Vie et opinions de Tristram Shandy/4/4
Chez Jean-François Bastien, (Tome troisième. Tome quatrième, p. 12-13).
CHAPITRE IV.
Description de Paris
Je ne sais si c’est la faute des François ou la nôtre, s’ils s’expliquent mal, ou si nous ne les comprenons pas bien. — Mais quand il nous disent que qui a vu Paris a tout vu, il m’est évident qu’ils se trompent. — Du moins, s’ils entendent parler de ce qu’on voit à la lueur des lanternes. — Car on ne voit rien.
En plein jour la chose est différente.
Paris est percé de mille à douze cents rues. — Quand vous les aurez toutes suivies, quand vous aurez vu ses portes, ses ponts, ses places, ses statues ; quand vous aurez visité ses quatre palais et toutes ses églises, parmi lesquelles vous vous garderez d’oublier Saint-Roch et Saint-Sulpice, —
Alors vous aurez vu…
Mais que sert de vous le dire ? Lisez-le vous-même écrit en ces mots sur le portique du Louvre :
« Non orbis gentem, non urbem gens habet ullam,
» Ulla parem. » —
On peut le traduire ainsi pour l’intelligence du lecteur :
« Cette nation est unique parmi les nations ;
» Cette ville est unique parmi les villes :
» Chanter et rire, — rire et mourir. » —
Il faut convenir que le François a une manière joviale de traiter tout ce qui est grand.