler des chênes qu’on abat ; et durant tout le froid, elles y restent cachées dans leurs retraites. Elles y vivent dans le bois. Parmi elles, on distingue les mères, et les ouvrières, comme parmi celles qui sont plus douces que celles-là. § 3[422]. C’est en observant les guêpes moins sauvages qu’on peut voir quelle est la nature des ouvrières et des mères. Dans les guêpes non sauvages, il y a deux espèces : les unes, qu’on appelle les mères, sont les chefs ; les autres sont les ouvrières. Les chefs sont beaucoup plus gros et plus doux. Les ouvrières ne vivent pas deux ans ; et toutes meurent pendant l’hiver. On peut le voir chaque année : les ouvrières, quand l’hiver commence, deviennent inertes, et elles disparaissent toutes vers le solstice. Au contraire, les chefs qu’on appelle les mères se montrent durant tout l’hiver, et font leurs retraites sous terre. Aussi, les laboureurs et les gens qui ont à fouiller la terre durant le froid ont trouvé bien des fois des mères ; et jamais ils n’ont vu d’ouvrières.

§ 4[423]. Voici ce que l’on sait de la reproduction des guêpes. Lorsque l’été arrive, les chefs, après avoir choisi un lieu bien disposé pour la surveillance, y font les gâteaux de cire, et y construisent ce qu’on appelle les guêpiers. Ces gâteaux sont petits ; ils ont comme quatre portes, ou quelque chose d’approchant. C’est là que naissent les ouvrières, mais non les mères. § 5[424]. Quand les guêpes ont grandi, les chefs font d’autres guêpiers plus grands après ceux-là ; mais les guêpes grandissant toujours, ils en font encore de nouveaux, de telle sorte qu’à la fin de l’automne les guêpiers sont très-nombreux et très-grands ; c’est dans ceux-là que le chef, nommé la mère, produit non plus des guêpes, mais des mères. Ces mères paraissent d’abord en haut du guêpier, et à la surface, comme des vers plus gros que les autres, dans quatre rangées de cellules consécutives ou un peu davantage, à peu près de la grosseur de ceux des chefs dans les gâteaux de cire des abeilles. § 6[425]. Une fois que les guêpes sont nées dans les gâteaux, les chefs ne font plus rien ; mais les ouvrières viennent leur apporter de la nourriture. C’est évident, puisque alors les chefs des ouvrières ne sortent plus dehors, et qu’ils demeurent à se reposer en dedans. On ne sait pas bien si les chefs de l’année précédente sont mis à mort par les jeunes guêpes, après qu’ils ont produit de nouveaux chefs, si c’est là ce qui arrive dans tous les cas également, ou si on les laisse vivre plus longtemps. On n’a pu faire encore aucune observation sur leur vieillesse, ou sur rien de ce qui s’y rapporte, pour la mère-guêpe et les guêpes sauvages.

§ 7[426]. La mère est large et pesante, plus épaisse et plus grosse que la simple guêpe ; et à cause de sa pesanteur, elle ne vole pas bien loin. C’est là ce qui fait qu’elles demeurent toujours dans les guêpiers, dont elles arrangent et confectionnent tout l’intérieur. Il y a ce qu’on appelle des mères dans presque tous les guêpiers. § 8[427]. Mais on n’est pas d’accord pour savoir si les chefs ont ou n’ont pas d’aiguillon. Il semble que, comme les chefs des abeilles, ceux des guêpes ont des dards ; mais ils ne peuvent les faire sortir, ni les lancer. Quant aux guêpes ordinaires, les unes sont sans aiguillon, ainsi que les bourdons ; les autres en sont pourvues. Les guêpes qui n’en ont pas sont plus petites, plus faibles, et ne se battent pas. Celles qui ont un dard sont plus grosses ; et elles sont très-courageuses. Parfois, on les appelle des mâles, tandis qu’on appelle femelles les guêpes qui n’ont pas de dard. A l’approche de l’hiver, les guêpes qui ont un aiguillon le perdent, à ce qu’on croit ; mais nous n’avons jamais trouvé quelqu’un qui l’ait vu de ses yeux.

§ 9[428]. Les guêpes naissent le plus souvent par les temps de sécheresse et dans les lieux les plus âpres ; c’est sous terre qu’elles naissent. Elles composent leurs gâteaux de ce qu’elles butinent et de la terre qu’elles y joignent, chacun de ces gâteaux partant d’une origine unique et comme d’une seule racine. Elles se nourrissent de certaines fleurs, et de certains fruits ; mais leur nourriture principale est la chair d’animaux. § 10[429]. On a observé des guêpes non-sauvages dans leur accouplement, ainsi que quelques-unes des autres ; mais on n’a pas pu savoir si toutes les deux étaient pourvues ou dépourvues de dard, ou bien si l’une en avait un, tandis que l’autre n’en avait pas. Sur des guêpes sauvages accouplées, on a constaté que l’une des deux avait un aiguillon ; et pour l’autre, on ne l’a pas vu.

§ 11[430]. Il ne semble pas que la guêpe vienne d’une ponte ; car immédiatement après sa naissance, elle est trop grosse pour qu’une autre guêpe ait pu la produire. Quand on prend une guêpe par les pattes, et qu’on lui laisse les ailes libres pour bourdonner, celles qui n’ont pas d’aiguillon s’approchent envolant ; mais celles qui en ont un ne s’approchent pas ; et l’on prétend trouver là une preuve que les unes sont mâles ; et les autres, femelles. § 12[431]. On prend des guêpes en hiver dans les trous de la terre ; et les unes ont des dards, tandis que les autres n’en ont pas. Les unes font de petits guêpiers et en petit nombre ; d’autres en font beaucoup et de très-grands. On prend beaucoup de celles qu’on appelle des mères, quand la saison change, sur des ormeaux, où elles butinent des matières gluantes et gommeuses. Il se produit une grande quantité de mères, quand l’année précédente a vu beaucoup de guêpes, et qu’elle a été très-pluvieuse. On les prend alors dans les lieux escarpés, et dans les fentes qui se forment sur la terre en ligne droite ; et toutes ont un aiguillon.

§ 13[432]. Voilà ce qu’on sait sur les guêpes.


CHAPITRE XXIX

Des frelons ; leur nourriture est presque uniquement de la chair ; leurs chefs ; leur manière de construire leurs ruches sous terre, comme les fourmis ; développement de ces ruches ; ils meurent presque tous en hiver ; les frelons n’essaiment pas ; essaims égarés par hasard ; on ne sait rien sur l’accouplement et la reproduction des frelons ; ils ont tous des aiguillons.


§ 1[433]. Les anthrènes, ou frelons, vivent, à peu près comme les abeilles, du suc des fleurs ; mais ils ne le recueillent pas comme elles. Le plus souvent, ils ne se nourrissent que de chair. De là vient qu’ils vivent dans les ordures. Ils font la chasse aux grosses mouches ; et quand ils les prennent, ils leur coupent la tête, et s’envolent en emportant le reste du corps. Ils mangent aussi des fruits sucrés et doux. Telle est leur nourriture. § 2[434]. Les frelons ont des chefs, tout comme les abeilles et les guêpes. Leurs chefs sont, en comparaison des autres frelons, plus gros que le chef des guêpes ne l’est aux autres guêpes, ou que le chef des abeilles ne l’est aux autres abeilles. Le chef des frelons reste également à l’intérieur, comme celui des guêpes. § 3[435]. Les frelons font leur ruche sous le sol, en rejetant de la terre, comme le font les fourmis. Il n’y a pas chez les frelons, non plus d’ailleurs que pour les guêpes, les envois d’essaim qu’il y a chez les abeilles ; mais les jeunes frelons sans cesse survenus restent où ils sont nés, et ils rendent la ruche de plus en plus considérable, en continuant à rejeter de la terre. Les ruches deviennent ainsi énormes ; et d’une ruche qui avait bien réussi, on a tiré souvent trois ou quatre paniers de gâteaux de cire.

§ 4[436]. Les frelons n’emmagasinent pas de nourriture comme les abeilles ; mais ils se cachent pendant l’hiver ; et alors, presque tous meurent. On n’a point encore observé s’ils meurent tous sans exception. Ils n’ont jamais qu’un seul chef dans leurs ruches, de même que dans les ruches d’abeilles il n’y a jamais qu’un chef unique, pour diriger les essaims qui s’en vont. § 5[437]. Lorsque quelques frelons se sont égarés loin de la ruche, qu’ils ont quittée, ils s’attachent en masse à un arbre, et ils y font des gâteaux, comme on en voit assez souvent à la surface de l’écorce. En ce cas, ils se donnent encore un chef unique ; puis, quand ce chef est arrivé à toute sa croissance, il sort en emmenant le reste de l’essaim ; et il va former, avec les frelons, une ruche nouvelle sous terre. § 6[438]. On ne sait encore rien sur l’accouplement des frelons ; et l’on ignore complètement leur mode de reproduction. Ainsi qu’on l’a vu plus haut, parmi les abeilles, il y en a qui n’ont pas d’aiguillon, non plus que les bourdons et les Rois, de même aussi qu’il y a des guêpes qui en sont dépourvues ; mais tous les frelons sans exception sont armés d’un dard. Toutefois, il resterait à savoir un peu plus précisément si leur chef a ou n’a pas non plus d’aiguillon.


CHAPITRE XXX

Des bombyles ; leurs ruches sous une pierre ; leur miel grossier ; du tenthrédon, ou grugeur ; sa nourriture ; ses énormes ruches sous terre. — Résumé sur l’industrie des insectes.


§ 1[439]. Les bombyles, ou bourdons, pondent sous une pierre et immédiatement sur le sol, dans deux cellules, et parfois un peu plus. Ils font aussi une espèce de miel, qui n’est qu’ébauché, et qui n’est pas bon. § 2[440]. Le tenthrédon, ou grugeur, se rapproche beaucoup du frelon ; il est moucheté, et de la largeur à peu près de l’abeille. Comme il est très-friand, il vole isolément sur les mets de cuisine, sur les poissons, et sur tels autres aliments de ce genre, qu’il aime beaucoup. Il pond sous le sol, ainsi que les guêpes ; et il remue beaucoup de terre. La ruche des tenthrédons, ou grugeurs, est bien plus grande et bien plus allongée que celle des guêpes.

§ 3[441]. Voilà ce que sont les travaux et la manière de vivre des abeilles, des guêpes et autres insectes du même genre.


CHAPITRE XXXI

Du lion et de son naturel ; sa douceur quand il est repu ; ses caresses aux animaux qu’il connaît ; ses allures fières et tranquilles devant le chasseur ; il craint le feu ; citation d’Homère ; sa magnanimité envers le chasseur maladroit ; sa longévité ; deux espèces de lions ; des morsures du lion ; du thôs ; sa force ; il n’y a sans doute qu’une seule espèce de thôs.


§ 1[442]. Ainsi qu’on l’a dit plus haut, on peut observer dans le naturel des animaux de grandes différences, surtout en fait de courage ou de lâcheté, de douceur et de férocité, même parmi les animaux sauvages. § 2[443]. Ainsi, le lion est terrible quand il mange ; mais quand il n’a plus faim et qu’il s’est repu, il est très-doux. Il n’est jamais inquiet, jamais soupçonneux de quoi que ce soit. Il aime beaucoup à jouer avec les animaux qu’on a élevés avec lui, et auxquels il est habitué ; il les caresse. A la chasse, tant qu’il est en vue, il ne fuit pas et ne craint pas les chasseurs ; si leur foule le force à s’éloigner, il se retire pas à pas et une patte après l’autre ; et bientôt il se retourne. § 3[444]. Si cependant il est surpris dans un fourré, il se hâte de fuir jusqu’à ce qu’il rejoigne un endroit découvert ; et alors, il recommence à se retirer pas à pas. Si, dans les plaines, il est obligé de fuir devant la multitude des assaillants, il court en allongeant sa marche ; mais il ne bondit pas. Cette course continue est allongée à peu près comme celle d’un chien. Quand il poursuit une proie, il fond sur elle, dès qu’il en est proche. § 4[445]. Ce qu’on rapporte du lion est vrai, quand on dit qu’il craint le feu, d’où ce vers d’Homère :

Et les torches qu’il craint, même dans sa fureur ;

et quand on assure qu’il cherche et distingue le chasseur qui l’a blessé, pour se jeter sur lui. Si on ne le tire pas, mais qu’on le gêne cependant, et qu’il puisse saisir le chasseur, il ne lui fait aucun mal et ne le déchire pas de ses griffes ; mais après l’avoir secoué et bien effrayé, il le laisse aller. C’est surtout quand les lions vieillissent qu’ils se rapprochent des villes et qu’ils attaquent les personnes, parce que la vieillesse leur ôte la force de chasser, et qu’alors ils souffrent beaucoup des dents. § 5[446]. Les lions vivent de longues années. Un lion boiteux qu’on avait pris avait bon nombre de ses dents toutes cassées ; et l’on conjecturait à ce signe qu’il avait dû vivre depuis bien longtemps, puisque, s’il n’avait pas été très-vieux, il n’aurait pas eu les dents en cet état.

§ 6[447]. Il y a des lions de deux espèces : l’un est plus ramassé ; sa crinière est plus crépue, et il est plus timide ; l’autre est plus long ; sa crinière est droite, et il est plus courageux. Quelquefois, en fuyant, les lions ont la queue basse et tendue, comme les chiens. On cite un lion qui allait se précipiter sur un sanglier, trembler à sa vue et fuir, en le voyant se hérisser pour se défendre. § 7[448]. Il supporte difficilement les blessures dans les flancs et dans le ventre ; mais sur toutes les autres parties du corps, il peut en supporter beaucoup, et il a la tête particulièrement dure. Les morsures qu’il fait, ou les déchirures de ses griffes, causent des plaies d’où sort une suppuration toute jaune, qu’on ne peut étancher, ni par des bandages, ni par des éponges. Mais le remède est le même que contre les plaies venant de morsures de chien.

§ 8[449]. Les thôs ne sont pas hostiles à l’homme ; ils ne l’attaquent pas, et ils n’en ont pas très-peur. Ils sont de force à combattre les chiens et les lions. Aussi, ne vivent-ils pas dans les mêmes lieux. Les petits thôs sont les plus forts. Tantôt on ne reconnaît que deux espèces de thôs ; tantôt on en compte trois ; il ne semble pas qu’il y en ait plus d’une espèce ; mais comme il arrive à quelques espèces de poissons, d’oiseaux et de quadrupèdes, les thôs subissent des changements selon les saisons de l’année. Ainsi, ils ont en hiver une autre couleur qu’en été ; et pendant la chaleur, ils deviennent tout lisses, tandis que, pendant l’hiver, ils sont revêtus d’un poil épais.


CHAPITRE XXXII

Du bison de Péonie ; sa grosseur ; sa crinière plus forte que celle du cheval ; sa voix ; ses cornes ne peuvent servira le défendre ; leur couleur et leur cavité profonde ; regard du bison ; il n’a pas de dents de devant ; sa queue ; sa chair très-bonne à manger ; sa manière de se défendre en lançant ses excréments, qui sont brûlants dans ce moment ; les bisons se retirent dans les montagnes vers la saison de mettre bas ; rempart qu’ils se font avec leur fiente, toujours très-abondante.


§ 1[450]. Le bison se trouve en Péonie, dans les monts Messapiens, qui séparent la Péonie de la Mædique. Les Péons l’appellent aussi Monape. Il est à peu près gros comme un taureau, et il est plus massif que le bœuf, parce qu’il n’est pas allongé. Sa peau bien déployée pourrait donner place à sept personnes. D’ailleurs, il ressemble beaucoup à un bœuf, si ce n’est qu’il a, comme le cheval, une crinière, qui va jusqu’aux épaules. § 2[451]. Le poil de cette crinière est plus doux que celui du cheval, et plus rapproché du corps. La couleur en est rousse ; cette crinière est longue jusqu’à tomber sur les yeux, et elle est fort épaisse. Sa couleur tient le milieu à peu près entre le cendré et le fauve, sans être cependant, comme celle des juments appelées alezanes ; mais cette crinière est plus sèche ; et en bas, elle est presque de la laine. Jamais les bisons ne deviennent, ni très-noirs, ni très-roux. § 3[452]. La voix du bison est assez semblable à celle du bœuf. Ses cornes sont recourbées et penchées l’une vers l’autre ; elles ne peuvent pas lui servir à se défendre ; elles ont un peu plus d’une coudée de long ; elles sont assez creuses pour contenir chacune une demi-mesure, ou peu s’en faut. La couleur de ces cornes est d’un beau noir, tout luisant. La touffe du front des bisons leur venant sur les yeux, ils regardent de côté plus souvent qu’en face. § 4[453]. Le bison n’a pas de dents de devant, non plus que le bœuf, ni aucun des animaux à cornes. Il a les jambes velues, et il a la corne du pied fendue en deux. Il a une queue petite proportionnellement à son corps, comme celle du bœuf. Il fait voler la poussière et creuse le sol, comme le taureau. Son cuir est résistant contre les coups. Sa chair est d’un goût agréable ; et aussi lui fait-on la chasse. § 5[454]. Quand il est blessé, il se met à fuir sans discontinuer jusqu’à ce qu’il n’en puisse plus. Il se défend en lançant des ruades, et en projetant ses excréments, qu’il pousse loin de lui jusqu’à la distance de quatre brasses, il se sert de ce moyen de défense, qui lui est aisé, et qu’il renouvelle souvent. Ses excréments brûlent à ce point que les poils des chiens atteints tombent desséchés. Mais sa fiente ne produit cet effet que quand l’animal est troublé et frappé de crainte ; autrement, quand il est tranquille, elle ne brûle pas. § 6[455]. Telle est la forme du bison, et tel est son naturel. Quand la saison de mettre bas est arrivée, ils se retirent en masse dans les montagnes. Mais auparavant ils couvrent de leurs excréments les environs du lieu où les femelles doivent mettre bas ; et ils s’en font comme un rempart circulaire ; car cet animal rend des excréments en une quantité vraiment extraordinaire.


CHAPITRE XXXIII

De l’éléphant, le plus doux et le plus apprivoisable des animaux sauvages ; on peut lui apprendre une foule de choses ; son accouplement ; longévité du mâle et de la femelle ; il aime l’eau ; mais il ne peut nager à cause de sa pesanteur ; il n’avance dans l’eau que jusqu’au point où sa trompe peut encore en sortir pour le faire respirer.


§ 1[456]. De tous les animaux sauvages, le plus facile à apprivoiser et le plus doux, c’est l’éléphant. On peut lui apprendre une foule de choses, qu’il comprend, puisqu’on l’instruit même à se prosterner devant le Roi. Il a des sens exquis ; et il a d’ailleurs une intelligence supérieure à celle des autres animaux. § 2[457]. Quand l’éléphant a monté une femelle et qu’elle est pleine, il ne la touche plus. Quelques personnes croient que l’éléphant vit deux cents ans ; d’autres disent cent vingt ; et que la femelle vit à peu près aussi longtemps que le mâle. Il est dans toute sa force à soixante ans, il supporte difficilement les frimas et les grands froids. Il aime à se tenir sur le bord des rivières, mais il n’y vit pas. Il marche cependant dans l’eau, et il s’y avance tant que sa trompe peut en sortir ; car c’est par sa trompe qu’il souffle et qu’il respire. Il ne peut pas d’ailleurs nager du tout, à cause de l’extrême pesanteur de son corps.


CHAPITRE XXXIV

Du chameau ; il refuse de monter sa mère ; vengeance d’un chameau qui y avait été forcé par ruse ; cheval d’un roi de Scythie qui se tue après avoir sailli sa mère, sans la reconnaître.


§ 1[458]. Les chameaux ne couvrent pas leurs mères ; et si on veut les y contraindre, ils s’y refusent. Une fois, un chamelier, qui n’avait pas d’étalon tout prêt, enveloppa une mère de façon à la cacher et la livra à son jeune chameau. Mais pendant l’accouplement, le voile tomba ; le jeune chameau se borna pour le moment à consommer la copulation ; mais peu de temps après, il tua le chamelier, à force de le mordre. § 2[459]. On rapporte aussi qu’un roi de Scythie avait une admirable jument, dont tous les produits étaient excellents. Désirant que le plus vigoureux de ses poulains produisit avec sa mère, il le fit amener pour la saillir. Le cheval refusa ; mais la mère ayant été cachée sous une couverture, il la monta sans la reconnaître. Le visage de la jument s’étant découvert après la saillie, le cheval, à cette vue, se mit à fuir, et alla se précipiter du haut des rochers.


CHAPITRE XXXV

Du dauphin ; sa douceur et son amour pour ses petits ; observations diverses sur son caractère ; vitesse prodigieuse du dauphin ; ses bonds hors de l’eau, par-dessus de gros bateaux ; explication de ce fait ; les plongeurs ; le dauphin vit toujours par couple, mâle et femelle ; il s’échoue souvent sur la plage.


§ 1[460]. Parmi les poissons de mer, le dauphin est celui dont on cite le plus de traits de douceur et de docilité. On vante même ses affections et son amour pour ses enfants, à Tarente, en Carie, et dans d’autres pays. Ainsi, en Carie, on prétend qu’un dauphin ayant été pris et couvert de blessures, une foule de dauphins arrivèrent dans le port, et ne le quittèrent que quand le pêcheur eût lâché le dauphin blessé ; alors seulement, tous s’en allèrent. § 2[461]. Les petits dauphins sont toujours suivis de quelqu’un des gros, pour les défendre. On a observé une fois une troupe de grands dauphins et de petits dauphins réunis tous ensemble. Deux autres laissés en arrière parurent à peu de distance, nageant sous un petit dauphin mort, et le soutenant sur leur dos, quand il coulait à fond, comme si, dans leur pitié pour lui, ils voulaient empêcher que d’autres gros poissons ne le dévorassent. § 3[462]. On raconte de la vitesse du dauphin des choses non moins incroyables ; et l’on peut admettre que c’est le plus rapide de tous les animaux de mer et de terre, dans ses mouvements. On prétend que, dans ses bonds, il saute jusque par-dessus les voiles de grands bateaux. C’est ce qui leur arrive surtout quand ils poursuivent quelque poisson pour le manger. Ils plongent avec lui jusqu’au fond des mers, où il fuit, tant la faim les presse ; mais quand le retour doit devenir par trop long, ils retiennent leur souffle, comme s’ils avaient calculé la distance ; et se retournant alors, ils vont avec la rapidité d’une flèche, voulant franchir l’immense intervalle aussi vite que possible, afin de pouvoir respirer à la surface. C’est dans cet élan qu’ils bondissent par-dessus les voiles des bateaux qui se trouvent là. C’est d’ailleurs le même effet qu’éprouvent aussi les plongeurs, quand ils descendent au fond de l’eau ; en remontant, ils se sentent emportés aussi avec une énorme vitesse, proportionnée à leur propre force.

§ 4[463]. Les dauphins vont toujours par paires, mâle et femelle. On ne sait pas pourquoi ils s’échouent parfois sur la plage ; car on assure qu’ils le font assez souvent, quand la fantaisie leur en prend, et sans aucune cause appréciable.


CHAPITRE XXXVI

Des changements réciproques qu’exercent dans les animaux les actes sur le naturel, et le naturel sur les actes ; poules essayant de se faire coqs ; coqs essayant de se faire poules.


§ 1[464]. Tout de même que les actes des animaux dépendent beaucoup des impressions qu’ils reçoivent, de même aussi leur naturel change suivant leurs actes ; souvent même ce sont des parties de leur corps qui éprouvent un changement. C’est ce qu’on peut voir sur les oiseaux. Les poules, quand elles ont vaincu les mâles, se mettent à chanter comme eux, et elles essayent de cocher ; leur crête et leur queue se relèvent, à ce point qu’on a de la peine à reconnaître que ce sont toujours des femelles ; il en est même auxquelles il pousse de petits ergots. § 2[465]. Réciproquement, on a vu des mâles, après la mort de la femelle, prendre pour les poussins tous les soins qu’elle aurait pu en prendre, les conduisant et les nourrissant, et allant jusqu’à cesser de chanter et de cocher. Il y a même quelques-uns de ces mâles qui sont tellement femelles, dès leur naissance, qu’ils tolèrent que d’autres essaient de les cocher.


CHAPITRE XXXVII

De la castration et de ses effets sur les oiseaux ; manière de les châtrer ; les eunuques ; effets de la castration sur leur voix et leur système pilaire ; effets de la castration sur les quadrupèdes ; description de la castration des veaux ; castration des truies ; procédés employés ; castration des chamelles ; rapidité des chameaux de courses ; effet général de la castration sur tous les animaux ; quelques observations sur les animaux ruminants ; aucun animal sauvage ne rumine, si ce n’est le cerf ; dents des ruminants ; quelques exceptions ; relâchement du ventre ; propension à vomir chez quelques espèces.


§ 1[466]. Il y a quelques animaux qui changent de forme et de naturel, non pas seulement par l’effet de l’âge et des saisons, mais aussi quand on les coupe. On ne peut couper que ceux qui ont des testicules. Les oiseaux en ont à l’intérieur ; les ovipares, parmi les quadrupèdes, les ont près des reins. Les vivipares qui marchent les ont, pour la plupart, à l’extérieur, bien que quelques-uns les aient au dedans du corps ; mais tous les ont au bas-ventre. § 2[467]. On châtre les oiseaux au croupion, au point par où ils se joignent dans l’accouplement. Si l’on brûle cette partie, à deux ou trois reprises, avec un fer chaud sur une bête adulte, sa crête devient toute pâle ; l’oiseau ne chante plus, et il ne cherche plus à cocher. Si la bête est jeune, la croissance ne lui donne aucune de ces facultés.

§ 3[468]. C’est bien ainsi que les choses se passent même pour les hommes. Si on les mutile dans leur enfance, les poils qui viennent postérieurement à la naissance ne poussent plus ; la voix ne change pas, et le timbre en reste aigu. Si l’on châtre des hommes déjà pubères, les poils postérieurs tombent, sauf les poils du pubis, qui diminuent, mais qui subsistent. Les poils de naissance ne disparaissent pas, puisque jamais un eunuque ne devient chauve. § 4[469]. Dans les quadrupèdes châtrés ou estropiés, la voix se modifie en celle de la femelle. Tous les autres quadrupèdes qui ont été châtrés, quand ils étaient plus jeunes, en souffrent beaucoup et en meurent ; il n’y a que les porcs sur lesquels l’opération ne fait aucune différence. Tous les animaux coupés en bas âge deviennent plus gras que ceux qu’on ne coupe pas ; et s’ils sont complètement constitués, ils ne grossissent plus. § 5[470]. Quand on coupe des cerfs qui, à cause de leur âge, n’ont pas encore de bois, il ne peut plus en pousser. Si on les coupe quand ils en ont déjà, la dimension des cornes reste la même ; et la bête ne les perd plus. § 6[471]. On coupe les veaux à un an ; autrement, ils deviennent moins beaux et plus petits. Voici comment on châtre les jeunes taureaux. On les met sur le dos, on leur ouvre les bourses dans le bas, et on leur froisse les testicules ; puis on relève les racines des testicules le plus possible, et l’on ferme la plaie de l’incision avec des poils, pour que la suppuration puisse se faire au dehors. Si la plaie s’enflamme, on cautérise la bourse, que l’on saupoudre de terre. Les taureaux qui ont des testicules, et que l’on châtre, peuvent saillir, en apparence…..

§ 7[472]. On coupe la matrice de la femelle des porcs, la caprie, et dès lors elle ne sent plus le besoin de l’accouplement ; mais elle engraisse très-vite. On la fait d’abord jeûner deux jours avant la castration ; et après l’avoir suspendue par les pieds de derrière, on lui ouvre le bas-ventre là où les mâles ordinairement ont les testicules ; car c’est là qu’est la caprie, dans la matrice. On en coupe un petit morceau, et l’on recoud la plaie. § 8[473]. On châtre aussi les chamelles, dont on compte se servir à la guerre, pour qu’elles ne deviennent pas pleines. Il y a des gens du Haut-Pays qui possèdent jusqu’à trois mille chameaux. A la course, les chameaux dépassent de beaucoup la vitesse des chevaux de Nisa, à cause de la longueur de leur pas. En général, les animaux qui sont coupés deviennent plus longs que ceux qui ne le sont pas.

§ 9[474]. Tous les animaux qui ruminent prennent profit et plaisir à ruminer, autant qu’ils en prennent à manger. Ceux qui ruminent sont les animaux qui n’ont pas la double rangée de dents, tels que les bœufs, les moutons, les chèvres. On n’a rien observé encore à cet égard pour les animaux sauvages, si ce n’est pour ceux qu’on élève quelquefois en troupeaux, comme on sait pour le cerf qu’il rumine. § 10[475]. Tous les ruminants se couchent plus volontiers pour ruminer ; et principalement pendant l’hiver. Ceux qu’on nourrit dans les étables ruminent pendant sept mois. Les ruminants qu’on réunit en troupeaux ruminent moins et moins longtemps, parce qu’ils vont paître au dehors. Quelques-uns des quadrupèdes qui ont la double rangée de dents n’en ruminent pas moins, comme les rats du Pont ; et parmi les poissons, celui qu’on appelle, à cause de cette circonstance, le Rumineux.

§ 11[476]. Les animaux qui ont de longs membres ont le ventre relâché ; et ceux qui ont de larges poitrines vomissent aisément. Cette observation générale s’applique tout aussi bien aux quadrupèdes, aux oiseaux, et aux hommes.


CHAPITRE XXXVIII

Exemples divers de changements de couleur et de voix dans les oiseaux ; illusions que font parfois ces changements ; exemples du coucou ; exemple de la huppe ; citation d’Eschyle ; oiseaux qui se roulent dans la poussière ou qui se baignent ; les oiseaux de proie ne se roulent ni ne se baignent ; oiseaux qui retient des vents par le derrière,


§ 1[477]. Bon nombre d’oiseaux changent, selon les saisons, de couleur et de voix. Ainsi, le merle devient roux de noir qu’il était ; et sa voix devient tout autre. En été, il chante ; mais en hiver, il siffle, et ne fait plus entendre que des sons discordants. La grive aussi change de couleur ; en hiver, elle est grisâtre au cou ; en été, elle y a des mouchetures ; mais sa voix ne varie pas. § 2[478]. Le rossignol ne cesse de chanter quinze jours et quinze nuits de suite, à l’époque où la montagne se couvre de feuillage ; plus tard, il chante encore ; mais ce n’est plus de suite. A mesure que l’été s’avance, il a un autre chant ; ce n’est plus sa voix si modulée, si forte, si répétée ; elle est devenue tout unie. Le rossignol change en outre de couleur ; aussi, durant cette saison, on lui donne en Italie un nom différent. D’ailleurs, cet oiseau ne se montre jamais longtemps, parce qu’il se retire.

§ 3[479]. Les rouges-gorges (Erithacos) et les oiseaux qu’on appelle queues-rouges se métamorphosent de l’un à l’autre. Le rouge-gorge est un oiseau d’hiver ; le queue-rouge est un oiseau d’été ; mais on peut assurer qu’il n’y a de différence entre eux que celle de la couleur, et pas d’autre. § 4[480]. On en peut dire autant des becs-figues et des têtes-noires qui se changent les uns dans les autres. Le bec-figue se montre aux approches de l’automne ; la tête-noire se montre aussitôt que l’automne a touché sa fin. Ces deux-là encore ne diffèrent absolument entre eux que par la couleur et la voix. Que ce soit un seul et même oiseau, c’est ce qu’on a constaté en observant le changement dans les deux espèces, avant que ce changement ne fût passé à l’autre entièrement. § 5[481]. Il n’y a rien d’étonnant d’ailleurs à ce que, dans ces oiseaux, la voix et la couleur changent à ce point, puisque en hiver la tourterelle ne roucoule plus. Parfois cependant, par de très-beaux jours en hiver, elle se fait entendre, à la grande surprise des témoins de ce phénomène. Puis, au printemps, la tourterelle recouvre la voix. Du reste, c’est surtout à l’époque de l’accouplement que les oiseaux, en général, ont leurs chants les plus forts et les plus variés.

§ 6[482]. Le coucou est encore un des oiseaux qui changent de couleur ; et il ne s’annonce plus par son cri, quand approche le moment où il va disparaître. C’est à la canicule qu’il disparaît ; et il se montre jusqu’au lever de cette constellation, à partir du printemps où on commence à le voir. L’oiseau que quelques-uns nomment l’œnanthe disparaît au lever de Sirius, et paraît quand il se couche, fuyant tantôt le froid, et tantôt la chaleur. § 7[483]. La huppe change aussi de couleur et d’aspect, comme Eschyle l’a dit dans les vers suivants :

« Il a varié les couleurs de la huppe, qui a été le témoin de ses propres forfaits, et il nous a montré cet oiseau hardi des rochers revêtu de toute son armure. Dès que le printemps paraît, la huppe déploie l’aile d’un busard-blanc ; car elle nous fait voir deux formes : celle de son enfance et la sienne, quoique toutes deux ne viennent que d’une seule source ; mais au début de l’automne, quand l’épi commence à jaunir, c’est un plumage moucheté qui la couvre de nouveau. Dans sa haine implacable des lieux qu’elle connaît, elle fuit toujours vers d’autres lieux, ne cherchant que les rochers déserts et les sombres forêts. »

§ 8[484]. Il y a des oiseaux qui se roulent dans la poussière ; d’autres aiment à se baigner ; il en est d’autres qui ne se roulent, ni ne se baignent. Ceux qui ne volent pas bien, et qui restent à terre, se roulent dans la poussière volontiers, comme la poule, la perdrix, l’attagen, l’alouette, le faisan. Quelques-uns de ceux qui ont les ongles droits, et tous ceux qui vivent le long des rivières, aux bords des étangs ou de la mer, aiment à se baigner. Il y en a qui aiment les deux, la poussière et l’eau, tels que le pigeon et le moineau. La plupart des oiseaux à serres recourbées n’ont, ni l’une, ni l’autre de ces habitudes.

§ 9[485]. Voilà ce que sont ces différents oiseaux ; mais il en est quelques-uns, parmi les petits, qui présentent cette particularité de faire du bruit par leur derrière, ainsi qu’en font les tourterelles. Les oiseaux de ce genre se donnent un mouvement violent dans ces parties inférieures du corps, en même temps qu’ils font entendre leur voix.


