Vies des hommes illustres/Titus Quintius Flamininus
Charpentier, (Volume 2, p. 305-334).
TITUS QUINTIUS FLAMININUS.
C’est Titus Quintius Flamininus que nous mettons en parallèle avec Philopœmen. Ceux qui voudront connaître sa figure n’ont qu’à jeter les yeux sur sa statue de bronze qui est à Rome, placée près du grand Apollon de Carthage, vis-à-vis du cirque, et qui porte une inscription grecque. Quant au caractère, on dit qu’il était également prompt et à s’irriter et à rendre service ; avec cette différence qu’il ne châtiait que légèrement, et sans s’opiniâtrer dans sa colère, au lieu qu’il ne se contentait jamais de faire plaisir à demi : il conservait pour tous ceux qu’il avait obligés autant d’affection et de zèle que s’ils eussent été ses bienfaiteurs ; sa plus grande richesse était, disait-il, de cultiver, de s’attacher par ses prévenances, ceux à qui il avait rendu service. Plein d’une extrême ambition et d’un ardent désir de gloire, il voulait être l’unique artisan de ses actions les plus grandes et les plus belles, et préférait ceux qui avaient besoin de son secours à ceux qui pouvaient lui venir en aide : il voyait dans ceux-là une matière pour exercer sa vertu, et dans les autres des rivaux qui lui disputaient la gloire.
Il fut élevé dans la profession des armes ; car, Rome ayant alors plusieurs guerres importantes à soutenir, tous les jeunes gens, dès qu’ils étaient en âge de servir, allaient apprendre, dans les travaux de la guerre, l’art de commander. Il fit sa première campagne comme tribun des soldats, sous le consul Marcellus[1], dans la guerre contre Annibal. Après que Marcellus eut péri dans une embuscade, Titus, nommé gouverneur du pays tarentin et de la ville de Tarente, qu’on venait de prendre pour la seconde fois, se distingua dans cette charge, par sa justice non moins que par ses talents militaires, et mérita d’être choisi pour conduire et organiser les colonies qui furent envoyées dans les deux villes de Narnia et de Cossa[2]. Il se sentit alors animé d’une noble confiance ; et, passant par-dessus ces dignités intermédiaires où les jeunes gens faisaient d’ordinaire leurs preuves, comme le tribunat, la préture, l’édilité, il brigua tout d’un coup le consulat. Les tribuns du peuple Fulvius et Manlius s’opposaient à son élection, représentant qu’il serait d’un dangereux exemple qu’un jeune homme, qui n’était pas encore initié, pour ainsi dire, aux premières cérémonies, aux premiers mystères du gouvernement, emportât de force, en faisant violence aux lois, la suprême magistrature. Le Sénat remit la décision aux suffrages du peuple, et le peuple le nomma consul avec Sextus Élius, quoiqu’il n’eût pas encore atteint sa trentième année.
La guerre contre Philippe et les Macédoniens lui échut par le sort ; et ce fut une bonne fortune pour les Romains que les affaires dont il se trouvait chargé, et les ennemis qu’il avait à combattre, n’exigeassent pas du général un continuel emploi des armes et de la force, et laissassent bien plus à gagner par la douceur et la persuasion. La puissance macédonienne suffisait pour assurer Philippe contre le premier choc de l’ennemi ; mais, dans une guerre de longue durée, ce qui faisait sa force, ce qui fournissait à ses dépenses, son refuge assuré, en un mot l’arsenal de sa phalange, c’était la Grèce : tant que les Grecs n’étaient pas détachés de Philippe, cette guerre ne pouvait pas être l’affaire d’une seule bataille. La Grèce n’avait pas encore eu de grandes relations avec les Romains : c’était la première circonstance où ses intérêts se trouvassent engagés dans les leurs ; et, si le général n’eût pas été un homme d’un naturel doux, qui préférât les voies de conciliation à la violence, qui sût écouter avec affabilité et persuader par la confiance ceux qui traitaient avec lui, tout en maintenant rigoureusement les droits de la justice, la Grèce ne se fût pas décidée sans difficulté à quitter ses maîtres accoutumés pour passer sous une domination étrangère. C’est ce qu’on va voir clairement dans le récit des actions de Titus.
Il savait que les généraux chargés avant lui de cette guerre, Sulpicius et Publius[3] n’étaient entrés en Macédoine que dans l’arrière-saison, et qu’ils avaient traîné en longueur la guerre contre Philippe, consumant leurs forces en combats de postes, en escarmouches pour forcer un passage ou enlever un convoi : il ne voulut pas, comme eux, passer l’année de son consulat à Rome, occupé à traiter les affaires, à jouir des honneurs de sa charge, pour ne se rendre à son armée qu’au dernier moment, et gagner, par conséquent, une année outre celle du consulat, en employant la première à gouverner dans Rome, et l’autre à faire la guerre. Il n’avait d’autre ambition que de pousser vivement la guerre durant l’année entière de son consulat : il renonça aux honneurs et aux distinctions dont il eût joui dans la ville ; il demanda au Sénat qu’on lui permît d’emmener avec lui son frère Lucius pour commander la flotte ; il prit, parmi les soldats qui avaient défait, sous les ordres de Scipion, Asdrubal en Espagne et Annibal en Afrique, trois mille hommes encore en état de servir et pleins d’ardeur, et qui devaient donner, pour ainsi dire, la trempe à son armée ; il s’embarqua, et arriva heureusement en Épire. Il trouva Publius campé en présence de Philippe, lequel depuis longtemps gardait les défilés qui sont le long de l’Apsus[4], tandis que le général romain restait sans rien faire, arrêté par la difficulté des lieux.
Titus prit le commandement de l’armée, et, après avoir envoyé Publius à Rome, il se mit à reconnaître le pays. Il n’est pas moins fort d’assiette que celui de Tempé[5] ; mais il n’a pas, comme ce dernier, des arbres magnifiques, des forêts verdoyantes, des retraites et des prairies délicieuses. Il est fermé, à droite et à gauche, d’une longue chaîne de hautes montagnes, dont les racines forment une gorge large et profonde, que traverse l’Apsus, fleuve assez semblable au Pénée, et pour l’aspect et pour la rapidité. L’Apsus couvre de ses eaux tout l’espace situé entre les pieds des montagnes, à l’exception d’un chemin étroit taillé dans le roc, le long du courant, et si escarpé qu’une armée y pouvait passer difficilement, ne fût-il même pas gardé ; et, pour peu qu’il fût défendu, parfaitement impraticable. Quelques-uns conseillaient à Titus de faire un circuit par la Dassarétide[6], près de Lyncus[7], où l’on trouverait un chemin large et facile. Mais il craignit de s’exposer à manquer de vivres, en s’éloignant de la mer pour se jeter dans un pays maigre et mal cultivé, si Philippe évitait le combat, et à se voir forcé, après être resté longtemps sans rien faire, comme son prédécesseur, de regagner la mer : il résolut donc de prendre par le haut des montagnes, et de forcer le passage les armes à la main. Mais les montagnes étaient occupées par les troupes de Philippe, qui, des deux côtés, faisaient pleuvoir sur les Romains une grêle de traits et de flèches. Il y eut des engagements très-vifs avec force coups bien portés ; des deux parts il tombait des morts, mais sans résultat décisif. Enfin des bergers, qui faisaient paître leurs troupeaux dans la contrée, vinrent dire qu’ils connaissaient un détour que les ennemis avaient négligé de garder, par lequel ils promettaient de faire passer l’armée, et de la conduire au plus tard en trois jours sur le sommet des montagnes. Ils fournirent pour témoin et pour garant de leur véracité Charops, fils de Machatas, prince des Épirotes, personnage attaché aux Romains, mais qui ne les favorisait que secrètement, parce qu’il craignait Philippe. Sur la parole de Charops, Titus envoie un de ses tribuns avec quatre mille hommes d’infanterie et trois cents chevaux. Les pâtres marchaient en tête de la troupe liés et garrottés ; le jour, on restait en repos, dans des endroits creux, couverts de bois ; la nuit, on s’avançait à la clarté de la lune qui était dans son plein.
