Vies des peintres, sculpteurs et architectes/tome 1/Préface des traducteurs

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PRÉFACE DES TRADUCTEURS.

Le livre du Vasari, à force d’avoir été recommandé à l’attention par l’éloge ou le blâme, à force d’avoir été compilé, cité, abrégé, délayé, traité enfin de mille manières, est devenu célèbre en France, sans jamais y avoir été traduit. Nous venons combler cette lacune, et en cela nous croyons faire une œuvre utile. Ne fallait-il pas qu’un jour ou l’autre on sût à quoi s’en tenir sur un ouvrage aussi souvent invoqué, aussi souvent attaqué ?

Nos arts, aujourd’hui, sont tiraillés par les opinions les plus contradictoires ; on n’est d’accord sur rien ; on se débat dans une anarchie poignante ; on marche, si ce mot convient, dans la confusion la plus complète. Au fond, les artistes ne savent où donner de la tête et qu’entreprendre. Les amis de l’art ne savent que leur conseiller, que leur demander. Cette langueur dans l’action, cette disette dans l’inspiration, cette nullité dans le résultat sont patentes, incontestables. Les affections éphémères de quelques faiseurs à la mode, les fantaisies inconsidérées de quelques amateurs ne font rien à la chose ; ce n’est pas porter la question de l’art dans les nuages, que de la mettre un peu plus haut que cela.

Que faire dans cet état ?

Évidemment, il faut tâcher de s’entendre : c’est le vœu de tous les gens de bonne foi, de tous les gens de cœur, de tous les ouvriers studieux et consciencieux, de tous les amis sincères et intelligents de l’art. Il le faut impérieusement ; et ce n’est point par un désir trop ambitieux que nous sommes amenés à le dire. Ce n’est pas en rêvant des progrès imaginaires qu’on réclame cet accord ; c’est simplement pour ne pas tomber dans toutes les décadences connues jusqu’à ce jour. Mais on le comprend, sur un intérêt aussi délicat, dans une circonstance aussi décisive, s’accorder, se réunir dans des principes communs, ce n’est pas se soumettre servilement, aveuglément aux opinions particulières. À ce compte, il n’y aurait qu’un embarras, celui du choix ; car beaucoup de gens ont fait annoncer, depuis quelque temps, qu’ils tenaient au service de l’école française l’unique et universelle panacée qui doit chez elle en finir avec toutes les blessures et toutes les infirmités de l’art moderne en souffrance. Le malheur est qu’on est payé pour y prendre garde. Le sens commun des artistes se méfie aujourd’hui. On a tant abusé de leurs entraînements et de leurs rapides sympathies, qu’ils en sont venus, comme bien d’autres, à vouloir des garanties. Cette méfiance est une mauvaise chose pour l’art, sans doute ; mais qui l’a motivée ? Ceux qui ont voulu, sur parole, disposer du génie des artistes, tirer tribut de leur travail, dans l’intérêt de leur marotte ou de leurs calculs, et qui n’ont su ni se préserver eux-mêmes, ni placer leurs confiants auxiliaires à l’abri d’une chute fâcheuse.