LIVRE X


APOCRYPHE




FIN
DU TROISIÈME ET DERNIER VOLUME
  1. Est tel qu’on vient de le voir. Ceci se rapporte aux développements donnés, dans les livres antérieurs, sur tout ce qui concerne les organes et la reproduction des animaux. C’est comme la partie matérielle du sujet ; l’étude du caractère et des habitudes des animaux en est en quelque sorte la partie morale. C’est à celle-là que sont consacrés le huitième et le neuvième livres. Voir plus haut, liv. I, ch. I, § 10. — Des traces des facultés diverses de l’âme. On voit qui Aristote n’exagère point la ressemblance des animaux avec l’homme, et que, sous ce rapport, il se tient dans une juste mesure, que bien des naturalistes modernes n’ont pas su garder. Leur science est sans doute beaucoup plus étendue ; mais ils jugent les choses beaucoup moins bien. — La pensée et l’intelligence. Qui sont le privilège exclusif de l’homme, comme l’auteur l’a établi si profondément dans le Traité de l’âme. — En traitant des parties… Ceci fait allusion au 1er livre, et non pas à l’ouvrage spécial, intitulé : Des Parties des Animaux.
  2. Du plus au moins. Ainsi la vue et l’ouïe sont beaucoup meilleures dans quelques animaux que chez l’homme. — Sur une simple analogie. Ce n’est plus la même faculté ; mais c’est seulement quelque chose d’analogue. — L’art et la science. Voir le premier chapitre de la Métaphysique, liv. I, § 5, p. 4 de ma traduction. — Telle autre faculté naturelle. En d’autres termes, l’Instinct. Aristote en citera de très nombreux exemples dans les livres suivants.
  3. Ce que sont les enfants. L’observation est très juste, et elle est d’autant plus facile et plus sûre que nous avons constamment les enfants sous les yeux. — En rien. Ce serait trop fort sans le correctif qui suit : « On peut presque dire ». — Il n’y a rien de faux. C’est vrai ; mais tout dépend de la mesure dans laquelle on rapproche l’homme et l’animal.
  4. Par des degrés tellement insensibles… la continuité nous cache… Ces considérations si hautes se trouvent présentées encore avec plus de développements dans le Traité des Parties des animaux, liv. V, § 95, p. 200, édit. et trad. Frantzius. Ces considérations, qui nous semblent aujourd’hui vulgaires et rebattues, étaient fort neuves au temps d’Aristote, et leur vérité n’en était que plus frappante ; elle a dû émerveiller les contemporains. — Auquel des deux extrêmes… Malgré tous les progrès qu’a pu faire la science, notre embarras à cet égard n’est pas moindre ; il y a encore une foule d’êtres qu’on ne sait comment classer entre les plantes et les animaux. — Participer davantage à la vie. Par exemple, les sensitives, et les plantes à mouvement giratoire.
  5. Ainsi qu’on vient de le dire. Le texte dit précisément : « Comme il a été dit antérieurement. » On peut rapporter ceci au paragraphe précédent ; ou bien aussi, au liv. I, ch. I, § 15 et 16. — Les pinnes… solènes. La science moderne a conservé les mots grecs, pour une espèce de mytilides ou moules, et pour une autre famille de coquillages, les Solénines ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, pp. 683 et 687.
  6. La classe tout entière des testacés. La remarque est juste. — Quant à la sensibilité. C’est cette faculté, qui, selon Aristote, distingue essentiellement l’animal ; mais là où elle est à peine marquée, il est bien difficile de faire la distinction. — Les téthyes. Voir plus haut, liv. IV, ch. IV, §§ 1 à 4 ; et pour les acalèphes, ibid. §§ 5 et suiv. — Une différence très légère. Voir plus haut, § 1.
  7. La même gradation… Le texte n’est pas aussi précis. — Toutes les plantes qui viennent de graine. Et où le fait de la reproduction est plus évident. — Sont communes à tous ces êtres. Aux plantes et aux animaux.
  8. Mais dès que la sensibilité se manifeste. C’est elle qui, à proprement parler, constitue l’animalité. — Soit l’accouplement… soit… Toutes questions qui ont été étudiées longuement dans tout ce qui précède. — Les uns… les autres… D’autres encore… Tous ces détails sont exacts et importants.
  9. Une partie de leur vie… une autre partie. Même observation ; et ceci distingue profondément les animaux des plantes, avec lesquelles ils semblaient peut-être un peu trop confondus dans le paragraphe précédent. — Le plaisir qui leur est naturel. Ici ; c’est uniquement le plaisir de se repaître.
  10. Selon les lieux qu’ils habitent. Au lieu de « Les lieux », nous dirions aujourd’hui : « Les milieux ». — Les uns vivent sur terre, les autres vivent dans l’eau. Il semblerait, d’après ceci, qu’Aristote ne reconnaît que deux grandes divisions, animaux terrestres, animaux aquatiques. La suite prouve qu’il reconnaît trois divisions, en ajoutant aux deux autres les amphibies, pouvant vivre à la fois sur terre et dans l’eau. Cette dernière classe n’est pas indiquée aussi nettement qu’elle pourrait l’être.
  11. De trois sortes. La même classification est répétée plus loin, et presque dans les mêmes termes, ch. III, au début. — D’abord les uns… puis, les autres… Voilà deux divisions déjà. — D’autres qui ne reçoivent… C’est une troisième division, qui semble impliquer la classe des amphibies. — D’autres enfin… Il est évident que ceci est une quatrième division. Il semble donc qu’il y a dans tout ce passage une confusion, qu’ont déjà signalée MM. Aubert et Wimmer, mais qu’il est impossible de corriger à l’aide des manuscrits, qui n’offrent aucune variante. — Jouir des deux existences. Ce sont les amphibies ; et il aurait fallu en faire la troisième classe, après ceux qui sont simplement aquatiques, ou simplement terrestres. On peut croire que c’est bien là au fond la pensée d’Aristote ; mais elle n’est pas suffisamment exprimée. Voir liv. I, ch. I, § 11.
  12. Parmi les animaux qui respirent l’eau. C’est-à-dire, les poissons. — Il y en a beaucoup qui tirent leur nourriture de l’eau. Ce seraient donc les amphibies, bien qu’Aristote ne le dise pas aussi nettement qu’on pourrait le désirer. En effet, les amphibies ne vivraient pas s’ils étaient absolument privés du séjour dans l’eau, alternant avec le séjour sur terre. J’ai suivi, dans tout ce passage, le sens le meilleur que pouvait donner la combinaison de diverses leçons empruntées aux manuscrits. — Les tortues… les crocodiles… les hippopotames et les phoques. Ce sont là autant d’amphibies, ou du moins qui semblent être amphibies. La science moderne n’est pas en ceci tout à fait d’accord avec Aristote. Cuvier, Règne animal, tome I, pp. 166 et suiv., ne classe, parmi les amphibies proprement dits, que le phoque et le morse, avec leurs différentes espèces. L’hippopotame est compté parmi les pachydermes ; les tortues, les crocodiles et les grenouilles, parmi les reptiles, chéloniens, sauriens, et batraciens, Cuvier, ibid., tome II, pp. 8 et 102. C’est que la science moderne attache peu d’importance au genre de vie des animaux, tandis qu’elle en attache beaucoup à leur structure osseuse. Les amphibies font partie de la grande classe, ou type, des vertébrés, qui comprend depuis les poissons jusqu’à l’homme. — Sur le bord de la terre sèche. Ceci se rapporte plus spécialement aux amphibies.
  13. Le plus singulier… C’est exagéré ; il est vrai qu’Aristote joint au dauphin les autres animaux qui lui ressemblent ; mais l’organisation des cétacés est en général fort étrange ; et Cuvier lui-même le remarque en la décrivant : Règne animal, tome I, p. 285. — Et ceux qui peuvent lui ressembler. MM. Aubert et Wimmer regardent ces mots comme apocryphes, ou tout au moins comme inutiles. Cependant, il est bien vrai qu’à côté du dauphin il y a d’autres cétacés qui s’en rapprochent, comme l’auteur lui-même l’indique ici. Outre la baleine, on pourrait citer les narvals, les cachalots, etc.
  14. Il n’est pas facile de classer. Cette difficulté est toujours la même ; et la science moderne n’est pas moins embarrassée que celle de l’Antiquité. — Les cétacés à tuyau. Ce soit ceux que nous appelons les Souffleurs. — Ils respirent l’eau. Voir dans Cuvier, loc. cit., l’explication de ce mécanisme spécial. — Ils respirent l’air par un poumon. C’est exact ; le larynx, pénétrant dans les arrière-narines, y reçoit l’air qu’il conduit aux poumons, sans que l’animal ait à faire sortir sa tête hors de l’eau. — Ils respirent par là. C’est le fait dans sa totalité ; mais l’acte de la respiration se fait spécialement comme on vient de le rappeler. — Gémissant. C’est le sens littéral du mot grec ; on pourrait dire aussi : « Râlant. » — Quand le dauphin dort. Il ne paraît pas que le fait soit certain.
  15. Dans les deux divisions. Il est vrai que c’est impossible ; mais on pourrait en faire une troisième division. — Tâchons de définir. L’auteur a raison d’essayer cette définition plus précise ; mais celle qu’il donne n’est pas très satisfaisante. — C’est pour se rafraîchir.. Ou « Se refroidir. » C’est là une théorie qui Aristote a toujours soutenue, et il pensait que la respiration n’a pas d’autre objet que de rafraîchir l’animal. Cette théorie n’est pas cependant absolument fausse ; et l’air que la respiration introduit dans notre organisation est toujours moins chaud que l’intérieur de notre corps. — Le rejeter par un organe spécial. Voir Cuvier, loc. cit., tome I, p. 285.
  16. Ont des branchies. Aristote a étudié ce sujet assez longuement dans le Traité des Parties des animaux, liv. III, ch. VI, p. 145, édit. et trad. Frantzius, à propos des fonctions du poumon. — Pourvus de sang. On ne comprend pas bien comment cette remarque vient ici. — Qu’en vue de leur nourriture. Il est probable que la science moderne contesterait ces assertions.
  17. Il faut classer…. Cette classification n’est pas plus nette que les précédentes ; et l’on ne peut faire une classe proprement dite pour un seul animal, comme l’auteur le fait ensuite pour le Cordyle. — Celui qu’on nomme le Cordyle. Cette formule qu’emploie ici Aristote semble indiquer que, même de son temps, l’animal dont il parle était peu connu. La science moderne ne le connaît pas du tout ; et dans ses recherches, elle n’a pas rencontré d’animal qui remplisse les conditions indiquées ici. Voir la note de MM. Aubert et Wimmer, dans leur Catalogue, tome I, p. 115, § 8. Il n’est pas probable cependant que le Cordyle soit un animal purement fabuleux. Voir plus haut, liv. I, ch. 1, § 12, et la note ; voir aussi Athénée, liv. VII, p. 306.
  18. En quelque sorte renversée. L’idée est ingénieuse ; mais elle pouvait être rendue plus clairement ; l’auteur veut dire sans doute qu’il suffit d’un très léger changement, dans les organes essentiels de l’animal, pour qu’il devienne amphibie, au lieu de rester purement terrestre ou aquatique. — Quelques animaux mâles… des femelles. La comparaison peut sembler assez singulière au premier coup d’œil ; mais au fond elle est assez juste ; voir sur la cause de la différence des sexes le Traité de la Génération des animaux, liv. IV, § 1 et §§ 27 et 28, pp. 280 et 292, édit. et trad. Aubert et Wimmer. — De très petits organes. Le paragraphe suivant indique quels sont ces organes.
  19. La partie qu’on mutile est très petite. L’observation est très juste. — Ni l’un ni l’autre. Ceci peut sembler exagéré ; le mâle a beau être mutilé, il se distingue toujours de la femelle.
  20. Dans les deux sens. Cette expression se rapporte exclusivement à l’animal aquatique, tel qu’il a été décrit plus haut, § 2, c’est-à-dire, simplement aquatique, ou amphibie. — D’un changement dans les parties les plus ténues. Il eût été bon d’indiquer précisément ces parties, bien que ce soit assez difficile encore, même pour la science moderne ; mais c’est surtout l’appareil respiratoire qui doit changer la nature de l’animal. — Participé… de la matière… Ceci ne se comprend pas bien. Au lieu de la matière dont ils font leur nourriture, il faudrait plutôt dire : « Du lieu où ils doivent trouver leur nourriture ». — Plus haut, Voir plus haut, ch. I, § 9, sur la nourriture des animaux.
  21. À trois points de vue différents. L’explication, donnée ici des trois divisions générales des animaux n’est pas plus claire que celle du chapitre II. — D’un certain mélange. L’auteur suppose qu’il s’agit ici des amphibies ; mais l’expression du texte est si générale qu’on peut l’interpréter de manières fort différentes, puisque MM. Aubert et Wimmer y voient la distinction des animaux à sang chaud, et à sang froid. Voir plus haut, liv. I, ch. I, § 11.
  22. De la partie potable de l’eau de mer. Je ne crois pas que ce fait soit constaté par des expériences récentes. — La coction… Il faut par là entendre la digestion, que font les organes de l’animal, qui cuisent en quelque sorte ses aliments. — L’expérience suivante. Cette curieuse expérience est déjà presque mot pour mot dans la Météorologie, liv. II, ch. III, § 35, p. 136 de ma traduction. Je ne vois pas qu’après Aristote on ait essayé de répéter cette expérience, qui est d’ailleurs assez facile à faire. — Et cette eau est potable. A la manière affirmative dont parle l’auteur, on pourrait croire qu’il avait fait lui-même l’expérience qu’il recommande.
  23. Les acalèphes. Dans la zoologie moderne, les Acalèphes sont des méduses, dont l’organisation est fort bizarre ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 210, trad. franç. — Au milieu de leur corps. L’observation est exacte. Voir Cuvier, Règne animal, à III, pp. 274 et suiv. C’est à lui que j’emprunte la synonymie d’Orties de mer. — La partie charnue de l’intérieur des huîtres. Le corps des acalèphes est gélatineux. — Le rocher qui leur sert de coquille. L’obtention est très ingénieuse. Voir plus haut sur les acalèphes, liv. IV, ch. VI, § 3. — Les Lépades…. Ou Écuelles. Voir plus haut, liv. IV, ch. III, § 4.
  24. Ceux des testacés qui se meuvent. Un peu plus haut, § 2, il a été question des testacés qui ne se meuvent pas ; l’auteur a fait une digression en parlant des acalèphes ; il revient à la seconde classe des crustacés. — Carnivores… ils se nourrissent des plantes. Ces distinctions sont fort exactes.
  25. Les tortues de mer. Il semble que cette étude sur les tortues de mer n’est pas ici à sa place, puisque, dans le paragraphe suivant, l’auteur doit revenir aux crustacés. D’ailleurs, les détails donnés sur les tortues sont exacts.
  26. Les langoustes…. § 9. Comment vivent les crustacés. MM. Aubert et Wimmer regardent ces trois paragraphes comme apocryphes ; ils donnent diverses raisons de cette conjecture : d’abord l’inexactitude des faits, et ensuite, l’incorrection du style. — Entre ces animaux. Il ne s’agit que des combats des langoustes entre elles ; leurs luttes sont féroces. — De singulières péripéties. C’est là une des expressions que MM. Aubert et Wimmer trouvent peu dignes du style aristotélique. — Les polypes. On croit qu’il s’agit ici du polype octopode. Il est probable que les détails qui suivent ne sont pas sans fondement réel, bien que peut-être ils soient exagérés. — Tous les mollusques sont carnivores. Ceci semble certain.
  27. Autour de leurs nids. Le mot grec a un sens moins général ; c’est plus particulièrement le lieu où ces animaux s’accouplent. — Dans les hautes mers. C’est la traduction littérale du mot grec ; mais il s’agit moins de la haute mer que des eaux simplement profondes.
  28. Leurs cornes. Ou Tentacules. — Elles se défendent de loin. Le sens est douteux ; et le texte offre encore ici une expression qui semble peu aristotélique. — Elles se battent aussi. Voir plus haut, § 7.
  29. Les petits calmars. Voir liv. 1, ch. VI, § 2. La plupart des traducteurs conservent le mot grec de Teuthides. — Les polypes. Le mot est bien vague ; et il y a beaucoup d’espèces de polypes.
  30. Se nourrissent de leurs œufs. Voir plus haut, le même fait déjà énoncé, liv. V, ch. IV, § 7, et liv. VI, ch. XII, § 4. — Les bonitons. Ou Amies ; voir Athénée, liv. VII, p. 277, § 4. — Les orphos. J’ai conservé le mot grec, parce que l’identification n’est pas certaine. Quelques zoologistes croient que l’Orphos est le Polyprion cernuus de Cuvier, qui porte encore ce nom et qu’on trouve dans la mer des Cyclades ; d’autres zoologistes croient que c’est le Serranus gigas. La première opinion semble la plus probable ; voir le Catalogue de MM. Aubert et Wimmer, tome I, p. 137, § 53. — Le Dasquille. J’ai dû reproduire simplement le mot grec, parce qu’on ne sait pas quel est ce poisson.
  31. Le scare. J’ai ajouté : On perroquet de mer, parce que cette identification paraît certaine. Le Scare se trouve dans l’archipel, et il y porte encore le même nom de Scarus cretensis, voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 846. — La queue-noire. C’est la traduction littérale du mot grec ; et la zoologie moderne a gardé le mot même de Melanoura. Ce poisson a une large tache noire sur le dos de la queue. Il paraît que les pécheurs grecs lui donnent encore le nom de Mélanourion. — Du Prasium. On ne sait pas au juste ce que c’est que le Prasium, et l’on suppose que c’est le Marrubium creticum ; en tout cas, ce doit être une plante marine. Théophraste, Histoire des Plantes, liv. VI, ch. II, § 5, p. 100, édit. Firmin-Didot, en décrit deux espèces. — Avec de la coloquinte. Le fait doit être vrai ; mais je ne sais si des observations nouvelles l’ont contrôlé.
  32. Le muge. C’est une expression très générale dans la langue zoologique d’Aristote ; et elle désigne plusieurs espèces de poissons qui se rapportent toutes à un seul genre ; voir Cuvier, Règne animal, tome II, pp. 230 et suiv.; voir aussi le Catalogue de MM. Aubert et Wimmer, tome 1, p. 130. — Le capiton. J’ai pris ce mot afin de me rapprocher davantage de l’étymologie grecque. La zoologie moderne a conservé le nom de Céphalos, en appelant une espèce de muge Mugil-Céphalus ; voir Cuvier, loc. cit., p. 231.
  33. Grosse-lèvre. C’est la traduction littérale du nom grec, que la zoologie de notre temps a conservé ; Mugil-chélo, de Cuvier, loc. cit., p. 232. — Le Péréas. L’orthographe de ce nom n’est pas sûre ; et elle varie dans quelques manuscrits. C’est sans doute une espèce de muge.
  34. Aucun autre poisson ne mange leur frai. Peut-être à cause de l’ordure dont ce frai est couvert. — L’acharnas. On ne sait quel est ce poisson. — Le plus vorace des poissons. Ceci se rapporte probablement à la seule espèce des muges ; car il y a des poissons beaucoup plus voraces encore. On peut croire qu’il y a ici quelque erreur, et qu’il s’agit d’un autre poisson que le muge. — Le sinodon. On ignore ce qu’est ce poisson ; et j’ai dû reproduire simplement le nom grec, qui se trouve déjà plus haut, § 1. — Tomber leur estomac par la bouche. Il paraît que ce n’est pas leur estomac proprement dit, mais plutôt leur vessie natatoire. Le fait d’ailleurs n’est rien moins que certain.
  35. Plus haut. Voir plus haut, § 1. — Et les mollusques. Il est probable qu’il y a ici quelque altération du texte. — De boue et d’algues. Ceci a été dit en partie au § 4. — Le Caulium. On ne sait quelle est cette plante ; elle n’est pas mentionnée par Théophraste. — Le phycis. Voir Athénée, l. VI, p 319. J’ai dû, comme presque tous les traducteurs, me borner à reproduire le nom grec, qu’on ne peut identifier sûrement ; voir le Calalogue de MM. Aubert et Wimmer, t. 1, p. 73, § 75. — Squille… Plus haut, liv. IV, ch. II, § 1, il a été question des squilles ou crevettes. Peut-être serait-il mieux de conserver simplement le mot grec de Carides, l’identification étant incertaine.
  36. Nous le répétons. Voir plus haut, ch. III, § 7. — Qu’ils sont carnivores. Ceci ne concerne que les poissons qu’on amorce avec de la viande, comme le contexte le prouve. — Le scare. Voir plus haut, § 2. — Le seul qui semble ruminer. Voir une assertion pareille, liv. II, ch. XII, § 23. Aristote d’ailleurs n’affirme pas, et il semble lui-même douter du fait, qui ne paraît pas avoir été confirmé par la science moderne.
  37. Les dauphins. Quelques éditeurs ont pensé que ces mots étaient une addition étrangère, parce que le fait n’est pas exact pour les dauphins, non plus que pour les cétacés. — Cela fait… vraiment inimaginables. MM. Aubert et Wimmer croient que cette phrase aussi est apocryphe.
  38. De tout ce qu’on leur jette. Il semble résulter de l’expression du texte que ce serait avec du pain et des comestibles ordinaires qu’on aurait nourri les anguilles. Voir Athénée, liv. VII, p. 298. — Se nourrissent d’eau douce. Ce fait n’est pas exact. — Se renouvelant sans cesse. Ces procédés, qui ressortent de la nature même des choses, sont encore ceux de la pisciculture. — Ils troublent l’eau. C’est un moyen qu’on pratique toujours.
  39. Le Strymon. Le fleuve le plus important de la Macédoine, qu’il séparait de la Thrace, et qui se jetait dans la mer Égée, au-dessous d’Amphipolis. — L’époque des Pléiades. Voir plus haut, liv. V, ch. VIII, § 5. L’époque ici indiquée répond à peu près au solstice d’hiver. — Ne surnagent pas. L’explication que donne l’auteur est ingénieuse. — Le ventre très petit. Ou l’estomac.
  40. Vivent encore cinq ou six jours. C’est peut-être un peu exagéré ; mais cette faculté de vivre assez longtemps hors de l’eau tient sans doute à ce que les branchies des anguilles sont très petites. Les observations qui suivent sont exactes, et elles prouvent quels soins on donnait déjà, dans l’Antiquité, à l’élevage du poisson.
  41. Elles sont suffoquées. Toutes ces observations sont exactes, comme les précédentes. — Des animaux qui respirent. Sous-entendu qui respirent « l’air ». Le fait est d’ailleurs parfaitement certain.
  42. Des sept et huit ans. On pouvait s’assurer de l’âge des anguilles en les gardant avec soin dans des viviers, comme on le voit d’après ce qui précède. — Les anguilles d’eau douce…. dans la vase. MM. Aubert et Wimmer croient cette phrase apocryphe, parce qu’elle n’est pas d’accord avec les détails antérieurs. — Elles mangent surtout durant la nuit. Le fait paraît certain.
  43. De l’alimentation des poissons. Dont l’étude a été commencée au chapitre III.
  44. Qui ont des serres. Le grec dit précisément : « Qui ont des ongles recourbés ». — En boulette. J’ai ajouté ces mots, pour rendre toute la force de ceux du texte. — Spidzias. Il a fallu conserver le mot grec, parce que l’identification n’est pas sûre ; c’est peut-être l’épervier-chanteur de Cuvier, Régne animal, tome 1, p. 333. La racine du mot Spidzias signifie Gazouiller. — La buse. Voir Cuvier, loc. cit., p. 336. — On la trouve partout, On pourrait traduire : « Durant toute l’année »; mais ce qui doit décider l’autre sens, c’est ce que dit Cuvier : « C’est un des oiseaux les plus répandus ; on l’a trouvée presque partout ». Il y a d’ailleurs de nombreuses espèces de Buse.
  45. L’orfraie. Espèce d’aigle-pêcheur ; voir Cuvier, Règne animal, tome I, p. 326. — Deux espèces de vautours. La zoologie moderne distingue beaucoup plus d’espèces ; voir Cuvier, loc. cit., p. 314. Peut-être Aristote a-t-il voulu parler des vautours et des faucons.
  46. Quelques oiseaux de nuit. C’est la grande division des oiseaux de proie en diurnes et nocturnes. — L’effraie. Voir Cuvier, loc. cit., p. 342. — Ces trois oiseaux. Il y a ici dans le texte une tournure grammaticale que MM. Aubert et Wimmer regardent comme tout à fait indigne d’Aristote. Il est possible qu’il y ait eu ici quelque altération de rédaction ; mais le fond des observations est bien de lui. — Comme l’hirondelle. On s’est étonné qui Aristote classe l’hirondelle parmi les carnivores ; mais comme elle ne se nourrit que d’insectes, il n’a pas eu tort comme on le croit.
  47. Le Batis. On a dû conserver le mot grec, ne sachant quel est cet oiseau. — Trois espèces de mésanges. La zoologie moderne reconnaît beaucoup plus d’espèces. Cuvier, Règne animal, tome I, p. 401, compte en France seulement six espèces de Mésanges. — Elle a une longue queue. Cuvier distingue aussi une de ses espèces par cette épithète de longue queue.
  48. L’épilaïs. Quelques éditeurs disent : Hypolaïs. On ne sait pas précisément quel est cet oiseau. — L’œstros. Même observation. — Le roitelet. Le mot grec est : « Tyran ». Un peu plus bas, il est question d’un oiseau appelé le Roi. Voir le § 12. — Qu’une sauterelle. C’est exagéré, bien que le roitelet soit le plus petit des oiseaux d’Europe ; le mâle a une belle tache de jaune d’or sur la tête ; voir Cuvier, Règne animal, tome I, p. 389. — Petite bête charmante. Cette remarque atteste que le philosophe était vivement ému des beautés de la nature. — La Fleur. C’est la traduction littérale du mot grec. — Le pinson de montagne. La zoologie moderne a conservé ce nom à une espèce de pinson. — Le troglodyte. Le texte dit précisément le Roi, que sans doute il ne faut pas confondre avec le roitelet. — Le spermologue. Quelques éditeurs ont cru que c’était une simple épithète, et non pas le nom d’un oiseau différent.
  49. De larves. Ou « de vers ». — Des épines. C’est la traduction exacte du mot grec ; mais on doit comprendre que c’est la graine des arbrisseaux à épines que mangent ces oiseaux. — L’épinier. J’ai traduit le mot grec ; mais il paraît bien que ce nom d’Acanthis désigne une espèce de Pinson, ou de Linotte, fort commune en Grèce, Fringilla cannabina ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 998. — Le Thraupis. Je n’ai pu que reproduire le mot du texte ; on ne sait pas quel est cet oiseau. L’étymologie m’a permis de donner une traduction : « Ou Briseur ». — Le bonnet-d’or. C’est la traduction du mot grec ; mais on ignore quel est cet oiseau. — Se contentent d’épines. Ou de graines épineuses. — Ils dorment…. dans les épines. Ou dans les buissons épineux.
  50. La Pipô. Voir plus loin, liv. IX, ch. XVIII, § 3. — Qui a deux espèces. La zoologie moderne en distingue davantage ; mais, parmi elles, il y en a deux qu’on nomme le grand Épeiche et le petit Épeiche ; voir Cuvier, Règne animal, t. 1, pp. 449 et suiv. — Perce-arbres. C’est en effet le nom qu’ils méritent ; voir Cuvier, loc. cit. — En volant contre les arbres. Ils frappent les arbres de leurs becs, et ils enfoncent leur forte langue dans les trous qu’ils font, pour y prendre les larves, dont ils se nourrissent ; Cuvier, id., ibid.
  51. De la grosseur d’une tourterelle. Cuvier se sert de la même expression ; et l’on peut croire qu’il avait sous les yeux le texte d’Aristote ; Cuvier, loc. cit., p. 419. — Le Gobe-mouche. C’est la traduction littéralement exacte du mot grec, composé de la même façon que le nôtre.
  52. Le petit ramier. L’identification n’est pas certaine. — Ramier…. pigeon, etc. Ce sont autant d’espèces de pigeons. Le Vineux en particulier est le Columba oenas de la zoologie moderne. Voir Athénée, abrégeant ce passage de l’Histoire des animaux, liv. IX, p. 393. — La tourterelle. Cet oiseau vit naturellement dans les bois, comme le ramier. On ne l’élève en volière que pour l’amusement, comme le dit Cuvier, Règne animal, tome I, p. 491. — Qu’il avale avec avidité. J’ai ajouté ces mots, pour rendre toute la force de l’expression grecque. — Colombacés. Ce mot, qui peut sembler avoir une apparence trop moderne, rend littéralement l’expression du texte.
  53. Trouvent leur nourriture sur la terre. Le texte dit littéralement : « Marchent pour trouver leur nourriture ». — Palmipèdes. C’est la traduction exacte du mot grec, qui est composé de la même manière. — Les doigts simplement divisés. Voir Cuvier, Règne animal, tome I, p. 493. Les échassiers s’appellent aussi, dans la science moderne, des oiseaux de rivage. — En y plongeant…. La leçon n’est pas certaine, et MM. Aubert et Wimmer croient qu’il y a ici une lacune dans le texte.
  54. Le héron blanc. C’est la traduction exacte du nom grec. On peut croire aussi qu’il s’agit du héron à bec en spatule, « qui a le bec large et long » comme le dit le texte. — Le Schoinilos, le Cincle. On doit garder les mots grecs, dans l’ignorance où l’on est des oiseaux qu’ils désignent précisément. Ils sont tous de la famille des Motacillides, ou Hoche-queues. — Le Scalidris. On ne sait pas quel est cet oiseau ; l’orthographe de son nom varie selon les manuscrits, Calidris, Scalydris, Scandris.
  55. Les halcyons. C’est l’Alcedo hispida et l’Alcedo rudis, qui répondent aux deux espèces dont Aristote parle ici. Voir sur les halcyons, plus haut, liv. V, ch. VIII, § 4. C’est un passereau assez petit. — Le Kéryle. On ne sait pas quel est cet oiseau.
  56. Le kepphos. C’est sans doute une espèce de mouette. — L’oiseau des rochers et des trous. J’ai paraphrasé le nom grec, parce qu’on ne sait pas au juste quelle est cette espèce d’oiseau de rivages. — Le phalaris. C’est sans doute une espèce de plongeon. — Le colymbe. Même remarque. — Le corbeau aquatique. Le texte dit simplement : « Le corbeau ». Il paraît bien que c’est le cormoran, qui est en général d’un brun noir, qui devient plus foncé sur le dos. Il niche sur les arbres ; voir Cuvier, Règne animal, tome I, p. 462.
  57. La grande-oie… la petite-oie. Ce sont les oies sauvages. — L’oie-renard. C’est la traduction littérale du mot grec ; mais il serait difficile de dire à quelle espèce d’oie il s’applique. Voir plus haut, liv. VI, ch. II, § 6. — La chèvre d’eau. Le texte ne dit que « La chèvre ». Comme ces mots manquent dans plusieurs manuscrits, et qu’on ne sait de quel oiseau il s’agit, MM. Aubert et Wimmer ont regardé ce mot comme apocryphe. — Le pénélops. On ne peut identifier cet oiseau ; mais on doit supposer que c’est une espèce de canard. — L’aigle marin. C’est la traduction exacte du mot grec. Dans la zoologie moderne, on a appliqué ce mot à une espèce de pygargue, appelée aussi aigle de mer, ou Pandion, espèce de Balbuzard ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 1001.
  58. Ils mangent les autres oiseaux. Il semble que ceci n’est qu’une répétition inutile de ce qui est dit un peu plus bas, sur les oiseaux de proie. — Boivent peu. Cette observation semble assez exacte, quoiqu’on l’ait contestée. — La cresserelle. C’est une espèce de faucon ; voir Cuvier, Règne animal, tome 1, p. 332 ; il y en a plusieurs espèces.
  59. Ils se nourrissent de chair… aussi de l’herbe. Ces faits sont exacts. — Plus glouton que le serpent. Il y a, parmi les poissons, des animaux encore plus voraces que le serpent, les requins par exemple ; mais ce qui distingue le serpent, c’est la manière dont il engloutit sa proie. — Qui a peu de sang. Comme MM. Aubert et Wimmer, j’ai admis la leçon proposée par Schneider d’après la traduction de Guillaume de Morbéka. Cette correction s’appuie en outre sur plusieurs passages des autres écrits d’Aristote ; Traité de la Génération des animaux, liv. II, § 8, p. 130, édit. et trad. Aubert et Wimmer ; et Traité des Parties des animaux, liv. III, ch. VI, p. 148, édit. et trad. de Frantzius.
  60. Aiment excessivement le vin. Il ne paraît pas qu’on ait fait depuis Aristote des observations de ce genre ; ce qui ne veut pas dire que celle-ci ne soit pas exacte. — Et le rejettent tout entier. Ceci n’est pas exact, et l’animal qu’ont avalé les serpents sort de leurs corps très différent de ce qu’il était au moment de l’absorption. — Il y a d’autres animaux… dans leur ventre. Ainsi que le pensent MM. Aubert et Wimmer, tout ce passage paraît bien être une addition étrangère, qui, de la marge du manuscrit, sera passée dans le texte ; la suite des pensées reprend régulièrement au § 3.
  61. Il la retire à lui. La description n’est pas fausse ; mais elle est trop concise, et ne donne pas une idée suffisante de l’action du serpent. — Se dresser tout droit. Cette traduction n’est pas sûre ; car le texte peut signifier que le serpent dresse sa proie tout droit, après l’avoir malaxée, aussi bien qu’il peut signifier que le serpent se dresse lui-même.
  62. Les araignées… sans manger. Ici encore, MM. Aubert et Wimmer croient que le texte est altéré ; la conjecture est très probable ; et il est certain que la suite régulière des pensées se retrouve dans la fin de la phrase. — Que nourrissent les marchands de remèdes. Nos pharmaciens ne nourrissent plus des serpents, comme le faisaient les pharmaciens grecs ; mais ils ont encore des serpents conservés dans l’esprit-de-vin, ainsi que d’autres objets ou animaux curieux.
  63. Les dents aiguës. On a traduit aussi quelquefois : « Les dents disposées : en forme de scie ». — Dit-on… mangent de la terre. L’auteur a soin de rapporter ce fait comme un on-dit populaire ; il ne le prend pas à son propre compte : et l’on doit croire qu’il a bien raison. — Comme le font les chiens. Tout le monde a vu les chiens se purger ainsi : il paraît que les loups ont aussi la même habitude. — Se jettent sur les hommes. Le fait est exact : mais les troupes de loups attaquent l’homme, aussi bien que les loups solitaires.
  64. Le Glanos. L’auteur lui-même explique ce que c’est que le glanos, qui se confond avec l’hyène. Ce nom ne se retrouve nulle part ailleurs. Pline ne le reproduit pas, bien qu’il traduise tout ce passage, liv. VIII, ch. LXIV, p. 335, édit. et trad. E. Littré. — Elle poursuit les chiens. La leçon n’est pas certaine ; et quelques éditeurs ont cru qu’il y a ici une lacune. Pline, loc. cit., dit que l’hyène imite les vomissements de l’homme, pour attirer les chiens à sa portée ; Aristote ne dit rien de pareil dans ce passage, puisqu’il se borne à rapprocher les vomissements de l’hyène de ceux de l’homme. — Elle déterre les cadavres. Le fait est très exact.
  65. Omnivore. C’est très exact encore. — Souplesse. Le mot grec n’est pas aussi précis. — Les crabes. Il ne paraît pas que la science moderne ait jamais constaté cette habitude de l’ours. — Il mange de la chair. C’est qu’en effet l’ours est omnivore, comme on peut s’en convaincre en observant ceux de nos ménageries… — Les cerfs… les sangliers… les taureaux. Tous ces détails sont vrais. — Tout droit sur ses deux pieds. Il n’est personne qui n’ait vu des ours marcher ainsi. — Avant de manger… pourrir. Quelques éditeurs ont cru que ceci devait être reporté au paragraphe précèdent, et attribué à l’hyène.
  66. Le lion est carnivore. Le peu qu’Aristote dit ici du lion est complété par ce qu’il en dit dans plusieurs autres passages ; voir la table alphabétique, article Lion. — Il mange avec avidité. Peut-être ceci n’est-il pas très exact, si l’on songe à l’avidité d’autres animaux féroces, tels que le tigre par exemple ; comparativement, le lion n’est pas très avide ; et il se repaît avec assez de calme, si l’on en juge par ceux qu’on amène dans un climats. — Et très durs. Plusieurs manuscrits disent « Très secs » ; ce qui revient à peu près au même. D’ailleurs, tous les détails donnés ici sur le lion sont exacts, et la science moderne les confirme ; voir Buffon, tome XVI, p. 25, édit. de 1830.
  67. Le phoque. D’après ce passage, il semblerait que le phoque devrait être compté parmi les quadrupèdes ; ce qui serait peut-être peu exact, si l’on songe à l’organisation particulière des pieds des phoques, soit de ceux de devant, soit de ceux de derrière. Ces pieds ne peuvent leur servir qu’à ramper sur terre, comme le dit Cuvier, Règne animal, tome 1, p. 164. — Le sathérion, le satyrion. Il paraît bien probable que ces deux noms, si rapprochés l’un de l’autre, ne désignent qu’un seul et même animal, dans le genre du castor et de la loutre. — Qu’on nomme Latax. Plus haut, liv. I, ch. I, § 12, le Latax a été nommé, et je l’ai pris pour la loutre. Le passage actuel montre que les deux animaux différent, bien que rapprochés l’un de l’autre. C’est sans doute une espèce de castor ; voir le Catalogue de MM. Aubert et Wimmer, tome 1, p. 70, § 28. — Il coupe avec ses dents les arbustes. Ceci se rapporte bien au castor ; mais il est singulier qu’Aristote n’ait rien dit de plus sur l’organisation si particulière du castor ; voir Cuvier, Règne animal, tome 1, p. 213
  68. Les dents aiguës. On pourrait traduire encore : « En forme de scie. » — En lapant. Laper, c’est boire en tirant la langue comme le fait le chien. — Les dents égales et continues. Le texte se sert ici, en parlant des bœufs et des chevaux, d’une expression qui ne paraît pas appartenir au style ordinaire d’Aristote ; voir la note de MM. Aubert et Wimmer. — Boivent en aspirant, et hument. Il n’y a qu’un mot dans le grec. — Il happe. Notre langue ne m’a pas offert une expression plus propre à rendre celle du texte. — S’y reprennent à plusieurs fois, en élevant la tête. La description est heureuse et exacte, comme chacun de nous a pu s’en convaincre bien des fois. — Le porphyrion. Voir plus haut, liv. II, ch. XII, § 29, où le Porphyrion est déjà nommé, et où j’ai traduit ce mot par Flamant ; mais cette identification, quoique probable, n’est pas certaine ; voir le Catalogue de MM. Aubert et Wimmer, tome I, p. 106, § 93.
  69. Si ce n’est quand ils sont trop pressés de la faim. Cette restriction n’est pas suffisante ; et le vague de l’expression pourrait faire croire que les herbivores pourraient, sous le coup du besoin, devenir carnivores. MM. Aubert et Wimmer ont eu raison de signaler ici une lacune ; mais les manuscrits ne fournissent aucun moyen pour la combler. — Il faut excepter le cochon. Il est clair que ceci devait être précédé de certains développements, qui nous manquent, et que nous ne pouvons suppléer. — De toute espèce de nourriture. Ceci est assez exact. Dans ce passage, quelques manuscrits parlent du Chien au lieu du Cochon. La méprise se comprend quand on se rappelle qu’en grec les deux mots sont fort rapprochés l’un de l’autre ; mais la suite prouve bien que c’est du cochon seul qu’il s’agit.
  70. Qui profite et s’engraisse. Il n’y a qu’un mot dans le texte. — Il suffit de soixante jours. La longueur de l’engraissement dépend du climat et de l’alimentation. Je ne sais pas si les procédés qu’indique Aristote sont encore en usage parmi nos éleveurs ; à Rome, ils étaient régulièrement adoptés ; voir Pline, liv. VIII, ch. LXXVII, p. 353, édit. et trad. E. Littré.