Titus, depuis le départ de cette troupe, maintenait son armée dans l’immobilité, se bornant à engager de temps en temps quelques escarmouches, afin d’occuper l’ennemi. Mais, dès le matin du jour où le détachement qu’il avait envoyé devait se montrer sur les hauteurs, il mit en mouvement tout ce qu’il avait de soldats : il divise son armée en trois corps ; il se place lui-même au centre, et conduit ses bataillons par cet étroit chemin qui longe la rivière. Il gravissait la montagne, en butte aux traits des Macédoniens, et attaquant au milieu des rochers tous ceux qui lui barraient le passage ; les deux autres corps marchaient sur les côtés, faisant à l’envi des efforts extraordinaires, et l’engageant, avec une vive ardeur, dans ces âpres sentiers, lorsque le soleil, en se levant, laisse apercevoir au loin une fumée, peu apparente d’abord, et semblable à un brouillard des montagnes. Les ennemis ne pouvaient la voir, parce qu’elle s’élevait de derrière eux, les hauteurs étant déjà occupées. Les Romains, fatigués du combat et des difficultés de leur marche, espérèrent, tout incertains qu’ils fussent de la vraie cause de cette fumée, que c’était ce qu’ils désiraient. Mais quand elle se fut épaissie au point d’obscurcir l’air, et qu’ils la virent monter en gros tourbillons, ils ne doutèrent plus que ce ne fût un signal ami. Ils se jettent sur les Macédoniens d’un élan rapide et terrible, en poussant le cri de guerre, et les acculent dans les endroits les plus âpres et les plus escarpés, tandis que la troupe qui occupait le sommet des montagnes répondait par ses cris à leur clameur guerrière. En un instant la déroute des ennemis fut complète ; mais il n’y en eut pas plus de deux mille de tués, parce que la difficulté des lieux ne permit pas de les poursuivre.
Les Romains pillèrent leur camp, prirent les tentes et les esclaves, et s’emparèrent des défilés. Ils traversèrent l’Épire avec tant d’ordre et de retenue, que, malgré l’éloignement où ils étaient de leur flotte et de la mer, quoiqu’ils n’eussent pas reçu leur ration de blé mensuelle, et qu’ils n’eussent pas d’argent pour s’en procurer, ils n’enlevèrent cependant rien dans un pays où tout était en abondance. C’est que Titus savait que Philippe traversait la Thessalie comme un fuyard, forçant les habitants de quitter leurs demeures pour se retirer dans les montagnes, brûlant les villes, livrant au pillage les richesses que leur poids ou leur quantité ne permettait pas d’emporter, et abandonnant déjà, pour ainsi dire, la contrée aux Romains ; il se fit un point d’honneur d’obtenir de ses soldats qu’ils la traitassent, durant leur marche, comme chose à eux acquise, et qu’on leur avait cédée. La suite fit bientôt sentir tout le prix de cette modération. À peine entrés dans la Thessalie, ils virent toutes les villes se donner à eux : les Grecs situés en deçà des Thermopyles brûlaient de voir arriver Titus, et de se jeter dans ses bras. Les Achéens, renonçant à l’alliance de Philippe, arrêtèrent, par un décret public, qu’ils s’uniraient avec les Romains pour lui faire la guerre ; les Opuntiens[8] rejetèrent l’offre que leur avaient faite les Étoliens, les plus dévoués auxiliaires qu’eussent alors les Romains, de mettre une garnison dans leur ville, et de se charger de la défendre ; mais ils appelèrent d’eux-mêmes Titus, et se remirent à sa discrétion avec une entière confiance.
On rapporte que Pyrrhus, la première fois qu’il vit d’une hauteur l’armée des Romains rangée en bataille, dit que l’ordonnance des Barbares ne lui paraissait nullement barbare. La première fois que ces peuples avaient affaire à Titus, ils étaient forcés de tenir à peu près le même langage. Ils avaient entendu dire aux Macédoniens qu’il venait un homme à la tête d’une armée barbare, subjuguant et détruisant tout par la force des armes ; et ils voyaient un guerrier à la fleur de l’âge, d’un air doux et hautain, qui parlait purement la langue grecque, et qui aimait la véritable gloire. Séduits par ces belles qualités, ils se répandaient dans les villes, qu’ils remplissaient des mêmes sentiments d’affection qu’il leur avait inspirés, et les assuraient qu’elles trouveraient en lui l’auteur de leur liberté. Quand ensuite il fut entré en conférence avec Philippe[9], qui semblait désirer la paix, et qu’il la lui eut offerte avec l’amitié des Romains, à condition qu’il laisserait les Grecs vivre en liberté sous leurs propres lois et retirerait ses garnisons de leurs villes, et que Philippe eut refusé d’accéder à ces conditions, alors il fut bien constant, même aux yeux des plus zélés partisans de Philippe, que les Romains étaient venus faire la guerre, non pas aux Grecs, mais aux Macédoniens, pour la défense des Grecs ; et toutes les villes allèrent se rendre volontairement à leur général.
Comme il traversait la Béotie sans y commettre aucune hostilité, les premiers d’entre les Thébains sortirent à sa rencontre ; ils tenaient pour les Macédoniens à cause de Brachyllélis[10] ; mais ils voulurent saluer Titus et lui adresser leurs hommages, comme s’ils étaient en bonne intelligence avec les deux partis. Il les reçut avec affabilité, et leur tendit la main amicalement ; puis il poursuivit tranquillement sa route avec eux, tantôt les questionnant et les faisant parler, tantôt les amusant par ses récits, et donna à ses soldats, qui étaient restés derrière, le temps de le rejoindre. À force de pousser en avant de la sorte, il finit par entrer dans la ville avec les Thébains, qui ne l’y voyaient pas avec plaisir, mais qui n’osèrent résister, parce qu’il avait une escorte passablement nombreuse. Là, Titus fit un discours aux Thébains, comme s’il n’eût pas eu la ville en son pouvoir, et les engagea à se déclarer pour les Romains. Il était secondé par le roi Attalus, qui pressait les Thébains de céder à ses conseils. Mais Attalus, ambitieux apparemment d’étaler son éloquence devant Titus, mit dans son plaidoyer plus de véhémence qu’il ne convenait à son âge : tout à coup, au milieu de son discours, il fut pris d’un étourdissement ou d’une quinte de toux qui lui ôta la parole et le sentiment. Il tomba à la renverse, et, peu de temps après, ayant été transporté en Asie, il mourut. Du reste, les Béotiens embrassèrent le parti des Romains.
