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Vies, doctrines et sentences des philosophes illustres/8/Eudoxe

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J. H. Schneider, Libraire (Tome IIp. 261-264).
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Livre VIII


EUDOXE.



Eudoxe, fils d’Æschine, nâquit à Gnide, & devint tout à la fois Astrologue, Géomêtre, Médecin & Législateur. Il apprkit d’Archytas la Géometrie, & étudia la Médecine sous Philistion de Sicile, dit Callomaque dans ses Tables. Sotion, dans ses Sucessions, nous informe qu’il eut Platon pour Maître. Dans sa vingt-troisieme année Eudoxe, pauvre & nécessiteux, mais aussi empressé de s’instruire que touché de la réputation des disciples de Socrate, s’en fut à Athenes avec le Médecin Théomedon, qui le nourrissoit, & qui, selon quelques-uns, avoit pour lui une tendresse toute particuliere. Etant arrivé au Pyrée, il alloit réguliérement tous les jours à Athenes, d’où, après avoir entendu les Orateurs, il revenoit au logis. Son séjour dans ce lieu dura deux mois, au bout desquels il s’en retourna chez lui. Ses amis ayant contribué à lui amasser quelque argent, il partit pour l’Égypte, accompagné du Médecin Chrysippe, & muni d’une lettre de recommandation qu’Agésilas lui donne pour Néctanabe, qui parla en sa faveur aux Prêtres d’Égypte. Il s’arrêta dans ce pays pendant un an & quatre mois, se faisant raser la barbe & les sourcils. Si on en croit quelques-uns, il s’y occupa à composer un ouvrage de Mathématique, qu’il intitula Octaëtre. Il se rendit ensuite à Cyzique & dans la Ptopontide, où il exerça la Philosophie. Enfin, après avoir vû Mausole, il reprit la route d’Athenes, & y aprut avec un grand nombre de disciples, dans le dessein, à ce qu’on croit, de mortifier Platon qui n’avoit pas d’abord voulu le recevoir. Il y en a qui disent qu’étant avec plusieurs autres à un repas que donnoit celui-ci, il introduisit l’usage de se placer à table en demi-cercle. Nicomaque, fils d’Aristote, lui attribue d’avoir dit que la volupté est un bien.

Eudoxe fkut extraordinairement estimé dans sa patrie, témoin le décret qu’on y fit à son honneur. La Grece n’eut pas moins de respect pour lui, tant à cause des Loix qu’il donna à ses concitoyens, comme le rapporte Hermippe dans son quatrieme livre des Sept Sages, que par rapport à ses excellens ouvrages sur l’Astrologie, la Géometrie & d’autres Sciences.</p. Ce Philosophe ekut trois filles, nommées Actis, Philtis & Delphis. Eratosthene, dans ses livres adressés à Baton[1], dit qi’il écrivit aussi des Dialogues Cyniques. D’autres au contraire prétendent qu’ils furent l’ouvrage d’Auteurs Egyptiens, qui les composerent en leur langue, & qu’Eudoxe les traduisit en Grec. Il prit de Chrysippe de Gnide, fisl d’Erinée, les notions des choses qui regardent les Dieux, Le Monde & les Météores. Quant à la Médecine, il fut dressé à cette science par Philistion de Sicile. Au reste il a laissé de fort beaux Commentaires.

Outre ses trois files, Eudoxe eut un fils, appellé Aristagore, qui éleva Chrysippe, fils d’Æthlius. Ce Chrysippe est Auteur d’un Traité de Médecine sur les maladies des yeux, auquel il travailla par occasion, en faisant des recherches Physiques.

Il y a eu trois Eudoxes ; celui-ci ; un autre, Rhodien de naissance & Historion ; un troisieme de Sicile, fils d’Agathocle, Poëte Comique, trois fois vainqueur dans les fêtes de Bacchus qui se célebroient en ville, & cinq fois dans celles de la campagne, selon Apollodore dans ses Chroniques. Nous trouvons encore un Médecin de même nom, natif de Gnide, & de qui notre Eudoxe, dans son livre de la Circonférence de la Terre, dit qu’il avoit pour maxime d’avertir qu’il falloit tenir son corps & ses sens dans un mouvement continuel par toutes sortes d’exercices.

Le même rapporte que cet Eudoxe de Gnide étoti en vogue vers la CIII. Olympiade, & qu’il découvrit les regles des lignes courbes. Il mourut dans la cinquante-troisieme année de son âge. Pendant qu’il étoit en Égypte auprès d’Isonuphis Héliopolitain, il arriva que le bœuf Apis lui lêcha l’habit, d’où les Prêtres coaciurent qu’il seroit fort célebre, mais qu’il ne vivroit pas longtems. Ce recit de Phavorin, dnas ses Commentaires, nous a donné matiere à cés cers sur son sujet.

On dit qu’Eudoxe, étant à Memphis, s’informe de son sort en s’adressant au bœuf célebre de ces lieux. L’animal ne répondit rien. Eh qu’auroit pû dire un bœuf ? Apis manque de vois, la nature ne lui en pas donné l’usage ; mais se tenant de côté, il lécha l’habit d,Euxode. Qu’annonçoit-il par-là ? qu’Euxode ne vivroit pas longtems. En effet il mourut bientôt, n’ayant vécu que cinquante-trois ans.

La grande réputation, qu’il avoit dans le monde, fit que par le changement de la seconde lettre d son nom, on l’appella d’un autre, qui signifioit Homme Célebre.

Mais après avoit fait mention des Philosophes Pythagoriciens les plus distngués, venons-en à divers autres qu ise sont rendus illustres, & commençons par Héraclite.

Fin de la I. Partie du
TOME SECOND.



  1. D’autres traduisent Hecaton. Voyez Menage.