  71. En Thrace. La Thrace répondait, en partie, à la Bulgarie et à la Roumélie orientale de nos jours. — Des glands. Le mot grec que j’ai rendu ici par Glands n’est pas spécialement le nom du gland ; mais il paraît cependant qu’il désigne le fruit d’une espèce de chêne ; c’est là ce qui peut autoriser ma traduction, le gland étant d’ailleurs la nourriture préférée du cochon. — Mais le cochon… contre le loup. Tout ce passage est regardé comme apocryphe par MM. Aubert et Wimmer. Il interrompt en effet la suite des pensées, qui reprend dans le reste du paragraphe. — La sixième partie. Ces observations prouvent que l’art de la charcuterie était déjà assez avancé au temps d’Aristote. — Ce que nous avions à dire du cochon. Aristote a bien des fois parlé ailleurs du cochon ; et ce qu’il en dit ici est la moindre partie. Voir la table alphabétique, article Cochon.
  72. De grains. Le mot grec dit littéralement : « Fruits ». — Les orobes. Plus haut, liv. III, ch. XVI, § 15, Orobes est traduit par Vesces ; ici je conserve le mot d’Orobes, parce qu’il peut y avoir quelque doute. Dans Théophraste, Histoire des plantes, liv. VIII, ch. III, § 2, p. 130, édit. et trad. Firmin-Didot, l’Orobe est placé à côté de la lentille. Je ne sais si, dans nos climats, on donne encore de la vesce aux bœufs. — Un autre moyen… leur nourriture. On a conjecturé avec raison que ceci est une addition faite postérieurement au texte, et qui y sera passée de la marge de quelque manuscrit. Le moyen est fort extraordinaire, et ce doit être une pure imagination, quoique Pline le répète, liv. VIII, ch. LXX. — Avec de l’orge. Ce détail peut être exact.
  73. Sucrés. J’ai cru pouvoir employer ce terme, qui s’applique bien aux aliments dont il est question ici. — Du vin. On ne pratique plus cet usage dans l’agriculture moderne. — La chaleur du soleil. Ou simplement : « La chaleur »; j’ai préféré la première expression, qui répond mieux à celle du texte. §
  74. et 4. MM. Aubert et Wimmer regardent ces deux paragraphes, jusqu’à la fin du chapitre, comme apocryphes ; la rédaction leur paraît peu correcte ; et les faits, peu exacts. On peut, tout au moins, trouver que ces paragraphes sont déplaces, puisqu’en effet ils ne se lient, ni à ce qui précède, ni à ce qui suit ; et que ces observations sont réunies d’une manière assez confuse ; mais elles ne sont pas toutes fausses. — Tout ce que l’on veut. Ceci se rapporte probablement au travail de la corne, où l’on employait sans doute de la cire. — On soulage leurs maux. Ces procédés sont encore pratiqués, après l’avoir été par les Romains et les Grecs. — Par la gelée blanche. Il est possible que cette différence tienne simplement à la saison, et à la localité.
  75. Grandissent davantage. L’observation peut être vraie ; et la génisse profite, pour son développement, de tout ce qu’elle ne perd pas sous une autre forme. — Dans l’Épire… les Pyrrhiques. Voir plus haut, liv. III, ch. XVI, § 13, quelques détails sur les vaches de l’Épire. — Jusqu’à l’âge de neuf ans. Il y a lieu de croire qu’on a confondu ici le nombre Quatre avec le nombre Neuf ; du moins Pline, liv. VIII, ch. LXX, p. 347, édit. et trad. Littré, dit positivement que c’est le roi Pyrrhus qui avait fait ce règlement de ne laisser couvrir les vaches qu’à quatre ans. — Apotaures. Mot a mot : « Loin du taureau, éloignées du taureau ». — Au nombre de quatre cents. C’était sans doute le nombre primitif du troupeau de Pyrrhus ; d’après le récit de Pline, on peut croire qu’il l’avait formé sur place, et par simple sélection. — Vivre dans d’autres climats. Ceci est fort probable, d’après la nature de ces vaches.
  76. C’est ce qu’ils boivent. C’est peut-être exagéré : mais il est certain que la nature de la boisson a grande influence sur la santé de ces animaux.
  77. Fraîche et pleine, il n’y a qu’un seul mot dans le texte. — Leur rend le poil lisse. L’observation est juste. — Des parties trop dures. Comme les côtes des feuilles, ou certaines herbes presque ligneuses. — L’herbe de Médie. On ne sait pas au juste quel est ce fourrage ; voir la même expression, plus haut, liv. III, ch. XVI, § 13.
  78. Le goût des chevaux… Voir plus loin, ch. XXIII, § 10, où la même observation est répétée sur le goût des chevaux pour l’eau trouble. — Avant d’en avoir troublé l’eau. L’observation est fort exacte. — Quatre jours de suite. Le temps pendant lequel le chameau peut rester sans boire est beaucoup plus long. — Une quantité d’eau énorme. Qui sert à le rafraîchir et à l’abreuver intérieurement, pendant les jours de privation. Voir Buffon, t. XVI, p. 397, édit. de 1830.
  79. Neuf médimnes macédoniens. Il n’est pas facile de savoir ce que représentait précisément le médimne macédonien ; mais l’on sait que chaque jour les éléphants domestiques mangent près de deux cents livres de nourriture. D’après ce que dit le texte même, neuf médimnes macédoniens étaient une quantité excessive. Le médimne passe ordinairement pour valoir plus de cent livres. — Cinq Maris de vin. Le Maris valait en général quatre ou six cotyles : mais le cotyle variait beaucoup de capacité. — Quatorze mesures macédoniennes. Même incertitude. D’après Buffon, t. XVI, pl 303, édit.. de 1830, l’éléphant mange à peu près cent cinquante livres d’herbe par jour.
  80. L’éléphant vit deux cents ans. Buffon semble admettre aussi ce chiffre, loc. cit., p. 311. D’autres zoologistes le réduisent à cent cinquante. A cet égard, on n’a pas d’observations très exactes, à cause de cette longévité même. Dans la domesticité, il est probable que ces bêtes puissantes vivent moins longtemps.
  81. En restant sur place. Pour ruminer plus à l’aise. — Le sommet des tiges. C’est ce qui rend les chèvres si fatales aux jeunes pousses des arbres.
  82. C’est surtout la boisson. Voir plus haut, ch. X, § 1. — Un médimne de sel par cent bêtes. Si le médimne vaut cent livres, c’est à peu près une livre de sel tous les cinq jours par bête. — Plus gras. Parce qu’il boit et mange davantage. — Les concombres. Ou « les courges » § 3. Quand on les fait sortir à midi. Il semble qu’il doit y avoir ici quelque erreur de copiste ; car on se garde au contraire de faire sortir les bêtes par la chaleur. — Lorsqu’on leur donne du sel… Toutes ces observations paraissent exactes. — La feuille d’olivier… pissenlit. Ces identifications ne sont pas sûres. — À un jeûne préalable Voir, plus haut, le même procédé pour le cochon, ch. VIII, § 4.
  83. Dans des lieux plus hauts. Et par conséquent, plus secs. — Les moutons à queue large. Ceci s’applique sans doute à ces moutons de Syrie et d’Égypte dont la queue pèse quelquefois plus de vingt livres. — Qui ont la laine claire. Probablement, parce que la peau, plus exposée aux intempéries, y résiste mieux. — Qui ont la laine en flocons. Ceci est un fait d’observation qui peut varier avec les contrées et les races d’animaux. — Sont plus sains. C’est-à-dire, Sont moins souvent malades ; peut-être cette observation n’est-elle pas très exacte. — Quand des moutons ont été dévorés… MM. Aubert et Wimmer croient que ceci est une addition venue d’une main étrangère. Cette conjecture est bien vraisemblable. En effet, cette dernière phrase ne tient pas à ce qui précède ; et l’assertion qu’elle renferme peut ne répondre qu’à quelque croyance populaire sans fondement. On pourrait citer de notre temps bien des opinions vulgaires qui ne valent pas mieux.
  84. Les eaux exposées au nord. On pourrait traduire aussi : « Les pluies du nord,… les pluies du midi ». — Les pâtures du soir. C’est pour cela qu’on ne les fait pas sortir par la grande chaleur du jour. — Les bergers savent reconnaître. L’observation est ingénieuse ; et le fait doit être certain.
  85. Parmi les insectes. Ce qui est dit ici de la nourriture des insectes est bien court et bien insuffisant. Il en a été déjà question, bien qu’incidemment plus haut, liv. IV, ch. VIII. — Ne peuvent vivre que de liquides. L’observation est très juste et très simple. — Les mouches. Le fait est exact ; et les mouches de nos climats, comme celles de Grèce, semblent prendre goût à tout ce qu’elles touchent. — Le taon et la grosse mouche. Aristote a souvent accouplé les noms de ces deux insectes, sans qu’il soit bien possible de les distinguer l’un de l’autre ; ce sont des insectes volants, qui sucent le sang des gros animaux ; voir le Catalogue de MM. Aubert et Wimmer, tome I, p. 168, § 35. — L’abeille est le seul insecte…. Voir plus haut, liv. IV, ch. VIII, § 23. — Une saveur douce. Et surtout les sucs divers des fleurs.
  86. Telle est donc…. Résume insuffisant, comme peut le paraître ce qui le précède.
  87. Les actions… Ou « Les fonctions ». — Le froid et le chaud. Qui déterminent les migrations des animaux. Ce rapprochement entre les animaux et l’espèce humaine n’est pas faux ; et il y a des populations dans les pays de montagnes, sur la surface entière du globe, qui émigrent en effet selon les saisons, vivant tantôt dans des maisons et des abris, ou vivant aussi en plein air, comme le font les peuples nomades de notre Algérie.
  88. Ainsi, tandis que les uns… crainte des chaleurs brûlantes. On peut remarquer la justesse de ces observations et la parfaite convenance du style. — Les rives du Pont. A l’époque d’Aristote, le Pont ou mer Noire paraissait une contrée très lointaine et très septentrionale.
  89. De la Scythie. L’expression est bien générale ; on peut supposer qu’elle désigne les contrées qui sont au nord du Danube. Cette distance paraissait alors prodigieuse. — Les marais de la Haute-Égypte. Nous dirions aujourd’hui « les lacs » d’où sort le Nil, comme le savait déjà l’Antiquité. Du Danube à l’équateur, où se trouvent les grands lacs, sources du Nil, ou ne peut guère compter moins de quarante degrés de latitude. C’était énorme dans l’Antiquité ; et c’est encore bien considérable pour nous. — C’est le pays où habitent les Pygmées….. dans des cavernes. On a généralement regardé ce passage comme apocryphe. Homère parle des Pygmées, chant III de l’Iliade, vers 7, et de la guerre que leur font les Grues. D’après des observations récentes, il paraît que l’existence des Pygmées n’est pas tout à fait une fable, si d’ailleurs la guerre des Grues en est une. On a trouvé vers le centre de l’Afrique des hommes très petits, appelés Nyam-Nyams. C’est à eux sans doute que s’appliquait cette légende de l’Antiquité.
  90. Les pélicans. Il ne paraît pas que les oiseaux ainsi désignés par Aristote soient ceux que nous désignons par le même nom. Ce qu’en dit Aristote ici est un fait très probable et d’une observation facile. Le Strymon étant un fleuve de Macédoine et le Danube étant au nord, la migration se comprend très bien ; les oiseaux vont chercher quelque fraîcheur en été. Voir le Catalogue de MM. Aubert et Wimmer, tome 1, p. 104, § 86. — En troupes serrées… Tous ces détails sont très exacts et dignes d’être étudiés.
  91. Les poissons… On peut remarquer qu’il y a peu d’ordre dans la succession des idées, puisque, après avoir quitté les oiseaux pour les poissons, l’auteur revient aux oiseaux dans ce qui suit, § 7, et même dans ce § 5. — Du Pont. Le Pont, ou mer Noire, était avec la Méditerranée, la seule mer que les Anciens connussent assez bien. — Ceux qui ne sont pas très forts. C’est la traduction littérale du grec : mais on peut trouver que l’expression est un peu vague : d’ailleurs, la description est très bien faite.
  92. Ainsi, les maquereaux. L’auteur revient aux poissons, après les avoir quittés pour mes oiseaux. — Boédromion. Août et septembre ; Moemactérion. Octobre et novembre. Il ne paraît pas d’ailleurs que tous les détails donnés ici soient d’une parfaite exactitude. — Il se trouve… Ceci ne se comprend pas très bien. — Plus portées à l’accouplement. Cette observation est vraie : mais elle ne semble pas être ici très bien à sa place.
  93. Ainsi qu’on vient de le dire. Voir plus haut, § 3. — Est faux. On a cru que ce passage était apocryphe. On peut au contraire le regarder comme authentique, puisque Aristote y réfute une erreur populaire. Pline, liv. X, ch. XXX, p. 401, édit. et trad. Littré, parle aussi de la pierre que les grues prennent dans leur patte pour se lester ; mais il ne dit pas qu’elles tiennent cette pierre dans leur bec.
  94. Dans nos contrées. J’ai dû ajouter ces mots, qui m’ont paru indispensables pour marquer davantage que c’est en Grèce que ces observations étaient faites. — Dans nos pays. Même remarque. — S’il en reste quelques-unes. Ce sont des exceptions qu’on peut constater aussi dans nos climats.
  95. S’assemblent en troupes. Le fait est exact ; et ces troupes d’oiseaux sont excessivement nombreuses. — Elles s’accouplent. Il semble qu’il ne doit plus être question ici de l’accouplement, dont on a traité plus haut. — Elles ne volent pas très-bien. C’est exact ; mais il est possible que, dans nos climats, le vent du midi ne leur cause pas les mêmes obstacles que dans le climat de la Grèce. — Aussi, les chasseurs… Les idées semblent se très-bien suivre, quoique quelques commentateurs aient cru y trouver un peu de confusion.. — Que leur arrache la fatigue. Il n’est pas sûr que cette explication soit très-juste.
  96. Viennent dans nos climats. Le sens n’est pas certain ; et les expressions du texte sont assez obscures pour qu’on puisse les interpréter dans un sens tout contraire ; « Quand elles partent de nos climats », selon qu’on met le point de départ en Grèce, ou dans une contrée différente. Ce serait une observation directe des faits, dans la Grèce même, qui trancherait la question. — La glottis. On croit que la glottis est un oiseau de la famille des Pics. — Le cychrame. On suppose que c’est le crex pratensis, ou crex des prés, de la famille des râles ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 976, et le Catalogue de MM. Aubert et Wimmer, tome I, pp. 90 et 100, §§ 26 et 67.
  97. La mère-caille. C’est la traduction littérale du nom grec ; et l’on doit entendre par là qu’une caille prend la direction de toute la troupe. — La glottis, dont la langue… C’est là ce qui explique le nom de cet oiseau. — Le hibou ressemble aux chouettes. Bien que ce qui est dit ici du hibou soit exact, il est évident que ce passage n’est pas à sa place, non plus que ce qui suit jusqu’à la fin du chapitre. Aussi MM. Aubertet Wimmer l’ont-ils mis entre crochets, dans leur édition.— La danse d’un chasseur. Le fait n’est pas absolument impossible ; mais il est assez probable que ce qui est rapporté ici ne repose que sur une erreur vulgaire. Athénée, liv. IX, p. 390, reproduit en partie ce qu’Aristote dit ici du hibou. Voir aussi Pline, X, XXXIII, p. 102, édit. et trad. E. Littré.
  98. Ces oiseaux. Il faut limiter ces remarques aux oiseaux dont il vient d’être parlé, et ne pas les étendre à tous les oiseaux armés de serres. — L’oiseau de l’Inde. Chez les Grecs, le perroquet passait pour être originaire de l’Inde ; et cette donnée n’était peut-être pas fausse. — Les oiseaux qui vont en bandes… Le désordre de ces idées est évident, et les trois espèces d’oiseaux ici nommées ne sont pas les seules qui aillent en troupes, dans leurs migrations.
  99. Ainsi qu’on vient de le dire. Voir le chapitre précédent, § 5. — Pour fuir l’excès du froid… Les migrations des divers animaux n’ont que cette cause, qui est commune à tous. — Valent mieux. Cette explication paraît très probable. — Comme on le voit dans les jardins… aux plantes sauvages. MM. Aubert et Wimmer inclinent à regarder tout ce passage comme apocryphe ; cette conjecture n’est pas, à ce qu’il semble, très justifiée. Seulement, on ne sait pas ce que c’est que la plante appelée ici This, mot qui étymologiquement ne veut dire que Rivage, Dune de sable. J’ai traduit Algue, pour ne pas reproduire simplement le mot du texte ; mais l’identification n’est pas certaine.
  100. Un équilibre complet. Mot à mot : « Un mélange ». — Molle. Ou Déliquescente. — Le Sinodon, ou Synodon. On ne sait quel est ce poisson. Quant à tous les poissons qui sont nommés ici, quelques-uns sont bien connus ; d’autres le sont moins, ou ne le sont pas du tout, comme le glaucus ; et l’identification de tous est très difficile. La plupart des traducteurs ont dû se borner à reproduire les noms et les mots grecs. Voir le Catalogue des poissons de MM. Aubert et Wimmer, tome 1, p. 131 et suiv. — Les coucous marins. J’ai dû ajouter le dernier mot. On croit que ce poisson est une espèce de Trigle et de Surmulet. Sur quelques-uns de ces poissons, le rouget et le phagre, voir Athenée, liv. VII, p. 300.
  101. Suivant les lieux. L’observation est très juste ; et nous pouvons aisément remarquer qu’entre les poissons de même espèce, il y a grande différence selon qu’ils sont de l’Océan ou de la Méditerranée. — Le lever de l’Arcture. C’est à peu près vers le mois d’octobre. — Tourmenté par les moucherons. Voir plus haut, liv. V, ch. XXV, § 7, quelques détails sur l’insecte qui pique les thons. — Les bonitons. Ou Bonites. Le mot grec Amia a été conservé dans la science moderne pour une famille de poissons ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 827. — Alopéconnèse… Biston. Alopéconnèse, ou île du Renard, est une ville de la Chersonèse de Thrace, fondée par des Éoliens. Le lac Biston, entre le Rhodope et la mer Égée, était près d’Abdère, presque en face de Thasos.
  102. Colias. Espèce de maquereau, Scomber scombrus. Voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 852. — La Propontide. Ou mer de Marmara. — Les poissons rapides. Ou les poissons de passage ; le terme grec est assez vague. — Et les troupes ont toujours un chef. Cette petite phrase peut sembler une addition étrangère.
  103. C’est le besoin de se nourrir. Voilà une première cause de migration pour les poissons ; la seconde, c’est la facilité du frai, § 6. — Le phocène. Ou Masouin, de la famille du dauphin ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 1041. Le mot grec a été conservé par Cuvier et par la science moderne. — En sortant du Pont. Le sens paraît évident ; mais la leçon varie selon les manuscrits.
  104. Ce n’est pas seulement. Voir le paragraphe précédent, au début. — Moins saumâtre. Le texte dit : « Plus doux ». Ce qui m’a engagé à traduire comme je l’ai fait, c’est que ceci se rapporte à l’eau de mer, et que l’eau potable est celle des fleuves qui se jettent dans la mer Noire. — Après le lever de la Pléiade. Voir plus haut, liv. V, ch. VII, § 5. Tous les détails ici donnés sont curieux, et ils doivent être exacts, parce qu’ils résultaient de longues observations.
  105. Le trichias. J’ai dû, comme la plupart des traducteurs, conserver le mot grec. On croit que le trichias est une sorte de sardine ou d’anchois. Il paraît certain qu’il y en a beaucoup dans la mer Noire. — De purifier leurs filets. Sans doute parce que ces pêcheurs croyaient, dans leurs idées superstitieuses, que ce poisson portait malheur. — Là où ce fleuve se divise. Ceci prouve combien peu, au temps d’Aristote, on connaissait le cours du Danube, puisqu’on croyait qu’il se partageait en deux bras dont l’un se jetait dans l’Adriatique. Strabon réfute cette erreur, qu’acceptait encore Ératosthène. Voir, l. I, p. 47, ch. XV, édit. Firmin-Didot.
  106. La terre à droite… à gauche. La Terre signifie sans doute ici la côte de l’Asie Mineure ; alors ces poissons faisaient le tour de la mer Noire, en longeant toujours les terres. — Et que leur vue est naturellement mauvaise. MM. Aubert et Wimmer rejettent cette fin de phrase. Aucune observation récente ne confirme ce qu’Aristote dit ici de la vue des thons. — Les Ryades. Voir plus haut, § 4. — Ne voyagent que de jour. Ces détails, comme les précédents, paraissent exacts.
  107. Des Colias. Voir plus haut, § 4. — Le plus près du rivage. Quelques manuscrits disent : « Près de la mer Égée »; et cette erreur de copiste se comprend bien, parce que les deux mots grecs se rapprochent beaucoup l’un de l’autre ; mais la version que j’ai suivie est bien préférable.
  108. Voilà ce que nous avions à dire. C’est la formule habituelle d’Aristote ; elle résume ce qui a été dit ; mais cette étude sur les migration, des animaux pourrait être plus étendue.
  109. Le temps de la retraite. On aurait pu traduire aussi : « L’hivernation » ; mais ce mot m’a paru trop moderne, et il ne répond pas assez au mot grec, quoique, au fond, l’idée soit la même. — Un abri retiré. C’est le sens, si ce n’est la forme, de l’expression grecque. — Dans un même genre. J’ai ajouté ces mots, dont le sens est implicitement compris dans le texte ; mais alors peut-être faudrait-il dire : « Telles espèces », au lieu de « Tels individus ».
  110. Qui sont détachés et libres. Il n’y a qu’un seul mot dans le grec. — Se couvrent d’une croûte à la surface. Le fait est exact ; mais le texte est plus concis que ma traduction. — Qui ne sont pas détachés. Et qui, par conséquent, adhèrent au rocher sur lequel ils sont nés. — On ne voit pas leur changement. Puisqu’ils ne bougent pas de place.
  111. Les limaçons. Bien que le texte emploie ici le même mot que celui dont il vient de se servir pour les limaçons terrestres. Il n’est pas probable qu’il s’agisse encore d’animaux de terre. La suite semble prouver qu’il est question d’animaux aquatiques et marins. Il y aura eu peut-être ici quelque erreur de copiste.
  112. Dans les habitations de l’homme. En effet, comme ces habitations sont relativement assez chaudes, les insectes n’ont pas besoin d’hivernation. — Les abeilles, qui elles aussi se retirent. Le fait est exact en ce sens que les abeilles se pressent alors les unes contre les autres, et ne bougent plus. — Qu’elle est transparente. Ceci n’est pas exact ; mais les autres détails le sont. — Le coucher de la Pléiade. Voir plus haut, ch. XV, § 6. Cette époque répond à peu près à notre mois de novembre.
  113. Se font des retraites. Ou Hivernent. — L’habitude d’aller dormir. La remarque est ingénieuse et vraie.
  114. Les animaux qui ont du sang. L’expression est bien vague, et elle n’indique pas suffisamment les animaux qui sont mentionnés ici. — Stellions. Espèce de lézards. La science moderne a conservé le mot grec d’Ascalabotes, que j’aurais pu reproduire dans ma traduction ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, pp. 918 et 920. L’hivernation est habituelle à presque tous les reptiles. — Crocodiles de rivières. C’est le crocodile ordinaire du Nil. Voir le catalogne de MM. Aubert et Wimmer, p. 117. — Les vipères se cachent sous des pierres. Le plus souvent on trouve les vipères sous des pierres ; mais il n’est pas sûr qu’elles y fassent leur hivernation.
  115. La plupart des poissons. Ceci est exact pour un assez grand nombre de poissons, bien que nous n’ayons pas beaucoup d’observations récentes sur ce sujet. — L’hippoure et le coracin. J’ai dû reproduire les noms grecs. On ne sait pas au juste ce que sont ces deux poissons ; on croit que le premier est une espèce de Murène, et que le second est le Chromis castanea de Cuvier, qui s’appelle encore à Naples Coracino, et qui est une espèce d’Acanthoptère ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 845. — L’orphôs. On présume que l’orphos ou orphôs d’Aristote est le Polyprion cornuus de Cuvier ; voir le Catalogue de MM. Aubert et Wimmer, tome 1, p. 137, § 53. Voir aussi Athénée, liv. VII, p. 315, citant Aristote sur l’orphos. — Pour faire leurs petits. L’expression grecque dont se sert le texte étant spéciale aux oiseaux, MM. Aubert et Wimmer conjecturent que ceci est une addition d’un copiste inattentif, qui a cru que les grives et les merles dont on parle ici étaient des oiseaux, tandis que ce sont des poissons. C’est là ce qui m’a fait ajouter Grives d’eau, Merles d’eau. Les noms grecs de ces laissons sont les mêmes que ceux des oiseaux. La zoologie moderne a d’ailleurs conservé pour un poisson le nom grec de Cichla, que j’aurais pu reproduire.
  116. Au lever de la Pléiade… coucher de l’Arcture. Il n’est pas facile de savoir précisément à quelle époque de l’année répond cette indication ; il faudrait des observations astronomiques sous le ciel de la Grèce. On peut conjecturer que cette période comprend depuis le solstice d’été jusqu’à la fin de l’automne. Voir plus haut, ch. XV, § 6 et § 3. — Ce qui leur arrive aussi dans les pleines lunes. Voir plus haut, ch. XV, § 8.
  117. Primades. Ces poissons sont appelés aussi Primnades ; ce sont de jeunes thons, à qui l’on donne ce nom ; mais on ne sait rien de bien précis à cet égard. — Vers la saison du printemps. C’est la leçon très probable, que plusieurs éditeurs ont tirée de la traduction de Gaza ; la leçon ordinaire est : « Vers la saison dont nous avons parlé ». — A l’automne et en hiver. Ceci semble confirmer la traduction de Gaza, puisqu’il est naturel d’opposer le printemps à l’automne et à l’hiver. — L’oestre qui les tourmente. Voir plus haut. liv. V, ch. XXV, § 7. L’oestre est le taon.
  118. Il y a des poissons… Tous ces détails paraissent exacts. — La preuve. On peut trouver en effet que cette preuve est péremptoire.
  119. Le glaucus. J’ai dû conserver le nom grec, parce qu’on ignore quel peut être ce poisson. — L’âne marin. Le texte dit simplement : L’âne. J’ai dû ajouter l’épithète ; on ignore également quel est le poisson ainsi nommé ; voir Athénée, liv. VII, p. 315. — Au coucher des constellations. Cette expression était sans doute très claire pour les Grecs ; mais pour nous, elle reste obscure. — L’étoile du Chien. J’ai préfère cette traduction littérale ; mais on pourrait traduire aussi La « canicule ». — Toute bouleversée. Sans doute, parce que c’est l’époque de l’équinoxe d’automne. — En agitant…. le fond de l’eau. Nos pécheurs font encore des pèches de ce genre. — Quand il est tombé…. très rarement. Ceci peut sembler une addition, qui n’est pas ici très bien à sa place.
  120. Il y a beaucoup d’oiseaux qui se retirent. Ce détail paraît n’être pas très exact ; des zoologistes modernes le contestent. — Comme les milans et les hirondelles. Ceci évidemment doit être une addition étrangère, qui, de la marge d’un manuscrit, sera passée dans le texte. La leçon ordinaire est : « Les milans » et non « Comme les milans ». C’est une raison de plus de douter. — On a trouvé bien souvent…. Il semble que ces hirondelles devaient avoir été surprises par le froid, n’ayant pas pu partir avec leurs compagnes. Ce n’est pas une hivernation proprement dite, quoique peut-être ces pauvres oiseaux aient pu reprendre vie au printemps suivant. — Et des milans. Pour les milans, le fait s’explique en ce qu’il y en a plusieurs espèces, dont les unes sont sédentaires, et les autres de passage ; on aura pu les confondre.
  121. Les oiseaux à ongles recourbés…. La phrase grecque n’est pas très régulièrement construite, et elle pourrait se prêter à un sens tout différent. — Pour la tourterelle. Ces détails sont curieux ; mais je ne sais s’ils sont également exacts.
  122. Parmi les ramiers… Les espèces sont nombreuses ; et les habitudes de chacune d’elles peuvent varier. — Un petit nombre de jours seulement. Il est peu probable que la retraite de ces oiseaux soit d’aussi courte durée qu’Aristote semble le croire.
  123. Les porcs-épics… Le fait de l’hivernation n’est pas constaté pour les porcs-épics, et il semble, d’après la phrase suivante, qu’Aristote lui-même en doutait. — Les ours sauvages. Il y aurait donc lieu de croire qu’en Grèce, comme chez nous, on essayait d’apprivoiser des ours, puisqu’on distinguait les ours restés sauvages. D’ailleurs, tout ce qui est dit ici est fort exact ; et la zoologie moderne constate tous ces faits ; mais MM. Aubert et Wimmer rejettent le mot de Sauvages, qui ne leur paraît qu’une erreur de copiste ; cette conjecture est très vraisemblable. — Le tropique. C’est-à-dire le solstice d’hiver. — Deux fois sept. C’est la théorie du septenaire qui reparaît ici, sans qu’on puisse dire au juste à quel titre.
  124. Les ours ne mangent pas du tout. Le fait paraît certain ; et ce qui suit prouve qu’on avait disséqué des ours pour savoir précisément dans quel état se trouvait leur estomac. — De l’arum. La Botanique moderne a conservé le mot grec ; l’arum est très commun dans nos climats, et se trouve en abondance dans les environs de Paris. Voir plus loin, liv. IX, ch. VII, § 1, où ce qui est dit ici est répété. — Pour séparer l’intestin. C’est sans doute d’une sorte de purgation qu’il s’agit ici : et il est possible que d’autres plantes que l’arum puissent la causer aussi. — Le loir…. le rat blanc du Pont. Il est possible que ces deux petites phrases soient des interpolations ; les faits d’ailleurs paraissent exacts.
  125. Parmi les animaux….. les organes essentiels. Quelques éditeurs ont cru que tout ce paragraphe était une addition étrangère ; on ne peut pas dire, il est vrai, qu’il soit parfaitement à sa place ; mais il ne gêne pas absolument non plus la suite des pensées. — Leur vieille peau. C’est le terme consacré dans notre langue ; le texte dit précisément : « La vieillesse »; mais par la tournure même qu’il prend, il est évident que dans le grec aussi le mot de « vieillesse » devait avoir le même sens. — L’enveloppe de tous les organes essentiels. Je ne suis pas sûr de cette traduction ; et peut-être faudrait-il dire, en se rapprochant davantage du grec : « L’enveloppe des organisations » successives. — Ainsi que nous venons de le dire. Voir plus haut, § 1. — Est molle, et qu’elle n’est pas de la nature de l’écaille. MM. Aubert et Wimmer voudraient faire une interversion dans cette phrase ; mais ce changement n’est pas nécessaire. — La tortue et l’émys. L’Emys est la tortue d’eau douce ; voir Cuvier, Règne animal, t. II, p. 10, et la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 935. — Le stellion. Voir Cuvier, Règne animal, t. II, p. 32. Le stellion est une espèce de saurien du genre Iguane. — Et surtout les serpents. C’est en effet sur les serpents que le phénomène est le plus évident et le plus facile à observer.
  126. C’est au printemps. Tous ces détails sont exacts, et la science moderne les a fréquemment confirmés. — Il n’est pas exact… On voit avec quel soin Aristote réfute, quand il en trouve l’occasion, les erreurs répandues de son temps.
  127. On croirait qu’ils deviennent aveugles. Le fait est vrai ; et il paraît que la peau même de la cornée se détache comme le reste. — Qui paraît blanche. C’est la traduction exacte ; mais on peut supposer quelque altération dans le texte ; car la tête n’est pas blanche pour cela : mais elle est en liberté la première. — Du dedans au dehors. C’est-à-dire simplement, que la peau nouvelle est placée sous l’ancienne, qui se détache successivement, à mesure que le serpent en sort avec sa peau neuve.
  128. Chez les insectes. Il ne paraît pas que le changement de peau chez les insectes s’étende aussi loin qu’Aristote semble le croire. Les insectes sortent de leur chrysalide ; mais ce n’est pas là un changement de peau dans le genre de celui des serpents. — La silpha. Le nom grec a été conservé par la zoologie moderne pour une espèce de coléoptère voisin de l’escarbot ; voir Cuvier. Règne animal, tome IV, p. 495 ; mais on ne sait pas précisément ce qu’est la silpha d’Aristote. — L’empis. C’est le Culez-pipiens de la zoologie moderne, une espèce d’arthropode ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 609. — Le kantharos. J’ai conservé le mot grec à cause de l’incertitude de l’identification ; mais on ne peut douter que le kantharos ne soit un coléoptère. — Après leur naissance. C’est la traduction littérale ; mais on doit par là entendre la sortie de la larve. — Les cri-cri. L’identification n’est pas certaine. — En laissant échapper un peu de liquide. Le fait n’est pas particulier aux cigales, et on l’observe dans un assez grand nombre d’insectes.
  129. Tantôt au printemps, d’autres fois à l’automne. Je ne sais pas si la science moderne a ratifié ces observations. D’ailleurs, les détails donnés sur la manière dont les langoustes changent d’enveloppe extérieure sont exacts ; c’est par plaques et non d’une façon continue, comme chez les serpents, que leurs écailles se renouvellent.
  130. Elles se retirent pendant cinq mois. Ceci est évidemment une addition étrangère, puisqu’il n’est plus question de l’hivernation, mais seulement du changement de peau. Il ne paraît pas d’ailleurs très sûr que les langoustes hivernent. — Les crabes (cancres). Voir Cuvier, Règne animal, pp. 30 et 36, tome IV. Le fait est exact ; et la science moderne l’admet comme Aristote. — Les maïas. De la famille des Brachyures, appelée aussi Araignée de mer ; voir Cuvier, Règne animal, tome IV, p. 59. Ce crustacé est très commun dans la Méditerranée. — Les Vieilles. Il n’y a que quelques manuscrits qui donnent ces mots ; ils semblent une erreur de copiste à MM. Aubert et Wimmer, qui les suppriment, tout en citant un passage d’Artémidore, qui prouve qu’il y avait un poisson nommé la Vieille, du genre de ceux dont l’auteur s’occupe ici. — Grand-peine à marcher. Le fait est exact.
  131. Voilà donc… Résumé des quatre derniers chapitres.
  132. Les animaux ne se trouvent pas… Toutes ces observations sont très exactes, et la science moderne n’aurait rien à y changer. — Et on le voit bien pour les ramiers. Ceci peut paraître l’addition de quelque main étrangère ; mais il est vrai que les ramiers sont une espèce d’oiseaux assez facile à observer.
  133. C’est que, d’une manière toute générale…. § 3. En pleine santé. MM. Aubert et Wimmer pensent que ces deux paragraphes sont apocryphes ; on peut croire tout au moins qu’ils sont déplacés, puisqu’ils interrompent en effet la suite des pensées, qui revient aux poissons dans le § 4. — Ainsi qu’on l’a déjà remarqué. Voir plus haut, ch. V, § 15. — Hésiode. Quelques éditeurs ont pensé qu’il y avait ici une erreur et qu’il fallait substituer Hérodote à Hésiode, ce qui à première vue peut sembler assez probable ; mais on ne trouve rien dans Hérodote qui se rapporte à ce fait ; et l’expression du texte indique bien qu’il s’agit d’un poète et non d’un historien. Il est vrai que, dans Hésiode, non plus il n’y a pas la moindre, allusion ni à Ninus, ni à l’aigle.
  134. Quand les oiseaux sont malades… Cette observation est très juste ; et on peut la vérifier bien souvent dans les basses-cours.
  135. Comme on vient de le dire. Voir plus haut. § 2. Cette formule peut faire supposer que, dans la pensée même de l’auteur, il devait y avoir quelque chose d’interposé entre le § 2 et le § 4. — Ils profitent…. davantage par la pluie. Le fait est bien connu de tous les jardiniers. — Les roseaux…. Ceci peut être une addition, qui, faite par quelque main étrangère, sera passée de la marge dans le texte. On ne sait pas d’ailleurs si le roseau profite de la pluie plus que les autres végétaux.
  136. Pour passer l’été dans le Pont-Euxin. Le fait paraît exact, et les raisons qui en sont données ici sont très probables. — Les goujons. L’identification n’est pas du tout certaine. Le goujon est un poisson de rivière, et le texte semble l’admettre ; mais peut-être vaudrait-il mieux, dans l’incertitude, reproduire le mot du texte : « Le Côbios ». La zoologie moderne a conservé le nom de Gobio pour une espèce de carpe ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 839.
  137. À la plupart des poissons. Ce paragraphe répète en partie ce qui a été dit plus haut, § 4. — Pour les hommes, la plupart des poissons. Le rapprochement peut sembler assez inattendu. — Une pierre dans la tête. C’est ce qu’on appelle les Otolithes. Il paraît certain que tous les poissons en ont ; mais chez quelques-uns elles sont très grosses ; elles ne sont pas précisément dans la tête, mais dans l’oreille. — Le chromis… la sciaena. La zoologie moderne a conservé ces noms grecs pour quelques familles d’Acanthoptères : voir la Zoologie descriptive de M. Claus, pp. 851 et 852. — Le phagre, ou le Pagre, ce qui est encore aujourd’hui le nom d’un poisson sur les côtes d’Italie et de Provence ; on croit que c’est le Dentex macrophthalmus, une espèce de la famille des Acanthoptères, qui n’est pas très différente des Perches ; voir M. Claus, loc. cit., p. 848. — Cette pierre est cause. Ceci n’est pas exact.
  138. Le marinos. Ou « Myrinos ». Ce poisson est inconnu, sous l’une ou l’autre forme. — Quand les pluies…. aveuglés. Ce n’est pas la pluie qui est cause de l’aveuglement de certains poissons ; mais c’est la tuméfaction des paupières. — Près de Nauplie. La ville de Nauplie, qui a aujourd’hui plus d’importance qu’elle n’en avait dans l’Antiquité, peut passer pour le port d’Argos, sur le golfe de ce nom.
  139. L’acharnas. J’ai conservé le mot grec, parce qu’on n’a pas pu identifier ce poisson. — Le coracin. Voir plus haut, liv. V, ch. IX, § 5.
  140. Ces deux aspects différents… dans les deux conditions. C’est-à-dire, qui peuvent vivre, tantôt dans la haute mer, tantôt sur le bord. — Beaucoup d’algue. Ceci s’applique plus particulièrement aux petits poissons. — Ceux qui sont carnivores. L’explication est très plausible.
  141. Les poissons longs. C’est la traduction exacte ; mais peut-être faut-il encore entendre par là les gros poissons, bien qu’un peu plus bas, le poisson large soit opposé au poisson long. — Les thons et les espadons…. Voir pour l’oestre du thon, plus haut. liv. V, ch. XXV, § 7. On croit que cet oestre est la Pennatula filosa, qui cause en effet à ces poissons les douleurs les plus vives.
  142. Où ils se chauffent. Ou bien : « Parce qu’ils y ont chaud ». MM. Aubert et Wimmer rejettent ces mots, qui leur semblent une addition inutile. — Mais en recherchant la chaleur. MM. Aubert et Wimmer ont changé ici le texte, de manière à comprendre que ce sont les mâles qui détruisent les œufs et le frai ; le changement ne consiste qu’en une ou deux lettres ; mais les manuscrits ne l’autorisent pas. On ne peut pas dire que la leçon vulgaire soit absolument satisfaisante ; mais il semble qu’il faut cependant la conserver telle qu’elle est. Les gros poissons, en s’approchant de terre, y détruisent les œufs et le frai qui y sont déposés ; voir aussi plus haut, l. V, ch. IV, § 7.
  143. C’est au lever du soleil…. Nos pécheurs le savent aussi bien que les pécheurs grecs, et les conditions n’ont pas changé. — Ou, d’une manière générale. Il semble que ceci n’est qu’une répétition peu utile de ce qui précède. — Les yeux des poissons les trompent le plus. Il aurait peut-être fallu donner une explication un peu plus développée.
  144. Exposés à des maladies contagieuses. Le fait est curieux ; mais il ne semble pas que la science moderne s’en soit occupée particulièrement. — Absolument décolorés. Il paraît certain que quelques espèces de poissons perdent leur couleur, dans certaines conditions encore peu connues ; on a donné à cette affection le nom d’Alampia.