Philippe ayant envoyé des ambassadeurs à Rome, Titus fit partir aussi des députés, pour solliciter du Sénat la prorogation de son commandement si l’on persistait à faire la guerre, ou, sinon, des pleins pouvoirs pour faire la paix. Son excessive ambition lui faisait craindre de se voir dépouillé de sa gloire, si l’on envoyait un autre général pour continuer la guerre. Ses amis firent si bien que Philippe n’obtint rien de ce qu’il demandait, et que Titus conserva la conduite de la guerre. Titus, en recevant le décret, se sentit enflé de nouvelles espérances : il marche vers la Thessalie, pour attaquer Philippe en personne, emmenant avec lui plus de vingt-six mille hommes, dont les Étoliens avaient fourni six mille fantassins et trois cents chevaux. L’armée de Philippe n’était guère moins forte en nombre. Ils s’avancèrent l’un contre l’autre et se rencontrèrent près de Scotuse[11], où ils résolurent de hasarder la bataille. Ce ne fut pas un sentiment de crainte, comme il arrive d’ordinaire, qu’éprouvèrent les chefs des deux armées en se voyant si près l’un de l’autre ; leurs troupes elles-mêmes étaient plus que jamais pleines de courage et d’ardeur : les Romains, à la pensée d’une victoire à remporter sur ces Macédoniens, qui devaient aux exploits d’Alexandre un si haut renom de valeur et de puissance ; les Macédoniens, dans l’espoir que, s’ils battaient les Romains, si supérieurs aux Perses, ils rendraient le nom de Philippe plus glorieux que celui d’Alexandre. Titus anima ses soldats à se montrer hommes de cœur, à déployer tout leur zèle en combattant dans la Grèce, le plus beau des théâtres, contre leurs plus valeureux adversaires. Philippe, soit hasard, soit précipitation, parce que le temps le pressait, monta sur une éminence qui se trouvait hors de son camp, sans s’apercevoir qu’il était sur un lieu de sépulture où l’on avait enterré plusieurs morts. Il commençait à haranguer ses troupes, et à leur dire tout ce qui est d’usage en pareille occasion ; mais, comme il vit que tous étaient saisis d’un profond découragement, à raison de l’augure sinistre du lieu d’où il parlait, il se tut, tout bouleversé lui-même, et ne voulut point combattre ce jour-là.
Le lendemain, à l’aube, après une nuit humide et pluvieuse, les nuages s’étant épaissis en brouillard, toute la plaine fut couverte d’une profonde obscurité ; et dès que le jour parut, le brouillard descendit des montagnes, se répandit sur tout l’espace qui était entre les deux camps, et en déroba entièrement la vue. Les détachements que les deux armées avaient envoyés pour reconnaître les lieux et s’emparer de quelques postes, s’étant bientôt rencontrés, combattirent près des Cynoscéphales, comme on les appelle, qui sont un certain nombre de petites collines terminées en pointe, placées les unes devant les autres, et qui doivent leur nom à leur ressemblance avec des têtes de chien. Cette escarmouche eut des vicissitudes, comme il était naturel dans des lieux difficiles : chaque parti fuyait et poursuivait à son tour, et des deux camps on envoyait continuellement du secours à ceux qui étaient pressés et qui reculaient : puis, l’air en s’éclaircissant laissa voir ce qui se passait ; et l’on en vint aux mains avec toutes les forces des deux armées. Philippe lança des hauteurs la phalange de son aile droite sur les Romains, et les fit plier sous le poids de ce front de bataille, couvert de boucliers serrés l’un contre l’autre, et tout hérissé de longues piques. Mais, à son aile gauche, les rangs se trouvaient séparés et rompus par les enfoncements qui formaient l’intervalle des collines. Titus laisse cette aile, qui était déjà vaincue ; et, passant rapidement à l’autre aile, il charge les Macédoniens, que l’inégalité et les coupures du terrain empêchaient de conserver leur forme de phalange, et de donner à leurs rangs cette profondeur qui était la force de leur armée. Quant à lutter d’homme à homme, les Macédoniens ne le pouvaient pas davantage, couverts d’armes pesantes et qui gênaient leurs mouvements. Car la phalange, tant qu’elle ne fait qu’un seul corps, qu’elle conserve ses rangs serrés et ses boucliers joints, ressemble à un animal d’une force indomptable. Mais, vient-elle à se rompre, chaque combattant perd sa force individuelle, à raison de l’espèce d’armure qu’il porte, et parce qu’il tirait sa force de la combinaison des parties de l’ensemble, bien plus que de lui-même[12].
L’aile gauche des ennemis étant ainsi mise en fuite, une partie des Romains s’attachent à sa poursuite ; les autres chargent en flanc ceux des Macédoniens qui combattaient encore, et en font un grand carnage. Vainqueurs il n’y a qu’un instant, ces derniers s’ébranlent à ce choc, et se sauvent en jetant leurs armes. Il n’y eut pas moins de huit mille Macédoniens tués à cette bataille, et environ cinq mille prisonniers. Philippe échappa ; mais ce fut la faute des Étoliens, qui s’arrêtèrent à piller son camp, pendant que les Romains étaient occupés à sa poursuite, si bien qu’à leur retour ceux-ci ne trouvèrent plus rien. De là, entre les Romains et les Étoliens, des paroles injurieuses, des querelles ouvertes. Mais les Étoliens offensèrent bien davantage Titus, en s’attribuant l’honneur de la victoire, et en se hâtant de répandre dans la Grèce la renommée de leurs prétendus exploits. Aussi, dans les vers des poètes et dans les chansons populaires composés à ce sujet, les Étoliens étaient-ils toujours nommés les premiers ; en particulier dans l’épigramme suivante, dont la vogue fut extraordinaire :
Passant, tu vois sur cette plaine, sans funérailles, sans tombeaux,
Trente mille Thessaliens gisants,
Abattus sous les coups valeureux des Étoliens, et des Latins
Que Titus avait amenés de la vaste Italie.
L’Émathie a senti le fléau terrible ; et cette audace dont Philippe
Était animé a fui d’une fuite plus rapide que celle des cerfs agiles.
Ces vers sont d’Alcée, qui, pour insulter à Philippe, exagéra faussement le nombre des morts ; et, comme on les chantait partout dans le peuple, Titus en était plus mortifié que Philippe, lequel répondit aux attaques d’Alcée, en ajoutant à ses vers deux vers de même mesure :
Passant, cet arbre sans écorce et sans feuilles, dressé sur cette colline,
Ce haut gibet fiché en terre, c’est pour Alcée.
Titus, qui était jaloux de l’estime des Grecs, fut très-sensible à cet affront ; et depuis il fit seul toutes les affaires, sans tenir désormais le moindre compte des Étoliens. Leur irritation fut extrême ; et, quand il eut accueilli une ambassade qui lui apportait, de la part du Macédonien, des propositions de paix, ils se mirent à courir par les villes, criant qu’on vendait la paix à Philippe alors qu’on pouvait déraciner entièrement la guerre, et anéantir une puissance qui, la première, avait réduit la Grèce en esclavage. Les plaintes des Étoliens jetaient le trouble parmi les alliés ; mais Philippe, en venant lui-même traiter de la paix, fit cesser tous les soupçons, car il se remit à la discrétion de Titus et des Romains. Titus termina la guerre en laissant à Philippe le royaume de Macédoine, en l’obligeant de renoncer à toute prétention sur la Grèce et de payer la somme de mille talents[13] ; il lui ôta tous ses vaisseaux, à l’exception de dix, et prit pour otage Démétrius, l’un de ses deux fils, qu’il envoya à Rome.
