Utilisatrice:Raymonde Lanthier/Brouillon

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nous avons connues au temps des vacances particulièrement, alors que, la famille regroupée par notre retour du collège, nous pouvions nous taquiner, nous étriver à notre soûl. Mon frère aîné, Albert[1], excellait dans cet art. À l’heure des repas, présents à cette escrime, notre père et notre mère feignaient d’observer la neutralité, sans pourtant s’empêcher le plus souvent de rire jusqu’aux larmes.

Quand nous eûmes grandi, un seul deuil vint assombrir notre vie de famille : la mort d’une petite sœur, Imelda[2], décédée à l’âge de treize ans, assez subitement, à la suite d’une infection généralisée provoquée par un vaccin. J’étais alors en philosophie 1ère année, à Sainte-Thérèse. Je vins à la maison pour les funérailles. À chacun de nous, cette mort révéla, une fois de plus, la profondeur de notre fraternité. Pour ma part, j’en éprouvai un véritable choc. Cette enfant m’était extrêmement attachée. Puis, je ne pouvais m’empêcher de relier ce deuil à un autre que j’avais à peine connu, et qui pourtant, avait laissé dans mon âme de tout jeune enfant, je ne sais quelle trace de mélancolie. J’avais trois ans à peine lorsque la mort vint prendre trois d’entre nous : une petite sœur, l’aînée du premier lit, un petit frère, Julien, qui me précédait, une autre petite fille d’à peine un an, la première-née du second mariage.[3] En huit jours, l’impitoyable diphtérie les avait emportés. De cinq que nous étions, nous ne restions que deux : mon frère Albert et moi. Nul souvenir ne m’est resté de mon petit frère Julien. Mais un vieil album nous a gardé une photographie sur zinc de la petite sœur aînée morte à 8 ans. Photo qui a gravé, au fond de ma mémoire, les plus vifs souvenirs. Que de fois, du reste, ma mère m’a parlé de sa première-née, m’a dit l’appui que la chère enfant savait déjà lui apporter. Elle me la décrivait de caractère affectueux. Jolie, très jolie, il semble bien qu’en effet, elle l’était. Que de fois encore, elle m’a vanté les soins qu’après la mort de notre père, la petite sœur m’avait prodigués. Pour la petite défunte, j’ai conçu sans peine une affection posthume faite de beaucoup de tendresse et de regret nostalgique. Souvent je me suis penché sur sa photographie ; je tâchais à saisir l’expression de

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