  145. Sur les poissons de mer. C’est peut-être au début de cette étude, et non à la fin, qu’il aurait fallu indiquer cette distinction, qui d’ailleurs est importante. On aurait pu croire que jusqu’ici il était question des poissons en général.
  146. Il n’y a jamais…. de contagion. Je ne sais si le fait est absolument exact. — Le glanis. Voir plus haut, liv. IV, ch. V, § 6, et aussi liv. II, ch. IX, § 7. On ne sait pas précisément ce qu’est le glanis ; voir encore, liv. IV, ch. XIII, §§ 2 et suiv. — Et les coups de tonnerre violents l’étourdissent. Le glanis n’est pas le seul poisson à éprouver cet effet du tonnerre ; il y a beaucoup d’espèces qui ressentent aussi très vivement l’influence des orages. — La carpe. Cette identification paraît certaine ; le nom grec a été conservé par la science moderne, Cyprinus carpino. — Les glanis… en quantité. MM. Aubert et Wimmer regardent ce paragraphe comme apocryphe.
  147. Le baléros et le tilon. J’ai dû reproduire les deux noms grecs, comme l’ont fait en général les traducteurs, parce qu’on ignore quels peuvent être ces poissons. — La chalcis. Ou Chalkeus ; voir plus haut, liv. IV, ch. IX, § 6. On ne sait pas non plus quel est précisément le Chalcis ou la Chalcis. Ce poisson n’est pas le seul à être tourmenté par des insectes parasites ; voir plus haut, liv. IV, ch. XIII, § 9.
  148. Du bouillon-blanc. Le mot grec est Plomos, qu’on écrit aussi Phlomos. L’identification n’est pas du tout certaine. Théophraste ne parle pas de cette plante. Je ne sais pas si cet effet du bouillon-blanc sur le poisson est bien certain ; mais ce procédé sommaire d’empoisonner les cours d’eau, par une matière quelconque, est encore en usage aujourd’hui ; et il est peut-être même plus répandu que jamais, quelque grossier qu’il soit.
  149. Deux autres espèces de pêche. Ces détails paraissent exacts, quoique la description ne soit pas aussi claire qu’on pourrait le désirer, attendu qu’elle se répète deux fois d’une manière presque identique. — On y prend des poissons à la nasse. C’est en effet une sorte de réservoir, où l’on peut puiser à l’aise comme on veut. — Une autre pêche. La seule différence, c’est qu’on pêche de cette façon aussi bien en été qu’en hiver ; mais le procédé est à peu près le même dans son ensemble ; c’est toujours une enceinte où le poisson se rend et peut être pris.
  150. Les testacés aiment en général… Je ne sais pas si la science moderne a fait des observations de ce genre. — Les pourpres. Il n’y a rien d’étonnant que les pourpres ne puissent vivre dans l’eau douce, puisque ce sont des animaux marins. — Cinquante jours. J’ignore si des observations récentes confirment ce fait curieux. — Pour les faire peser davantage. Ceci indique que ce précieux coquillage se vendait au poids citez les Anciens, et cela se conçoit sans peine, ainsi que la fraude des pécheurs.
  151. Les peignes deviennent roux. Le sens n’est pas certain, parce que le fait lui-même n’est pas vérifié. — L’Euripe Pyrrhéen. Voir plus haut, liv. V, c. X, § 3. L’Euripe de Pyrrha est tantôt placé près de Volo en Thessalie, tantôt sur les côtes de l’Asie Mineure, ou même du Pont-Euxin. Strabon place l’Euripe des Pyrrhéens non loin de Lesbos, liv. XIII, ch. II, § 2, p. 527, 32, édit. Firmin-Didot. — À cause de l’engin. Ceci n’est pas expliqué assez clairement. — L’eau de mer devient moins salée. Le fait n’est peut-être pas très certain. — Bivalves. C’est la traduction littérale du mot grec, bien que ce mot ait une apparence toute moderne.
  152. Voilà ce qu’on avait à dire. Résumé assez exact de tout ce chapitre.
  153. Le branchos. Il faut reproduire le mot grec, parce qu’il n’y a pas d’identification certaine. D’après l’expression même du texte, il semble que ce nom de maladie du porc était assez récent. J’ai risqué le mot d’Esquinancie, mais entre parenthèses. — Au poumon. Quelques traducteurs ont cru qu’il s’agissait de la langue et non du poumon. — D’amputer l’organe entier. Peut-être voudrait-il mieux traduire : « La partie entière », attendu que l’ablation d’un organe entier tuerait l’animal. Il paraît bien, d’ailleurs, que sous le nom de Branchos, l’auteur comprend plusieurs maladies spéciales au porc, que la zootechnie moderne distingue, mais que l’Antiquité ne distinguait pas aussi bien.
  154. Du même nom de craura. On ne peut que reproduire le mot grec, bien qu’il s’adresse à deux maladies fort distinctes. La première atteint les oreilles de l’animal ; l’autre atteint les entrailles. Aujourd’hui, on ne regarde plus ces affections comme mortelles ; et l’on guérit souvent les porcs par des soins appropriés. § 3. Quand l’été est prospère et fécond. L’expression dont se sert ici le texte a été critiquée avec raison par quelques éditeurs ; mais le sens général n’est pas douteux. — De les saigner sous la langue. Je ne sais si ces procédés thérapeutiques sont suivis parmi nous ; mais il est probable qu’en Grèce on les avait trouvés efficaces, pour soulager et guérir les porcs.
  155. De la tipha. J’ai conservé le mot grec, parce qu’on ne sait pas au juste quel est ce grain, qui se rapproche beaucoup du blé, du seigle, ou de l’orge. Théophraste en parle souvent, notamment liv. 1, ch. VI, § 5, p. 9, édit. Firmin-Didot. Histoire des Plantes : voir aussi liv. VIII, ch. 1, §§ 1, 2. 3. p. 126, édit. Firmin-Didot. — Le seul animal qui ait le grêlon. Il ne paraît pas que ceci soit très exact et des animaux autres que le porc ont une affection pareille.
  156. Des grêlons. J’ai reproduit exactement l’expression du texte : mais on voit qu’il s’agit de boutons, ou de pustules, qui sont gros comme des grains de grêle. Les détails donnés ici sont généralement exacts. — Sur le front. Cette indication est implicitement comprise dans l’expression que le texte emploie. — Ne peut rester un instant tranquille. Parce qu’il est incessamment tourmenté par les démangeaisons que lui causent les parasites intérieurs.
  157. L’esquinancie. Ou L’angine ; il ne peut guère y avoir de doute ici sur la traduction du mot du texte ; voir plus haut, dans le chapitre précédent, § 1. — Sauf l’homme. On sait que ceci est une erreur ; et il est difficile de comprendre comment cette erreur a pu être commise ; car il est bien probable que des accidents de ce genre avaient dit se produire en Grèce, comme ils se produisent chez nous. — Elle les emporte eux-mêmes. Le texte ajoute encore une fois : « Sauf l’homme ». Il est clair que cette répétition ne peut venir que de l’inattention d’un copiste ; et la plupart des éditeurs l’ont supprimée, non sans raison.
  158. La rage prend aussi les chameaux. Il ne paraît pas que la science moderne ait rien constaté à cet égard. Le chameau est furieux au moment du rut ; mais on n’a jamais dit qu’il eût la rage comme les chiens. — Les éléphants. Voir plus loin, ch. XXV, des détails sur les maladies des éléphants.
  159. La craura. Voir plus haut, ch. XXI, § 2. Le mot grec est le même dans le texte pour les porcs et pour les bœufs ; je n’ai eu qu’à le répéter : et c’est seulement entre parenthèses que j’ai risqué le mot d’Écrouelle.
  160. Sauf la goutte. C’est surtout aux pieds que le cheval est atteint ; notre mot de Goutte n’a pas cette nuance.
  161. Le symptôme de la maladie… Il ne semble pas que les vétérinaires modernes aient constaté rien de semblable aux détails qui sont donnés ici, et qui ne sont peut-être qu’une addition étrangère.
  162. Qu’on nourrit à l’écurie. « Ou Dans les pâturages ». Le texte est un peu moins précis que ma traduction. — La colique. Le sens n’est pas très sûr ; et la plupart des traducteurs se sont bornés à reproduire le mot grec d’Eiléos. Le mouvement convulsif prêté au cheval atteint de ce mal semble justifier l’interprétation à laquelle je me suis arrêté. — Devient furieux. Ceci aurait demandé une explication plus développée. Il semble que Gaza a eu une variante que sa traduction rend par : Rareflat. Je préfère le sens ordinaire, quoiqu’il ne soit pas absolument suffisant.
  163. Le tétanos. C’est le mot conservé dans la science moderne pour une foule d’autres animaux ; et pour l’homme en particulier. — Purulents. C’est la traduction exacte de l’expression grecque ; mais, selon toute apparence, il s’agit de la morve ; cette maladie très grave méritait que l’auteur s’y arrêtât davantage. — « Faire de l’orge. » J’ai voulu reproduire le sens du mot grec. C’est sans doute la diphtérie, ou « étranguillon des chevaux ». — Le voile du palais devient mou. Je ne sais si cette observation est bien exacte.
  164. La nymphe. Cette traduction est rapprochée du mot grec autant que possible ; d’après ce qui suit, il est bien probable qu’il s’agit du Vertigo. — Le son de la flûte. Ceci n’est sans doute qu’une croyance populaire. — De baisser les yeux. Quelques commentateurs et traducteurs ont pensé que le mot du texte signifiait : « Ruer. » — Jusqu’à ce que quelqu’un vienne à l’arrêter. C’est la leçon ordinaire ; elle me paraît suffisante ; et il n’est pas besoin d’adopter les variantes diverses qui ont été proposées. — Même quand il a la rage. Ceci ne se comprend pas bien et n’est amené par rien de ce qui précède ; peut-être la rage se confond-elle ici avec le vertigo.
  165. La cardialgie. C’est la reproduction du mot grec, que la sciences moderne adopte aussi.— Le déplacement de la vessie. Ou peut-être : « Le dérangement de la vessie » et ce serait alors une simple inflammation, qui suffit d’ailleurs à rendre l’animal fort malade. — Un staphylin. Ce mot grec a été conservé par la science moderne à un insecte arthropode, qui donne son nom à toute une famille ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 645. Le texte peut signifier aussi, d’après quelques traducteurs, que le cheval est piqué par un staphylin et non pas qu’il l’avale. — D’une sphondyle. On ne sait pas quel est cet insecte.
  166. De la mygale. La zoologie moderne applique ce mot, conservé du grec, à une espèce d’araignée, qui a donné son nom à toute une famille : voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 520. — Était pleine. Parce qu’alors elle dépose ses œufs dans la plaie qu’elle fait. — La chalcis… la zignis. On ne sait pas quel est ce petit animal.
  167. Toutes les maladies de l’homme….. les moutons. Ces remarques ne sont pas très justes, les chevaux et les moutons ont leurs maladies spéciales, qui ne ressemblent guère à celles des hommes. — La sandaraque. Il est difficile de savoir ce que les Anciens désignaient par là. Est-ce la résine de certaine espèce d’arbre vert ? Est-ce une composition arsénicale ? On l’ignore. Dans ce dernier cas, ce peut être un poison violent. — L’odeur d’une lampe. Il est certain que l’odeur d’une lampe qui s’éteint est fort nauséabonde ; mais de là, à produire des effets mortels sur les juments pleines et sur les femmes enceintes, il y a fort loin. C’est sans doute un conte populaire : ou si, par hasard, le fait s’est produit, ce n’a pu être qu’une simple coïncidence, quelque violente d’ailleurs que fût l’odeur.
  168. Quant à l’excroissance qu’on appelle l’Hippomane. Tout ce passage jusqu’à la fin du paragraphe a pu être regardé comme apocryphe, ou du moins comme une interpolation. D’abord, il interrompt la suite des pensées ; et il ne fait guère que répéter ce qui a été déjà dit de l’Hippomane, liv. VI, ch. XVII, § 8 ; voir sur l’Hippomane, Buffon, t. XIV, pp. 47 et 57, édit. de 1830. — Toutes les fables qu’on débite. L’auteur était, de son temps, bien hardi sans doute en s’exprimant si vivement sur des croyances vulgaires : voir plus haut, liv. VI, ch. XXII, § 14. — Le Pôlion. On ne sait pas précisément ce que les Anciens entendaient par là : mais on peut croire qu’il s’agit ici de quelque excrétion rejetée par la jument, au moment où elle met bas.
  169. Ont antérieurement combattu. Aux époques de l’accouplement. — Ce qui constitue la nature de l’Hippopotame. On a eu raison de considérer ceci comme une interpolation ; c’est quelque addition qui, comme bien d’autres, sera passée de la marge dans le texte. D’ailleurs, les observations sur les goûts différents du cheval et du bœuf sont exactes.
  170. La mélide. Le nom de cette maladie a varié même en grec ; on ne sait pas bien de quelle affection il s’agit ; c’est peut-être la morve, ou la gourme. Cependant, le mal signalé ici est assez bien caractérisé pour qu’on puisse le reconnaître, sans trop de peine.
  171. Ni dans le royaume du Pont, ni en Scythie. Il semble que ces deux pays n’ont pas la même température, puisque le royaume du Pont s’étendait surtout dans l’Asie Mineure, au sud de la mer Noire, tandis que la Scythie est beaucoup plus au Nord ; mais ce qui est vrai, c’est que les ânes sauvages, zèbres, hémiones, counggas, ne se trouvent que dans les pays les plus chauds.
  172. Des vents. Voir plus haut. ch. XXII, § 2. — Mange de la terre. Ce fait fort extraordinaire n’a pas été confirmé par la science moderne ; et l’on peut supposer qu’il y a ici quelque altération dans le texte. — Il avale des pierres. Cette assertion est sans doute, comme la précédente, l’écho de quelque opinion populaire sans fondement.
  173. De diarrhée. La maladie peut être réelle ; mais les remèdes indiqués plus bas ne semblent pas devoir être très efficaces. Les procédés signalés ici avaient été sans doute connus dans l’Inde par les compagnons d’Alexandre, qui les avaient appris à la Grèce. — En y appliquant de la chair de porc. Il est bien probable que ceci est encore une de ces croyances vulgaires que l’auteur a l’habitude de réfuter, loin de paraître y donner créance.
  174. Qui boivent de l’huile. Tous les détails contenus dans ce paragraphe paraissent absolument invraisemblables. L’auteur lui-même s’en aperçoit, comme le prouvent les expressions mêmes dont il se sert : « On prétend ». — Une décoction de racine. J’ai adopté ici la conjecture de MM. Aubert et Wimmer, bien qu’elle n’améliore pas beaucoup les choses. La plupart des manuscrits parlent « du vin », qu’on fait boire aux éléphants ; d’autres supposent qu’on tire ce vin, d’une racine qui serait le riz. On peut dire, d’une façon générale, et selon toute vraisemblance, que ce passage entier doit être altéré.
  175. Les insectes. Ce qui est dit ici des insectes peut paraître bien concis et bien insuffisant. L’auteur s’arrête un peu plus aux abeilles, parce que ces insectes sont mieux connus et plus faciles à observer : et encore ce qu’il en dit est-il bien insuffisant. Il reviendra du reste longuement sur les abeilles, liv. IX. ch. XXVII
  176. Les petites bêtes. L’expression est trop vague. — Le cléros… le pyrauste. Quelques éditeurs ont cru pouvoir contester l’exactitude de ces noms, que nous devons accepter tels que l’auteur nous les transmet. La science moderne a conservé le nom de clérus à un coléoptère qui donne son nom a toute une famille ; mais je ne sais si c’est bien l’insecte dont il est question ici : voir la Zoologie descriptive de M. Claus. p. 636.
  177. Une autre petite bête. Cette bête ne serait pas si petite si en effet elle ressemble au papillon. J’ai cru devoir traduire, à cause de ce qui suit, le mot grec d’Hépiolos par Papillon ; beaucoup de traducteurs l’ont simplement reproduit. — De duvet. Ou de Poussière. — Des tarières. Ici encore, j’ai traduit le nom grec, au lieu de le reproduire.
  178. La rouille qui atteint les fleurs. Parce qu’alors toute l’industrie des abeilles est compromise, et que leur travail est vicié. — Si on les frotte d’huile. L’huile les empêche alors de respirer, parce que la fonction de la respiration, chez la plupart des insectes, s’exerce par la surface du corps ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 396. — Une goutte sur la tête. C’est là une expérience qu’il est très facile de vérifier, et l’on comprend que la chaleur, en dilatant l’huile ; rend son effet encore plus rapide et plus fort.
  179. Varient selon les climats. Cette observation, qui aujourd’hui peut paraître banale, était neuve du temps d’Aristote. — De la Milésie. Ceci désigne évidemment la contrée où était la ville de Milet, non loin de l’embouchure du Méandre. — Des cigales. Comme les cigales recherchent la chaleur, il suffit qu’un lieu soit mal exposé pour que les cigales y manquent, bien qu’elles se trouvent dans un lieu voisin dont l’exposition est meilleure.
  180. Dans l’île de Céphalonie. Île voisine d’Ithaque et une des plus grandes de la mer Ionienne. Pline, liv. VIII, ch. LXXXIII, p. 356, édit. et trad. Littré, a répété presque tout ce chapitre d’Aristote. — Dans la Pordosélène. C’est une petite île près de Lesbos. — En Béotie. Voyez Pline, loc. cit. — Elles ne veulent point y fouiller la terre. Je ne sais pas si des observations modernes ont confirmé ces faits ; mais ils sont fort possibles ; et la diversité des terrains, composés d’éléments répugnant aux taupes d’une façon quelconque, expliquerait très bien pourquoi elles ne fouillent pas la terre.
  181. A Ithaque, les lièvres… On n’a pas vérifié ce fait particulier pour Ithaque ; mais il paraît que, dans toutes les Cyclades, les lièvres et les lapins se sont excessivement multipliés.
  182. Ni un sanglier. Il paraît qu’au contraire les sangliers sont fort nombreux dans cette partie de l’Afrique, qui correspond à l’ancienne Libye, comme ils le sont aussi dans l’Inde. — Ctésias… peu digne de foi. Voir plus haut une critique non moins vive de la véracité de Ctésias, liv. II, ch, III, § 15, sur le Martichore. — Ni de mollusques, ni de testacés. Quelques éditeurs donnent une leçon un peu différente ; « Ni toutes les espèces de mollusques, ni tous les testacés. ». — Dans la mer Rouge. Le fait est exact.
  183. Des queues larges d’une coudée. Ce n’est pas exagéré. Voir plus haut, ch. XII, § 5. — Des crinières. Il s’agit sans doute des bisons, ou des zébus. — Comme le dit Homère. Odyssée, chant IV, vers 85, p. 322, édit. Firmin-Didot. — Du côté de la Scythie. C’est-à-dire, au nord.
  184. En Égypte, certains animaux… Ces observations sont exactes en général, bien que penture quelques détails ne le soient pas ; mais ils prouvent du moins que les Grecs étudiaient très curieusement l’Égypte, et qu’ils cherchaient à la bien connaître. — Par celle de la nourriture. Cette explication est très juste. — Parce que les petits oiseaux y sont peu nombreux. Il est clair que cette observation ne peut pas s’appliquer aux carnivores ; mais elle peut se rapporter fort bien aux éperviers ; et il suffirait d’un simple déplacement dans le texte.
  185. Les ânes sont petits. Ils le sont aussi en Égypte. — Dans la Celtique. C’est la Gaule et la France, qui s’appelaient alors de ce nom, et que les Grecs ne connaissaient guère que par la colonie Phocéenne de Marseille, au temps d’Aristote. — Leurs pattes de devant… Il y a des éditeurs qui ont changé complètement ce passage en mettant : « Devant » au lieu de « Derrière », et réciproquement « Derrière » au lieu de « Devant ». Je crois qu’il faut garder le texte tel qu’il est, bien qu’il soit insuffisant pour nous apprendre quel est l’animal dont il s’agit. Si l’on suppose que ce sont les pattes de derrière qui sont les plus longues, l’animal pourrait bien être une sorte de sarigue.
  186. En Libye. Toute l’Antiquité a eu cette opinion, qui n’est pas sans fondement, bien que les faits aient été fort exagérés, comme le prouve la légende du combat de l’armée de Régulus contre le fameux serpent du Bagradas. — Des navigateurs… Ces récits pouvaient être aisément fabuleux, parce que ces parages étaient peu visités par les Grecs.
  187. Il y a plus de lions en Europe. Aujourd’hui et depuis bien longtemps, il n’y a plus de lions en Europe ; ils ont disparu devant l’homme ; mais on ne peut guère douter qu’il n’y en ait en autrefois. — L’Achéloüs et le Nessus. Ou Nestus. Voir plus haut, liv. VI, ch. XXVIII, § 2. La légende d’Hercule, quoique fabuleuse, prouve qu’on croyait à l’existence des lions en Europe ; voir aussi Xénophon, Traité de la Chasse, ch. II, p. 758, édit. Firmin-Didot. — Le proverbe. Les Romains avaient recueilli ce dicton populaire ; mais ils en avaient détourné le sens. — L’accouplement y devient fécond. Si d’ailleurs les espèces sont assez voisines les unes des autres, indépendamment des autres conditions dont parle l’auteur. Il est bien vrai d’ailleurs que c’est sur le bord des eaux que doivent se rencontrer toutes les bêtes sauvages de ces contrées.
  188. Ils s’adoucissent… La raison qu’en donne l’auteur ne paraît pas très forte ; et les animaux féroces doivent se disputer le liquide, qui leur est si nécessaire. — Ils perdent l’habitude de boire. Ceci peut sembler exagéré, quoique les animaux s’accoutument à boire moins, ainsi que les hommes. — Et même les rats du pays… Il est clair que ceci est une addition, qui interrompt le cours des pensées, et qui de plus affirme un fait incroyable.
  189. Il y a encore d’autres animaux… Ce paragraphe ne se rattache guère à ce qui précède ; il contient d’ailleurs des renseignements curieux, qui peuvent être exacts. — Cyrène. C’est la grande ville d’Afrique, entre la Tripolitaine et l’Égypte, fondée six siècles avant l’ère chrétienne par une colonie grecque. Cette partie de la côte nord de l’Afrique était mieux connue des Anciens qu’elle ne l’est aujourd’hui. — Les loups s’accouplent aux chiennes. Il paraît certain qu’on a obtenu des produits du chien et de la louve ; l’inverse est donc assez probable. — Viennent d’un renard et d’un chien. La possibilité de ce croisement n’est pas certaine ; mais c’est peut-être la forme seule des chiens de Laconie qui aura donné naissance à cette opinion, pour peu qu’ils ressemblassent à des renards. Il ne paraît pas que les essais tentés en ce genre par les Modernes aient pu réussir. — On assure aussi. L’auteur ne fait que répéter un renseignement, qui, sans doute, sera venu de l’Inde après l’expédition d’Alexandre. — Viennent d’un tigre et d’une chienne. Dans le Traité de la Génération des animaux, liv. II, § 118, p. 196, édit. et trad. Aubert et Wimmer, Aristote revient sur ces accouplements bâtards ; mais il ne parle pas du tigre à propos des chiens indiens. Il parle seulement d’un animal qui a du rapport avec le chien. — On conduit les chiennes. Il est possible qu’on ait employé ce procédé ; mais l’important est de savoir jusqu’à quel point il a réussi.
  190. Les lieux. Cette influence des lieux sur les êtres qui les habitent avait été admirablement étudiée par Hippocrate dans son fameux traité ; mais il s’était surtout occupé des hommes, tandis qu’ici Aristote s’occupe des animaux ; l’un est médecin ; et l’autre, zoologiste. — Les sangliers de l’Athos. Il est à présumer que ces animaux n’ont guère changé depuis le temps d’Aristote ; mais je ne sais pas s’ils ont été l’objet d’observations récentes.
  191. Dans les morsures des animaux. La remarque est ingénieuse et vraie, si on ne l’exagère pas. — Dans la Carie. Dans la plupart des manuscrits et dans les éditions, on trouve cette leçon ; mais MM. Aubert et Wimmer ont préféré « Dans la Scythie », au lieu de « Dans la Carie », d’après la traduction de Guillaume de Morbéka et celle de Gaza. Je crois qu’il est préférable de s’en tenir à la leçon vulgaire ; et il semble que, dans un pays chaud comme la Carie, les scorpions doivent être plus venimeux que dans le climat froid de la Scythie.
  192. De la Libye. Cette expression géographique était pour les Anciens à peu près aussi vague qu’elle peut l’être pour nous. — Un poison qui putréfie. Le texte a l’air de désigner nominativement ce poison, en l’appelant le Septique. — Le silphium. Voir, sur cette plante de la Cyrénaïque et sa préparation, Théophraste, Histoire des Plantes, liv. VI, ch. III, §§ 1 et suiv., p. 101, édit. Firmin-Didot. — Une pierre C’est évidemment une fantaisie populaire, dont l’auteur ne prend pas la responsabilité : « A ce qu’on prétend ». — Des simples stellions. C’est une espèce de saurien iguanien. Il est fréquent, à ce qu’il paraît, en Égypte, plus qu’ailleurs ; voir Cuvier, Règne animal, tome II, p. 32. L’Italie, d’ailleurs, n’était pas très bien connue des Grecs, si ce n’est la partie appelée Grande-Grèce. Le stellion s’appelle aussi Ascalabote, mot grec que la science moderne a conservé ; voir Cuvier, loc. cit., p. 50. Il ne paraît pas du reste que le gecko italien, ou l’ascalabote, soit aussi venimeux qu’Aristote semble le croire.
  193. La vipère ayant mangé un scorpion. Évidemment, c’est là un dire populaire, qui ne mérite aucune créance. — La salive de l’homme. Il est possible que la salive humaine puisse être un adoucissement ; mais ce ne peut être un contrepoison. — Le serpent sacré. C’est sans doute en Égypte. — Comme velu. Le fait est tout à fait invraisemblable. — Dans l’Inde un petit serpent. L’indication est trop vague pour qu’on puisse savoir précisément quel est ne reptile, surtout dans un pays où il y en a tant.
  194. La gestation. Cette série d’observations est très curieuse ; et elle complète bien toutes les précédentes. — Pour l’espèce des langoustes. C’est-à-dire, pour les langoustes et les crustacés, qui leur ressemblent. Les crustacés sont la seconde forme des animaux articulés ; voir Cuvier, Règne animal, t. III, p. 183, et t. IV, p. 80. — Quoiqu’on n’en ait jamais vu. Je ne sais pas si le fait est exact, et si la science moderne est à cet égard plus avancée qu’Aristote.
  195. La maenis. Il semble bien que c’est un petit poisson de la famille des Ménides, Maena vulgaris ; voir Cuvier, Règne animal, t. II, p. 186. — Les mâles prendre une couleur noire. Le fait est exact ; mais il n’est pas exclusif à l’espèce des Ménides ; d’autres espèces éprouvent aussi ce changement. — Le nom de Boucs. A cause de leur mauvaise odeur.
  196. Qu’on appelle les grives, les merles. L’identification n’est pas sûre ; mais les mêmes noms sont employés aussi en grec, pour désigner des oiseaux, en même temps que des poissons. — Comme on le voit sur quelques oiseaux. Le fait est bien connu pour plusieurs espèces d’oiseaux. — La phycis. On ne sait pas au juste quel est ce petit poisson ; mais on présume que c’est l’épinoche, qui, dans ces derniers temps, a été l’objet d’observations très attentives, à cause du nid qu’il se construit — A ce qu’on assure. Ici l’auteur aurait pu être plus affirmatif.
  197. Ainsi qu’on vient de le dire. Plus haut, § 2. — La smaris. Comme ce poisson n’est nommé nulle part ailleurs qu’ici, il est bien difficile de savoir ce qu’il est. Ce qu’on peut présumer, c’est qu’il se rapproche de la Maenia puisqu’il est nommé auprès d’elle. Quelques manuscrits donnent Carie au lieu de smaris ; et ce serait peut-être la vraie leçon. La zoologie moderne a conservé le nom de smaris à une espèce de la famille des Acanthoptéres ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 848, où la maena et la smaris sont tout prés l’une de l’autre. — Les autres poissons à écailles. J’ai adopté la leçon proposée par MM. Aubert et Wimmer, d’après un assez grand nombre de manuscrits ; la leçon vulgaire dit : « Et le reste des animaux qui nagent ». — Le glaucus. Ce poisson est inconnu ; voir plus haut, ch. XV, § 2.
  198. Les vieux poissons ne sont pas bons. Peut-être, cette assertion est-elle trop générale ; les carpes, par exemple, ne sont pas moins bonnes en vieillissant, non plus que les brochets. — Quinze talents. Il est impossible de savoir ce que ceci représente ; le poids du talent a beaucoup varié selon les pays et selon les temps. Les évaluations changent considérablement, puisqu’elles sont tantôt de 25 kilogr, et tantôt de 60, et plus. — La largeur de sa queue. Ce passage peut se comprendre de deux façons : ou il signifie la longueur du poisson de la tête à la queue ; ou il signifie que sa queue mesurait deux coudées et une palme, pour l’étendue totale des deux nageoires qui la composent. Ce dernier sens paraît préférable.
  199. La saperdis. On ne sait quel est ce poisson d’eau douce. — Le glanis. Le glanis n’est pas bien connu, quoique Aristote en ait parlé souvent ; voir plus haut, liv. I, ch. V, § 6 ; voir aussi liv. VI, ch. XIII, § 6. — Celles qu’on prend pour des femelles. Comme on ne sait rien sur la reproduction des anguilles, il n’est pas étonnant que les Anciens l’aient ignorée ainsi que nous. FIN DU LIVRE VIII.
  200. Les mœurs des animaux… Voir des considérations analogues, mais plus larges, au début du VIIIe livre ; voir aussi la Dissertation sur la composition de l’Histoire des Animaux. — Plus cachée et plus courte,… plus longue. Tout ceci est fort juste. L’auteur aurait pu ajouter : « Selon que leur existence est domestique ou sauvage ». — Toutes les affections que l’âme peut éprouver. L’expression est peut-être trop générale ; il aurait mieux valu dire : « Quelques-unes des affections ». Dans bon nombre de descriptions de Buffon, on peut voir qu’il partageait à bien des égards les idées qui sont exprimées ici, sur les ressemblances de l’homme et des animaux. On se rappelle surtout les portraits qu’il a faits du lion, de l’éléphant, de l’âne, du cheval, etc.
  201. Susceptibles d’apprendre. Voir le début de la Métaphysique, l. I, ch. I, § 3, p. 3 de ma traduction. — Le sens de l’ouïe. La Métaphysique donne aussi au sens de l’ouïe, chez les animaux, la plus grande importance. — Les différences des signes. Ceci est une considération nouvelle ; il s’agit des signes par lesquels l’homme manifeste sa volonté à l’animal.
  202. Mâle et femelle. Le sexe, en effet, exerce la plus vive influence ; et ce serait supprimer une partie de la zoologie que de passer cette question sous silence. — Sur l’espèce humaine. Ici, l’on peut trouver que l’on ne distingue pas assez l’homme du reste des animaux ; c’est évidemment un être à part, qui sans doute ressemble à bien d’autres, mais qu’on ne doit confondre avec aucun d’eux. Du reste, ce qui est dit des femelles des animaux est en général fort exact.
  203. Les chiennes de Laconie. Je crois que beaucoup de nos chasseurs donnent aussi la préférence aux chiennes ; celles de Laconie étaient célèbres dans toute la Grèce. — De Molossie. La Molossie était une partie de l’Épire, sur le golfe d’Ambracie. Le nom de Molosses est devenu générique pour tous les chiens de grande taille.
  204. Moins de courage que les mâles. Excepté, quand elles ont à défendre leur progéniture. — De l’ourse et de la panthère. Je ne sais pas si le fait est constant, et s’il a été sanctionné par la science moderne.
  205. Chez l’homme. C’est vrai ; mais c’était un motif de plus pour séparer l’homme du reste des animaux. — La nature de l’homme est achevée. Et sous certains rapports, toute autre que la nature animale.
  206. La femme. Le portrait de la femme n’est pas flatté dans ce passage ; mais pour excuser l’auteur, il faut se rappeler quelle était la condition des femmes en Grèce ; et certainement, cette situation a inspiré à l’auteur un dédain, qui n’est pas justifiable. — Dans les animaux. J’ai ajouté ces mots qui me semblent ressortir du contexte, et que justifie l’exemple de la seiche, cité à la fin du paragraphe. — Jusque dans les mollusques. Je ne sais pas si le fait est exact ; mais on peut le croire, parce qu’il avait dû se représenter bien souvent à l’observation des pécheurs.
  207. Qu’ils tirent leur vie des mêmes substances. Il ne peut pas y avoir de cause d’hostilité plus énergique entre les bêtes. Cette cause, bien que sous d’autres formes, agit aussi bien souvent entre les hommes. — C’est ainsi que les phoques…. Ce détail peut être exact, quoique le phoque soit facile à apprivoiser.
  208. En guerre avec les carnivores. Le motif est de toute évidence ; mais il était bon de consigner cette observation, quelque simple qu’elle soit. — Entre les humains. J’ai ajouté ces mots qui sont implicitement compris dans l’expression du texte ; quelques traducteurs l’avaient déjà fait avant moi.
  209. Qu’une nourriture constamment abondante. C’est de là que vient l’attachement des animaux pour les gens qui les nourrissent ; et c’est un moyen puissant, que les dompteurs ne manquent pas d’employer. — En Égypte. Les Grecs avaient dû remarquer de bonne heure ce culte singulier des Égyptiens pour les animaux, dont un bon nombre était sacré à leurs yeux ; dans aucun pays, ce culte, qui faisait partie de la religion, n’a été poussé aussi loin. — Le crocodile. Il n’y a rien là que de très probable. — Dans quelques-uns de leurs cantons. Le texte ne peut pas avoir un autre sens ; mais ces mots sont ici assez mal placés, et quelques commentateurs ont soupçonné une lacune ; ces mots seraient, selon eux, la fin de quelque phrase qui manquerait. MM. Aubert et Wimmer, qui émettent cette conjecture, trouvent, d’ailleurs, que presque tout ce livre est peu digne d’Aristote. Voir ma Dissertation sur la composition de l’Histoire des animaux.
  210. L’aigle et le serpent. Ces détails sont le développement très naturel du sujet ; et quoi qu’on en dise, ils ne manquent ni d’à-propos ni d’intérêt. — L’ichneumon. Espèce d’insecte hyménoptère, qui a donné son nom à toute une famille ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 657. — La phalange. Espèce d’araignée, qui forme aussi tout un ordre ; id., ibid., p. 514.
  211. L’orchile. On ne sait pas ce qu’est cet oiseau ; mais peut-être est-ce le Trochile, avec lequel une facile erreur de copiste peut le faire confondre. — Tous les petits oiseaux. Le fait est bien connu ; au temps d’Aristote, l’observation était assez neuve. — C’est pour l’admirer. C’était sans doute la croyance populaire.
  212. Surnommé le Sénateur. Ou le Roi. Cet oiseau serait alors une espèce de roitelet, Troglodytes Europaeus. Voir plus loin sur le sénateur, liv. IX, ch. XII, § 4. — La Pyrallis. On ignore ce qu’est cet animal, et l’on ne sait même pas si c’est un oiseau. — Le pic-vert. En grec Kéléos ; il semble bien que c’est le Picus viridis de la zoologie moderne. — Ces oiseaux. Il est donc probable que la Pyrallis est aussi un oiseau, comme tous les animaux nommés dans ce passage.
  213. Les oiseaux qui tirent leur nourriture de la mer. Quelques-uns des oiseaux désignés dans ce paragraphe sont en effet des oiseaux de mer ; mais le reste sont des oiseaux qui ne vivent qu’à terre. — Le Brenthos. Ou Brinthos. On ne sait pas quel est cet oiseau ; mais il est probable que c’est une espèce de mouette. — Le goéland. Ou « La mouette ». — La harpé. J’ai dû reproduire simplement le mot grec, parce qu’on n’a pu identifier cet oiseau. — Le crapaud. Ou Grenouille de haie, comme on l’appelle quelquefois. — Le typan. On ignore quel est cet oiseau ; et, d’après l’expression du texte, il semble qu’il était peu connu en Grèce. — L’ægolie. Ou L’aetolie. On ignore aussi ce que peut être cet oiseau, qui sans doute était un oiseau de nuit. Voir plus loin, ch. XVI, § 7. — Les autres oiseaux. Il faut probablement ajouter : « De nuit ». — Le calaris. Ou Colaris, ou Scalaris, selon diverses lectures ; l’identification n’a pu être faite.
  214. Le stellion. Voir plus haut, liv. VIII, ch. XXVIII, § 3. — La pipone. J’ai reproduit le mot grec ; cet oiseau est une espèce de pie, à ce qu’on suppose. — L’ægithe. J’ai dû encore reproduire le mot grec, parce qu’on ne peut identifier cet oiseau. Pline répète ce détail sur l’ægithe, qu’il appelle un oiseau très petit, de même qu’il s’approprie presque tous les autres détails de ce chapitre ; Histoire naturelle, liv. X, ch. XCV, p. 424, édit. et trad. Littré.
  215. Le loup fait la guerre… Le loup n’attaque pas seulement les animaux qui sont nommés ici ; il attaque tous ceux qui sont plus faibles que lui, ou qu’il peut surprendre. — Le corbeau est l’ennemi du taureau. C’est trop dire, bien qu’il ne soit pas impossible que le corbeau, dont le bec est très fort, crève quelquefois les yeux des autres animaux.
  216. L’ægype. On ne sait précisément quel est cet oiseau, non plus que la Crex, qui probablement doit être un échassier. Voir plus loin, ch. XVI § 7. — Amies des fables. C’est une critique que l’auteur dirige contre les croyances populaires. — La sitte. J’ai dû reproduire le nom grec, que la science moderne a conservé pour une espèce de mésange ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 996, trad. franc. — Le trochile. Voir plus haut, § 5. — L’aigle est en guerre avec tous les oiseaux. Ceci n’est pas particulier à l’aigle ; tous les grands oiseaux de proie en sont là.
  217. L’anthos. C’est le mot grec, transcrit simplement. On croit reconnaître dans l’Anthos une espèce de bec-fin, Motacilla Bava ; voir Cuvier, Règne animal, tome 1, p. 382, et la Zoologie descriptive, de M. Claus, p. 996. Il est, d’ailleurs, évident que ce qui est dit ici de cet oiseau n’est qu’un tissu de fables ; et il ne semble pu qu’un oiseau joue à l’égard du cheval le rôle qu’on prête ici à l’Anthos. On a donc pu avec toute raison suspecter ce passage ; il ne vient pas d’Aristote.
  218. Du côlôte. On suppose que le côlôte doit être une espèce de lézard. Il est bien probable que ce détail est aussi fabuleux que tous ceux qui précèdent. — Il y a trois espèces de hérons. Ceci ne tient, ni à ce qui vient d’être dit, ni à ce qui suit. Ce sont là évidemment des notes assez confuses, mises sans ordre les unes à la suite des autres. La science moderne compte des espèces nombreuses de hérons ; voir Cuvier, Règne animal, tome I, pp. 310 et suiv, et Zoologie descriptive de M. Claus, p. 975. — Cendré. Le sens du mot grec Pellos n’est pas très défini ; je l’ai rendu par Cendré, pour me rapprocher davantage de la réalité, puisque plusieurs espèces de hérons présentent en effet cette couleur. — L’étoilé. La zoologie moderne appelle une espèce de héron Ardea stellaria. Voir plus loin, ch. XVII, § 1. — A ce qu’on dit. L’auteur n’a pas l’air de croire à ce fait étrange et faux.
  219. Le serpent… la belette… le cochon… le corbeau et le renard. Tous ces détails ne répondent, comme les précédents, qu’à des faits insignifiants, ou à des erreurs populaires.