En faisant cette paix, il se prêta sagement aux circonstances et sut prévoir l’avenir ; car Annibal, l’implacable ennemi des Romains, banni de son pays s’était réfugié auprès du roi Antiochus, qu’il pressait de poursuivre sa fortune, et de se livrer au cours de ses brillantes prospérités. Antiochus, qui devait à ses exploits le surnom de Grand, était assez porté de lui-même aux vastes entreprises : il aspirait à la monarchie universelle, et ne cherchait qu’une occasion d’attaquer les Romains. Si Titus, par une sage prévoyance de l’avenir, n’eût pas accédé à la paix, et que la guerre d’Antiochus eût concouru avec celle qu’on avait déjà dans la Grèce contre Philippe, il suffisait que les deux plus grands rois et les plus puissants qu’il y eût alors eussent uni leurs intérêts et leurs forces, et Rome aurait eu à soutenir des combats non moins difficiles et périlleux que dans ses luttes contre Annibal. Titus, en plaçant à propos la paix entre ces deux guerres, en terminant l’une avant que l’autre eût commencé, ruina d’un seul coup la dernière espérance de Philippe et la première d’Antiochus.
Les dix commissaires que le Sénat avait envoyés à Titus lui conseillaient de déclarer libres tous les autres Grecs, à l’exception de Corinthe, de Chalcis et de Démétrias, où il mettrait des garnisons, pour s’assurer contre Antiochus. Alors les Étoliens, toujours habiles dans l’art de calomnier, employèrent tout ce qu’ils avaient de talent en ce genre pour porter les villes à la sédition. Ils priaient Titus de délier les fers de la Grèce : c’était le nom que Philippe avait coutume de donner aux trois villes dont il s’agit ; en même temps ils demandaient aux Grecs si, pour avoir une chaîne, mieux polie à la vérité, mais plus pesante, ils se trouvaient plus heureux ; s’ils admiraient Titus comme un bienfaiteur, parce qu’il leur avait mis au cou les chaînes dont il avait dégagé leurs pieds.
Piqué de ces imputations et poussé à bout, Titus pressa si fort le conseil, qu’il finit par obtenir qu’on retirerait les garnisons de ces villes, afin que les Grecs reçussent de lui la grâce tout entière. Aussi, quand on célébra les jeux isthmiques[14] s’assit-il dans le stade une foule immense de peuple, pour y voir les combats gymniques ; car la Grèce, délivrée depuis quelque temps des guerres, convolait à ces fêtes, dans l’attente de la liberté, et pour jouir du moins d’une paix dont elle était assurée. Puis, le son de la trompette ayant fait faire silence dans l’assemblée, le héraut s’avance au milieu de l’arène, et proclame à haute voix : « Que le Sénat des Romains, et Titus Quintius, général consulaire, après avoir vaincu Philippe et les Macédoniens, accordent immunité de garnisons et d’impôt, avec la faculté de se régir par leurs lois nationales, aux Corinthiens, Locriens, Phocéens, Eubéens, Achéens, Phthiotes, Magnètes, Thessaliens et Perrhèbes. » Au premier moment, tous les spectateurs n’entendirent ni tout entière, ni distinctement, la proclamation. Le stade était plein de confusion et de trouble ; les uns témoignaient leur admiration, les autres s’informaient de ce qu’on avait dit ; et tous demandaient que le héraut recommençât. Mais, quand le silence se fut rétabli, et que le héraut, ayant renforcé sa voix, eut répété la proclamation, et porté la nouvelle dans tous les rangs, alors ce fut une immense clameur de joie, qui retentissait jusqu’à la mer. Tout le théâtre se leva debout et ne pensa plus aux combattants ; tous s’empressaient de courir saluer Titus : on l’appelait le sauveur, le défenseur de la Grèce. On vit alors s’effectuer ce qu’on répète souvent pour désigner toute la force possible et toute la grandeur des cris d’une foule nombreuse. Des corbeaux qui volaient par hasard au-dessus de l’assemblée, tombèrent dans le stade[15]. La cause en est qu’il se fit une rupture dans le tissu de l’air, lequel se déchire lorsqu’il est en même temps frappé par plusieurs voix très-fortes, et n’offre plus au vol des oiseaux un appui suffisant ; et ceux-ci glissent d’en haut, comme s’ils tombaient dans le vide. Peut-être est-il plus vrai de dire qu’ils tombent et meurent, frappés avec force par ces voix réunies, comme par un trait ; ou bien encore ce serait un effet des tourbillons qui s’élèvent dans l’air, comme on voit tournoyer les vagues de la mer, agitées violemment par la tempête.
Titus, à la fin du spectacle, prévoyant qu’il se ferait autour de lui un concours immense, se déroba bien vite à leur empressement, sans quoi il eût couru risque de se voir étouffé, tant la foule affluait, et de tous les côtés à la fois ! Quand ils furent bien las d’avoir crié jusqu’à la nuit devant sa tente, ils se retirèrent, et tous ceux de leurs amis et de leurs concitoyens qu’ils rencontraient, ils les saluaient, les embrassaient ; puis ils s’en allaient les uns chez les autres souper et vider les coupes ensemble. Et là, comme on pense bien, la joie redoublait encore : on s’entretenait de la Grèce ; on se rappelait les grands combats qu’elle avait soutenus pour la liberté : « Après tant d’efforts, disaient-ils, elle n’a jamais reçu de salaire plus doux et plus solide de ses travaux, que celui qu’elle doit à ces étrangers, qui sont venus combattre pour elle. Elle a emporté, sans verser une goutte de sang, pour ainsi dire, et sans qu’elle ait eu à porter un seul deuil, le prix le plus, glorieux, le plus digne d’être disputé par les armes. Si la valeur et la prudence sont chose rare parmi les hommes, une vertu plus rare encore, c’est la justice. Les Agésilas, les Lysandre, les Nicias, les Alcibiade, étaient des généraux habiles certainement à conduire des guerres et à remporter des victoires sur terre et sur mer, mais ils n’ont jamais su faire servir leurs succès à une généreuse et noble bienfaisance. En effet, si l’on excepte l’exploit de Marathon, la bataille navale de Salamine, et Platée, et les Thermopyles, et les victoires de Cimon sur l’Eurymédon et auprès de Cypre, tous les autres combats, la Grèce les a livrés contre elle-même pour se mettre sous le joug ; tous les trophées qu’elle a érigés ont été des monuments de ses malheurs et de sa honte ; et c’est aux vices, à la jalouse rivalité de ses généraux qu’elle a dû presque tous ses revers. Et voilà que des étrangers, qui n’avaient plus, semblait-il, avec la Grèce, que de faibles étincelles d’une ancienne parenté presque effacée, de qui on eût dû s’étonner que la Grèce pût jamais recevoir le moindre encouragement, le moindre conseil salutaire, voilà qu’ils ont arraché la Grèce, au prix des plus grands travaux, des plus grands périls, des mains de maîtres durs et de tyrans cruels, et lui ont rendu la liberté ! »
Telles étaient les réflexions des Grecs ; et la conduite de Titus ne démentit pas la proclamation. Il envoya, en même temps, Lentulus en Asie, pour affranchir les Bargyliens[16] ; Titilius en Thrace, pour débarrasser des garnisons de Philippe les villes et les îles de ce pays, et Publius Villius s’embarqua pour aller traiter avec Antiochus de la liberté des Grecs qui étaient sous sa dépendance. Titus lui-même passa à Chalcis ; puis, de là il fit voile pour la Magnésie, ôtant les garnisons de toutes les villes, et rendant aux peuples leur gouvernement et leurs lois.
