Vie du pape Pie-IX/Pie IX protecteur des opprimés

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CHAPITRE XXII.

Pie IX protecteur des opprimés.


Voyez la malheureuse Pologne ! Voyez ce peuple martyr, prosterné sous le talon du Cosaque. Voyez cette nation, jadis puissante, jadis le rempart sanglant de l’Europe ; voyez cette nation chevaleresque, généreuse, catholique ; voyez là qui se meurt lentement, sous la main du bourreau tartare, à la vue de l’Europe ingrate, que cette longue agonie n’émeut point. Mais le meurtre de toute une nation s’accomplira-t-il sans qu’une voix s’élève pour protester contre ce crime ? N’existe-t-il pas un prince animé de l’esprit des temps anciens pour plaider en faveur du faible contre le fort, en faveur de l’opprimé contre le tyran ?

Oui, il en existe un. Mais c’est le souverain le plus faible de l’Europe, c’est un souverain dépouillé de ses États, un souverain sans armées, qui n’a pour défendre le droit, que sa parole que les nations affolées n’écoutent plus ; c’est Pie IX.

Dans une allocution magistrale, sans violence, mais avec une énergie terrible, Pie IX flétrit solennellement, à la face de l’univers entier, les iniquités du gouvernement russe. Nous transcrivons ici quelques-unes des nobles paroles du Souverain-Pontife, prononcées le 27 avril 1864 :

« Le sang des faibles et des innocents crie vengeance devant le trône de l’Éternel contre ceux qui le répandent. Pauvre Pologne ! J’aurais voulu ne pas parler avant le prochain consistoire ; mais je craindrais, en gardant plus longtemps le silence d’attirer sur moi la punition céleste annoncée par les prophètes à ceux qui laissent commettre l’iniquité… Ce potentat, dont l’immense empire s’étend jusqu’au pôle, persécute et tue ses sujets catholiques, et par sa cruauté féroce, les a poussés à l’insurrection. Sous prétexte de réprimer cette insurrection, il extirpe le catholicisme, il déporte des populations entières dans des contrées glaciales où elles se voient privées de tout secours religieux… Il arrache les prêtres à leurs troupeaux, il les exile, il les condamne aux travaux forcés ou à d’autres peines infâmantes. Heureux ceux qui ont pu fuir et qui maintenant errent sur une terre étrangère !… Et que personne ne dise qu’en Nous élevant contre de tels attentats, Nous fomentons la révolution européenne. Nous savons distinguer entre la révolution socialiste et les droits légitimes d’une nation qui lutte pour son indépendance et sa foi religieuse…

“Nous déclarons… que Nous donnons Notre bénédiction apostolique à tous ceux qui, dans la journée d’aujourd’hui, auront prié pour la Pologne. Prions tous pour elle ! ”

Dans plusieurs autres circonstances Pie IX se montra l’intrépide protecteur des faibles. Il accueillit à Rome le roi de Naples, chassé de ses États par son cousin Victor-Emmanuel, et malgré les menaces du roi sarde et les conseils perfides venus des Tuileries, François II resta à Rome.

La duchesse de Parme, expulsée de son pays par la révolution, trouva dans la ville des papes une retraite paisible. La malheureuse impératrice Charlotte, veuve de Maximilien, fut aussi bien aise de se réfugier à Rome après qu’on l’eut repoussée ailleurs.