  220. L’ægype, Voir plus haut, § 10. — Plus que les cygnes. J’ai adopté la leçon de M. Pikkolos, admise par MM. Aubert et Wimmer. Les éditions ordinaires disent, d’après les manuscrits, que les cygnes se dévorent entre eux, au lieu de dire qu’ils se tuent. Le fait est qu’à l’époque de l’accouplement, les mâles se battent d’une manière furieuse. Athenée, liv. IX, 393, cite en partie ce passage sur les cygnes. Voir aussi Élien. liv. V, ch. XXXIV, p. 83, edit. Firmin-Didot. — Comme y sont les hommes. Cette remarque est au moins singulière ; et sans doute, c’est une addition faite par une main qui n’est pas celle de l’auteur. — Le pinson. Ou peut-être, « la Linotte ». J’ai mis entre parenthèses le mot d’Épinier pour rendre littéralement le mot du texte. Le fait, d’ailleurs, n’a aucune vraisemblance. Voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 998.
  221. L’anthos. Voir plus haut, § 11. — L’ægithe. On ignore quel est cet oiseau ; d’après ceux avec lesquels il est ici nommé, on peut croire qu’il s’agit d’une espèce de mésange. — Le sang de l’ægithe et de l’anthos. C’est un récit absurde, auquel l’auteur de ces notes, quel qu’il soit, ne croit pas. — Le schoinion… Le laédos. J’ai dû simplement reproduire les noms grecs, parce qu’on ne sait pas quels sont ces oiseaux. Même remarque pour le Piphinx ; et aussi pour la Harpé, mentionnée déjà plus haut, § 7. Voir plus loin ch. XVII, § 2. — Le renard et le serpent. Ce rapprochement est au moins très singulier ; et le motif qu’on en donne l’est encore davantage.
  222. Le thôs. On ignore ce qu’est au juste cet animal ; on a cru que ce pouvait être le chacal ; mais on pense aussi que ce pouvait être une sorte de civette, Viverra, espèce de carnassier qui paraît trop faible pour pouvoir lutter contre le lion. Voir Cuvier, Règne animal, tome I, p. 154, et Zoologie descriptive de M. Claus, p. 1077 ; voir aussi le Catalogue de MM. Aubert et Wimmer, t. I, p. 69, § 20. — Les éléphants se battent furieusement. Surtout au moment du rut. Les détails qui suivent sont assez curieux ; et sans doute, la Grèce n’avait bien connu les mœurs des éléphants qu’après l’expédition d’Alexandre ; mais ces détails ne tiennent pas à ce qui précède, et ils ne se rapportent même pas au sujet général de ce chapitre. — Soumis à un rude esclavage. Ceci n’est pas assez expliqué et ne se comprend pas très bien. — Les Indiens. Ceci prouve bien l’origine de ces renseignements. — Plus petites. On croit pouvoir fixer approximativement à un cinquième, la différence de taille entre les femelles et les mâles.
  223. La chasse à l’éléphant. Buffon a décrit aussi la chasse à l’éléphant, tome XVI, pp. 308 et suiv. Le naturaliste moderne ne donne pas tout à fait les mêmes renseignements ; mais les siens sont beaucoup plus exacts et beaucoup plus étendus. — Sa faux. C’est le bâton armé d’une pointe de fer que porte le cornac, monté sur le cou de la bête ; j’ai conservé la nuance du mot grec ; le mot vrai serait Aiguillon.
  224. Voilà donc comment les animaux. Résumé de ce qui a été annoncé, dès le premier paragraphe de ce chapitre. On ne saurait repousser la conjecture de MM. Aubert et Wimmer, qui ne veulent pas attribuer cette rédaction à Aristote lui-même. Les idées sont en effet désordonnées, et le style n’est pas meilleur. Mais si le sujet est imparfaitement traité, il n’en était pas moins important ; et la zoologie ne peut oublier les guerres des animaux entre eux. C’est une partie de leur caractère et de leurs mœurs.
  225. Les uns avec les autres. Ceci ne s’applique évidemment qu’aux poissons qui forment la troupe ; mais les poissons d’une troupe peuvent fort bien combattre les poissons d’une autre troupe. — Ceux qui ne vivent pas en troupe… Cette assertion est trop générale. — Les thons, les maenides… Il faut admettre qu’il n’y a ici que des noms de poissons ; et alors, on ne comprend pas bien qu’on y compte des Sauriens ; ceci ne s’explique que si ce nom, qui désigne des reptiles terrestres, était employé aussi à désigner des poissons, dont nous ignorons d’ailleurs la véritable espèce. — Les sphyrènes. La science moderne a conservé ce nom à une espèce d’acanthoptère ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 852. Beaucoup des autres noms énumérés ici n’ont pu être identifiés, comme les bogues, les élégins, les ioulides, etc.
  226. Par paires. Le mâle et la femelle se réunissant et restant quelque temps ensemble. — À certaines époques. Il eût été bon de dire à quelles époques, et dans quelles circonstances, se réunissent ces ennemis implacables.
  227. De même espèce. J’ai adopté la leçon de Gaza, comme l’ont fait aussi MM. Aubert et Wimmer, bien que la leçon ordinaire soit acceptable : « Les individus qui pondent en même temps ». — Pourvu que cette nourriture soit très abondante. Car autrement les animaux se la disputeraient. — On voit fréquemment. Ceci ne tient pas très bien à ce qui précède immédiatement ; mais cette observation, qui est exacte, se rapporte au sujet général de ce chapitre, la guerre des poissons les uns contre les autres.
  228. Pour les poissons de mer. Ceci semblerait indiquer que l’auteur se proposait d’étudier ainsi les poissons d’eau douce ; il est donc possible qu’il y ait ici quelque lacune.
  229. Plus haut. Liv. VIII, ch. I. — Le mouton a un caractère aussi doux que stupide. C’est aussi l’avis de Buffon, tome XIV, pp. 158 et suiv., édit. de 1830. Il semble que le naturaliste français a eu sous les yeux le passage d’Aristote, au moment où il faisait lui-même la description du mouton. — C’est le plus bête. On est généralement d’accord sur ce point. — En plein hiver, il sort de l’étable. Tous ces détails sont exacts. — Ils ne veulent pas bouger. Buffon a dit les mêmes choses ; Id., ibid., p. 159. — Il n’emporte les mâles. Même remarque.
  230. Si l’on prend une chèvre… Ceci ne se rapporte pas ce qui précède ; et il semble que, dans ce chapitre, il ne devrait être question que du mouton. Il paraît que Guillaume de Morbéka a eu un autre texte, où ce serait la patte de la chèvre que l’on prendrait, et non plus sa barbiche. Le mot du texte n’a pas une signification bien déterminée. Je ne sais pas d’ailleurs si le fait rapporté ici est exact. Pline le répète aussi et semble l’admettre, liv. VIII, ch. LXXVI, p. 352, édit. et trad. Littré. — Dorment dehors… Le texte paraît avoir été altéré ; et le sens n’est pas sûr. — Plus tranquillement. Ici encore, on peut supposer quelque altération ; car les chèvres sont naturellement beaucoup moins tranquilles que les moutons.
  231. Quand le bruit du tonnerre se fait entendre. Voir Buffon, tome XIV, p. 161, qui constate qu’un coup de tonnerre suffit pour faire avorter les brebis. — Les taureaux. On ne voit pas comment on peut parler ici des taureaux ; et Camus, d’après un manuscrit de Paris, a substitué les Béliers aux Taureaux ; mais d’après l’expression du texte, qui reproduit celle du liv. VI, ch. XVII, § 12, il semble bien que c’est des taureaux qu’il s’agit ; alors il faudrait dire que cette phrase a été tout à fait déplacée, puisque la phrase suivante retient aux moutons et aux chèvres. — Après que le soleil a tourné. L’expression du texte est aussi vague ; mais Pline, qui répète ce passage, loc. cit., ne laisse aucun doute ; c’est vers le coucher du soleil que les chèvres ne se couchent plus nez à nez, mais qu’elles se tournent le dos.
  232. Les vaches paissent de compagnie… C’est un fait que chacun de nous a pu observer bien des fois. — Selon l’habitude. Il se forme en effet des liaisons constantes entre les mêmes vaches, qui vont toujours ensemble. — Se mettent tout de suite à chercher toutes les autres. Il me semble que c’est là le sens très régulier du texte, et il n’est pas besoin d’y faire quelque changement, comme l’ont voulu plusieurs commentateurs. Si la vache qui est le chef des autres, n’est pas au lieu où on la cherche, et si les autres sont absentes également, en en conclut qu’elles doivent être avec la première.
  233. Quand, parmi les juments… Ceci ne tient pas, à ce qui vient d’être dit des vaches ; et évidemment, ce sont là des notes mises, sans ordre, à la suite les unes des autres. Je ne sais pas d’ailleurs si le fait mentionné est bien exact, quoiqu’il n’ait rien d’impossible. — Très susceptible d’affection. Ce qui est vrai, c’est que l’homme, s’il vit fréquemment avec le cheval, peut développer en lui beaucoup de qualités. — On voit des juments stériles. Je ne crois pas que la science moderne ait vérifié des faits semblables.
  234. Sauvages. Il faut distinguer trois classes d’animaux : les animaux, domestiques, sauvages, et les animaux féroces. Buffon a fait aussi cette distinction ; voir toms XIV, p. 351, édit. de 1830. Le chorion… du séseli. Pline, qui a reproduit la plus grande partie de ce chapitre, parle aussi du séseli que mange la biche, liv. VIII, ch. I, p. 337, édit. et trad. Littré. Ailleurs, liv. XX, ch. XVIII, p. 7, ibid., il appelle l’herbe que mangent les biches le sili et non plus le séséli ; il ajoute que c’est surtout de cette plante que les biches se nourrissent avant de mettre bas. Le séséli tortuosum est classé dans la botanique actuelle ; c’est une herbe dont la racine surtout est odprante. Il ne paraît pu, d’ailleurs, que la science moderne ait constaté rien de pareil à ce qui est dit ici. — Elle conduit ses faons à des retraites. Tout ceci, au contraire, est très exact.
  235. Le mâle, de son côté. Tous les détails donnés dans ce paragraphe sont exacts, comme les précédents, et se retrouvent en partie dans Buffon. — Le proverbe si usité. Nous n’avons pas dans notre langue rien qui réponde au proverbe grec. — Leurs armes. Il est bien probable en effet que l’animal se cache instinctivement, parce qu’il sent sa faiblesse. — On prétend… Pline répète ce conte populaire ; mais il parle de la corne Droite au lieu de la corne Gauche, liv. VIII, ch. I., comme plusieurs autres auteurs. On ne sait à quelle habitude du cerf peut se rapporter cette singulière croyance. Ce qui peut-être y a donné naissance, c’est que les deux bois ne tombent pas toujours en même temps, et qu’il y a parfois un ou deux jours d’intervalle.
  236. A un an… Les détails que donne Aristote sur ce bois du cerf, ne sont pas complets sans doute ; mais ils prouvent déjà toute l’attention que les naturalistes grecs attachaient à ce singulier phénomène, qui est unique dans le règne animal ; on peut voir la longue étude qu’y a consacrée Buffon, loc. cit., pp. 373 et suiv. — Court et velu. Ce détail est exact. — Comme des pieux. Au lieu d’être ramifiées et courbées de diverses façons. — Des piquets. Ainsi, les Grecs avaient fait aussi une sorte de langue spéciale pour décrire les remarquables propriétés que le cerf présente. Chez les modernes, la langue de la vénerie, appliquée à cet animal, forme tout un dictionnaire, Buffon, loc. cit., pp. 361 et suiv. — Jusqu’à six ans. C’est exact en général ; mais parfois, la croissance dure jusqu’à huit ans.
  237. Toujours les mêmes. Cependant, il y a bien quelques différences de formes et de grosseurs, selon l’abondance plus ou moins grande de la nourriture. — On appelle Défenses. Voilà encore un mot spécial dans la langue grecque ; et l’auteur l’explique. Nous dirions plus généralement les Andouillers. — Le mois de Thargélion. Ce mois grec répond en partie à nos mois de mai et de juin ; mais les époques où les cerfs mettent bas varient beaucoup avec l’âge des bêtes, et avec les rigueurs plus ou moins grandes des hivers. C’est ainsi que la mue peut durer plusieurs mois. Voir Buffon, tome XIV, p. 386.
  238. Des mouches. C’est la leçon ordinaire ; MM. Aubert et Wimmer proposent de lire par un très petit changement de lettres : « Pour éviter les chemins ». Ce sens est certainement préférable ; mais les manuscrits ne l’autorisent pas. Le commentaire d’Albert le Grand donne : « Pour éviter les loups ». Ce qui prouve tout au moins qu’il y avait des variantes sur ce passage. — Comme dans une peau… elles sont velues. Ceci est exact, sans l’être complètement. — Pour les mûrir. C’est la traduction du mot grec.
  239. En frottant son bois contre les arbres. Ce mouvement du cerf est provoqué par la douleur que lui cause la croissance du bois. — Un cerf d’Achaïe… un lierre touffu et tout vert. Buffon, tome XIV, p. 381, semble ne pas repousser la possibilité de ce fait, qui, rapporté par Aristote, a été répété par Théophraste et Pline. Ce fait peut sembler fabuleux. Ici, l’Achaïe désigne une ville de Crête, où il y avait des cerfs d’une espèce particulière.
  240. Mordu par une araignée-phalange. Ceci n’est qu’un conte populaire, qui ne repose sur rien. — Des escargots. Le mot grec peut signifier aussi des crabes ; mais ce qui suit m’a fait préférer le mot d’escargots. Le fait est du reste tout à fait faux. — Elle dévore…. le chorion. Ceci a été dit déjà, dans le § 1. Il est bien probable que ce passage est une note marginale, qui s’appliquait plus haut et qu’un copiste inattentif aura déplacée.
  241. En jouant de la flûte et en chantant. Ceci est sans doute exagéré ; mais il paraît certain que ces animaux aiment la musique, et qu’ils l’écoutent attentivement. — Un des deux chasseurs. C’est peut-être là un de ces récits de chasse qui ont chez nous tant de réputation, et que les chasseurs grecs ne s’épargnaient pas plus que les nôtres. — Et on la surprend. J’ai ajouté ces mots qui m’ont paru indispensables, pour compléter la phrase et la rendre claire.
  242. Elles poussent leurs petits devant elles. Cette sollicitude des ourses pour leurs petits a été vérifiée bien des fois. — Dans leur gueule. Le texte n’est pas tout à fait aussi précis. — Elles grimpent sur les arbres. L’expression du texte peut impliquer que les ourses font monter leurs petits avec elles sur les arbres. — Ce que font…. les petits. La tournure du texte semble concerner les mères plutôt que les petits ; mais la suite s’applique aux oursons plutôt qu’à elles ; car ce sont les petits qui ont besoin de faciliter la pousse des dents. — Ainsi que nous l’avons déjà dit. Voir plus haut, liv. VIII, ch. XIX, § 3. Dans ce passage, c’est l’ours qui mange l’arum ; ce ne sont pas les petits.
  243. On prétend… Il est très probable, d’après cette réserve, que l’auteur ne croyait pas à cet étrange préjugé. Cette fable avait cours du temps d’Aristote, et des auteurs l’ont souvent répétée après lui. — Se faire vomir. Le fait est exact, comme chacun de nous peut le savoir par ses observations personnelles. Cicéron avait sans doute tout ce passage sous les yeux, quand il écrivait son second livre de la Nature des Dieux, ch. I. et suiv.
  244. La panthère. Le mot grec est Pardalis, qui signifie ordinairement le Léopard ; mais comme Pline, liv. VIII, ch. XXIII, p. 328, édit. et trad. Littré, applique à la panthère presque tout ce qu’Aristote dit ici, le doute est permis. Du reste, la panthère et le léopard sont assez rapprochés l’un de l’autre pour qu’on les confonde. — La mort aux panthères. C’est la traduction littérale du mot grec. — Des excréments humains. Ceci n’est qu’un conte populaire, aussi peu fondé que tant d’autres, malgré les détails que l’on donne ici, avec tant de précision, sur les expédients des chasseurs. — Son odeur attire d’autres animaux. Pline reproduit ce détail, loc. cit.
  245. Quand l’ichneumon. Il est probable que ce récit, venu d’Égypte, était encore moins véridique que tant d’autres récits analogues venus de Grèce. — Lorsque le crocodile… C’est Hérodote, qui, le premier, a raconté ces relations du crocodile et du trochile, liv. II, ch. LXVIII, p. 94, édit. Firmin-Didot ; il tenait sans doute ce récit de prêtres égyptiens ; il ajoute que c’était de sangsues que le trochile débarrasse la mâchoire du crocodile. — De manière à ne pas le mordre. Hérodote dit à peu près la même chose, sans d’ailleurs parler, comme on le fait ici, du cou du crocodile ; ce qui en effet ne se comprend guère.
  246. De l’origan. Voir plus haut, livre IV, ch. VIII, § 21, une des propriétés de l’origan. Le fait que rapporte ici l’auteur grec est répété par Paré dans son Traité des animaux ; voir Littré, Dictionnaire de la langue française, article Origan. — À une autre vipère. Le texte est moins précis. — De la rue. Cette identification n’est pas absolument sûre ; et plusieurs traducteurs se sont contentés de reproduire le mot grec Peganon. Théophraste en parle souvent ; Des Causes des plantes, liv. VI, ch. XVI, § 1, p. 313. édit. Firmin-Didot. — Le serpent-dragon. Le texte dit simplement Dragon. La zoologie moderne a conserve ce nom a un saurien de l’espèce iguane ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 919. — Laitue sauvage. Le mot grec est Piéris, qu’on identifie avec l’Elminthie vipérine ; voir Théophraste, Histoire des plantes, liv. VII, ch. II, §, 4, p. 122, édit. Firmin-Didot.
  247. Du blé en herbe. Ou plutôt, du Chiendent — Les cigognes. Imagination populaire. — La fouine. On n’est pas sûr de cette identification. — La belette… Je ne sais pas si les détails donnés sur la belette, attrapant les oiseaux ou luttant contre les serpents, sont plus exacts que tant d’autres.
  248. Les hérissons… Il paraît certain que les hérissons font dans leurs demeures deux ouvertures, l’une au sud et l’autre au nord ; mais on ne sait rien de plus sur leur instinct en ce genre. — Passent d’un mur à l’autre. C’est-à-dire encore, du midi au nord, et réciproquement. — Une personne de Byzance. Plutarque rapporte le même fait, De l’Intelligence des Animaux, p. 1189, 31, édit. Firmin-Didot ; seulement il cite la ville de Cyzique, au lieu de celle de Byzance. — Le putois. L’identification n’est peut-être pas très certaine ; et l’on peut hésiter entre le putois, le furet, la belette, l’hermine. Ce qui m’a décidé à adopter le mot de putois, c’est qu’il est, d’après Cuvier, le plus sanguinaire de tous ; Règne animal, tome I, p. 143. — Est osseuse. La même organisation se présente chez plusieurs animaux, et notamment dans le chien. — Un remède excellent contre la strangourie. Il est bien à croire que c’était là un prétendu remède, comme nous en avons tant encore chez nous ; il y a en médecine une superstition aussi ardente que toute autre, et aussi aveugle.
  249. Qui ressemblent à la vie même de l’homme. Le texte dit précisément : « Qui sont des imitations », expression qui n’est peut-être pas très-juste, puisque les animaux ne font que suivre leur instinct, sans chercher à imiter l’homme, qu’ils ne connaissent pas. — Dans les petits animaux. L’auteur fait sans doute allusion aux insectes et aux abeilles qu’il étudiera très-particulièrement. — Dont l’hirondelle fait son nid. C’est une observation que chacun peut faire, surtout à la campagne. — Et va rouler ses ailes dans la poussière. Je ne sais si le fait est exact ; mais il n’a rien d’improbable.
  250. Le mâle et la femelle. Ce détail et tous ceux qui suivent sont exacts. — Elle donne. Ceci se rapporte à l’hirondelle en général, mâle et femelle ; on pourrait traduire par le pluriel ; mais j’ai préféré suivre le texte de plus près, puisqu’il ne peut y avoir de doute sur le sens. — Comme si elle en avait l’habitude. L’expression du texte n’est pas aussi précise. — Elle leur apprend à se tourner en dehors. Le fait peut être constamment observé.
  251. Sur les pigeons. Les détails donnés sur les pigeons sont aussi exacts que les précédents. — Veuf ou veuve. Ce sont les termes mêmes du texte, qui sans doute s’appliquaient, dans la langue grecque comme dans la nôtre, spécialement aux humains. — Ses colères. Le texte dit précisément : « Son indignation. » — De la terre salée. Il est possible que ce détail spécial ne soit pas parfaitement exact ; mais il est certain que le pigeon fait manger ses petits dans les premiers jours, comme on le dit ici. — Le mâle recommence à cocher. C’est la leçon proposée et adoptée par MM. Aubert et Wimmer ; elle me semble acceptable. La leçon ordinaire affirmerait que le mâle coche tous les jeunes, avant de les laisser sortir du nid. Il semble qu’il y a là une impossibilité manifeste, qui doit faire rejeter cette leçon, bien que tous les manuscrits la donnent.
  252. C’est là d’ordinaire…. Ces observations sont aussi exactes que celles qui précèdent.
  253. Cette particularité de ne relever la tête. La zoologie moderne a reconnu la justesse de cette observation délicate ; les pigeons domestiques en offrent toujours l’occasion. — Que le même mâle. C’est exact. — Par l’examen des viscères intérieurs. Ceci prouve une fois de plus que les Anciens disséquaient avec soin les animaux qu’ils voulaient étudier plus particulièrement.
  254. Les ramiers vivent très-longtemps. On comprend que ces renseignements doivent varier selon les pays et selon les climats ; mais les chiffres donnés ici paraissent en général assez exacts. — Leurs ongles s’allongent. Le fait est exact. — Crèvent les yeux. La cruauté des Anciens devançait ainsi la nôtre.
  255. Généralement, les mâles vivent plus de temps. Cette généralité n’est peut-être pas très-exacte. — Ne vivent qu’un an. Ce fait paraît inexact ; et les moineaux vivent bien davantage ; mais, du moins, l’auteur essaye de donner des preuves à l’appui de son assertion. Voir Athénée, liv. IX, p. 391. — Les femelles des moineaux vivent plus… Je ne crois pas que la science moderne ait fait des observations spéciales. — Les tourterelles….. les pinsons. Je ne sais si ces faits ont été vérifiés ; mais il est possible que, sous le climat de la Grèce, les choses se passent autrement que dans le nôtre ; et les espèces peuvent aussi être différentes.
  256. Les oiseaux pesants. C’est la traduction littérale du texte ; on pourrait traduire encore : « Les oiseaux qui volent mal ». Voir Athénée, liv. IX, p. 392, où il analyse ce passage de l’Histoire des Animaux. — Les cailles, les perdrix. Ces espèces en effet pondent comme il est dit ici. — Sur un endroit uni. Ou plutôt peut-être : « Dans un guéret ». — Ils les chassent. Instinctivement, les petits se sauvent d’eux-mêmes, sans que les parents aient besoin de les chasser ; mais ceci semble contredire le paragraphe suivant.
  257. Comme le font les poules. Et, par conséquent, elles ne les chassent pas, comme le dit le paragraphe précédent. — Pas toujours à la même place. Ceci signifie qu’elles dispersent leurs œufs en divers endroits. — Quand le chasseur tombe sur le nid. Cette ruse de la perdrix est bien connue, et on l’a citée bien des fois.
  258. Ainsi qu’on l’a dit. Ou peut-être : « Ainsi qu’on vient de le dire », par référence au paragraphe précédent. — En chantant. Guillaume de Morbéka semble avoir eu un autre texte ; car il traduit : « Propter partum » ; ce qui est plus d’accord avec ce qui suit. — Pourvu que le mâle soit hors de portée. Il y a des manuscrits et des éditions qui donnent une affirmation : « Même quand le mâle est à portée ». Voir Athénée, liv. IX, p. 389. — Afin de les sauver. De la destruction qu’en fait le mâle. — Comme pour ses petits. Voir le paragraphe précédent.
  259. Des veufs. C’était probablement dans la langue grecque une expression aussi spéciale que dans la nôtre. — Et ne se laisse cocher que par lui. Ceci ne se comprend pas ; mais le texte ne peut avoir que ce sens ; et les manuscrits n’offrent pas de variantes. — Si un mâle est vaincu… Même remarque. L’auteur aurait dû expliquer davantage ce qu’il veut nous apprendre des rapports des mâles entre eux. — Mais seulement à certaines époques. Ce détail n’est pas complet.
  260. Il en est de même des cailles. Il ne paraît pas que ceci soit fort exact. Les mâles se battent violemment ; mais on ne sait pas quel traitement subit le vaincu. — Dans les temples où l’on nourrit des coqs. C’étaient les oiseaux sacrés, dont les devins se servaient pour leurs prédictions. — Cocher le nouveau venu. Il est probable que le fait est certain, parce qu’on avait de nombreuses occasions de l’observer. — Les perdrix domestiques. Il semble donc que les Grecs, dès le temps d’Aristote, élevaient des perdrix, comme aujourd’hui on élève des faisans.
  261. Le chef des perdrix sauvages…. Tout ce passage a paru offrir quelque obscurité à plusieurs commentateurs ; et en effet tout n’y est pas clair, surtout vers la fln du paragraphe. — Ils l’éloignent de la femelle….. au lieu de venir à eux. Ceci ne se comprend pas bien, puisqu’il semble que le mâle a été envoyé, tout exprès, auprès de l’appeau, par ses compagnons. Mais peut-être le mâle ainsi envoyé devait-il seulement aller s’assurer de ce qu’était l’appeau. On peut voir dans Pline, liv. X, ch. LI, p. 407, édit. et trad Littré, une reproduction de tout ce passage d’Aristote, que Trogue Pompée paraît avoir aussi connu et reproduit.
  262. Au dire des gens qui en ont été les témoins. L’auteur n’a pas fait cette observation lui-même. — Si les autres mâles l’entendaient. Ceci encore est obscur, et l’on ne comprend pas bien ce dont il s’agit. — Mais ce n’est pas seulement…. plusieurs autres espèces de sons. Ceci est peut-être une addition étrangère. La remarque est vraie ; mais elle ne tient, ni à ce qui précède, ni à ce qui suit.
  263. Souvent, une femelle……. Il y a peu d’animaux chez qui le besoin de l’accouplement soit plus vif que chez les perdrix ; tous les naturalistes sont d’accord sur ce point. On peut voir ce qu’en dit Pline, loc. cit. — Et se posent sur leur tête. Pline dit que c’est sur la tête de l’oiseleur que les perdrix vont se poser. Je ne sais si le fait est exact ; mais du moins il attesterait l’aveugle ardeur qui entraîne ces oiseaux. Le texte grec peut avoir aussi ce sens.
  264. Leur détestable caractère. Voir plus haut, ch. IX, § 3. L’expression grecque n’est pas moins forte que celle de ma traduction. — Ainsi qu’on l’a dit. Même chapitre, § 1. — Avec la caille. Cette répétition est inutile ; et c’est peut-être une addition étrangère.
  265. Frappeur de chênes. C’est la traduction littérale du mot grec, qui est composé de deux mots réunis. D’ailleurs, tous les détails donnés sur le pic sont très-exacte. Voir la description des Pics par Cuvier, Règne animal, tome I, p. 448. Il distingue cinq ou six espèces de pics, de différentes grosseurs. Voir aussi la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 986. — Avec sa langue, qui est large et longue. La langue des picides est organisée d’une façon toute spéciale : « Plate, longue et cornée, elle porte à l’extrémité de courts crochets dirigés en arrière, et elle peut se projeter fort loin par suite d’un mécanisme particulier de l’appareil hyoïdien » ; Cuvier, loc. cit. — Il a des ongles…. Tous ces détails sont exacte.
  266. Il y a une espèce de pic. Les descriptions qui suivent ne suffisent pas pour faire reconnaître nettement les diverses espèces de pics. Il est possible, d’ailleurs, que ces espèces ne soient pas les mêmes dans nos climats qu’en Grèce. — Que la femelle du coq. C’est la poule ; mais j’ai tenu à conserver autant que possible la tournure du texte.
  267. Comme on vient de le dire. Dans le paragraphe précédent, — Qu’il finit par les faire tomber. Cela est d’autant plus possible que c’est à des arbres à moitié pourris déjà que le pic s’attaque. — Un pic apprivoisé. Les pics passent pour des oiseaux tout à fait insociables ; mais il n’est pas impossible qu’à force de soins on en ait apprivoisé quelques-uns. D’ailleurs, le fait cité par Aristote a bien pu être réel. Il y a des pics sauvages qui, dit-on, en font autant.
  268. Les grues montrent aussi de l’intelligence. Tous les détails donnés ici sur les grues ont été confirmés par une foule d’observateurs modernes. — À la queue de la volée… en tête. Le texte n’est pas aussi précis. — La tête cachée sous l’aile… sur une seule patte. Tout cela est exact. — À l’air. Et non sous son aile, comme le reste de la troupe. Cicéron dans le Traité de la nature des Dieux, liv. II, ch. XLIX, cite sur le vol des grues un détail fort curieux, qu’il emprunte à Aristote en le nommant ; ce détail devrait se retrouver ici, et il y manque. Peut-être Cicéron avait-il un autre texte sous les yeux.
  269. Les pélicans…. sur le bord des rivières. Ceci n’est pas absolument exact ; et les pélicans se tiennent plutôt sur le bord des marais, où ils nichent, et à l’embouchure des fleuves, que sur le bord de la mer.
  270. Des oiseaux sauvages. Il semblerait d’après cette expression qu’il n’aurait été question jusqu’ici que des oiseaux domestiques, auxquels on opposerait les oiseaux sauvages ; il n’en est rien, puisque, dans le chapitre précédent, l’auteur a traité des grues et des pélicans. D’ailleurs, les distinctions faites ici sont très-justes ; et l’industrie de ces oiseaux varie beaucoup selon les espèces.
  271. Charadrios. Le mot grec, reproduit dans ma traduction, a été conservé par la science moderne pour désigner le pluvier, oiseau voyageur, qui niche dans des trous et se nourrit d’insectes. Voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 971. — Il se cache de jour. C’est en effet pendant la nuit que sort le charadrios, ou pluvier, pour atteindre sa proie. — Il ne mange pas le cœur… Je ne crois pas que ce fait ait été constaté par des recherches récentes ; il semble bien que c’est là un conte populaire, malgré les observations diverses que cite l’auteur.
  272. Comme en hiver. Le texte est moins précis ; mais le sens ne peut être douteux ; j’ai ajouté ces mots, qui sont implicitement compris dans l’expression qu’emploie l’auteur ; c’est l’hiver qui peut être opposé à l’été. — On prétend… L’auteur ne paraît pas croire lui-même beaucoup à cette assertion. Il est vrai que le vautour niche dans les lieux les plus inaccessibles. — Hérodore, le père de Bryson. Voir plus haut, liv. VI, ch. ν, § 1. L’auteur dit déjà dans ce passage à peu près ce qu’il répète dans celui-ci. La seule différence, c’est qu’au liv. VI, il affirme qu’on a vu parfois des nids de vautour. — Il ne fait qu’un œuf, ou deux tout au plus. Dans le ch. V, du liv. VI, l’auteur dit expressément Deux œufs.
  273. Le Brenthos. Voir plus haut ch. II, § 7. Le Brenthos doit être une espèce de mouette, qui habite les rochers des bords de la mer ou des îles. — Le roitelet se cache… Ce détail paraît exact. — Le Sénateur. Voir plus haut, ch. II, § 6. — Que l’aigle lui fait la guerre. Sans doute, parce que l’aigle, dit-on, serait jaloux du titre que porte ce roitelet.
  274. Le Hoche-queue. Selon toute apparence, le Cincle est le Hoche-queue, comme semble le prouver la fin du paragraphe. La zoologie moderne a conservé le nom grec de Cinclus pour un oiseau de l’espèce des grives, Turdides ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 997. Voir aussi Cuvier, Règne animal, tome I, p. 375. Le Cincle ressemble au merle. — Maître des parties postérieures de son corps. L’expression est singulière ; mais elle est exacte.
  275. Palmipèdes. C’est la traduction littérale du mot grec ; et c’est aussi le mot qu’a adopté la science moderne. Aristote avait très-bien vu l’organisation toute spéciale qui distingue ces oiseaux de tous les autres. — La nature elle-même. C’est une pensée qu’Arietote a répétée dans tous ses ouvrages ; et personne plus que lui n’admire l’intelligence répandue dans la nature entière. — Fissipèdes. Même remarque que sur le nom de Palmipèdes. — L’anthos. Voir plus haut, ch. 11, § 11. C’est sans doute sa belle couleur qui lui a fait donner son nom, Anthoe signifiant Fleur. Il paraît aussi que le plumage de cet oiseau est encore plus brillant sous le soleil de la Grèce que dans nos climats.
  276. Le catarrhacte. J’ai conservé le mot grec, parce que l’identification n’est pas sûre. On croit qu’il s’agit d’une espèce de foulque, ou poule d’eau ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 977, Fulica atra ; voir aussi le Catalogue de MM. Aubert et Wimmer, tome I, p. 94, § 42. Cet oiseau habite les étangs et les grands lacs, plutôt que la mer. Un plèthre. J’ai dû reproduire le mot grec Plèthre, parce qu’on n’est pas bien fixé sur cette longueur. On croit que c’est 30 mètres environ ; c’est déjà une assez grande distance pour un homme nageant sous l’eau.
  277. Les cygnes. La description est assez exacte, sauf les erreurs populaires, que l’auteur aurait pu laisser de côté. — Quand l’aigle est le premier… Voilà encore une de ces fables que les naturalistes ne devraient pas accueillir. — Quand leur mort approche. Il n’y a guère de récit plus répandu que celui-là dans les auteurs de l’Antiquité ; on ne saurait dire sur quel fondement sérieux il s’appuie, si ce n’est qu’il y a une espèce de cygne qui a un chant un peu mieux articulé que les autres espèces, Cygnus musicus ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 967. — Des navigateurs. C’était sans doute un témoignage assez important ; mais les cygnes morts sous les yeux des navigateurs ne chantaient pas leurs funérailles, comme l’ont dit les poètes. Cette fable sur le chant des cygnes est déjà dans le Phédon de Platon, page 248, trad. V. Cousin.
  278. La Cymindis. On ne sait quel est cet oiseau, malgré les indications données ici. On ne le connaît pas davantage sous son nom vulgaire de Chalcis. Le seul point qui soit certain, c’est qu’on le trouve en Ionie ; et c’est là sans doute qu’Homère l’avait vu. Dans l’Iliade. Chant XIV, v. 291, édit. Firmin-Didot.
  279. La Hybris… le Ptynx. On ignore ce que sont ces deux oiseaux. — Comme chassent également les aigles. Le fait ne paraît pas exact ; et il est probable qu’il y a ici quelque erreur de copiste. On a proposé une variante ingénieuse, qui, en ne changeant qu’une ou deux lettres, permettrait de lire les Ducs, au lieu des Aigles. Cette leçon serait fort acceptable. — Elle lutte aussi contre l’aigle. On en peut conclure que la hybris doit être un oiseau assez fort ; mais cette indication nouvelle reste toujours très-vague.
  280. Les grues aussi. Le fait paraît exact. Gaza semble avoir eu un texte un peu différent du nôtre, puisqu’il dit expressément que les deux oiseaux tombent à terre. — Deux œufs. C’est en effet le nombre d’œufs que la grue pond habituellement.
  281. La kitta. J’ai conservé le mot grec, parce que l’identification est trop incertaine ; Kitta ou Kissa est le plus souvent le nom de la pie ; on croit cependant qu’ici il s’agit plutôt de l’espèce de corbeau appelée Corvus glandarius. — Elle en fait provision. Beaucoup d’oiseaux ont la même prévoyance.
  282. On répète communément. L’auteur n’a pas l’air d’ajouter beaucoup de foi à ce récit populaire. — Les méropes. J’ai conservé le mot grec, comme le fait aussi la science moderne ; les Méropides, ou Guêpiers, forment une famille ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus p. 990. — Quand ils sont vieux. Je ne sais si le fait est bien exact ; mais il n’est pas impossible. — La couleur des ailes. Le plumage des méropes est en effet bariolé ; et ces oiseaux volent à la manière des hirondelles, saisissant leur proie dans l’air. Ils nichent en effet dans les creux du sol ; et la profondeur que le texte indique ne paraît pas exagérée, puisque parfois le trou a jusqu’à deux mètres.
  283. Le verdier. La zoologie moderne a conservé à cet oiseau son nom grec en l’appelant Loxia Chloris ; voir Cuvier, Règne animal, tome I, p. 413, édit. de 1829. — Le dessous de son corps. Ce serait plutôt le dessus qu’il faudrait dire. — De la consoude. En grec Synîphytimi ; c’est l’identification donnée par Littré au texte de Pline, liv. XXVI ; ch. XLIX, p. 209. — Le merle et la pie…. la mésange. Nous devons faire remarquer le sentiment d’admiration que l’auteur semble éprouver devant cette industrie de quelques animaux. D’ailleurs, les détails qu’il donne sur la construction des nids sont très-exacts.
  284. Cinnamome. On peut voir dans Hérodote, liv. III, ch. III, p. 168, édit. Firmin-Didot, la fable qui avait cours, dès son temps, sur la moisson du Cinnamome ; cette fable a eu une grande vogue dans l’Antiquité ; et ce qu’en dit ici Aristote prouve qu’on y croyait toujours. On ne sait pas au juste ce que les Anciens prétendaient désigner par le Cinnamome, ou Cinname. Était-ce la myrrhe, ou la cannelle ? — Font tomber ce nid à coup de flèches. La version d’Hérodote est un peu différente.
  285. L’halcyon. Voir plus haut, liv. V, ch. VIII, § 4, ce qui a été déjà dit de l’halcyon ; ce qui y est ajouté dans le présent chapitre est inexact à certains égards ; et quelques commentateurs n’ont pas voulu y reconnaître le style d’Aristote, soit à cause de quelques expressions peu régulières, soit à cause de quelques erreurs. Du reste, l’halcyon, qui a donné son nom à toute une famille d’oiseaux, est une espèce de Martin-pécheur, et il se rapproche des méropes. — Sa couleur… La description n’est peut-être pas très-exacte ; mais ces oiseaux ont en effet des couleurs très brillantes ; voir Buffon, tome XXV, p. 129, édit. de 1830.
  286. Boules marines et écume de mer. Le sens des mots grecs n’est pas très-bien connu ; et la traduction que j’en donne n’est peut-être pas très-certaine. Les explications qui suivent ne fournissent pas tous les éclaircissements désirables, bien que l’auteur s’efforce évidemment d’être aussi complet qu’il le peut. Voir le chapitre de Buffon sur le Martin-pécheur, qu’il confond absolument avec l’Halcyon, t. XXV, p. 125, édit. de 1830. Buffon traduit en partie la description d’Aristote.
  287. Ces nids… Buffon, loc. cit., p. 131, conteste quelques-uns des détails donnés ici sur le nid de l’Halcyon ; mais la minutie même de ces détails atteste que les Anciens avaient observé les choses de très-près. — Si la mer renverse le nid. Il semble d’après ceci que l’halcyon doit vivre aussi sur les bords de la mer, comme il vit sur le bord des fleuves et des rivières. Buffon est également de cet avis. — À ceux de l’éponge. Il ne semble pas que cette ressemblance soit aussi frappante.
  288. Avec les arêtes de l’aiguille. Il est certain que l’halcyon compose en partie son nid avec les arêtes des poissons dont il fait sa nourriture, comme le dit ici Aristote ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 990 ; voir aussi Buffon, loc. cit., p. 131. — Il commence à quatre mois. Buffon, p. 132, cite cette assertion, sans la réfuter ; il est donc probable qu’il l’admet.
  289. La huppe. Le mot grec est Epops, que la science moderne a conservé plus particulièrement pour une espèce de huppe, Upu-pa epope ; voir Cuvier, Règne animal, tome I, p. 439, et la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 991. — Avec de la fiente humaine. Ceci est inexact ; et c’est la fiente des petits qui remplit le nid de ces oiseaux, moins soigneux que bien d’autres,