À Argos, il fut nommé agonothète des jeux néméens[17], qu’il fit célébrer avec une grande solennité, et où il proclama derechef, par la voix d’un héraut, la liberté de la Grèce. De là, il parcourut les villes, prescrivant des règlements sages, réformant la justice, rétablissant entre les peuples divers la concorde et l’harmonie. Apaiser les séditions, rappeler les bannis, réconcilier les Grecs entre eux par la persuasion, c’était une gloire dont il n’était pas moins fier que d’avoir vaincu les Macédoniens par la force des armes. Aussi la liberté sembla-t-elle bientôt le moindre de ses bienfaits. Le philosophe Xénocrate, traîné un jour en prison par les publicains, qui voulaient lui faire payer l’impôt que paient les étrangers établis dans la ville, avait été délivré de leurs mains par l’orateur Lycurgue, et son libérateur les avait fait punir de leur brutalité. On conte que Xénocrate, ayant rencontré les fils de Lycurgue : « Je paie avec usure, dit-il, le service que m’a rendu votre père ; car il en est loué de tout le monde. » Mais les bienfaits de Titus et des Romains, en excitant la reconnaissance de la Grèce, ne leur attirèrent pas seulement les louanges de tous les peuples, ils leur valurent, et à juste titre, des droits à la confiance universelle, et un accroissement de puissance. Ce n’était point assez pour les Grecs de recevoir les généraux imposés par eux : ils les demandaient, les appelaient, et se remettaient entre leurs mains. Non-seulement les peuples et les villes, mais les rois mêmes, lorsqu’ils avaient reçu quelque tort des rois voisins, recouraient à leur protection. Et voilà comment en peu de temps, sans doute aussi avec l’assistance divine, tout l’univers fut soumis à leur empire.
Titus se glorifiait de l’affranchissement de la Grèce bien plus que de tous ses autres exploits ; car, ayant consacré dans le temple de Delphes des boucliers d’argent et son propre pavois, il fit graver cette inscription :
Salut, Dioscures, qui vous plaisez à voir courir les chevaux rapides,
Rois de Sparte, Tyndarides, salut !
C’est le Romain Titus qui vous fait cette magnifique offrande,
Après avoir donné la liberté aux enfants de la Grèce.
Il consacra aussi à Apollon une couronne d’or, avec cette inscription :
Sur ta chevelure immortelle a été placée
Cette couronne d’or, fils de Latone,
Offrande du puissant chef des Romains. Toi donc, dieu qui lances au loin tes traits,
Donne la gloire du courage au divin Titus.
La ville de Corinthe a donc eu deux fois le bonheur d’entendre proclamer dans ses murs la liberté de la Grèce : la première fois par Titus, la seconde de nos jours par Néron, qui, se trouvant à Corinthe vers le temps qu’on célèbre les jeux isthmiques, rendit aux Grecs leur liberté et l’usage de leurs lois. Seulement, Titus fit la proclamation par un héraut, ainsi qu’il a été dit, et Néron dans une harangue publique, qu’il prononça lui-même sur son tribunal devant la foule assemblée. Mais ceci est postérieur de bien des années à l’autre événement[18].
Titus, après avoir commencé contre Nabis, oppresseur de Lacédémone, le plus scélérat et le plus cruel des tyrans, une guerre aussi honorable que juste, finit par tromper les espérances de la Grèce : au lieu de l’écraser, comme il le pouvait, il fit la paix avec lui, et laissa Sparte sous le joug d’une indigne servitude. Peut-être craignait-il que, la guerre venant à traîner en longueur, il n’arrivât de Rome un nouveau général qui lui enlèverait la gloire de la terminer ; peut-être cédait-il à un sentiment d’envieuse et jalouse rivalité que lui inspiraient les honneurs rendus à Philopœmen : on avait reconnu mainte fois dans ce dernier un des plus habiles généraux qu’eussent eus les Grecs ; il avait surtout donné dans cette guerre des preuves étonnantes de courage et de capacité. Les Achéens lui décernaient dans les théâtres les mêmes respects et les mêmes honneurs qu’à Titus ; et celui-ci s’en chagrinait, n’imaginant pas qu’un homme d’Arcadie, qui n’avait commandé que dans de petites guerres, et contre des peuples voisins du sien, pût être l’objet de leur admiration, à l’égal d’un consul romain qui était venu combattre pour la liberté de la Grèce. Au reste, Titus disait, pour se justifier, que s’il avait fait la paix avec Nabis, c’est qu’il avait vu que la perte du tyran entraînerait les plus grands maux pour les Spartiates.
Entre tous les honneurs que lui décernèrent les Achéens, il n’y en eut pas un qui parût égaler ses bienfaits, hormis le présent qu’ils lui firent, et qu’il préféra à tout le reste. Voici en quoi consistait ce présent. Les Romains faits prisonniers dans la guerre contre Annibal avaient été vendus et dispersés dans différentes contrées où ils vivaient en esclavage. Il y en avait dans la Grèce environ douze cents, victimes du sort dignes en tout temps de pitié, mais bien plus à plaindre, comme on peut penser, dans une circonstance où ils se trouvaient au milieu de leurs fils, de leurs frères et de leurs amis : esclaves, ils les voyaient libres ; prisonniers, ils les voyaient victorieux. Titus, si vivement touché qu’il fût de leur infortune, ne voulut pas les enlèvera leurs maîtres ; mais les Achéens payèrent leur rançon à cinq mines par tête[19], et, les ayant tous réunis en une seule troupe, ils les livrèrent à Titus au moment où il allait s’embarquer. Il mit à la voile, joyeux d’emporter, en retour d’actions si nobles, une noble récompense et digne d’un grand homme, et d’un homme dévoué à ses concitoyens. Ces Romains firent, je n’en doute pas, le plus bel ornement de son triomphe ; ils s’étaient tous rasé la tête, et se l’étaient couverte de bonnets, comme c’est la coutume des esclaves qu’on affranchit : ils suivirent en cet état le char triomphal de Titus. Les dépouilles qui furent portées en pompe à ce triomphe frappaient les spectateurs par leur beauté : c’étaient des casques grecs, des boucliers macédoniens, et des sarisses[20]. On y voyait aussi une grande quantité d’or et d’argent ; car Itanus[21] assure qu’on porta, dans le triomphe, trois mille sept cent treize livres d’or en lingots, quarante-trois mille deux cent soixante-dix livres d’argent et quatorze mille cinq cent quatorze philippes d’or, sans compter les mille talents que Philippe devait payer. Mais, dans la suite, les Romains, à la sollicitation de Titus, firent remise à Philippe de cette dette : ils le déclarèrent leur allié, et lui rendirent son fils, qu’ils avaient en otage.
Antiochus, étant passé en Grèce avec une flotte considérable et une armée, sollicitait les villes à la défection, et y suscitait des dissensions intestines, secondé par les Étoliens, depuis longtemps ennemis des Romains, et qui ne cherchaient qu’une occasion de leur déclarer la guerre. Ils alléguaient le dessein de mettre en liberté les Grecs, lesquels n’en avaient nul besoin, puisqu’ils étaient libres ; mais, faute d’un prétexte plus honnête, ils suggéraient à Antiochus de couvrir son injustice du plus spécieux de tous les motifs. Les Romains, qui s’effrayaient de ces mouvements, et de l’idée qu’ils s’étaient faite des forces d’Antiochus, chargèrent de cette guerre le consul Manius Acilius, et lui donnèrent pour lieutenant Titus, à cause de son crédit auprès des Grecs. En effet, il eut bien vite affermi dans le parti des Romains ceux qui leur étaient restés fidèles ; et, ceux que la contagion commençait à gagner, il leur apporta à propos, comme un remède salutaire, le souvenir de l’amitié qu’ils avaient pour lui, et les empêcha de consommer leur défection. Il ne lui en échappa qu’un petit nombre, déjà gagnés par les Étoliens, et entièrement corrompus. Tout irrité qu’il fût contre eux, il ne laissa pas de les protéger après la bataille. Antiochus avait été défait aux Thermopyles et mis en fuite, et sur-le-champ il s’était embarqué pour l’Asie. Alors le consul Manius, entrant dans le pays des Étoliens, assiégea lui-même les uns, et abandonna les autres au roi Philippe. D’un côté, les Dolopes, les Magnètes, les Athamanes et les Apérantes[22] étaient ravagés et pillés par le Macédonien ; de l’autre, Manius, qui venait de mettre à sac Héraclée, assiégeait Naupacte, occupée par les Étoliens.
Titus, touché de compassion pour les Grecs, vint du Péloponnèse par mer pour parler au consul. Il commença par le blâmer de ce qu’après la victoire il laissait Philippe emporter le prix de la guerre, et perdait son temps, par colère, à assiéger une seule place, tandis que les Macédoniens subjuguaient vingt nations et des royaumes. Puis, comme les assiégés l’eurent aperçu et l’appelaient du haut de leurs murailles, et lui tendaient les mains en le conjurant de leur être favorable, il ne leur répondit rien pour l’instant : il se retourna les yeux baignés de larmes, et se retira. Mais plus tard il entra en conférence avec Manius, calma son ressentiment, et fit accorder aux Étoliens une trêve pendant laquelle ils enverraient des députés à Rome pour tâcher d’obtenir des conditions plus douces. Le combat le plus rude qu’il eut à livrer, la plus difficile de toutes les entreprises, ce fut son intercession en faveur des Chalcidiens. Ils s’étaient attiré la colère de Manius à cause du mariage qu’Antiochus avait contracté chez eux, alors que déjà la guerre était commencée : mariage aussi peu convenable à son âge qu’à la circonstance. Lui, vieillard, il s’était pris d’amour pour une jeune personne, fille de Cléoptolème, la plus belle, dit-on, des vierges de la Grèce. À la suite de ce mariage, les Chalcidiens avaient embrassé avec chaleur les intérêts du roi ; et ils lui avaient donné leur ville pour en faire sa place d’armes pendant cette guerre. Antiochus donc, après la perte de la bataille, s’enfuit promptement à Chalcis ; et, prenant sa jeune femme, ses richesses et ses amis, il s’embarqua pour l’Asie. Manius, irrité, marcha, sans perdre un instant, contre Chalcis. Titus le suivit, et travailla si bien à l’adoucir et à excuser les Chalcidiens qu’il vint à bout de l’apaiser à force de le supplier, lui et ceux des Romains qui avaient autorité dans le conseil.
Les Chalcidiens, sauvés ainsi, consacrèrent à Titus les plus grands et les plus beaux de leurs édifices publics, dont on peut voir encore aujourd’hui les inscriptions. Par exemple : « Le peuple a dédié le gymnase à Titus et à Hercule. » Et ailleurs : « Le peuple a dédié le Delphinium à Titus et à Apollon. » Encore de notre temps ils élisent un prêtre de Titus ; et, dans les sacrifices institués en son honneur, après les libations on chante un péan à sa louange. Il serait trop long de l’insérer ici tout entier ; j’en rapporterai seulement la fin :
« Nous honorons cette loi inaltérable et pure qui garantit les serments faits par des Romains. Chantez, jeunes filles, le grand Jupiter, et Rome et Titus avec lui, et la foi des Romains. Io péan ! ô Titus, notre sauveur ! »
Les autres peuples de la Grèce lui rendirent aussi les honneurs qu’il avait si bien mérités : honneurs vrais et sincères dictés par cette affection vive qu’inspirait la douceur de ses mœurs. Quoiqu’il eût eu des démêlés avec quelques personnes, soit pour les affaires publiques, soit pour des rivalités d’ambition, comme avec Philopœmen et ensuite avec Diophanès, général des Achéens, il n’était pas vindicatif, et son emportement n’allait jamais jusqu’aux effets ; il l’exhalait dans ces discours pleins de franchise que permettent les discussions politiques. Jamais il ne montrait la moindre amertume dans la dispute ; mais la plupart le trouvaient un peu prompt et léger de caractère. C’était, du reste, l’homme le plus doux dans le commerce de la vie ; et sa conversation était pleine de sel et d’agrément. Ainsi, les Achéens voulant se rendre maîtres de l’île de Zacynthe[23], il dit, pour les en détourner, que s’ils mettaient la tête hors du Péloponnèse, ils courraient le même danger que les tortues qui mettent la tête hors de leur écaille. La première fois qu’il entra en conférence avec Philippe pour traiter de la paix : « Tu as amené bien du monde avec toi, dit Philippe ; et moi je suis venu seul. — C’est toi même, répondit Titus, qui t’es réduit à la solitude en faisant périr tes amis et tes parents. » Dinocratès le Messénien, s’étant enivré à Rome dans un banquet, avait dansé déguisé en femme. Le lendemain, il pria Titus de l’appuyer dans le dessein qu’il avait conçu de détacher Messène de la ligue des Achéens. « J’y penserai, dit Titus ; mais je m’étonne qu’ayant entrepris de si grandes affaires, tu puisses danser et chanter dans un festin. » Les ambassadeurs d’Antiochus faisaient, devant les Achéens, rémunération des troupes nombreuses de leur roi, et les comptaient par leurs différents noms. Alors Titus : « Un jour je soupais, dit-il, chez un de mes « hôtes ; je lui fis des reproches de la quantité de viandes « qu’il avait fait servir ; et je lui demandai avec surprise « comment il avait pu se procurer tant de sortes de « mets. — Toutes ces viandes, me répondit mon hôte, ne « sont que du porc, et ne diffèrent que par l’apprêt et l’assaisonnement. Gardez-vous donc, Achéens, de vous laisser prendre à ce qu’on vous dit de l’armée d’Antiochus : ces lanciers, ces piquiers, ces fantassins ne sont tous que des Syriens qui diffèrent par leurs armures. »
Après ses exploits de Grèce et la guerre d’Antiochus, il fut nommé censeur. C’est une des plus grandes charges, et en quelque façon le comble des honneurs où l’on puisse monter dans la république. Il eut pour collègue le fils de ce Marcellus qui avait été cinq fois consul. Les deux censeurs chassèrent du Sénat quatre sénateurs qui n’appartenaient pas à des familles considérables, et ils reçurent au nombre des citoyens tous ceux qui voulurent se faire inscrire, pourvu qu’ils fussent nés de parents libres. Ils y furent forcés par le tribun du peuple Térentius Culléo qui, pour mortifier le parti aristocratique, persuada au peuple d’en porter la loi. Les deux plus grands personnages et les plus illustres qu’il y eût en ce temps à Rome, Scipion l’Africain et Marcus Caton, étaient en guerre ouverte l’un contre l’autre. Titus choisit Scipion pour prince du Sénat, comme le plus vertueux des hommes et le premier de tous ; mais il se brouilla avec Caton à l’occasion suivante[24].