  290. La mésange. Le mot grec est Aegithalus, et il a été conservé par la science moderne pour une espèce de mésange ; j’ai adopté ce dernier nom, qui comprend toutes les espèces qu’on peut reconnaître dans cette famille, celle des Parides ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 996. — Appelé la Tête-noire. C’est la traduction littérale du nom grec ; quelques commentateurs pensent que c’est l’espèce de mésange appelée Parue palustris. — Dix-sept…. vingt. Il paraît que ce nombre n’est pas exagéré, du moins dans nos climats. — À ce qu’on dit. L’auteur fait donc ses réserves. — De larves. Ou « de vers ».
  291. Une particularité… pas de pointe à la langue. Il paraît que cette observation s’applique bien plutôt à la huppe ; et quelques commentateurs ont conjecturé qu’elle avait été déplacée de quelques lignes, dans le texte et qu’elle devrait être reportée plus haut. Cette organisation spéciale n’est pas mentionnée pour la mésange, ni par Cuvier, Règne animal, t. 1, p. 401, ni par M. Claus, Zoologie descriptive, p. 996.
  292. L’Ægithe. Voir plus haut, ch. II, § 8. On ignore quel oiseau est l’Aegithe. — Le chlorion. C’est peut-être le verdier, ou le loriot, Oriolus galbula ; mais Aristote lui donnant une vilaine couleur, ce serait plutôt le second ; voir plus loin, ch. XIX, § 1.
  293. L’éléa. J’ai reproduit le mot grec, parce qu’on ne sait pas quel est cet oiseau ; j’en ai mis la traduction entre parenthèses. — Perché sur les roseaux. C’est ce qui lui fait donner en allemand le nom de Rohrsauger.
  294. Le gnaphalos. J’ai dû encore reproduire le nom grec, l’identification étant tout à fait incertaine. J’ai mis entra parenthèses « le Foulon », parce que le mot grec a dans l’usage ordinaire le sens de Laine à matelas.
  295. La Crex. C’est un échassier, mais d’une espèce mal déterminée ; on croit que c’est l’himantopus rufipes de la zoologie moderne, voir plus haut, ch. II, § 40 ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 972. — La sitte. Voir plus haut, ch. II, § 40. On suppose que la sitte est une sorte de mésange. — La pharmacienne… C’est la traduction littérale du mot grec ; mais on peut supposer que tout ce paragraphe n’est qu’une addition étrangère. — En frappant les arbres. Ce serait donc une espèce de pic.
  296. L’aegolios. J’ai encore reproduit le mot grec, mettant entre parenthèses : La chouette, qui se rapproche de lœgolios, si elle n’est l’aegolios lui-même. — Certhius. Ce doit être une espèce de grimpereau, et d’oiseau chanteur. La zoologie moderne a conservé le nom grec, presque en entier, dans l’oiseau nommé Certhia familiaris, ou caulodromus ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 992. — Les épiniers. C’est la traduction littérale ; mais on peut croire qu’il s’agit de la linotte, ou dupineon, Fringilla cannabina, ou linota ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 998.
  297. Ainsi qu’on l’a déjà dit. Voir plus haut, ch. II, § 12, où l’on distingue aussi trois espèces de hérons. La science moderne compte beaucoup plus de trois espèces. Voir Cuvier, Règne animal, tome I, p. 510. La première espèce d’Aristote, le héron noir, correspond vraisemblablement au héron commun, Ardea cinerea. La seconde espèce, la blanche, est la Petite aigrette, ou la Grande aigrette, de la zoologie moderne. — Les plaines et les prairies. Ces mots ont bien pu être ajoutés par une main étrangère. — Le héron étoilé. L’ardea stellaris, ou le butor d’Europe ; voir Cuvier, Règne animal, tome I, p. 512.
  298. La phoyx. Cet oiseau doit être, selon toute apparence, assez ressemblant au héron, puisqu’il est nommé après lui ; mais on ne sait pas ce qu’il est. D’ailleurs, le nom varie dans les manuscrits : Thoyx, ohiïx, poyx. — La harpe, Voir plus haut, ch. II, § 15.
  299. Il y a deux espèces de merles. La zoologie moderne en compte un peu davantage. Le merle commun est en effet noir, comme le dit Aristote. — À demi blanc. Je crois que le mot grec a ce sens plutôt que celui de Très-blanc, qui lui est le plus ordinairement donné. Cette seconde espèce de merle est le merle à plastron blanc, Turdus torquatus, de Cuvier, Règne animal, tome I, p. 368. — À Cyllène en Arcadie. Pline, liv. X, ch. XLV, p. 405, édit. et trad. Littré, répète la même chose ; et le merle blanc ne passait pas en Grèce pour aussi rare que nous le croyons. Cyllène était la plus haute montagne du Péloponnèse, entre l’Arcadie et l’Achale. — Le laïus. On ne sait pas au juste quel est cet oiseau ; mais il est bien probable qu’il est de l’espèce des merles. — Il n’a pas le bec rouge, comme le merle. Le bec du merle est jaune, et noir pas rouge.
  300. La grive est de trois espèces. La science moderne en distingue davantage. La grive est une sorte de merle à plumage marqué de petites taches noires ou brunes ; voir Cuvier, Règne animal, t. I, p. 369. — Celle qui se nourrit de gui. C’est le Turdus viscivorus, de Cuvier, ou la Drenne. — A un cri perçant. C’est sans doute l’espèce que la science moderne appelle Turdus musicus. — llias. Ou Illas. Guillaume de Morbéka dit Ylias.
  301. L’oiseau bleu. Quelques commentateurs veulent sous-entendre ici l’idée de Merle ; et il s’agirait alors non pas d’un oiseau de couleur bleue en général, mais d’un merle de cette couleur. Quoique cette conjecture soit très-probable, je n’ai pas cru devoir aller plus loin que le texte lui-même : mais il est certain qu’il y a deux espèces de merle : l’une qu’on appelle merle de roche, et l’autre merle bleu. — Nisyros. Petite île de l’Archipel, non loin de Rhodes, en face des côtes de la Carie. — Les pattes grandes. Ou « Noires », comme le veulent quelques éditeurs. Cette variante s’obtient par le changement d’une ou deux lettres seulement. — De la Pipô. Ou « Pic », Voir plus haut, liv. VIII, ch. V, § 7.
  302. Le chlorion. Voir plus haut, ch. XVI, § 4. Le loriot est jaune, comme il est dit ici du Chlorion ; et l’identification ne paraît guère douteuse, quoiqu’on ait pris parfois le chlorion pour le verdier ; voir Pline, liv. X, ch. XLV, p. 405, édit. et trad. Liltré. — Au lever de l’Arcture. C’est-à-dire, vers la fin du mois d’août.
  303. Tête-molle, C’est la traduction littérale du mot grec ; mais on ne sait pas quel est cet oiseau, malgré la description assez longue qu’en fait Aristote. Cet oiseau n’est, du reste, nommé nulle part ailleurs ; et Pline n’en fait pas mention. Tout ce passage doit paraître suspect ; et l’on peut signaler dans le texte des expressions qui ne sont guère dignes du style habituel d’Aristote.
  304. Le Pardalos. J’ai dû, comme la plupart des commentateurs, reproduire le mot grec, parce qu’on ne sait pas précisément quel est cet oiseau ; les identifications qui ont été proposées ne sont pas acceptables.
  305. Le Collyrion. On ne sait pas davantage quel peut-être cet oiseau. — Celle des précédents. Il semble que les oiseaux qui viennent d’être nommés ne sont pas tous de même grosseur.
  306. Le Coracias. L’étymologie de ce mot indique que ce geai se rapproche du corbeau ; et en effet, la science moderne classe les geais dans la famille des Corvidés, ainsi que les loriots ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 994. — Le Loup. J’ai pris la leçon ordinaire ; mais quelques manuscrits en donnent d’autres : « le Lycien », « le Blanc » ; il suffit de l’addition, ou de la suppression, d’une seule lettre, pour expliquer ce changement, qui est d’ailleurs d’assez peu d’importance. — Celui-là est palmipède. Cette espèce de geai paraît tout à fait inconnue dans nos climats ; elle l’était peut-être aussi en Grèce.
  307. De deux espèces. La science moderne distingue plus de deux espèces d’alouettes. — Et a une crête. C’est l’alouette huppée, Alauda cristata. — C’est celle qu’on mange. C’est notre alouette des champs, Alauda arvensis. Toutes les espèces d’alouettes nichent à terre ; et c’est peut-être là ce qu’entend précisément le texte, quand il dit « qu’elle marche à terre » ; voir Cuvier, Règne animal, tome I, p. 399. — L’ascalopas. On n’est pas d’accord sur cette orthographe ; mais l’identification paraît certaine, et c’est de la bécasse qu’il s’agit. La zoologie moderne a conservé le nom de scolopax pour la famille des bécasses, bécasseaux, bécassines, etc ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 973. — L’attagen. On ne sait pas au juste ce qu’est l’attagen. On a cru que c’est une espèce de perdrix ou de francolin. Cuvier, Règne animal, t I, p. 483, croit que l’attagen est une espèce de Ganga, ou Gelinotte des Pyrénées. Ces oiseaux se rapprochent de la perdrix. Voir plus loin, ch. XXXVI, § 8, où l’attagen est encore nommé avec la perdrix. L’étourneau est moucheté. En effet, l’étourneau est tacheté de blanc, ou de fauve, sur tout le corps, avec des reflets, tantôt violets, tantôt verts ; voir Cuvier, Règne animal, tome I, p. 419.
  308. Les ibis d’Égypte….. blanche…. noire. La zoologie moderne n’admet pas des divisions aussi tranchées, et aussi peu nombreuses. — Si ce n’est à Péluse…. Pline, liv. X, ch. XLV, p. 404, édit. et trad. Littré, répète la même chose ; mais je ne sais pas si le fait est avéré. Il semble que ce qui est dit ici des ibis est tiré d’Hérodote, liv. II, ch. LXXVI, p. 96, édit. Firmin-Didot.
  309. Les ducs. Cette identification n’est pas certaine ; mais il s’agit évidemment d’un oiseau de nuit, dans le genre du hibou ou de la chouette. La science moderne a conservé le mot grec pour désigner l’Ëphialtes-scops. Voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 1000. — Ducs-perpétuels. C’est la traduction littérale du composé grec. Mais il semble, d’après ce qui est dit ici, que ce soient des oiseaux de passage ; et en effet, il y en a beaucoup dans la famille des Rapaces. — Avec l’arrivée du zéphyr. Le zéphyr est le vent d’ouest, qui peut s’élever en tout temps.
  310. Le coucou… De cette étude d’Aristote, il faut rapprocher celle de Buffon, qui est beaucoup plus longue et beaucoup plus complète, tome XXIV, pp. 185 et suiv., édit. de 1830. Les détails que donne Aristote sont en général exacts, et l’on voit que la singularité des mœurs de cet oiseau avait déjà provoqué l’attention des Anciens. — Ainsi qu’on l’a dit ailleurs. Voir plus haut, liv. VI, ch. VII, § 1. Il est possible aussi qu’il s’agisse d’un autre ouvrage encore. — Chloris. Ce nom a été gardé dans la science moderne pour la Fringilla chloris, espèce de pinson ou de linotte. — il ne fait qu’un œuf. Plus haut, liv. VI, ch. VII, § 1, il a été dit que le coucou fait aussi jusqu’à deux œufs ; voir encore le Traité de la Génération des animaux, liv. III, § 9, p. 216, édit. et trad. de MM. Aubert et Wimmer.
  311. On ajoute même. L’imagination populaire s’était donné carrière à propos du coucou, précisément parce que les habitudes de cet oiseau étaient fort étranges. — Lui paraît si beau… Au contraire, d’après Buffon, le petit du coucou est extrêmement laid. — Des gens qui les ont vus. Buffon a fait de même de nombreuses expériences pour s’assurer de la possibilité de tout ce qu’on disait du coucou ; voir Buffon, loc. cit., pp. 200 et suiv.
  312. La manière dont périssent les petits. Ces questions n’ont plus le même intérêt ; mais elles prouvent toujours la curiosité très-éveillée des observateurs.
  313. Une sorte d’intelligence. Voir plus haut, ch. VIII, § 1. — Sa propre lâcheté. Dans le Traité de la Génération des animaux, liv. III, § 8, p. 216, édit. et trad. de MM. Aubert et Wimmer. Aristote explique la cause de cette lâcheté du coucou, par sa constitution physique.
  314. Les apodes. Le mot grec signifie proprement : Sans pieds ; l’expression est trop forte et signifie seulement que les pattes de ces oiseaux sont fort courtes. — Des cypsèles. La zoologie moderne a conservé ce nom, en faisant des martinets une famille sous le nom de cypsélides ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 993. — Ressemblent beaucoup à l’hirondelle. On ne peut méconnaître ici le martinet, qui se rapproche en effet beaucoup de l’hirondelle. — La patte couverte de plumes. Les tarses du martinet sont courts et emplumés. — Ils nichent… Les nids des martinets ne diffèrent guère de ceux des hirondelles. — Dans les creux. Tous ces détails sont fort exacts.
  315. Tette-chèvre. C’est la traduction littérale du composé grec. La zoologie moderne a conservé cette composition de mots, en la transportant en latin et en l’appliquant à une espèce d’engoulevent, Caprimulgus Europeus ; voir Cuvier, Règne animal, tome I, p. 398 ; voir aussi la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 993. — Un peu plus gros qu’un merle. La grosseur des caprimulgides varie, de celle d’une alouette jusqu’à celle du corbeau. — Deux ou trois œufs. Qu’ils déposent simplement sur le sol nu. — Il vole à côté des chèvres. Pline, liv. X, ch. LVI, p. 410, édit. et trad. Littré, répète cette fable et l’enjolive encore ; on ne sait d’où cette fable peut venir, si ce n’est que parfois l’engoulevent se réfugie dans les étables. — La chèvre devient aveugle. Élien, dans son Histoire des animaux, liv. III, ch. XXXIX, p. 50, édit. Firmin-Didot, applique à la mamelle ce qui est dit ici de la chèvre elle-même ; l’oiseau, en tétant la chèvre, détruirait les fonctions de la mamelle, « qui serait éteinte », c’est-à-dire qui ne pourrait plus donner issue au lait. Ëiien se sert d’une expression pareille à celle qui est ici dans notre texte. — Mais la nuit, il y voit bien. Ces détails ne sont peut-être pas bien présentés ; mais ce qui est vrai, c’est que l’engoulevent se nourrit surtout de papillons de nuit, qu’il attrape au vol, en tenant le bec ouvert.
  316. Les corbeaux… Il ne paraît pas que ces détails soient fort exacts ; et la fable qui termine ce paragraphe doit les rendre encore plus suspects. — Les hôtes de Médias… On ne sait pas précisément ce dont il s’agit ici. Xénophon, Histoire grecque, liv. III, ch. I, § 14, p. 366, édit. Fîrmia-Didot, rapporte une longue histoire de Médias ; mais l’aventure se passe en Asie-Mineure. Pline, liv. X, ch. XV, p. 397, édit. et trad. Littré, semble supposer que cet événement du massacre des hôtes de Médias est connu de tout le monde. Diodore de Sicile, liv. XIV, ch. LXXXII, p. 604, édit. Firmin-Didot, parle de Médios, tyran de Pharsale en Thessalie, et du massacre des Lacédémoniens qui s’étaient fiés à lui. Mais tous ces renseignements ne sont pas suffisants. Le nom de Médias varie d’ailleurs chez les différents historiens. Pline vante, comme on le fait ici, l’intelligence des corbeaux qui, seuls de tous les oiseaux propres aux auspices, comprennent ce qu’ils annoncent, du moins selon les devins.
  317. Les aigles sont de plusieurs espèces. Buffon, tome XIX, p. 81, édit. de 1830, réduit le nombre des espèces d’aigles de onze à six d’abord, et ensuite de six à trois ; le grand aigle, l’aigle commun, et le petit aigle, ou aigle tacheté. Les trois autres espèces généralement admises, le pygargue, le balbuzard ou aigle de mer, et l’orfraie ou grand aigle de mer, ne sont pas, d’après Buffon, de véritables aigles. — Le pygargue. Le mot grec signifie étymologiquement : « Qui a la queue blanche » ; il a été conservé dans la science moderne ; voir Buffon, loc. cit., p. 99. — Tueur-de-faons. A ce signe, Buffon pense qu’il s’agit du grand pygargue, le petit ne pouvant âtre de force à faire sa proie des jeunes cerfs, des daims et des chevreuils. — Sur les montagnes et dans les forêts. Buffon, p. 100, conteste ce caractère du grand pygargue, qui se tient plutôt à portée des plaines, et des bois peu éloignés des habitations. Ce qui a fait peut-être qu’Aristote a placé ce pygargue en première ligne, c’est que le grand pygargue est au moins aussi gros et aussi fort que l’aigle commun.
  318. Une seconde espèce d’aigle. Buffon, p. 94, loc. cit., croit reconnaître dans cette seconde espèce d’Aristote le petit aigle, plaintif et criard. — Le tueur-de-canards. Le fait est exact ; et de là, son nom d’Anataria, dans la science moderne. — Le morphnos. Ce mot signifie Tacheté ; et ce caractère du petit aigle est très-exact ; la science moderne a laissé à cette espèce le surnom de morphna ; Buffon, p. 94. Homère, Iliade, chant XXIV, vers 316 ; Aristote reproduit le mot même de Morphnos, que le poète a employé.
  319. De couleur noire… l’aigle noir. Buffon, loc. cit., p. 92, pense qu’Aristote « dont il admire souvent l’exactitude » a confondu ici sous un seul nom l’aigle noir et l’aigle brun, qui ne diffèrent que par des couleurs plus ou moins foncées. — Le plus petit… le plus fort de tous. Ce n’est que relativement que cet aigle est le plus fort ; sa grosseur étant donnée, sa force paraît surpasser celle des autres. — Le seul aigle qui nourrisse ses petits… Ces détails sont parfaitement justes. — Au gémissement et à la plainte. Comme fait la seconde espèce, qui pousse sans cesse des cris lamentables.
  320. A des ailes tachetées de noir… Il y a, ce semble, quelque confusion dans les caractères qui sont donnés ici. On pourrait les appliquer au petit aigle ; mais Aristote dit que cette espèce est la plus grande de toutes. Buffon, loc. cit., p. 95, reconnaît aussi cette espèce d’aigle lâche et faible, dont parle le naturaliste grec ; et il pense que cet oiseau est le vautour percnoptère, tome XIX, p. 136. — Le sous-aigle. Ceci contredit ce qui a été dit plus haut, que cet aigle est le plus grand de tous ; voir aussi, plus loin, § 6.
  321. Les aigles de mer. Buffon, loc. cit., p. 105, conteste ce sur-nom, qui lui paraît peu exact ; il préférerait qu’on appelât ces oiseaux les aigles des eaux douces ; et c’est pour le distinguer de tous les autres qu’il les appelle Balbuxards. — Ils sont entraînés au fond de l’eau. Le fait paraît avoir été vérifié plusieurs fois.
  322. Aigles-francs. Il est difficile de savoir à quelle autre espèce d’aigle ceci se rapporte particulièrement, si ce n’est au grand-aigle. — Le plus grand de tous. Voir plus haut, § 4, cette assertion appliquée déjà à une autre espèce ; l’espèce dont il serait question ici serait peut-être le grand-aigle. Voir Buffon, loc. cit., p. 84. — Il se montre aussi rarement… Ceci semble une addition étrangère.
  323. Le moment… Ce détail paraît exact ; mais il n’est pas ici à sa place, entre ce qui précède et ce qui suit. — L’heure du déjeuner…. nos marchés s’emplissent. Ces indications étaient suffisantes en Grèce ; elles restent indécises pour nous. — Leur bec s’allonge. Voir Buffon, tome XIX, p. 90, édit. de 1830, qui reproduit cette observation. Il paraît d’ailleurs que l’aigle blanchit avec l’âge, et qu’il vit très-longtemps. — Qui, étant jadis homme. Ces métamorphoses sont assez rares dans la mythologie des Grecs ; elles sont bien plus fréquentes dans les légendes de l’Orient.
  324. Ils font, pour leurs petits… Tous ces détails sont exacts. — Ils le frappent à coups d’ailes. On pourrait citer de nombreux exemples de ce genre, et ici l’auteur n’exagère rien. L’aigle défend son nid avec fureur. — Dans des endroits fort élevés… des roches inaccessibles. Buffon a décrit la construction de l’aire ou nid de l’aigle. Le mot d’Aire est particulièrement applicable, parce que ce nid est tout plat ; et il a parfois cinq à six pieds de long.
  325. Il les chasse du nid. Voir Buffon, loc. cit., p. 89. L’aigle chasse ses petits, sans jamais leur permettre de revenir. — Une seule paire d’aigles. Buffon, p. 86, atteste aussi qu’il est très rare de voir deux paires d’aigles dans la même portion de montagne, non plus que deux familles de lions dans la même partie de forêt.
  326. Il la dépose… Buffon, loc. cit., p. 88, dit à peu près la même chose : « Lorsque l’aigle a saisi « sa proie, il rabat son vol pour « en éprouver le poids, et la pose « à terre avant de l’emporter. » — Il ne prend pas non plus les lièvres… Je ne sais si ce détail a été vérifié par des observations récentes ; mais il paraît très-probable.
  327. Il se pose en général sur un point élevé. Buffon, loc. cit., p. 88, dit également : « Quoiqu’il ait l’aile très-forte, comme il a peu de souplesse dans les jambes, il a quelque peine à s’élever de terre, surtout lorsqu’il est chargé. » — Dont les hommes aient fait un oiseau divin. La remarque est juste, en ce sens que l’aigle a été l’oiseau de Jupiter ; mais il semble aussi que d’autres oiseaux aient été divinisés, la chouette pour Minerve, le paon pour Junon, le cheval pour Neptune, etc. — L’aigle vit longtemps. Buffon, loc. cit., p. 90, ne paraît pas éloigné de croire que les aigles vivent plus d’un siècle, comme on le dit. — Reste très-longtemps le même. Buffon, loc. cit., p. 88, admet que le même nid sert à l’aigle durant toute sa vie, « parce que c’est réellement un ouvrage assez considérable pour n’être fait qu’une fois, et assez solide pour durer longtemps. »
  328. En Scythie. Ce pays n’était pas très-bien connu des Grecs ; et il n’y a rien d’étonnant qu’on en racontât beaucoup de choses fabuleuses, comme celles qui suivent dans ce paragraphe. — Fait deux petits. C’est la formule même du texte ; mais il semble qu’il vaudrait mieux dire : « Deux œufs ». — Comme le font les aigles. Voir au chapitre précédent, § 8. On ne sait pas d’ailleurs ce que peut être cet oiseau de Scythie ; et ce que l’auteur en dit ici ne suffit pas pour le déterminer.
  329. Ou corbeaux de nuit. C’est la traduction littérale du mot grec — Durant la nuit entière. Buffon, tome XIX, p. 259, édit. de 1830, fait la même remarque ; et il explique, par la sensibilité extrême des yeux de ces oiseaux, la nécessité où ils sont de ne chasser qu’à la lumière la plus douce ; mais cette lumière leur est indispensable ; et dans une nuit profonde, ils ne voient pas plus que les autres animaux. — Les sphondyles. Ou Spondyles. On ne sait pas au juste quel est cet insecte, qui doit être de la grosseur de ceux que l’auteur cite à côté de lui.
  330. Qu’on nomme le vautour. L’identification n’est pas certaine ; et rien dans ce qu’on connaît du vautour ne répond aux détails qu’Aristote donne ici. On pourrait croire qu’il s’agit de l’orfraie ; du moins c’est à l’orfraie que Buffon applique le mot Phéné, employé dans notre texte. On pourrait donc, au lieu du Vautour, traduire par Orfraie, quoique Buffon doute beaucoup du fait rapporté ici par Aristote, tout en rendant pleine justice à l’exactitude et à la sagacité de ses observations ; voir Buffon, tome XIX, pp. 109 et suiv. — Quand l’aigle les chasse. Voir au chapitre précédent, § 9. Le fait est d’ailleurs exact.
  331. Par une sorte de jalousie égoïste. J’ai dû prendre cette périphrase pour rendre toute la force de l’expression grecque. L’aigle chasse ses petits, parce qu’il n’y a pas assez de nourriture pour toute la famille, et qu’il veut se réserver sa proie pour lui-même. — Que l’orfraie les recueille. Ou le Vautour, selon qu’on adopte l’une ou l’autre des deux versions. — L’orfraie a une taie sur les yeux. Buffon, qui avait d’abord douté du fait, s’est fait gloire de rendre à Aristote ce témoignage qu’il a parfaitement discerné les choses, et qu’en effet a vue de l’orfraie est conformée d’une manière toute spéciale. Une sorte de petite taie est placée sur le milieu de l’ouverture de la pupille ; tome XIX, p. 110. C’est une raison de plus pour croire que l’on doit reconnais l’Orfraie, et non le Vautour, dans la Phéné.
  332. L’aigle de mer. Ou Baluzard, qui, selon Buffon, n’est pas réellement un aigle ; voir Buffon, tome XIX, p. 103. — Il les force à regarder le soleil. Buffon, loc. cit., p. 105, réfute cette erreur populaire, qu’Aristote n’aurait pas dû recueillir, et que tant d’autres auteurs n’auraient pas du répéter, d’après lui. — Ainsi qu’on l’a déjà dit. Voir plus haut, liv. VIII, ch. VI, § 14. Le fait d’ailleurs n’est pas très-exact ; et l’aigle de mer, ou Balbuzard, pèche bien plutôt qu’il ne chasse ; il vit de poissons et non d’oiseaux. Voir Buffon, loc. cit., p. 106. Il serait possible de concilier les deux assertions, en supposant que ce sont les oiseaux aquatiques que chasse l’aigle de mer. — L’aigle, Sous-entendu : « De mer » ; car c’est toujours de lui qu’il est question. — La bande le repousse. Le texte n’est pas tout à fait aussi précis.
  333. Les kepphes. On ne sait pas ce qu’est cet oiseau ; on présume que ce doit être une espèce de mouette. D’ailleurs, les détails ici donnée sur le procédé qu’on emploie pour prendre les kepphes ne sont pas assez clairs pour qu’on puisse se bien rendre compte de cette chasse.
  334. Parmi les éperviers. Il est bien probable que, sous ce titre général d’éperviers, on comprend ici plusieurs espèces d’oiseaux analogues à l’épervier, l’autour, le faucon, la buse, etc. — Tue-pigeons. C’est la traduction littérale du mot grec. Un épervier se nomme encore Épervier des pigeons ; voir Buffon, loc. cit., p. 200. — Pternis. On ne sait quelle est cette espèce. — Les spizias. Même remarque. — Les éperviers lisses. Dans le texte, il n’y a que l’adjectif ; mais il est clair qu’il se rapporte à un épervier. On peut dire aussi : « Les éperviers de marais ». — Les grenouilles. La Buse se nourrit de grenouilles, de lézards, etc.; voir Buffon, loc cit., p. 177.
  335. Dix espèces. Buffon veut réduire toutes les espèces d’éperviers à une seule, tome XIX, p. 191 ; et il blâme les nomenclateurs qui les multiplient sans nécessité. — D’assez grandes différences. Celles qui sont indiquées ici ne sont que superficielles, puisqu’elles ne sont relatives qu’aux habitudes de ces oiseaux, et non à leur organisation.
  336. On assure aussi. Le naturaliste grec ne fait que rapporter une opinion étrangère, sans se l’approprier ; mais le fait attribué au pigeon n’a rien d’impossible. C’est l’instinct qui inspire cette prudence à l’oiseau le plus faible.
  337. Cédripole. Ou Cédropole. Cette partie de la Thrace répond en partie à la Bulgarie actuelle et à la Roumélie Orientale. Pline, liv. X, ch. X, p. 395, édit. et trad. Littré, dit, en rapportant le même fait : « Au-dessus d’Amphipolis », c’est-à-dire, au nord de cette ville. Le fait est peu probable ; mais il n’est pas absolument impossible.
  338. On raconte encore. Ce sont toujours des récits populaires. — Les loups marins. C’est le bar, ou perca labrax ; voir Pline ; loc. cit., qui répète aussi ce passage d’Aristote.
  339. Voilà ce qu’on avait à dire de l’habileté des oiseaux. Voir plus haut, ch. VIII.
  340. De la grenouille-marine appelée le Pêcheur. J’ai traduit littéralement le texte ; mais le poisson dont il est question est certainement le Lophius piacatorius, de la famille des acanthoptères-pédiculés. Ce poisson cherche et saisit sa proie, comme Aristote le dit ici. Il se sert, pour l’attirer, des appendices cutanés de ses rayons, qu’il peut redresser, et des filaments situés près de sa bouche ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 857. Voir aussi Cuvier, Règne animal, tome II, p. 250, où il rappelle que les Anciens nommaient ce poisson Grenouille. C’est une baudroye, appelée vulgairement raie-pécheresse. MM. Aubert et Wimmer ont consacré à la grenouille de mer un article spécial de leur Catalogue, tome l, p. 146, § 90. — La torpille. La faculté électrique de la torpille était trop remarquable pour qu’elle échappât à l’attention du naturaliste grec ; voir plus bas, § 3.
  341. Au devant des yeux. Ces filaments sont situés près de la bouche plutôt que devant les yeux. — Dans les sables et les boues. Ce détail est exact, ainsi que le suivant.
  342. Qu’elle possède dans la bouche. Ce n’est pas dans la bouche précisément qu’est placé l’appareil électrique de la torpille ; c’est entre la tête, les branchies, et le bord interne des nageoires ventrales ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 820, et Cuvier, Règne animal, tome II, p. 396. La torpille est une espèce de raie. — C’est là un fait. On voit que les Anciens cherchaient aussi curieusement que nous à s’assurer toujours, de la vérité.
  343. La pasténague. Ou Trygon ; la science moderne a conservé le nom grec pour une espèce de raie ; les trygonides forment une famille : voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 820, et Cuvier, Règne animal, tome II, p. 399. — Ce qui démontre… La preuve ne paraît pas très-forte ; et ceci n’explique pas comment la pasténague saisit sa proie. Pline, liv. IX, ch. LXVII, p. 383, édit. et trad. E. Littré, reproduit presque tout ce passage, qu’il a évidemment sous les yeux, en écrivant. — Ce qui le démontre encore… même des hommes. Toutes ces phrases sont ici hors de place ; et elles devraient être reportées plus haut, puisqu’elles concernent la grenouille de mer et la torpille.
  344. L’âne marin. Le texte dit simplement : « L’âne ». Ce poisson est de la famille des Gadides, et, sans doute, une espèce de morue ou de merluche. — La grenouille de mer. Cette répétition est inacceptable ; aussi Schneider, en s’appuyant sur la traduction de Gaza, et sur Pline, loc. cit., propose de lire le Batos, au lieu de la grenouille de mer, dont le nom grec se rapproche beaucoup du mot Batos, et peut être aisément confondu avec lui. — Ils tendent, comme des bâtons.. Ceci semble être une répétition de ce qui vient d’être dit plus haut, § 2. Le Batos paraît être un sélacien. — Les tout petits poissons. Ces mots indispensables ne sont donnés que par un seul manuscrit du Vatican.
  345. Un anthias. On ne sait pas précisément quel est ce poisson. On conçoit, d’ailleurs, la reconnaissance des pécheurs d’éponges, qui trouvent dans la présence de l’anthias une sécurité précieuse. — Là où il y a des limaçons. Je ne sais si ce fait a été vérifié par des observations récentes.
  346. Le serpent de mer. On suppose que c’est une espèce de muraine, puisqu’il se rapproche du congre ou anguille de mer.
  347. La scolopendre. On ne sait pas quel est ce poisson ; Pline le fait analogue aux scolopendres terrestres ou mille-pieds, et il cite ce passage, en le traduisant, liv. X, ch. LXVII ; mais comme il n’ajoute rien à ce qui est dit ici, ce renseignement ne peut servir à déterminer cet animal. Le fait doit paraître d’ailleurs fort extraordinaire.
  348. Renards-marins. Il paraît que c’est une espèce de squale, peut-être un requin. Un squale de la famille des Lamnides porte le nom d’Alopécies, dans la science moderne ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 818.
  349. Les bonitons. C’est la pelamys Sarda de la zoologie moderne, et une espèce de thon. Voir plus haut, liv. I, ch. I, § 20 ; et liv. VI, ch. XVI, § 11. — Une lamie. Ce doit être un assez gros poisson, du genre des squales et des sélaciens ; voir plus haut, liv. V, ch. IV, § 3.
  350. Le glanis mâle… Voir sur le glanis, plus haut, liv. I, ch. V, § 6. Ce qui est dit ici de la sollicitude paternelle du glanis ne paraît pas avoir fait le sujet d’observations récentes. Il n’y a, d’ailleurs, rien d’impossible dans le fait même. Le glanis est un silure ; voir Cuvier, Règne animal, tome II, p. 290.
  351. Sous des racines profondes. Ce détail est obscur. — S’il est jeune et novice. Cette leçon n’est pas certaine, et elle est peu satisfaisante. Ce qui doit déterminer à traduire comme je l’ai fait, c’est ce qui suit, où il semble qu’on oppose l’habitude contractée plus tard par le glanis à sa première inexpérience.
  352. Parce que la pâture propre. La raison est très-forte ; et la découvrir aussi nettement qu’on le fait ici, est une preuve de sagacité et d’exactitude de plus, parmi toutes celles que donne l’auteur. — Du reste, presque tous….. un très-petit nombre. MM. Aubert et Wimmer regardent ce membre de phrase comme apocryphe, et ils l’ont mis entre crochète. — La phôlis. On ne sait quel est ce poisson ; et la tournure que prend le texte lui-même indique que ce poisson n’était guère plus connu en Grèce. Le fait, d’ailleurs, n’a rien d’improbable.
  353. Les apodes. Aristote entend sans doute par là une espèce de testacés, ou du moins des animaux voisins de ceux-là. Dans la science moderne, le mot d’apodes (sans pieds) désigne plusieurs sortes d’êtres fort différents : des holothuries, des rhizocéphales et des amphibies ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, pp. 268, 408 et 870. Ce n’est d’aucun de ces êtres qu’il peut être question ici. — Le peigne. Des observations récentes ont vérifié que le peigne se meut avec une très-grande rapidité relative, en ouvrant et en refermant brusquement ses valves. Il y a aussi de ces espèces de mollusques qui sont immobiles. Voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 682 ; voir aussi Cuvier, Règne animal, tome III, p. 122, qui constate que les peignes nagent avec assez de vitesse, en fermant vivement leurs valves. — En se fiant à ses propres forces. Le texte n’est pas tout à fait aussi précis. — Ne s’éloigne que d’une très-faible distance. Sous-entendu : « Du lieu où elle trouve sa pâture » — L’Euripe de Pyrrha. On n’est pas sûr du lieu qui est ainsi désigné ; voir plus haut, liv. V, ch. X, § 3. — À cause de la rigueur du froid. Ceci semblerait se rapporter au Pont-Euxin plutôt qu’aux rivages de Thessalie.
  354. Le scare. Quelques manuscrits disent le Sarge, au lieu du Scare. On ne sait pas très-précisément ce qu’est le sarge ; mais le scare paraît bien être le scarue cretensis, ou le poisson-perroquet, de la famille des Labrides ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 846 ; voir, en outre, Cuvier, Règne animal, tome II, p. 265.
  355. C’est au printemps… Il ne paraît pas que la science moderne ait vérifié ces observations, en en faisant du même genre. — Lesbos… l’Euripe. Il est évident par ce passage qu’il s’agit ici de l’Euripe, ou bras de mer, qui doit le trouver entre Lesbos et le continent. — Les sélaciens…. encore conjoints. Il n’y a pas d’observations récentes qui constatent ce qui est dit ici des sélaciens et de leur accouplement.
  356. Le plus rusé. Peut-être faudrait-il traduire simplement : « Le plus adroit ». La faculté qu’a la seiche de projeter son encre est bien connue ; et le fait était assez frappant pour ne pas échapper aux premiers observateurs ; voir aussi Cuvier, Règne animal, tome III, p. 9, article Céphalopodes. La seiche n’est pas, d’ailleurs, le seul poisson qui lance cette excrétion particulière d’un noir très-foncé. — Elle se reforme…. En effet cette matière est sécrétée par une glande ; et elle s’accumule dans une sorte de sac spécial.
  357. En vue de se cacher. Cette répétition est peu utile, et elle semble contredire en partie ce qui précède. — Ses longs appendices. La seiche a huit pieds, tous à peu près égaux, très-grands en proportion du corps. Leur longueur et leur force en font des armes redoutables, au moyen des-quelles la seiche enlace des animaux, et fait souvent périr des nageurs ; voir Cuvier, Règne animal, tome III, p. 12. — Il n’hésite pas à s’en approcher. Ou peut-être aussi : « A se mettre dessus ». — Il est fort ménager. Ceci semble contredire la phrase précédente, où l’on attribue si peu d’intelligence au polype. — Il rejette les coquilles. Comme ces animaux sont très-voraces, ils détruisent une grande quantité de poissons, et ils laissent les débris qu’ils ne peuvent manger. — Il change sa couleur. Le fait est exact, bien que la cause à laquelle l’auteur l’attribue ne le soit pas. Il est certain que la peau des Céphalopodes change de couleur par places et par taches, « avec une rapidité « bien supérieure à celle du chaméléon », dit Cuvier, loc. cit. p. 10. — Il prend celle des rochers qu’il côtoie. — Il est possible que la couleur des rochers se reflète sur la peau de l’animal, sans qu’il y soit pour rien.
  358. Que la seiche en fait autant. Malgré ce qu’en dit l’auteur, la seiche a aussi cette faculté de changer de couleur. — La raie. La raie est une espèce de sélacien, et il ne paraît pas qu’elle possède la faculté dont Aristote parle ici ; du moins, la science moderne n’en fait pas mention. Nos zoologistes ont, d’ailleurs, conservé le mot grec de Rhina, que j’aurais pu reproduire ; voir Cuvier, Règne animal, t. II, p. 396.
  359. Des polypes…. Le sujet traité dans ce paragraphe et les deux suivants ne tient pas à ce qui précède, et n’a plus de rapport à l’intelligence plus ou moins développée de certains poissons. — D’une année sur l’autre. Il paraît que ceci n’est pas exact. — À se dissoudre et à se fondre. Il n’y a qu’un seul mot dans le texte. Je n’ai rien trouvé dans la zoologie moderne qui se rapporte à ces observations, sur la composition matérielle du polype.
  360. Une preuve. Il ne semble pas que cette preuve soit absolument décisive ; et les polypes peuvent se retirer, vers cette époque, dans des lieux où l’on ne peut plus les observer. — Dit-on. Ainsi, l’auteur ne fait que répéter des détails qui lui ont été rapportés par d’autres personnes ; il n’en répond pas. — Ils se laissent dévorer par de petits poissons. On ne sait pas si ce fait est bien exact
  361. Les seiches n’atteignent pas non plus la seconde année. C’est un renseignement qui n’a pas été constaté par des observations récentes. Il est possible, du reste, que cette phrase ne soit qu’une addition au texte, qui se hâte de revenir aux polypes. — Le polype…. Voir Cuvier, Règne animal, tome III, p. 12, sur les Polypes d’Aristote. Il est certain que, sous le nom de polypes, le naturaliste grec comprend plusieurs espèces d’êtres que la science a plus tard distingués les uns des autres. — Qui aille à sec. Pline répète ceci, livre IX, ch. XLVI, p. 373, édit. et trad. Littré. — Sauf le cou. Ce détail n’a pas été vérifié.
  362. Quant aux conques… Schneider croyait qu’il y avait ici une lacune ; et MM. Aubert et Wimmer, partagent cette opinion. Il ne semble pas qu’elle soit très-justifiée ; et il est assez simple que l’auteur passe, des polypes et des mollusques, aux testacés. — Une sorte de cuirasse. Il ne semble pas que cette théorie de la formation des coquillages soit d’accord avec les théories modernes ; et les commentateurs ont été généralement embarrassés pour expliquer ce passage obscur. L’auteur du reste se défend de proposer lui-même cette opinion sur la formation des conques, et il s’en réfère à ce que d’autres « prétendent ».
  363. Le polype nautile. Il faut comparer ce qui est dit ici de ce polype avec ce qu’en dit Cuvier, Règne animal, tome III, p. 13. Les traits généraux de la description sont les mêmes dans les deux naturalistes, quoique Cuvier soit nécessairement beaucoup plus précis. — Entre ses tentacules. L’expression est trop vague, puisque cette espèce de tissu n’est pas qu’entre deux bras, mais à l’extrémité des deux bras seulement. — Aussi mince qu’une toile d’araignée. Ceci paraît exagéré. — Lui font un gouvernail. Ceci au contraire paraît fort exact. — Il plonge dans la mer. Même remarque. Tous ces détails se retrouvent dans Cuvier, loc. cit. ; Athénée, liv. VII, p. 317, cite Aristote sur le Nautile.
  364. Sur la reproduction et la croissance de ce polype. Cuver est encore dans les mêmes douas. » et la science moderne n’a pas eu l’occasion de les dissiper par des observations directes. Le corps de l’animal ne va pas jusqu’au fond de la coquille, et il n’y est pas attaché. On pourrait croire qu’il y est comme un parasite ; mais on le trouve toujours dans la même coquille, et on n’y trouve jamais d’autre animal ; il n’y est donc pas en qualité d’étranger. — Il pousse comme tant d’autres coquillages. Ceci ne serait un éclaircissement véritable que si l’on savait comment les autres coquillages se forment. Quoi qu’il en soit, la description d’Aristote n’en est pas moins très-remarquable ; elle prouve tout à la fois sa curiosité sagace et son exactitude.
  365. Les fourmis et les abeilles. Il sera parlé des fourmis, et surtout des abeilles, dans le chapitre suivant, qui sera consacré presque exclusivement à ces dernières. Il sera parlé des guêpes dans le ch. XXVIII, et des frelons dans le ch. XXIX. Le présent chapitre ne traitera que des araignées. — Entre les araignées…. les fourmis travailler. Ces idées ne se suivent pas très-régulièrement ; et il semble qu’il ne devrait être question ici que des fourmis toutes seules. — Toujours le même chemin. Le fait est exact ; et tout le monde en effet a pu l’observer, comme le dit l’auteur. — Même de nuit. Je ne sais si le fait est certain.
  366. Les phalanges. J’ai conservé le mot grec, que la science moderne a gardé aussi pour l’ordre des Phalangides, qui est très-rapproché de celui des aranéides, ou araignées vraies. Les phalangides se tiennent cachées le jour, et ne sortent que la nuit pour capturer leur nourriture ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 515. — En présentent déjà deux. Il est remarquable qu’Aristote ait si bien distinguo les espèces de Phalangides ; la première est sans doute celle des phalangides proprement dites ; et la seconde, celle des gonyleptides. — Des psylles. Je n’ai pu que reproduire le nom grec, comme l’ont fait tous les commentateurs, dans l’impossibilité de préciser davantage les choses. La science moderne a distingué aussi des araignées Saltigrades, parce qu’elles sautent. — Les pharmaciens. Le mot pourra sembler bien moderne ; mais il répond tout à fait à l’expression du texte ; et l’on voit que les pharmaciens de nos jours, qui exposent dans leurs vitrines, des animaux plus ou moins curieux, n’ont pas inventé ces exhibitions.
  367. Qu’on appelle des Loups. Il y a, dans la zoologie moderne, cette même distinction des Lycoses ; voir Cuvier, Règne animal, tome IV, pp. 224 et 239. — Elle ne file pas. Les Saltigrades ne filent pas non plus ; elles ne tissent pas précisément des toiles ; ce sont plutôt des sacs qu’elles fixent sur les pierres et sur les plantes ; voir M. Claus, loc. cit.. p. 521. C’est sans doute cette espèce qu’Aristote entend désigner. — Près des ouvertures. C’est la traduction littérale ; et le sens n’est pas douteux. Ces ouvertures ou ces bouches, comme dit le grec, sont des trous au-devant desquels l’animal tend ses rets. — L’araignée tachetée. Je ne vois rien, dans la zoologie moderne, qui réponde à cette distinction ; il y a diverses espèces d’araignées qui ont des yeux très-nombreux et assez régulièrement placés sur le dos ; comme Aristote ne parle pas de cette organisation si remarquable, il est possible qu’il ait pris d’abord ces yeux pour des taches.
  368. Et plus remarquable. Le texte se sert ici du même mot qu’il a déjà employé au § 1. Ce mot n’a pas un sens très-défini ; et il peut signifier aussi que le corps de ces araignées est poli, c’est-à-dire sans poils, ou à moins de poils que le corps de certaines autres espèces ; voir plus bas, § 6. — Elle fait son tissu. Toute cette description est d’une exactitude parfaite ; et Aristote avait dû observer les choses de très près pour constater, comme le fait la zoologie moderne, de grandes différences dans les toiles et dans les manœuvres des araignées.
  369. Elle suce l’animal. Les araignées ont des chélicères très-développés, et qui ont à leur extrémité une griffe mobile, où débouche une glande venimeuse, Ce poison cause la mort presque subite de l’animal que l’araignée saisit. Les araignées sont en général très-féroces ; et la femelle dévore souvent le mâle, même pendant l’accouplement ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, pp. 515 et 516. — Le mâle ne fait que partager sa proie. Il me semble que l’expression du texte ne peut pas avoir un autre sens ; mais, d’après quelques commentateurs du Moyen-Age, il paraîtrait que « le mâle aide la femelle à chasser la proie ». Cette nuance est d’ailleurs peu importante.
  370. Sans poils. Voir plus haut, § 4. Le mot du texte est ici le même, si ce n’est que l’adjectif n’est plus au comparatif ; mais le sens ne peut pas avoir varié pour le positif. — L’une de ces espèces… L’autre espèce. La différence qu’établit l’auteur entre ces deux espèces vient surtout de la longueur des pattes. Sur ce point, je ne trouve rien d’aussi formel dans la zoologie moderne. Seulement, les Phalangides, qui peuvent se confondre aisément avec les aranéides, ont en général des pattes plus courtes ; mais elles n’ont pas de filières. Peut-être, Aristote désigne-t-il par la première espèce les Tetrapneumones (quatre poumons) qui sont en effet plus grosses, mais qui, je crois, n’ont pas de poils. La seconde espèce serait celle des Dipneumones (deux poumons) sédentaires ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, pp. 520 et 521. D’ailleurs, les détails donnés par Aristote sont exacts et viennent d’une observation très-attentive. — Une petite ouverture. C’est là un procédé qu’emploient plusieurs espèces d’araignées.
  371. Ainsi que le prétend Démocrite. Aristote a tort contre Démocrite ; et c’est bien en effet de leur intérieur que les araignées tirent la matière de leurs fils et de leurs toiles. L’anus est entouré de quatre à six petits mamelons ou filières, par ou sort une sécrétion des organes fileurs. Ces organes sont des glandes dont les conduits débouchent au sommet de ces filières. La substance visqueuse qui en sort se durcit promptement à l’air, et constitue des fils que les araignées tissent à l’aide de leurs pattes garnies de griffes. Les fils dits de la Vierge sont l’œuvre des jeunes araignées ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 516. Voir aussi Cuvier, Règne animal, tome IV, pp. 219 et suivantes. — Beaucoup plus grands qu’elle. Ceci est très-vrai ; et il y a des araignées qui tuent de petits oiseaux ; ce sont surtout les femelles qui sont redoutables. — Elle les suce. « Ou les pique ».
  372. Ces diverses espèces d’animaux. Ceci peut s’adresser tout aussi bien aux animaux dont il est question dans les chapitres précédents qu’à ceux du présent chapitre. Les chapitres qui sui-vent traitent encore des insectes et de leurs nombreuses espèces.
  373. Congénère. Bien que ce mot ait une apparence toute moderne, il n’est que la reproduction littérale du mot grec. — Des alvéoles de cire. Le texte n’est peut-être pas aussi précis. — De forme analogue à la leur. Dans cette généralité, l’expression est juste, malgré les différences assez sensibles qui distinguent ces insectes.
  374. Jusqu’à neuf espèces. Bien que ces neuf espèces soient énumérées dans ce paragraphe, l’auteur ne les étudie pas toutes ; et il en est quelques-unes qu’il laisse absolument de côté. Les rois des abeilles et les bourdons ne font pas d’alvéoles. — L’anthrène et le tenthrédon. J’ai dû reproduire simplement les noms grecs, parce que l’identification est trop incertaine. Il paraît bien cependant que ce sont là des espèces de guêpes ; peut-être même, des frelons. Voir plus loin pour les anthrènes le chapitre XXIX, qui leur est consacré tout entier ; et pour les tenthrédons, le chapitre XXX, § 2. La zoologie moderne a conservé aussi les deux mots grecs d’anthrénus et de tenthrédo, pour des insectes arthropodes-coléoptères ; mais ces insectes ont peu de rapport avec les abeilles ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, pp. 642 et 654. — Le petit siren. On ignore quel est l’insecte qu’Aristote indique par ce nom. Il a fallu conserver le mot grec, faute d’identification. On croit que les deux Siren sont des espèces de guêpes solitaires ; quant au bombyle, c’est une espèce de Bourdon ; voir M. Claus, ibid., p. 605.
  375. Les fourmis. On peut s’étonner que l’auteur revienne ici aux fourmis, après ce qu’il en a dit plus haut, et même aux araignées. Il est assez probable que c’est pour opposer la nourriture et le travail des fourmis au travail et à la nourriture des abeilles ; mais on peut supposer qu’il y a eu ici quelque déplacement, par l’erreur d’un copiste. — Plus tard. Dans les chapitres qui suivent ; mais l’auteur négligera plusieurs genres, parmi les neuf qu’il vient d’énumérer. — Elles produisent quelque chose. Le miel et la cire.
  376. C’est le miel qui est leur nourriture. Selon Pline, liv. XI, ch. VII, p. 430, édit. et traduct. Littré, la nourriture des abeilles est, non pas le miel, mais l’Érithace, appelée aussi Sandaraque ou Cérinthe. Voir, au paragraphe suivant, ce que l’auteur dit du Cérinthe, espèce de miel inférieur. — On les voit en manger peu. Quelques commentateurs ont proposé de changer le texte et de lire : « Elles ne goûtent que très-peu au miel ». Ce changement serait sans importance ; et le texte ordinaire suffit, bien qu’il ne soit pas très-régulier. — Comme elles y portent la cire. La cire est un extrait du miel, et les abeilles ne l’apportent pas toute faite du dehors, comme elles apportent le pollen des fleurs. Le fait est que le miel est la principale nourriture des abeilles, comme le dit Aristote.
  377. Une foule de phénomènes. Les observations qu’on peut faire sur le travail des abeilles sont tellement nombreuses, qu’aujourd’hui même nous ne pouvons nous flatter d’avoir épuisé cette étude. Cet insecte est un des plus admirables de la création, et un des plus utiles à l’homme ; il n’y a pas à s’étonner que les Anciens y aient donné tant d’attention. Tout ce que dit ici Aristote paraît tout à fait digne de son génie, malgré les erreurs qu’il a pu commettra. On peut voir que Pline a consacré une de ses études les plus approfondies à l’abeille. — En y apportant les larmes…. Il semblerait résulter de ceci que l’abeille apporte la cire toute faite du dehors ; il n’en est rien. La cire est une sécrétion qui provient du miel, ou de toute autre matière sucrée qu’a digérée l’animal. Ce n’est pas plus que le miel un produit étranger ; il faut une élaboration particulière, qui se fait dans le corps de l’abeille. — De matières visqueuses. Il vaudrait mieux dire : « Sucrées ». — Elles enduisent soigneusement de cette matière… La conisis. Cette matière est ce que nous appelons aujourd’hui la propolis, espèce de résine dont les abeilles se servent, comme d’un mortier et d’un plâtre, pour enduire les parois intérieures de la ruche, et pour solidifier toutes leurs constructions. La propolis est récoltée sur les bourgeons de certains arbres, pendant le printemps et l’été. Ce qui nous porte à croire que la Conisis d’Aristote n’est que notre Propolis, c’est que Conisis veut dire étymologiquement : « Amas de poussière ». Cette expression est moins juste que celle de Propolis, qui rappelle une enceinte et une fortification de ville ; voir sur la Propolis, Pline, liv. XI, ch. VI, p. 430, édit. et trad. Littré.
  378. Elles font, en premier lieu… Ces détails sont assez exacts. Les abeilles font trois espèces de cellules : pour les ouvrières, pour les mâles, et pour les mères. Celles des mâles sont un peu plus grandes que celles des ouvrières, et beaucoup moins que celles des Reines. — Elles bâtissent en tout temps. Le texte dit précisément : « Toujours ». Je ne sais pas d’ailleurs si les différences de constructions sont réellement aussi marquées que le dit l’auteur. — Celles des Rois. Nous dirions aujourd’hui : des Reines ; et nous avons raison, puisque ces abeilles particulières sont chargées de devenir mères ; mais j’ai dû conserver la nuance de l’expression grecque. — Que les cellules des Rois. Le texte n’est pas aussi formel, et l’on pourrait croire qu’il s’agit non des cellules des Rois, mais de simples cellules d’abeilles.
  379. Elles commencent… Ces détails sont en général exacts. — Par le bas. On a comparé cette disposition des alvéoles à des stalactites, pendants du haut d’une voûte. — Jusqu’au plancher. C’est-à-dire, jusqu’au bas de la ruche, qui repose nécessairement sur une large base, et qui va en se rétrécissant en forme de cône. — Une coupe à deux becs. C’est la traduction littérale du mot grec. D’ailleurs, la description d’Aristote est fort juste. — Là où commencent les gâteaux. Ou les alvéoles. Le mot de Gâteau s’applique surtout aux alvéoles qui contiennent le couvain. — Enduits…. et faits. Il n’y a qu’un seul mot dans le texte.
  380. Est enduit de Mitys. Il est probable que la Mitys des Grecs est notre Propolis ; les caractères donnés ici à la Mitys sont à peu près les mêmes ; seulement, l’odeur de la Propolis ne paraît pas aussi forte que l’auteur le dit. — C’est un remède contre les contusions. Il paraît que la pharmacopée contemporaine fait encore usage de cette matière pour certains remèdes — L’enduit qui vient après…. La science moderne ne semble pas faire cette distinction, bien qu’elle ne soit pas sans raison. — La poix de cire. C’est la traduction littérale de l’expression grecque, qui est également composée.
  381. Que les mâles. Appelés aussi Faux-Bourdons, ou même Frelons. Dans chaque essaim, il n’y a qu’une seule Reine, beaucoup plus grosse que les abeilles ; puis quinze à vingt mille ouvrières, et un millier de mâles environ. — Bruyamment par groupes. Le sens du mot grec n’est pas bien déterminé. Les mâles ne servent qu’à la fécondation de la Reine ; ils sortent de la ruche, presque tous les jours, pour leur nourriture, pendant la belle saison ; puis, à l’approche de l’hiver, les ouvrières les tuent, afin de n’avoir pas à nourrir des hôtes devenus inutiles.
  382. Les Rois. Lisez : « Les Reines ». — Ne sortent jamais. Cette observation est exacte ; voir plus bas, § 23. — Si l’essaim vient à s’égarer. Le texte vulgaire ne donne que ce sens ; mais on peut croire que Gaza avait, en faisant sa traduction, un autre texte sous les yeux, puisqu’il comprend que c’est la Reine qui s’égare, et que c’est l’essaim qui la cherche. — On ajoute même… Je ne sais pas si la zoologie moderne a vérifié ce fait, qui, du reste, n’aurait rien d’impossible, les abeilles ayant le plus grand soin de leur Reine. — L’essaim meurt avec lui. Ceci est vrai en ce sens que les abeilles dispersées ne forment plus d’essaim.
  383. La cire. C’est le mot même du texte ; mais il est évident que ce n’est pas encore la cire proprement dite, mais les matières diverses que les abeilles recueillent sur les fleurs et sur les arbres. — En ratissant vivement… Ces détails sont très-curieux, et la zoologie moderne ne les a pas étudiés de plus près qu’Aristote. — À une fleur d’espèce différente. Ceci est très-exact ; et les abeilles ne s’adressent chaque jour qu’à une seule et même espèce. — Est suivie de trois ou quatre autres. Il est probable que ces trois ou quatre compagnes aident l’abeille à se débarrasser de son fardeau ; voir Pline, liv. XI, ch. X, p. 431, édit. et trad. Littré.
  384. Il n’est pas facile de voir… Le microscope et des observations longuement et attentivement continuées ont appris à peu près complètement ce qu’est le travail des abeilles sur les plantes ; mais au temps d’Aristote, on n’avait pas autant de moyens d’investigation. Les abeilles introduisent leur trompe jusqu’aux nectaires des fleurs pour y puiser la sécrétion sucrée ; elles transforment cette matière en miel, par une élaboration intérieure, qui est très-rapide, mais qui est indispensable. — Sur les oliviers. Ceci n’est pas très-exact ; et comme le font remarquer MM. Aubert et Wimmer, il ne peut s’agir ici des feuilles mêmes de l’olivier, mais de la fleur qui naît à l’aisselle des feuilles.
  385. Rien n’empêche… Cette observation et toutes celles qui suivent dans ce paragraphe sont exactes. Les mâles, ou faux-bourdons, ont des cellules à part en général, et ces cellules sont un peu plus grandes que celles des neutres et moins grandes que celles des Reines ; parfois le même gâteau contient des neutres et des mâles. — Le chef. C’est l’expression même du texte. Le chef ici, c’est la Reine. — À ce qu’on dit… L’auteur ne se prononce pas lui-même, et il ne fait sans doute que rapporter les dires des éleveurs d’abeilles. — Non pas qu’ils aient un dard. Les bourdons, en effet, n’ont pas de dard, comme en ont les ouvrières ; et cette organisation permet aux ouvrières de tuer les mâles, quand, à rapproche de l’hiver, elles veulent s’en débarrasser pour n’avoir plus à les nourrir. Les bourdons ne peuvent se défendre contre les aiguillons de leurs ennemies. — Comment les éleveurs les séparent. Le sens paraît bien être celui-ci ; mais l’expression grecque n’est pas très-claire.
  386. Les espèces des abeilles sont fort nombreuses. Dans nos climats, les abeilles proprement dites, sont d’une seule espèce ; mais on distingue les abeilles sociales et les abeilles solitaires, qui n’ont pas de Reine. Ces dernières abeilles, qui font aussi du miel, sont subdivisées en plusieurs espèces ; et c’est sans doute de celles-là que l’auteur veut parler. — Ainsi qu’on l’a déjà dit. Voir plus haut, liv. V, ch. XVIII, §§ 2 et suiv., et ch. XIX. — Deux espèces de chefs. Ceci ne doit pas se comprendre en ce sens que dans un même essaim ou dans une même ruche, il y aurait deux espèces de Reines ou de Rois ; mais il s’agit sans doute d’espèces diverses d’abeilles. — Double de l’abeille travailleuse. C’est peut-être dire beaucoup ; et la différence n’est pas aussi grande, quoique la Reine soit plus grosse que les neutres. Voir liv. V, ch. XVIII, § 2, et ch. XIX. — Le Voleur. C’est la traduction précise du mot grec. Voir plus haut, liv. V, ch. XIX, § 1. L’abeille que les Anciens appelaient Voleuse est peut-être la guêpe ou le frelon. — Le plus gros de tous. Le bourdon est moins gros que la Reine ; et l’on ne comprend pas bien comment l’auteur a pu se tromper sur ce point ; d’ailleurs, l’erreur a été répétée bien des fois.
  387. Il y a grande différence… Cette observation est juste, bien qu’il ne faille pas exagérer ces différences ; elles ne tiennent qu’aux localités, qui influent sur le hommes eux-mêmes autant que sur les animaux ; les citadins ne sont pas tout à fait ce que sont les campagnards. — Bien égaux. Ceci est d’une complète vérité ; et depuis quelques milliers d’années que l’on observe les abeilles, la forme des alvéoles n’a jamais changé. Les alvéoles fossiles l’attestent encore bien mieux. — Un gâteau qui aura été fait tout exprès…. On peut supposer ici quelque désordre dans le texte ; et les idées évidemment ne se suivent pas bien.
  388. Les abeilles longues…. Il y a sans doute quelque confusion dans ce passage entre les abeilles et les guêpes. Le désordre signalé dans ces ruches se produit dans celles des abeilles, quand la Reine vient à manquer.
  389. Elles les échauffent. Le texte dit précisément : « Elles les mûrissent ». — De toiles d’araignées. Ce ne sont pas des araignées qui font ces sortes de toi-les dans les ruches ; c’est une espèce de chenille appelée la Teigne de la cire, et qui détruit les gâteaux par de longs tubes de soie qu’elle se construit. — C’est comme une cicatrice. J’ai adopté la correction proposée par Schneider, et qui consiste dans le changement d’une seule lettre. — De petits vers. Ce sont sans doute les larves de la teigne de la cire, Tinea cerella ; mais je ne sais pas s’il est exact que ces larves se convertissent en papillons, qui soient en état de voler. — Les toiles d’araignées. On plutôt, les soies de la teigne de la cire.
  390. Le Voleur. Voir plus haut, § 15. — Le bourdon. Les mâles des abeilles ne font en effet, ni miel, ni cire ; mais ils ne gâtent pas le travail des autres. — Les saisissent et les tuent. Voir plus haut, § 14. Les abeilles ne tuent les mâles que pour n’avoir point à les nourrir pendant l’hiver. — Ils ne divisent l’essaim. Voir la même idée, plus haut, liv. V, ch. XIX, § 2. Mais il paraît que ce ne sont pas les abeilles elles-mêmes qui tuent leurs chefs, comme le dit l’auteur ; c’est plutôt la Reine, qui se débarrasse ainsi de ses futures rivales, lesquelles seraient les chefs de nouveaux essaims. Mais il faut toujours une Reine par essaim.
  391. Elles détruisent même celles des bourdons. Ce sont les bourdons qu’elles détruisent plutôt que leurs cellules. — Au milieu de leur travail. L’expression du texte est obscure ; et le sens peut être douteux.
  392. Les petites abeilles…. celles de la grosse espèce. Ceci ne se comprend pas bien, à moins qu’on ne suppose qu’il s’agit encore de la lutte des ouvrières contre les bourdons, lorsque le temps est venu de les mettre à mort. Ce qui pourrait le faire croire, c’est que les bourdons ne produisant rien, on peut dire « qu’ils se livrent à leur oisiveté ». — En dehors de la ruche. Ceci est exact ; et les cadavres des bourdons sont toujours rejetés au dehors ; autrement, ils infecteraient la ruche. Les abeilles de même espèce se livrent entre elles de furieux combats, dont on ne connaît pas bien les causes.
  393. Les Voleurs. Voir plus haut, § 15. Il n’est pas aisé de savoir de quelle espèce d’abeilles l’auteur entend parler. Mais il est dans le vrai en vantant la vigilance des abeilles, et leur énergie impitoyable contre les animaux de différents genres, qui viennent essayer de ravir leur miel, — Parce qu’il se remplit outre mesure. Ce détail ne paraît pas très-exact.
  394. Quant aux Rois…. Voir la même observation plus haut, § 10. — Un son monotone et très-particulier. Ceci est parfaitement exact. La veille de l’essaimage, l’abeille-reine fait entendre un bruit très-spécial, qui ne manque pas d’harmonie, et qui avertit les mâles qu’elle sortira le lendemain. La fécondation a lieu au dehors, soit par un mâle de la ruche, soit par un mâle d’une ruche étrangère. La Reine fécondée part avec une portion de l’essaim, laissant le reste dans la ruche qu’elle quitte. — Si le Roi est alors au milieu d’elles. La Reine y est certainement, et sans elle l’essaim n’émigrerait pas. Les autres détails sont en général assez exacts. — Les moins nombreuses se réunissent. Quand un essaim est trop peu nombreux, les éleveurs le réunissent à un autre, afin que le nombre total des abeilles se monte à quinze ou vingt mille.
  395. Et qu’ils se séparent. Le sens de l’expression grecque n’est pas très-déterminé ; et il serait possible de traduire encore : « Et qu’ils se constituent ».
  396. Attachées régulièrement. Ces détails sont exacts, et d’une observation facile, pour peu qu’on regarde ce qui se passe dans la ruche, et au dehors. — Est destinée à nourrir les jeunes. Ceci n’est peut-être pas aussi exact que le reste ; mais il est certain qu’elles apportent de l’eau ; voir Élien, De la Nature des animaux, liv. V, ch. XI, p. 77, 3, édit. Firmin-Didot. Ici comme ailleurs, Élien emprunte la meilleure partie de ce qu’il dit à l’ouvrage d’Aristote. — Sur de la viande. Plus haut, liv. IV, ch. VIII, § 23, il a été dit que l’abeille ne se pose jamais sur rien de fétide ; ici, on ajoute qu’elle ne se pose jamais sur de la viande. Les deux assertions n’ont rien de contradictoire, et il n’y a pas à changer le texte, comme font cru quelques commentateurs. — Rien de cuit. La nuance de l’expression grecque indique qu’il s’agit de mets préparés pour la nourriture des hommes. — Elles n’ont point de temps marqué. En effet, les abeilles ne cessent de travailler, dès que l’essaim s’est constitué. — Sans regarder à une saison plus qu’à l’autre. Il y a cependant cette différence qu’en hiver les abeilles n’ont pas de fleurs, comme elles en ont au printemps et en été.
  397. Trois jours après son éclosion. Ce détail est exact. Depuis la ponte de l’œuf par la Reine jusqu’à la formation complète de l’insecte, il s’écoule en général vingt-quatre jours, pendant lesquels il est successivement à l’état de larve, à l’état de nymphe, et enfin à l’état d’abeille. — Quand l’essaim est posé…. Qui y reviennent ensuite. Tout ceci semble interrompre la suite des pensées. — Que dans les quarante jours. Les abeilles ne travaillent pas en hiver ; elles se reposent sans produire quoi que ce soit, ni miel, ni cire ; elles se nourrissent de ce qu’elles ont emmagasiné durant la belle saison. — Quand les jeunes sont déjà assez grands. C’est-à-dire, quand les larves se sont transformées en nymphes. — Avec un enduit. Les ouvrières enferment les nymphes dans les cellules, qu’elles bouchent avec un couvercle de cire. Au bout de quelques jours, la jeune abeille en sort, en brisant les parois de sa prison.
  398. Les bêtes qui s’y introduisent. Les abeilles ont pour ennemis une foule de petits animaux, qui aiment beaucoup le miel, et aussi d’autres insectes, comme la guêpe, le frelon et des papillons de diverses espèces. — Les autres abeilles. Sans doute, les mâles et les Reines. — Ils y laissent assez de miel. On estime aujourd’hui de dix à douze livres de miel ce qu’il faut pour la nourriture d’un essaim ordinaire, pendant l’hiver. — Les abeilles meurent en temps d’hiver. Le danger le plus redoutable pour la ruche, c’est le froid, dont les éleveurs doivent toujours avoir le soin de les garantir.
  399. De la sandaraque. Plus haut, § 5, ce second aliment des abeilles a été appelé le Cérinthe. On ne sait pas précisément quelle est la matière que les Anciens désignaient par ces deux noms. Aujourd’hui, on regarde le miel comme la seule nourriture des abeilles ; voir Pline, liv. XI, ch. VII, p. 430, édit. et trad. Littré.
  400. Les mésanges ægithales. J’ai ajouté le nom grec, en le reproduisant simplement. On ne peut guère douter que l’œgithale ne soit la mésange. — Les grenouilles. Je ne sais pas si le fait est certain ; mais il n’a rien d’impossible ; et les grenouilles, cachées dans les herbes, peuvent bien happer les abeilles, quand elles puisent de l’eau. — Les hirondelles. MM. Aubert et Wimmer proposent de lire : « Les nids d’hirondelles ». Il suffit de l’addition d’une seule lettre pour justifier cette leçon, qui serait d’ailleurs mieux d’accord avec le contexte. — Ne craint aucun animal. Le courage indomptable des abeilles a été signalé par tous ceux qui les ont observées et décrites. — Elles se battent entre elles. Les Reines se battent contre leurs rivales jusqu’à la mort ; il y a aussi quelques occasions, du reste peu connues, où les ouvrières luttent entre elles, sans parler de leur guerre aux bourdons.
  401. Elles en meurent. Le fait est exact. — En ôtant l’aiguillon de la plaie. C’est un soin qu’il faut prendre pour guérir, parce que l’aiguillon apporte le venin avec lui. — Faire mourir de très-gros animaux. Les faits de ce genre sont assez nombreux ; et on conçoit facilement qu’un très-grand nombre de piqûres puissent faire mourir un très-gros animal, comme un cheval, par exemple. Un homme même peut périr de cette façon.
  402. Les Rois. Ou les Reines. L’abeille-mère est armée d’un aiguillon comme les ouvrières ; mais elle ne s’en sert que très-rarement. — Il n’y a pas d’animal plus propre que l’abeille. C’est ce que tous les observateurs ont constaté. Voir Pline, liv. XI, ch. X, p. 432, édit. et trad. E. Littré. — Ainsi qu’on l’a déjà dit. Voir plus haut, § 25. — Celle des parfums. Je ne sais si le fait est exact ; mais il paraît bien probable.
  403. Étant plus nombreux qu’il ne faut. Il ne doit y avoir qu’une seule Reine par ruche ; et les autres doivent sortir sous peine de mort ; ce sont elles alors qui emmènent et conduisent les essaims. — La grenouille de haie. L’auteur semble distinguer cette grenouille de celle dont il a parlé plus haut, § 29. — En venant souffler. Le fait n’est pas exact ; et ceci paraît n’être qu’une fable populaire ; Pline la répète, liv. XI, ch. XIX, p. 437, édit. et trad. E. Littré.
  404. Nous venons de dire. Voir plus haut, § 17. — A en croire quelques éleveurs. Ceci peut faire supposer que c’était surtout au témoignage des éleveurs que l’auteur demandait ses renseignements. Mais ici ce témoignage pourrait bien être en défaut. — L’on jette aux abeilles des figues. Aujourd’hui, on leur donne, pour subvenir aux mêmes besoins, de la mélasse, de la glucose, du sucre brut, et en général des matières sucrées liquides, parce qu’il faut aussi que le miel soit liquide, pour que l’abeille puisse s’en nourrir. On voit par là que notre méthode est au fond celle des Anciens, pour créer aux abeilles une nourriture artificielle.
  405. Elles sont plus velues. Il semble, au contraire, que les vieilles abeilles sont moins velues que les jeunes. Leurs ailes sont usées et déchiquetées par des franges. Au contraire, les jeunes ont plus de poils, et leur couleur est moins foncée. — On tue les bourdons. Voir plus haut, § 19. — Dans une ruche malade. Je ne sais pas si quelque fait analogue a été récemment observé ; mais on a constaté plusieurs faits qui, de la part des abeilles, attestent au moins autant d’intelligence. Ce passage ne peut avoir un autre sens que celui que je donne, d’après la leçon vulgaire ; mais quelques traducteurs l’ont compris autrement ; ce serait, selon eux, un essaim étranger qui serait venu attaquer l’essaim malade et lui ravir son miel. Voir Pline, liv. XI, ch. XVIII, p. 436, éd. et trad. E. Littré. Du reste, la science moderne a constaté des faits de ce genre.
  406. Les maladies… A partir de ce paragraphe jusqu’à la fin du chapitre, MM. Aubert et Wimmer croient reconnaître une main différente de celle qui a écrit ce qui précède. Le fond et la forme leur semblent également indiquer cette différence. Cette opinion n’est pas sans fondement ; mais ce qui doit frapper surtout, dans cette fin du chapitre, c’est plutôt encore la confusion de détails qui ne tiennent pas assez les uns aux autres, bien qu’ils ne manquent, ni d’exactitude, ni d’intérêt. La question des maladies des abeilles était à étudier, comme l’auteur a déjà étudié, au livre VIII, les maladies de plusieurs espèces d’animaux ; mais il faut reconnaître que plusieurs des considérations qui vont être présentées ont été déjà exposées. Ces répétitions ne se comprennent guère de la part d’un même auteur. Il est possible que cette fin du chapitre ne soit qu’un recueil de notes préparées par Aristote, et qui auront été ajoutées après coup à l’ouvrage. En tout cas, il est certain qu’à l’époque de Pline, cette fin de chapitre faisait déjà partie de l’Histoire des animaux, puisque le naturaliste romain y a fait de nombreux emprunts. — Le cléros. Voir plus haut, liv. VIII, ch. XXVI, § 2, où il a déjà été question du Cléros, ou Pyrauste. La description qui en est donnée ici est suffisante pour faire comprendre ce qu’est cette maladie, ou plutôt quel est le désordre apporté dans la ruche par les vers qui s’y produisent. C’est peut-être ce que les Modernes appellent la pourriture, comme le texte le dit aussi.
  407. C’est l’inertie où tombent les abeilles. C’est sans doute la dysenterie, qui est une des maladies les plus fréquentes de ces insectes ; mais l’expression grecque est obscure, comme celle que j’ai dû employer. — Le butin des abeilles… l’emplacement des ruches. Il semble que ces détails ne sont pas ici à leur place, bien qu’exacts, puisque l’auteur revient un peu plus bas à la question des maladies. — Des plantes atteintes de la rouille. L’observation est juste. La zoologie moderne a constaté que les abeilles sauvages ne sont jamais malades, et que les abeilles domestiques le sont surtout en automne et au sortir de l’hiver.
  408. Quand le vent souffle… Pline a répété ce qui est dit ici, liv. XI, ch. X, p. 431, édit. et trad. E. Littré. Du reste, l’intelligence des abeilles peut bien aller jusque-là ; et l’on cite des faits certains qui sont plus extraordinaires que celui-ci. — Elles rejettent leur miel. Ceci est obscur ; et les manuscrits ne donnent aucune variante qui puisse éclaircir ce passage.
  409. Les deux saisons. Plus haut, § 25, il a été dit que les abeilles n’ont pas de temps bien fixe pour leur travail, et que l’été est la saison la plus favorable en général. Il y aurait donc une contradiction entre ces deux pas-sages. D’ailleurs, les détails donnés sur les qualités du miel paraissent exacts ; mais ces qualités peuvent varier selon les contrées et les climats. — De nouvelles cellules. C’est-à-dire, des jeunes abeilles travaillant pour la première fois. — Le miel roux… C’est sans doute là une particularité des contrées auxquelles l’auteur entend faire allusion, — Le faire sécher. Ceci encore est obscur et demandait plus de développements.
  410. Le miel ne durcit pas. Il faut que le miel soit liquide pour pouvoir servir à la nourriture de l’abeille. — Mais il est efficace pour les maux d’yeux. On a conjecturé, non sans raison, que cette phrase pourrait bien être une addition étrangère. Mais Pline répète que le miel est d’un très-bon emploi contre les ophthalmies, liv. XI, ch. XIV, p. 433, édit. et trad. E. Littré. Ainsi du temps de Pline, le texte d’Aristote était déjà, selon toute apparence, tel que nous l’avons aujourd’hui. Pline décrit fort longuement les trois espèces de miel que l’on prisait le plus.
  411. Font la cire. Le fait est exact ; mais il aurait dû indiquer à l’auteur que la cire ne peut être faite sans le miel. — Aussi, faut-il alors enlever… Ceci est obscur et ne se comprend pas bien. — L’atractyllis… J’ai reproduit à peu près uniquement les mots grecs, que la botanique moderne a conservés en grande partie. — Si elles emploient du thym. Je ne sais pas si le fait est exact.
  412. Comme on l’a dit plus haut. Voir plus haut, § 31. — Les petites. L’auteur entend sans doute par là les ouvrières, qui sont en effet les hôtes les plus petits de toute la ruche. — Des ailes toutes froissées. Ceci se rapporte surtout aux vieilles abeilles, dont les ailes sont très-usées. — Sont fainéantes, comme les femmes. Ceci paraît bien être encore une addition étrangère.
  413. Dit-on. Ceci prouve encore que l’auteur n’avait pas fait sur ce point d’observation personnelle. — Si elles ont la faculté de l’ouïe. Au début de la Métaphysique, liv. I, ch. I, § 3, p. 3 de ma traduction, Aristote refuse à l’abeille le sens de l’ouïe. Il semble d’après le § 23, plus haut, et le § 43, plus bas, que les abeilles entendent très-bien la voix de leur Reine ; et cela seul pourrait suffire à prouver qu’elles jouissent du sens de l’ouïe. Pline le leur accorde, liv. XI, ch. XXII, p. 438, édit. et trad. E. Littré. — Que nous avons expliquée. Voir plus haut, § 25.
  414. Elles dorment en silence. Sur cette discipline de la ruche, voir Pline, liv. XI, ch. X, p. 432, edit. et trad. E. Littré. Il représente la ruche comme un camp de soldats, soumis aux règles les plus sévères et les plus sages. Tous ces détails supposent, comme on le voit, que l’abeille entend les sons et les distingue nettement. Il se peut, d’ailleurs, qu’elle n’entende pas les sons du dehors.
  415. On reconnaît la santé de la ruche…. C’est qu’en effet les abeilles sont alors pleines d’activité et de force. — Quand elles commencent à travailler. Cette leçon me semble très-satisfaisante ; et c’est celle de tous les manuscrits. MM. Aubert et Wimmer ont proposé une variante qui est fort ingénieuse, mais qui n’est pas nécessaire. — Moins de miel qu’il ne leur en faut. Parce qu’alors elles sont trop peu nourries. La science moderne a fixé des chiffres assez précis sur la quantité de miel qu’il faut laisser à l’essaim. C’est environ un kilogramme par mille mouches, pour tout l’hiver.
  416. Une mesure. Le mot grec est Chœus ou Choûs par contraction ; on n’en sait pas au juste la valeur. Le Thésaurus d’Henri Etienne, édit. Firmin-Didot, l’estime à neuf livres. — Ainsi qu’on vient de le dire. Plus haut, § 29. Ceci, du reste, jusqu’à la fin du paragraphe, ne tient pas à ce qui précède. Ces détails sont d’ailleurs exacts.
  417. Les abeilles pressentent le mauvais temps. Les éleveurs de nos jours sont aussi de cet avis ; et quand on a bien observé la conduite habituelle des abeilles, on peut en tirer des pronostics assez sûrs pour juger du temps qu’il va faire.
  418. Se pendent les unes aux autres. C’est cette disposition des abeilles réunies entre elles qu’on a souvent comparée a une grappe de raisin. — Ils aspergent la ruche de vin doux. Je ne sais pas si ce procédé est encore en usage, comme l’est celui dont il est, parlé plus bas. — Des poiriers, des fèves…. Le choix des plantes et des fleurs à offrir aux abeilles varie nécessairement avec les contrées et les conditions locales. — Jettent dessus de la farine. Il paraît que ce procédé est encore quelquefois employé de nos jours. — Si le printemps est tardif. Voir la même remarque, liv. V, ch. XIX, § 3.
  419. Tels sont tous les faits. Ce résumé montre assez le soin que l’auteur apportait à ses observations.
  420. Les guêpes sont de deux espèces. La zoologie distingue également les guêpes en solitaires et en sociales ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 662, les Vespidee et les Polistines. Les guêpes nous sont inutiles, tandis que les abeilles nous fournissent le miel et la cire ; mais elles sont encore aussi curieuses à observer ; voir ce qui en a été dit plus haut, liv. V, ch. XX, où les guêpes et les frelons sont réunis. — Elles sont plus grosses. Ces détails ne sont peut-être pas tout à fait exacts ; et les guêpes solitaires et sauvages ne sont pas, à ce qu’il paraît, plus grosses que les autres. — Leur dard à toutes est intérieur. L’expression grecque me semble avoir cette nuance.