Titus avait un frère, nommé Lucius Flamininus, d’un caractère différent du sien sous tous les rapports ; c’était d’ailleurs un homme livré aux plus infâmes débauches, et qui foulait aux pieds toute pudeur. Il avait avec lui un jeune homme qu’il aimait éperdument, et qu’il menait toujours à sa suite lorsqu’il allait faire la guerre ou commander dans une province. Un jour, dans un banquet, le jeune homme voulant flatter Lucius : « Je t’aime à ce point, dit-il, que j’ai laissé, pour courir à toi, un spectacle de gladiateurs, quoique je n’eusse pas encore vu égorger un homme ; mais j’ai sacrifié ma propre satisfaction au désir de te plaire. » Alors Lucius, tout joyeux : « N’aie point de regret à ce plaisir, dit-il ; je contenterai ton envie. » Et il ordonne qu’on amène de la prison un condamné à mort ; il fait venir le licteur et lui commande de trancher la tête au condamné dans la salle du banquet. Valérius d’Antium dit que ce fut pour une jeune fille qu’il aimait, et non point pour un jeune homme que Lucius eut cette affreuse complaisance. Suivant Tïte Live, Caton lui-même aurait écrit dans son discours à ce sujet que la victime était un transfuge gaulois : il se serait présenté dans ce moment à la porte de Lucius avec sa femme et ses enfants, et Lucius l’aurait fait entrer dans la salle du banquet et l’aurait tué de sa propre main pour faire plaisir au jeune homme. Mais il est vraisemblable que ce n’était là qu’une circonstance imaginée par Caton pour donner plus de poids à l’accusation. Car la plupart assurent que la victime fut, non un transfuge, mais un prisonnier de ceux qui étaient condamnés à mort ; tel est particulièrement le témoignage de Cicéron dans le traité de la Vieillesse, et il met ce récit dans la bouche de Caton lui-même[25].
C’est sur ces entrefaites que Caton fut nommé censeur, et fit l’épuration du Sénat ; il en chassa Lucius, quoiqu’il fût personnage consulaire, et bien que la flétrissure parût rejaillir sur son frère. Aussi se présentèrent-ils tous deux devant le peuple dans l’état le plus humble et fondant en larmes ; là, ils firent une demande qui parut juste : c’était que Caton expliquât les motifs qu’il avait eus de flétrir à ce point une maison illustre. Caton se rend sans différer au Forum, et s’assied sur le tribunal avec son collègue ; il demande à Titus s’il a connaissance du banquet en question. Titus ayant répondu qu’il ignorait le fait, Caton raconte ce qui s’est passé, et défère le serment à Lucius, dans le cas où il s’inscrirait en faux contre ce récit. Lucius garda le silence ; et le peuple jugea qu’il avait mérité cette note d’infamie, et reconduisit honorablement Caton du tribunal jusqu’à sa maison. Titus, vivement touché du malheur de son frère, se ligua avec les anciens ennemis de Caton : il fit casser par le Sénat les baux de location et les marchés qu’avait faits Caton au nom de la république ; il lui suscita personnellement plusieurs procès graves ; mais je doute que ce fût une conduite sage et politique de vouer ainsi une haine irréconciliable à un excellent citoyen, à un magistrat qui remplissait son devoir ; et cela pour un homme, à la vérité son proche parent, mais indigne de l’être, et qui n’avait subi que la juste punition de son crime. Quoi qu’il en soit, un jour que le peuple romain était assemblé dans le théâtre pour assister à des jeux, et que le Sénat occupait, suivant l’usage, les rangs les plus honorables, Lucius s’étant assis aux derniers rangs, tout honteux et humilié, ce fut dans toute cette foule un sentiment de pitié profonde : ils ne purent supporter cette vue, ils lui crièrent d’avancer, et ne cessèrent leurs clameurs que lorsqu’il eut obéi, et que les consulaires lui eurent fait place au milieu d’eux.
Tant que l’ambition naturelle de Titus eut un sujet honnête de s’exercer dans les guerres dont nous avons parlé, elle lui valut l’estime de tous ; on lui sut gré d’avoir, après son consulat, servi comme tribun des soldats, sans en être sollicité. Mais, quand son âge l’eut mis hors d’état de commander et d’exercer des emplois, on trouva mauvais que, dans un reste de vie qui n’était plus propre aux affaires, il conservât un vif désir de gloire, et se livrât en jeune homme à sa passion sans pouvoir se vaincre[26]. C’est cette ambition déplacée qui le fit s’acharner après Annibal, et qui le rendit généralement odieux. Annibal avait fui secrètement de Carthage, et s’était retiré chez Antiochus ; mais, lorsque celui-ci, battu en Phrygie, se trouva trop heureux d’accepter la paix, Annibal fut encore obligé de s’enfuir ; et, après avoir longtemps erré, il se fixa enfin en Bithynie, à la cour de Prusias. Nul Romain n’ignorait sa retraite ; mais tous fermaient les yeux, méprisant la faiblesse et le grand âge d’un homme abattu par la fortune. Titus, que le Sénat avait envoyé auprès de Prusias pour d’autres affaires, ayant trouvé Annibal dans ce pays, s’indigna de le voir encore en vie ; et, malgré les prières, malgré les instances de Prusias en faveur d’un suppliant et d’un hôte, il fut inexorable.
Il y avait sur la mort d’Annibal, à ce qu’il paraît, un ancien oracle qui disait :
Annibal entendait qu’il s’agissait de la Libye ; il comptait finir ses jours à Carthage, et y être enterré. Mais il y a dans la Bithynie, assez près de la mer, un pays sablonneux, et, dans ce pays, un petit bourg appelé Libysse, où Annibal faisait sa demeure ; comme il se défiait sans cesse de la résolution de Prusias, et qu’il craignait les Romains, il avait ménagé sept conduits souterrains qui, de sa maison, allaient tous aboutir de différents côtés, fort loin du bourg, et dont on n’apercevait rien au dehors. Dès qu’il apprit l’exigence de Titus, il voulut s’enfuir par les souterrains ; mais, ayant donné dans des gardes du roi, il résolut de s’ôter la vie. Quelques-uns disent qu’il entortilla son manteau autour de son cou, et ordonna à un de ses esclaves de lui appuyer le genou contre le dos, et de tordre avec force le manteau en tirant à lui jusqu’à ce qu’il fût étranglé. D’autres rapportent qu’à l’exemple de Thémistocle et de Midas, il but du sang de taureau. Mais, suivant Tite Live, il avait sur lui du poison : il le détrempa, et, prenant la coupe : « Délivrons, dit-il, les Romains de ce terrible souci, puisqu’ils trouvent long et pénible d’attendre la mort d’un vieillard qui leur est odieux. Titus ne remportera pas ici une victoire honorable, ni digne de ces anciens Romains qui firent avertir Pyrrhus, leur ennemi et leur vainqueur, du dessein qu’on avait de l’empoisonner. »
Voilà quelle fut, dit-on, la mort d’Annibal.