  421. Les guêpes de cette espèce. C’est-à-dire, les guêpes sauvages ou solitaires. — Vivent deux ans. Je ne sais si le fait a été constaté par des observations récentes. — Des chênes qu’on abat. Le texte ne peut pas avoir un autre sens. — Parmi elles, on distingue…. Il semble, au contraire, que les guêpes sauvages ou solitaires n’ont pas parmi elles les distinctions que fait ici Aristote. — Plus douces. Le mot du texte pourrait désigner aussi des animaux domestiques, dans le genre où le sont les abeilles ; mais on n’a jamais songé à élever des guêpes, qui ne peuvent nous servir à rien.
  422. Les guêpes moins sauvages. C’est-à-dire, qui s’éloignent moins des demeures de l’homme. — Il y a deux espèces. Ceci n’est pas exact, et les guêpes sociales présentent, comme les abeilles, trois espèces : les mâles, les femelles et les ouvrières. — Vers le solstice. C’est-à-dire, dans la dernière moitié du mois de décembre. — Se montrent durant tout l’hiver. Les femelles ne se montrent pas précisément durant l’hiver ; mais elles vivent durant ce temps, tandis que les mâles sont morts dès la fin de l’automne. Les mères, qui ont été fécondées vers la fin de l’été, hivernent sous les pierres ; et l’année suivante, elles fondent une nouvelle colonie ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 662. L’auteur lui-même semble un peu se contredire, puisqu’il assure maintenant que les mères hivernent sous terre ; et par conséquent, elles ne se montrent pas à cette époque. — Ont trouvé bien des fois des mères. Ceci prouve l’attention apportée à toutes ces observations.
  423. Voici ce que l’on sait de la reproduction. Les détails qui suivent sont un peu confus ; mais ils sont assez exacts. — Un lieu bien disposé pour la surveillance. C’est le sens précis du mot grec ; mais l’expression peut paraître obscure. Quelques traducteurs ont compris qu’il s’agissait d’un « Lieu facile à retrouver ». — Ce qu’on appelle des guêpiers. Les nids des guêpes ont quelque chose de très-particulier. Ils sont faits avec des parcelles de vieux bois, qu’elles rongent jusqu’à le rendre aussi mince que du papier ; elles réunissent toutes ces particules par une sorte de gomme, qu’elles dégorgent ; elles font ainsi des lames horizontales au-dessous desquelles elles suspendent des cellules. Ces cellules sont comme celles des abeilles régulières et hexagonales. — C’est là que naissent les ouvrières. En effet, au printemps, les mères, qui ont hiverné, produisent des ouvrières, qui d’abord les aident, et ensuite des mâles.
  424. Font d’autres guêpiers. Les détails donnés sur la construction des cellules et des guêpiers sont justes ; et les nids de guêpes prennent, par ces accroissements successifs, des dimensions considérables, soit en terre, soit sur les arbres. — À la fin de l’automne. Comme c’est aussi à cette époque que les mâles disparaissent, tout le travail cesse ; et il est à recommencer l’année suivante. — Produit non plus des guêpes. Ceci n’a lieu qu’au printemps suivant, où se forme une nouvelle colonie.
  425. Les chefs ne font plus rien. Les mères n’ont plus rien à faire, quand elles ont pondu les œufs qui doivent donner de jeunes guêpes. — À se reposer en dedans. Il paraît que ce repos dure plusieurs mois, de juin à septembre. — On ne sait pas bien. Nouvelle preuve du soin que l’auteur apporte à toute cette étude. Je ne crois pas qu’aujourd’hui encore on soit bien fixé à cet égard. Ce qui est certain, c’est que les mâles disparaissent presque aussitôt après l’accouplement, qui a lieu en l’air ; mais on ne sait pas au juste comment ils meurent. L’auteur en disant : « Dans tous les cas également », semble faire allusion aux abeilles, qui mettent toujours à mort les mâles, quand, à l’approche de l’hiver, elles seraient hors d’état de les nourrir. — Sur leur vieillesse. C’est le mot même du texte ; mais ici Vieillesse ne signifie que l’âge auquel les guêpes peuvent arriver, un ou deux ans au plus.
  426. La mère est large et pesante. Tous ces nouveaux détails sont en général exacts, comme tous les précédents. — Dont elles arrangent et confectionnent tout l’intérieur. Les fondements de toute la construction du nid sont posés, au printemps, par une seule femelle ; elle est ensuite aidée par les ouvrières qu’elle produit. — Il y a ce qu’on appelle…. dans presque tous les guêpiers. Il semble que ceci est une addition étrangère et peu justifiée, puisque les mères sont indispensables, et que le guêpier ne peut jamais être formé sans elles.
  427. Si les chefs ont ou n’ont pas d’aiguillon. Les mères, ou chefs, ont des aiguillons ; mais les mâles n’en ont pas ; seulement, ils sont plus gros que les femelles et les ouvrières. — Le perdent, à ce qu’on croit. Il ne semble pas que sur ce point la zoologie moderne soit plus avancée ; on ne sait pas ce qu’il en est.
  428. C’est sous terre qu’elles naissent. Parce que c’est sous terre aussi que les mères hivernent. — De ce qu’elles butinent. Leur butin se compose surtout de particules de bois, qu’elles amincissent en les rongeant. — Et de la terre qu’elles y joignent. Il y a en effet des guêpes qui construisent leurs cellules avec du sable et de l’argile. — Comme d’une seule racine. Souvent, en effet, le nid des guêpes est suspendu à une queue, qui ressemble à celle d’une poire ; et c’est une sorte de racine, qui soutient toute la construction. — La chair des animaux. Ceci ne paraît pas exact ; mais seulement la guêpe-frelon se nourrit surtout d’insectes.
  429. On a observé. L’auteur revient à la question du dard, qu’il a déjà indiquée, au § 7. Il y a peut-être ici quelque déplacement et quelque désordre ; mais on n’en voit pas moins avec quelle curiosité toute cette étude est faite.
  430. Vienne d’une ponte. Au contraire, il est prouvé que les mères, après l’hivernage, pondent les jeunes guêpes, qu’elles ont conçues à la fin de l’automne précédent. — Quand on prend une guêpe par les pattes. Je ne sais si le fait est exact ; mais il a peu d’importance. On peut supposer que tout ce passage a été ajouté par une main étrangère.
  431. Les unes ont des dards. Voir plus haut, §§ 7 et 10. — Les unes font de petits guêpiers. Ces idées ne se suivent pas très-régulièrement. — Quand la saison change. L’expression du texte n’est pas moins vague ; quelques commentateurs ont cru qu’il s’agissait de l’équinoxe du printemps, en particulier. — Et toutes ont un aiguillon. Ce sont, en effet, des ouvrières que les mères viennent de pondre et de faire éclore ; et les ouvrières sont toutes pourvues d’aiguillon.
  432. Voilà ce qu’on sait sur les guêpes. On peut trouver toute cette étude sur les guêpes fort remarquable ; et dans la zoologie moderne, il n’y en a guère qui, relativement, soit plus complète sur le même sujet.
  433. Les anthrènes, ou frelons. Voir plus haut sur les anthrènes, ch. XXVII, § 2. Je hasarde la synonymie de Frelons ; mais elle n’est pas sûre quoique les détails donnés ici semblent la justifier, du moins en grande partie. Les frelons se rapprochent beaucoup des guêpes ; et l’auteur veut peut-être désigner l’espèce de guêpe appelée Crabro ou Crabo. Comme les guêpes et les espèces voisines ont été beaucoup moins étudiées que les abeilles, l’identification est plus douteuse. On a supposé que le mot d’anthrène n’est qu’un changement de nom pour la guêpe vulgaire, dans quelques contrées de la Grèce. — Que de chair. Il faut entendre par ceci les insectes auxquels les guêpes font la chasse. — Des fruits sucrés et doux. Ce mode de nourriture est commun à toutes les espèces de guêpes.
  434. Les frelons. Ou les anthrènes. J’ai mis ici le mot de frelons pour plus de clarté. — Ont des chefs. Ou des Reines, s’ils se gouvernent comme les abeilles. — Reste également à l’intérieur. Il est évident, d’après tous ces détails, que l’anthrène avait été étudiée, chez les Grecs, beaucoup plus que nous n’avons étudié les guêpes et les frelons.
  435. Font leur ruche sous le sol. Il y a toute une espèce de Mellifères que les zoologistes appellent les Fouisseurs. C’est sans doute de cette espèce d’insectes qu’il est question ici. — Il n’y a pas chez les frelons…. Ce renseignement est assez précis pour que des observateurs attentifs puissent reconnaître le genre spécial d’insectes que l’auteur décrit, si toutefois nos climats nourrissent les mêmes espèces que le climat de la Grèce. — Trois ou quatre paniers de gâteaux de cire. Ceci encore est très-précis ; mais l’expression du texte que je traduis par « Gâteaux de cire » peut signifier simplement des gâteaux analogues à ceux des abeilles, sans qu’ils contiennent d’ailleurs de la cire proprement dite.
  436. On n’a point encore observé. Ceci est une preuve nouvelle de l’attention avec laquelle les observateurs faisaient toutes ces descriptions et ces analyses.
  437. Ils s’attachent en masse à un arbre. Ceci semble contredire ce qui a été dit plus haut sur les nids faits dans le sol ; mais il s’agit, d’une circonstance particulière, qui força sans doute ces insectes à changer leurs habitudes. — Arrivé à toute sa croissance. Il semble que le chef doit être déjà arrivé à cette croissance, quand il est pris pour le maître et le guide de l’essaim. — Sous terre. Les anthrènes, ou frelons, reviennent alors à leur premier instinct de fouisseurs. La guêpe commune et le frelon font également leur nid en terre.
  438. On ne sait encore rien sur l’accouplement. Je ne sais pas si la zoologie moderne a fait des recherches particulières sur ce point ; mais il est probable que la fécondation chez les anthrènes se fait comme chez les abeilles et les guêpes, par l’accouplement des mâles et des femelles. — Plus haut. Voir ch. XXVII, § 30. — Tous les frelons sans exception…. C’est là encore une donnée qui peut servir à identifier l’anthrène. — Leur chef. Ou leur Reine.
  439. Les bombyles. Voir plus haut, ch. XXVII, § 2, où le bombyle est nommé comme la troisième espèce et la plus grosse du siren. Il n’est guère douteux que le Bombyle ne soit le Bourdon de la zoologie moderne, qui rappelle d’un nom presque identique Bombus ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 664. — Sous une pierre…. En général, les nids des bourdons sont faits dans des trous du sol ; ils ont aussi des ouvrières et une Reine. Mais les amas de pollen qu’ils font, pour la nourriture des larves, ne parviennent jamais à devenir du miel, même très-imparfait. Une espèce de Bombus se nomme plus particulièrement Lapidarius.
  440. Le tenthrédon. Voir plus haut, ch. XXVII, § 2 ; on ne sait pas ce que c’est précisément que le tenthrédon, et l’identification n’en est pas faite ; mais on voit que ce doit être un insecte du genre des abeilles, des guêpes et des frelons. — Sur les mets de cuisine. Les guêpes aiment aussi les viandes cuites. — Il remue beaucoup de terre. Le mot du texte n’a pas un sens très-déterminé ; et celui que j’y donne n’est pas très-sûr.
  441. Et autres insectes du même genre. Plus haut, ch. XXVII, § 2, l’auteur avait énuméré neuf espèces qu’il devait étudier ; mais il en a, comme on voit, négligé le plus grand nombre.
  442. Plus haut. Voir ch. I, § 1, et aussi, liv. VIII, ch. I, § 1. L’auteur revient ici, et dans les chapitres suivants, aux considérations qu’il a déjà présentées sur le caractère des animaux. Ces observations, d’ailleurs fort exactes et fort curieuses, ne se rattachent en rien à celles qui précèdent. C’est évidemment la suite du désordre assez grave qui règne dans une partie de ce IXe livre.
  443. Il est très-doux. C’est la traduction exacte du mot grec ; mais évidemment cette expression est exagérée ; et l’on ne peut jamais dire du lion qu’il est « très-doux ». Buffon dit aussi que le lion est « doux » pour ses maîtres et même « caressant » ; tome XVI, p. 12, édit. de 1830. — Il aime beaucoup à jouer…. Buffon fait la même remarque, loc. cit. — Tant qu’il est en vue. Buffon confirme encore cette observation, ibid., p. 11.
  444. Il est surpris dans un fourré. Tous ces détails n’ont jamais été mieux présentés, et ils sont confirmés par tous les zoologistes modernes. — Il fond sur elle. Les bonds que fait alors le lion sont d’une étendue prodigieuse ; voir Buffon, ibid., p. 26.
  445. Ce vers d’Homère. Voir l’Iliade, chant XI, vers 554, édit. Pirmîn-Didot. C’est Ajax qu’Homère compare au lion. Au chant XVII, vers 663, la même comparaison est répétée pour Ménélas. Le poète présente le caractère du lion sous le même jour que le naturaliste. L’animal se retire à pas lents, et sans peur, devant les chasseurs dont il est assailli. — Distingue le chasseur qui l’a blessé. Buffon, loc. cit., p. 27, dit à peu près la même chose. — Il le laisse aller. Ceci peut paraître peu probable ; c’est l’écho de quelque récit populaire. — Ils se rapprochent des villes. Buffon fait aussi cette observation, et presque dans les mêmes termes, 16., p. 26.
  446. De longues années. On n’est pas bien fixé sur ce point ; mais le lion vit en général une quarantaine d’années, et même davantage. Il y en a qui, même en captivité, ont vécu bien plus longtemps. — Ses dents toutes cassées. Pline répète ceci, liv. VIII, ch. XVIII, p. 326, edit. et trad. E. Littré. Il emprunte ici, comme ailleurs, presque tout à Aristote, qu’il admire sans limites, ib., p. 325.
  447. Il y a des lions de deux espèces. Buffon contredit cette assertion, ibid…. p. 16 ; selon lui, il n’y a qu’une seule espèce de lion ; on ne connaît pas de lion à crinière crépue ; bien que quelquefois les sculpteurs aient donné ce genre de crinière aux lions qu’ils modelaient. — Se précipiter sur un sanglier. Le fait peut être vrai ; mais il s’expliquerait sans doute par des circonstances particulières, plutôt que par la timidité du lion.
  448. Des plaies d’où sort une suppuration toute jaune. Je ne sais pas si le fait est exact. — Venant de morsures de chien. Ceci semble se rapporter aux morsures des chiens enragés.
  449. Les thôs. On a cru long-temps que le Thôs était le chacal ; mais on a dû renoncer à cette conjecture, parce que le chacal ne prend pas une fourrure d’hiver. On suppose donc avec plus de raison que le thôs pourrait bien être le lynx du Nord ; mais le lynx du Nord n’est pas de force à combattre les lions, comme l’animal dont parle Aristote. Pour Pline, liv. VIII, ch. LII, p. 339, le thôs est une sorte de loup, à corps plus long, à jambes courtes, et sautant avec agilité. Pline répète, d’après Aristote, que le thôs change de fourrure en hiver. En résumé, on ne sait pas ce qu’est le thôs des Anciens. Cependant les détails qu’on en donne sont trop précis et trop simples pour qu’on puisse croire que c’est un animal purement imaginaire.
  450. Le bison. Buffon, tome XVI, p. 408, édit. de 1830, a pris la peine de démontrer que le Bonasus des Grecs et d’Aristote est le bison ; et d’après la description qui est faite ici, on ne peut guère en douter — En Péonie. La Péonie est une province de la Thrace, au nord-ouest de la Macédoine. — Dans les monts Messapiens. Il doit y avoir quelque erreur, puisque la Messapie désigne la Calabre en Italie ; mais il est possible aussi que, dans cette région de la Thrace, il y eût une montagne qui portât également ce nom. — De la Mædique. Il est bien probable qu’il y a encore ici quelque altération du texte, par la faute d’un copiste inattentif, et qu’il s’agit de la Macédoine. Voir plus haut, liv. II, ch. II, § 17. Voir aussi Strabon, liv. VII, ch. V, p. 260, et frag. p. 274, édit. Firmin-Didot. — Monape. C’était le nom local ; mais il n’a pas prévalu. — Plus massif. Ou plus ramassé. — Place à sept personnes. C’est une mesure peu précise et assez singulière. — Une crinière, qui va jusqu’aux épaules. C’est exact.
  451. Le poil de cette crinière…. Toute cette description est juste, et il est facile d’y reconnaître le bison. — Sa couleur. Il paraît certain que la couleur du bison varie sensiblement avec les saisons. — Alezanes. On sait que la couleur alezan est bai-cendré. J’ai suivi la leçon proposée et adoptée par MM. Aubert et Wimmer, qui retranchent ici la négation donnée par tous les manuscrits : « Non comme celle des juments…. » Il faudrait observer avec soin la couleur des bisons à diverses époques de l’année, pour savoir si jamais cette couleur se rapproche de l’alezan. — Ni très-noirs, ni très-roux. Ceci est très-exact, si l’on en juge d’après les bisons de nos ménageries.
  452. Assez semblable à celle du bœuf. La voix du bison est plus sourde que celle du bœuf. — Ses cornes sont recourbées. Ces détails s’appliquent très-bien au bison. — Elles ne peuvent pas lui servir à se défendre. C’est peut-être trop dire ; mais il est certain que le bison ne peut pas se servir de ses cornes, comme le taureau se sert des siennes. — Une demi-mesure. Le texte dit précisément un demi-Chôus. Le Chôus représente, à ce qu’on croit, neuf livres de liquide. — Ils regardent de côté. Ce trait de la physionomie du bison est aussi très-exact.
  453. N’a pas de dents de devant. On sait que les ruminants n’ont, ni canines, ni incisives, à la mâchoire supérieure. — Il fait voler la poussière… Quand il est en fureur, et quand il se bat contre des rivaux. — D’un goût agréable. Il paraît que c’est surtout la bosse que l’on mange, plus encore que la chair.
  454. Il se met à fuir. C’est en général par une fuite rapide que les ruminants cherchent à échapper aux attaques des bêtes féroces ; ils n’ont guère que ce moyen de défense. — En projetant ses excréments. Ce détail ne paraît pas exact, et je ne vois rien dans la zoologie moderne qui puisse le confirmer. Pline, liv. VIII, ch. XVI, p. 325, édit. et trad. E. Littré, répète ce que dit ici Aristote, et il exagère beaucoup la distance à laquelle il prétend que le bonase lance sa fiente brûlante. — Ses excréments brûlent… Le naturaliste grec n’aurait pas dû se faire l’écho complaisant de cette erreur populaire.
  455. Ils couvrent de leurs excréments… Ce détail et ceux qui suivent ne sont pas sans doute plus exacts que ceux qui précèdent. Il est bien probable que l’auteur ne les connaissait que par oui-dire, et qu’il n’avait pas observé personnellement le bison.
  456. Le plus facile à apprivoiser. Voir plus haut, liv. I, ch. I, § 26, la même assertion, qui d’ailleurs est fort exacte. — Même à se prosterner devant le Roi. L’expression du texte n’est pas plus précise, et l’on peut se demander à quel roi l’auteur veut faire allusion. — Il a des sens exquis. Tous les zoologistes sont d’accord sur ce point — Une intelligence supérieure. On peut voir dans Buffon un éloge non moins vif de l’intelligence de l’éléphant.
  457. Il ne la touche plus. Le fait paraît certain. — Vit deux cents ans. C’est peut-être une exagération ; mais l’éléphant vit très-longtemps. — Dans toute sa force à soixante ans. Il met plus de trente ans à croître. — Tant que sa trompe peut en sortir. Dans le Traité des Parties des Animaux, liv. II, ch. XVI, p. 102, édit. et trad. Frantzias, Aristote revient longuement sur l’organisation de l’éléphant, et spécialement sur celle de sa trompe. — Il ne peut pas d’ailleurs nager. Il est assez difficile de comprendre comment l’auteur a pu commettre cette erreur. L’éléphant nage très-bien, quelque lourd que soit son corps, parce que sa pesanteur spécifique est moindre que celle de l’eau.
  458. Les chameaux ne couvrent pas leurs mères. Ceci est encore une opinion populaire, qui n’a pas de fondement ; l’auteur n’aurait pas dû la reproduire ; mais toute cette fin du IXe livre paraît n’être qu’un recueil de faits détachés, et de notes, qui auraient dû subir plus tard une révision sévère. Je ne trouve pas, dans la zoologie moderne, rien qui se rapporte aux détails donnés ici par l’auteur sur la pudeur du chameau. — À force de le mordre. Il est bien possible que des chameaux aient mordu leurs conducteurs, comme les chevaux mordent parfois les palefreniers qui les rudoient ; mais c’est le motif prêté au chameau qui n’est pas admissible.
  459. Un roi de Scythie. Du temps d’Aristote, la Scythie était bien peu connue des Grecs ; et les récits les plus singuliers pouvaient avoir cours sur ces pays lointaine et barbares. — Le cheval refusa. Le fait est absolument improbable. — Et alla se précipiter du haut des rochers. Ce remords de piété filiale n’est pas plus admissible pour un cheval que pour un chameau. L’imagination du vulgaire a pu inventer de tels contes ; mais la science ne devrait pas les recueillir. Élien, De la Nature des animaux, liv. IV, ch. VII, p. 56, édit. Firmin-Didot, a répété cette étrange histoire presque mot pour mot. Il répète également la fable du chameau couvrant sa mère, ibid., liv. III, ch. XLVII, p. 53, édit. Firmin-Didot. Il ajoute aussi pour le chameau qu’il se précipita du haut d’un rocher par désespoir, après avoir tué son gardien. Comme Élien vivait sous Alexandre Sévère, au IIIe siècle, il est certain qu’il a emprunté ces détails à l’Histoire des animaux, et que ce n’est pas de son ouvrage qu’ils sont passés dans l’ouvrage d’Aristote.
  460. Le dauphin. Voir plus haut, liv. VI, ch. II. — Son amour pour ses enfants. Ou « Ses petits » ; ibid. § 4. — Une foule de dauphins…. Il paraît que, dans ces derniers temps, on a pu faire des observations qui rendent celle-ci assez croyable.
  461. Les petits dauphins…. Ceci est fort possible et n’a rien d’extraordinaire. — Le soutenant sur leur dos. Ceci au contraire ne mérite aucune créance. Élien, De la Nature des animaux, liv. X, ch. VIII, p. 169, et liv. XII, ch. VI, p. 204, édit. Firmin-Didot, raconte à peu près les mêmes choses de l’amour des dauphins pour leurs petits, et de leur piété envers les morts.
  462. De la vitesse du dauphin. Ceci est très-exact, et les dauphins nagent avec une rapidité prodigieuse ; ils font aussi des bonds sur l’eau, mais non pas à la hauteur exagérée dont il est parlé dans ce paragraphe. — Par-dessus les voiles. Le mot du texte signifie Mât de vaisseau, aussi bien que voiles. Pline, liv. IX, ch. VII, p. 362, édit. et trad. E. Littré, reproduit tout ceci, et il dit « les Voiles ». — Ils plongent avec lui… Ceci est exact. — C’est dans cet élan. Il est certain que le dauphin bondît » mais ce bond n’a pas l’ampleur qu’on lui prête. — C’est d’ailleurs….. à leur propre force. Ceci peut paraître une addition étrangère. L’observation, d’ailleurs, est juste ; et pour peu qu’on ait soi-même plonge en nageant, on a du sentir l’effet dont il est question ici.
  463. Les dauphins vont toujours par paires. C’est le fait le plus fréquent, bien qu’il ne soit pas absolument régulier. Voir Pline, id., ibid. — Ils s’échouent parfois sur la plage. C’est exact ; mais il est probable que c’est en poursuivant leur proie avec trop d’ardeur.
  464. Les actes des animaux. Voir plus haut, ch. I et ch. VIII. — Ce sont des parties de leur corps. La suite explique ce qu’on doit entendre par là, bien que, dans les faits qui seront cités, il n’y ait pas précisément de changement d’organes. — Les poules… Je ne sais pas si le fait est exact, et si l’on a observé, dans les temps récents, des interversions de rôles aussi étranges entre les poules et les coqs. — Il pousse de petits ergots. Même remarque.
  465. On a vu des mâles. Ceci a pu se voir plus souvent et plus aisément. Le rôle nouveau des coqs était plus facile ; et il n’est pas impossible que quelques individus le jouent par hasard. — De chanter et de cocher. Ceci encore n’est pas impossible. — Qui sont tellement femelles. L’expression grecque a cette force. Il y a de ces aberrations dans toutes les races d’animaux, avec les conséquences qu’elles entraînent.
  466. Il y a quelques animaux… Ce chapitre a été déplacé par la première édition des Aldes, et il a été mis après le xxxviiie, pour terminer ce IXe livre, et l’ouvrage entier. Cet ordre est contraire à celui que donnent tous les manuscrits grecs, et il n’y a pas de motif pour l’adopter. MM. Aubert et Wimmer l’ont repoussé, et je crois qu’ils ont eu pleinement raison. J’ai suivi leur exemple. — Quand on les coupe. La castration amène les changements les plus notables dans toute la constitution des animaux ; et les naturalistes ne peuvent se dispenser d’étudier une telle question. Aristote n’y a pas manqué ; et on ne peut que l’en louer, d’autant que les considérations qu’il présente sont en général aussi exactes qu’importantes. — Que ceux qui ont des testicules. Soit extérieurs, soit intérieurs, selon l’organisation. Voir sur les organes de la génération dans toute la série animale, plus haut, livre III, chap. I et suivants. — Les aient au dedans du corps. Il eût été bon de citer particulièrement quelques-unes de ces espèces.
  467. Si l’on brûle cette partie… Je crois que ce n’est plus par la brûlure, mais par l’ablation, qu’on châtre aujourd’hui les oiseaux, et notamment les oiseaux de basse-cour. Le procédé des Grecs était peut-être plus facile, et c’était là ce qui l’avait fait adopter, bien qu’il fût sans doute moins efficace.
  468. Même pour les hommes. On ne faisait pas d’eunuques en Grèce, au temps d’Aristote ; et l’on n’y connaissait l’existence de ces mutilations que par l’exemple des pays étrangers, la Perse surtout, et peut-être aussi l’Egypte. Voir dans le Traite de la Génération des animaux, livre V, § 55, page 380, édit. et trad. Aubert et Wimmer, un passage sur les Eunuques, qui deviennent des espèces de femmes. Hérodote, livre VIII, ch. CV, p. 412, édit. Firmin-Didot, cite un homme de Chios, qui faisait des eunuques pour les vendre aux Perses, et l’historien flétrit énergiquement cette affreuse coutume, si chère aux Barbares. Voir aussi Hérodote, livre VI, ch. XXXII, p. 285. — Postérieurement à la naissance. Voir plus haut, livre III, ch. X, § 10, la distinction entre les poils, selon qu’ils poussent à diverses époques de l’existence. — Ne devient chauve. Aristote répète ceci dans le Traité de la Génération des animaux, loc. cit.
  469. Ou estropiés. Par un accident quelconque, soit extérieur, soit naturel, comme l’est une infirmité. — En celle de la femelle. Les organes génitaux et ceux de la voix ont des rapports manifestes. — Et en meurent. Il n’y a qu’un seul mot dans le texte. — Il n’y a que les porcs. Je ne sais pas si des observations récentes ont confirmé ce fait. On châtre les porcs à six semaines ou à six mois ; et il paraît que l’opération réussit aussi bien. — Plus gras. C’est surtout pour obtenir ce résultat qu’on coupe les animaux, et aussi pour avoir des bêtes plus douces, des bœufs au lieu de taureaux. — Ils ne grossissent plus. C’est exact ; mais alors l’opération est plus chanceuse.
  470. Quand on coupe des cerfs… Ceci suppose que, dès le temps d’Aristote, on connaissait l’usage des parcs ; et qu’on élevait des troupeaux de cerfs, sans doute pour le plaisir de la chasse D’ailleurs, les détails donnés ici sont vrais.
  471. À un an. C’est encore la pratique d’aujourd’hui, bien que l’on coupe aussi les veaux un peu plus tard, et jusqu’à deux ans. — Ces jeunes taureaux. Il semble qu’on peut conserver ces mots, que MM. Aubert et Wimmer mettent entre crochets. Ces veaux sont bien des taureaux jusqu’à ce qu’ils soient châtrés. — On leur froisse les testicules. C’est encore le procédé dont on se sert actuellement ; on leur écrase les testicules. — Les taureaux… que l’on châtre. Il y a ici un texte tout à fait insuffisant ; et l’on a essayé de combler cette lacune de diverses manières ; mais ce ne sont que des conjectures plus ou moins plausibles. Gaza pensait que c’est une allusion au passage du Traité de la Génération des animaux, livre I, § 41, p. 50, édit. et trad. Aubert et Wimmer, où il est question d’un taureau qui avait pu encore saillir, et féconder une vache, aussitôt après l’opération.
  472. La caprie. J’ai reproduit le mot grec, en le paraphrasant ; la Caprie signifie sans doute l’ovaire des truies, ainsi que doivent le faire croire les détails mêmes que donne l’auteur.
  473. Les chamelles. Il est assez singulier qu’il soit question des chamelles spécialement et qu’il ne soit rien dit des chameaux, qui sont cependant employés à la guerre bien plus que les femelles. On sait aussi que l’on châtre les chameaux, qui sont en effet presque indomptables dans le temps du rut ; mais, en général, on ne parle pas de la castration des chamelles, qui sont beaucoup plus douces. — Du Haut-Pays. Ceci ne peut signifier que la partie de l’Asie Mineure qui avoisine la Perse ; ou peut-être est-ce de la Perse même qu’il s’agit. Du reste, la suite des pensées est interrompue, quelle que soit l’exactitude du renseignement. — Jusqu’à trois mille chameaux. Ou chamelles. Aujourd’hui encore ce serait, dans ces pays, une richesse considérable. — A la course. Il faut prendre ceci d’une manière générale ; car le chameau n’a pu être dressé à la course proprement dite ; et les essais qu’on a tentés ont toujours échoué. Ce qui est vrai, c’est que, pour un voyage, le chameau va en somme beaucoup plus vite que les meilleurs chevaux. — Des chevaux de Nisa. Les plaines de Nisa, célèbres par les chevaux qu’elles produisaient, étaient dans la Haute Médie. Elles sont aux environs de la ville actuelle de Kermanshah ou Karamsin, chef-lieu du Kourdistan. — Deviennent plus longs. L’expression du texte n’est pas plus claire.
  474. Les animaux qui ruminent. Cette question nouvelle ne tient en rien à celles qui précèdent : il est probable qu’il y a eu ici quelque déplacement ; mais les manuscrits ne donnent aucun moyen de corriger ce désordre. D’ailleurs, les renseignements sont exacts et intéressants. Voir plus haut, livre II, ch. XII. § 9. — Qui n’ont pas la double rangée de dents. Le texte n’a qu’un seul mot composé ; notre langue zoologique n’a pas le même avantage. Comme on l’a déjà dit, les ruminants n’ont pas d’incisives ni de canines supérieures. La mâchoire inférieure compte en général huit incisives, dirigées en avant, qui, avec le bord calleux de la mâchoire supérieurs, servent à mâcher les végétaux. Viennent ensuite des molaires au nombre de cinq ou de sept, en haut et en bas, qui frottent leurs surfaces les unes contre les autres, en manière de meules. — Quelquefois en troupeaux. L’expression du texte semble indiquer que ces animaux sauvages ont été réduits en domesticité, et qu’ils vivent auprès de l’homme. — On sait pour le cerf qu’il rumine. Le cerf est en effet un ruminant ; mais les mâles ont assez fréquemment de grosses canines à la mâchoire supérieure.
  475. Se couchent plus volontiers. L’observation est exacte. — Pendant sept mois. Sous le climat de la Grèce, c’était tenir bien longtemps les bêtes dans l’étable ; mais on ne peut guère douter, d’après ce passage, que ce ne fut la pratique la plus ordinaire. Dans nos climats mêmes, ce séjour à l’étable pourrait paraître excessif. — Comme les rats du Pont. Il est difficile de savoir de quel animal il s’agit. — Et parmi les poissons… J’ai dû changer légèrement le texte pour mettre ce passage d’accord avec celui du livre VIII, ch. IV, § 7, et celui du livre II, ch. XII, § 23. Il paraît bien qu’il s’agit du Scarus cretensis ; mais je ne sais pas si la science moderne a vérifié la rumination de ce poisson ; voir la Zoologie descriptive de M. Claus, p. 846.
  476. Les animaux qui ont de longs membres. Ce paragraphe ne tient en rien à ce qui précède, ni à ce qui suit. Il est clair que ceci ne peut être la fin de l’ouvrage, pas plus que le chapitre XXXVII, qui d’ordinaire est placé le dernier. L’Histoire des Animaux présente donc une lacune, comme la plupart des autres ouvrages d’Aristote. Il n’a pu mettre la dernière main à presque aucun de ceux qu’il a produits ; et sa mort prématurée, causée par un exil inattendu, explique de reste le désordre dans lequel il a dû laisser ses manuscrits. Théophraste ne paraît pas avoir pu prendre soin de corriger ce désordre ; et il faut nous résigner à le souffrir. On a pu tenter une restauration pour quelques autres œuvres d’Aristote ; mais pour celle-ci, toute tentative serait inutile, comme pour la Métaphysique. L’Histoire des Animaux a été beaucoup moins maltraitée ; et nous pouvons nous en contenter telle qu’elle est, malgré plus d’une imperfection de détail. C’est à la fois le parti le plus simple et le plus sage. Le monument n’y perd absolument rien de sa grandeur et de sa beauté.
  477. Bon nombre d’oiseaux changent de couleur et de voix. L’observation est exacte pour nos climats, aussi bien que pour le climat de la Grèce. — Le merle. Les détails donnés sur le merle peuvent s’appliquer également à d’autres oiseaux, qui, comme lui, sont sujets à la mue. A ce moment, le merle se tait ; puis, il recommence à chanter au début de l’hiver ; mais dans cette saison, il n’a le plus souvent qu’un cri enroué et désagréable ; voir Buffon, tome XXI, p. 271, édit. de 1830. Ce qui peut donner lieu aussi à quelques méprises, c’est que la femelle du merle et les jeunes sont plus roux que noirs, et qu’on les confond avec les mâles, qui sont en général moins nombreux. Buffon, id., ibid., fait allusion à ce que dit Aristote. D’ailleurs, les variétés du merle sont multiples, et Buffon en compte une dizaine au moins pour nos climats, sans parler d’une foule d’espèces étrangères. — La grive. Le naturaliste grec rapproche avec raison la grive du merle ; ce sont deux oiseaux qui se ressemblent, et qui vont presque toujours de compagnie. La grive, mâle et femelle, change de couleur d’une saison à l’autre ; mais leur gazouillement ne change pas. Quelques espèces chantent très-rarement. Voir Buffon, tome XXI, p. 220, édit. de 1830.
  478. Le rossignol. On peut croire, d’après tout ce passage, que les Anciens admiraient le chant du rossignol autant que nous l’admirons. Mais ce que dit Aristote sur ce chant, non interrompu durant quinze jours et quinze nuits, ne doit, selon Buffon, s’appliquer qu’aux rossignols sauvages. Voir Buffon, tome XXIII, p. 70, édit. de 1830. — A mesure que l’été s’avance… Passé le mois de juin, le rossignol ne chante plus ; il ne lui reste qu’un cri rauque, que Buffon compare à un croassement, ibid., p. 73. — On lui donne en Italie un nom différent. Buffon, ibid. 9 p. 73, confirme ceci en le répétant, sans dire qu’il l’emprunte au naturaliste grec — Il se retire. Ou plutôt « il hiverne », Le rossignol est très-solitaire ; il arrive seul au mois d’avril et de mai ; il s’en retourne seul, au mois de septembre. Voir Buffon, ibid., p. 79. Ces époques d’arrivée et de départ varient avec les pays, et la saison. Voir plus haut, livre IV, ch. IX, §§ 14 et 18 ; voir aussi l’article de Pline, sur le chant du rossignol, livre X, ch. XLIII, p. 404, édit. et trad. E. Littré.
  479. Les rouges-gorges. Le mot grec est Erithacos ; il aurait fallu peut-être le conserver, parce que l’identification n’est pas sûre ; c’est ce qu’ont fait plusieurs commentateurs. Buffon ne doute pas que ce ne soit le rouge-gorge, tome XXIII, p. 142, édit. de 1830. — Queues-rouges. C’est la traduction littérale de l’expression du texte, composée de même étymologiquement Buffon dit : Rouges-queues, tome XXIII, p. 142, édit. de 1830.
  480. Des becs-figues. Le mot grec est Sycalis ; et l’identification est incertaine. C’est peut-être une espèce de mésange, Parus palustris. — Têtes-noires. C’est la traduction littérale du mot grec ; on pourrait traduire de plus près encore par Aigrettes-noires. Buffon croit que c’est la mésange à tête noire, ibid., p. 143. — Qui se changent les uns dans les autres. C’est la tournure même du texte ; l’expression pourrait être plus correcte ; mais le sens en est évident. — C’est ce qu’on a constaté. On voit que les observateurs étaient, dans l’Antiquité, aussi attentifs que nous pouvons l’être.
  481. La tourterelle ne roucoule plus. Il paraît bien en effet que la tourterelle cesse de roucouler à partir de septembre jusqu’au retour du printemps. — À l’époque de l’accouplement. L’observation est très-exacte ; et elle a été répétée bien des fois.
  482. Le coucou…. c’est à la canicule… Il n’est pas très-certain que les époques indiquées ici soient fort exactes, pour l’apparition et la disparition du coucou, sous le climat de la Grèce. — Il ne s’annonce plus. MM. Aubert et Wimmer proposent de retrancher la négation que donnent tous les manuscrits ; je crois qu’il n’y a pas à changer la leçon vulgaire, quoique l’expression du texte ne soit pas d’ailleurs très-correcte. — L’œnanthe. On ne sait pas précisément quel est cet oiseau ; il n’est pas nommé ailleurs qu’ici.
  483. La huppe. La zoologie moderne a conservé en partie le mot grec, en distinguant une espèce de huppe, la huppe commune, sous le nom d’Upupa epops. — Eschyle. Voir le fragment 341, p. 257, édit. Firmin-Didot. Il est très-probable que, dans les vers d’Eschyle, il y a une allusion à des croyances populaires sur la huppe ; mais il est difficile de savoir la part qu’on doit faire en ceci à la réalité. Pline, livre X, ch. XLIV, p. 405, édit. et trad. E. Littré, rappelle brièvement ce passage d’Eschyle, pour établir seulement que la huppe change de forme. Les vers du poète sont obscurs ; et je n’en ai peut-être pas bien saisi le sens. La huppe passe pour être fort sale dans toutes ses habitudes, et on la prend encore aujourd’hui dans quelques pays pour un oiseau de mauvais augure. Buffon, tome XXIV, p. 288, lui a consacré une longue étude.
  484. Il y a des oiseaux… On a remarqué avec raison que ces observations ne tiennent en rien à ce qui précède. Elles sont d’ailleurs exactes, en général. — L’attagen. On ne sait pas précisément quel est cet oiseau ; il est déjà nommé plus haut, ch. XIX, § 6. Cuvier, Règne animal, I, p. 483, croit que c’est un Ganga, espèce de perdrix. Ce nom a été donné, dans la zoologie moderne, à une espèce d’insecte ; voir la Zoologie descriptive de M. Clans, p. 642. — La plupart. Il paraît que l’aigle fait exception, et qu’il se baigne assez souvent.
  485. De faire du bruit par leur derrière. Il paraît qu’un bruit de ce genre se produit dans la tourterelle, parce qu’elle respire très-rapidement en roucoulant. Cette propriété singulière de quelques oiseaux ne semble pas avoir été étudiée récemment par les zoologistes. Voir la note, à la fin du chapitre précédent sur le désordre de ces derniers chapitres de l’Histoire des Animaux.