Quand on apprit à Rome ce qui s’était passé, Titus fut l’objet d’un blâme général ; on traita d’excès condamnable et de cruauté sa conduite envers Annibal, la mort d’un homme que le peuple romain laissait vivre, comme un oiseau que la vieillesse a dépouillé de son plumage, à qui Ton conserve la vie sans danger, et que Titus avait fait périr sans que rien l’y contraignît, uniquement pour la gloire d’être appelé l’auteur de la mort d’Annibal. On rappelait, à cette occasion, la douceur et la magnanimité de Scipion l’Africain ; et l’admiration pour ce grand homme redoublait encore. Scipion, après avoir défait en Afrique Annibal, jusqu’alors invincible et redoutable aux Romains, ne le chassa point de son pays, et ne demanda point son extradition. Au contraire, il avait eu avec lui, avant le combat, une conférence dans laquelle il le traita noblement ; et, après la bataille, en réglant les conditions de la paix, il ne proposa rien qui lui fût défavorable, et n’insulta point à son malheur. Ils eurent, dit-on, une seconde entrevue à Éphèse ; et, comme ils se promenaient ensemble, Annibal ayant pris la place d’honneur, Scipion le souffrit, et, sans donner aucun signe de mécontentement, il continua la promenade. Puis, la conversation étant tombée sur les chefs d’armée, et Annibal ayant proclamé qu’Alexandre avait été le premier de tous, Pyrrhus le second, et lui Annibal le troisième, Scipion, souriant : « Que dirais-tu donc, dit-il, si je ne t’avais pas vaincu ? — Scipion, repartit Annibal, je ne me serais pas nommé le troisième, mais le premier. » Le souvenir de ces traits admirables de Scipion soulevait une immense réprobation contre Titus, coupable, disait-on, d’avoir porté les mains sur un cadavre qui appartenait à d’autres. Quelques-uns pourtant louaient sa conduite, disant que tant qu’Annibal vivait c’était un feu couvert qui ne demandait qu’à être soufflé ; que ce n’était ni son corps ni son bras qui avait fait trembler les Romains, alors qu’il était dans la force de l’âge, mais sa capacité et son expérience, avec la rancune et la haine qu’il portait enracinées dans son cœur : sentiments dont la vieillesse ne diminue pas l’activité, parce que le caractère persiste toujours le même dans nos mœurs, tandis que la fortune ne demeure pas constamment la même, et que, dans ses continuelles vicissitudes, elle appelle, par de nouvelles espérances, à de nouvelles entreprises ceux que pousse contre nous une haine invétérée.
Au reste, les événements ultérieurs servirent davantage encore à la décharge, si je puis dire, de Titus. D’un côté, ce fut un Aristonicus, fils d’un joueur de lyre, qui remplit, pour les intérêts d’Eumène, l’Asie de séditions et de guerres. D’un autre côté, ce fut Mithridate qu’on vit, après les victoires de Sylla et de Fimbria, après la destruction de tant de généraux et de tant d’armées, se relever de ses désastres, plus puissant que jamais, et lutter contre Lucullus par terre et par mer. Annibal n’était pas plus abattu que ne le fut Caïus Marius : il avait pour ami un roi puissant qui fournissait abondamment à son entretien ; il s’occupait habituellement de l’organisation de la flotte et de la cavalerie du roi, et de la discipline de ses troupes de pied. Marius, errant et mendiant dans l’Afrique, n’inspirait aux Romains que du mépris : encore quelques jours, et égorgés, battus de verges dans Rome même, ils se prosternaient devant lui : tant le présent, dans cette vie, n’est jamais ni grand ni petit par rapport à l’avenir ! tant les vicissitudes de l’homme n’ont d’autre terme que la fin même de sa vie ! Aussi quelques-uns assurent-ils que Titus, en cette affaire, n’agit point de sa seule autorité, qu’il fut député à Prusias avec Lucius Scipion, et que cette ambassade n’avait d’autre objet que la mort d’Annibal.
Comme l’histoire ne nous offre, depuis cette époque, aucune action mémorable de Titus, soit guerrière ou politique, et que sa fin d’ailleurs fut naturelle et paisible, il ne nous reste plus qu’à le comparer avec Philopœmen.
- ↑ Voyez la Vie de Marcellus dans ce volume.
- ↑ Narnia, sur le Nar, dans l’Ombrie, ou, suivant quelques-uns, dans le pays des Sabins. Cossa était dans l’Étrurie.
- ↑ Sulpitius Galba, consul l’an de Rome 654, et Publius Tapulus ou Villius, consul l’année suivante.
- ↑ Suivant Tite-Live, il était campé près du fleuve Aoüs.
- ↑ Tempé, ou plutôt les Tempés, sont ces vallées de Thessalie, célèbres chez les poètes, que le fleuve Pénée forme dans son cours à travers les montagnes.
- ↑ C’est un canton de la Macédoine.
- ↑ C’est le nom d’une ville mentionnée assez souvent par les auteurs.
- ↑ Opunte, capitale de la Locride opuntienne, sur le bord de la mer vis-à-vis de l’Eubée.
- ↑ L’entrevue eut lieu à Nicée, sur les bords du golfe Maliaque.
- ↑ Polybe le nomme Brachyllas et Tite-Live Barcillus.
- ↑ Ville de la Magnésie.
- ↑ Voyez, sur l’ordonnance de la phalange macédonienne, les observations de Polybe à la fin du dix-septième livre de son histoire.
- ↑ Environ six millions de notre monnaie.
- ↑ Ces jeux se célébraient deux fois par chaque Olympiade, dans l’isthme de Corinthe, en l’honneur de Mélicerte ou Palémon, dieu marin.
- ↑ Voyez dans la Vie de Pompée un autre exemple de cet étrange phénomène, ou plutôt de ce singulier hasard.
- ↑ Peuple de la Carie qui avait pour capitale la ville de Bargytes, aujourd’hui Barghili.
- ↑ On les célébrait dans la forêt de Némée en Achaïe en l’honneur d’Hercule, vainqueur du lion ; comme les jeux isthmiques, c’était deux fois par Olympiade, mais à d’autres époques.
- ↑ Deux cent soixante-trois ans plus tard, l’an 67 de notre ère.
- ↑ Environ quatre cent cinquante francs de notre monnaie.
- ↑ Espèces de longues piques.
- ↑ Cet historien est inconnu ; mais le nom s’est peut-être corrompu par la faute des copistes.
- ↑ Ces diverses populations habitaient des provinces de la Thessalie et quelques cantons limitrophes.
- ↑ Île de la mer Ionienne qui se nomme aujourd’hui Zante.
- ↑ L’histoire que va conter Plutarque se trouve déjà dans la Vie de Marcus Caton, presque dans les mêmes termes.
- ↑ De Senect., 12. Voyez Tite Live, liv. XXXIX, 42.
- ↑ Il ne paraît pourtant pas, en comparant les dates, que Flamininus soit parvenu à un grand âge, ni même qu’il eût beaucoup plus de quarante-cinq ans à l’époque de la mort d’Annibal.