Dans ces circonstances, il importe de mettre l’histoire de l’art en honneur. Quand le présent ne sait pas où il va, il faut lui dire d’où il vient. Nous n’insisterons pas sur cette convenance ; on l’a proclamée assez haut, dans toutes les directions de l’étude ; et tout ce qu’on en a dit de bon ailleurs peut se reporter ici. Mais apprendre au présent quel a été le passé, n’est pas une chose facile autant qu’on pourrait se le figurer en voyant tant de gens s’y mettre sans façon. C’est au contraire une tâche assez mal remplie, malgré le grand nombre d’ouvriers qui s’y livrent. Le passé s’interprète mal par les talents minutieux et lourds, qui ne voient jamais dans une chose que ses accessoires, que ses accidents, et dont la vue bornée se fatigue avant d’atteindre à la hauteur des aspects, et dont l’esprit resserré s’émousse avant de pénétrer jusque dans l’intimité des choses. Le passé s’interprète mal également, et par les talents orgueilleux qui passent témérairement sur tout, qui traitent avec une résolution inouïe les événements, les hommes, les œuvres, les situations, les rapports, et qui, dans les plus insolentes abstractions, généralisent fantastiquement tout ce qui leur tombe sous la main, sans y avoir presque regardé ; et par les talents légers qui renversent tout dans leurs inconstants et continuels revirements, et dont l’inquiétude maladive ne laisse à rien ni consistance ni force. Il en est ainsi, surtout sur le terrain de l’histoire de l’art. On doit le concevoir d’autant mieux, que les écrivains qui sont en possession de l’occuper et d’y produire, étant toujours des hommes exclusivement littéraires, ne peuvent guère exposer que des lieux communs, empruntés à la métaphysique de l’art, ou des détails de pure érudition dont ils sont peu à même d’apprécier l’utilité ou l’emploi. En effet, c’est parce qu’ils sont généralement entrepris par des gens incompétents et mal disposés à se bien renseigner, que les nombreux écrits sur la peinture fourmillent d’erreurs de tous genres. Pour peu qu’on ait une plume taillée et du loisir, on arrive à traiter la question d’art : il faut dire qu’il y a toute licence et nul danger à le faire. De ce qu’il a été convenu, à tort ou à raison, que les productions artistiques s’adressaient à tout le monde, tout le monde s’est cru capable de les apprécier et de les juger ; et comme les conventions mal faites engendrent vite les plus grands abus, au lieu de se borner à jouir naïvement, à se prêter franchement aux impressions que l’artiste cherche à exciter, on s’est donné la mission de l’influencer et de le tordre. Rien ne saurait résister à cette position fausse. Nous savons bien que les parleurs n’en veulent pas convenir ; mais nous savons aussi que les parleurs n’ont jamais fait avancer l’art d’une ligne ; et si nous sommes disposés à reconnaître que la décadence de nos écoles a donné naissance à cette invasion de la critique, il faut bien sans doute que l’on nous accorde que jamais la critique ne ravivera l’art. C’est un cercle vicieux ; on ne peut en sortir que par des concessions mutuelles. Dans l’intérêt de l’art, il faut permettre aux artistes de demander qu’on retire des questions qui les touchent cette ignorante loquacité qui embrouille toutes les choses et n’en tranche aucune : erreurs bavardes, qui ne seraient pas admises à s’établir autant à l’aise sur le terrain d’aucune autre spécialité du travail humain. En effet, n’est-il pas vrai que, sous le manteau d’une science quelconque, jamais un oisif ignorant ne serait admis à dogmatiser et à législater ? Les véritables savants, tous habitués à la lutte, défendraient leur conscience blessée, et couvriraient de ridicule les hérésies de l’intrus. Il en est autrement à propos des arts. Les artistes sont quotidiennement harcelés dans leurs goûts, offensés dans leurs croyances, on pourrait même dire attaqués dans leurs droits. Il n’y a que l’art pour être ainsi livré aux jugements arbitraires, aux discussions niaises, aux inexactitudes impardonnables. On généralise et on distingue, on classe et on mêle, on blâme et on loue, on doute et on affirme, avec un aplomb vraiment désespérant. Comme la théorie générale n’a pu être faite avec quelque autorité par personne encore que nous sachions ; comme la théorie particulière d’aucun maître n’a pu être traitée exactement, les écrivains profitent de cette absence, se lâchent la bride, et ne respectent rien. Il leur suffit de ramasser quelques lambeaux dans la phraséologie des systèmes en vigueur, pour afficher dans leurs jugements une profondeur qui nous effraie ; il leur suffit de feuilleter les catalogues et les livres de pratique, pour affecter dans leurs descriptions une connaissance intime des détails, qui nous déconcerte. On appelle tout cela la synthèse et l’analyse de l’art. Et nous, par crainte ou dédain de tout débat avec ces puissances, nous laissons croire que nos arts ont été résumés et embrassés complètement, dans un seul regard de ces aigles.

C’est un grand mal, et qui motiverait une plus longue digression. En effet, rien ne restera debout dans les arts, si les artistes n’y prennent garde. N’est-ce pas à eux à maintenir l’intégrité des belles traditions de l’art, et à défendre les œuvres consacrées ? C’est surtout sur ce terrain, qu’il leur est facile de parler avec cette autorité que l’opinion ne refuse jamais à l’étude consciencieuse. Et qu’on ne s’y trompe pas ; c’est bien travailler pour la réalisation présente et les progrès à venir, que de faire respecter, et d’honorer soi-même comme on le doit, les fécondes productions du passé. Mais on a laissé aller tout à la dérive ; on a interverti toutes les notions. La critique se permet tout, et l’art n’ose plus rien. Cependant, il est incontestable que le propre de la critique est d’examiner avec soin, et de se prononcer avec tranquillité, comme le propre de l’art est de concevoir avec hardiesse, et de travailler avec indépendance. Or, cette indépendance est-elle possible au milieu de tous les blasphèmes et de toutes les usurpations d’une critique extravagante, qui croit faire acte de haute judiciaire et de profonde sagacité, en courant après les aperçus les plus inattendus et les plus bizarres paradoxes ? Quand on pense qu’on a dit, à propos des œuvres de Michel-Ange : « n’est-ce que cela ? » sous quelle impression prétend-on placer la jeunesse qui s’essaie pour l’avenir ? Mais il faut se rappeler que ces mêmes hommes, qui professent ce sublime dédain pour les œuvres les plus durables et les plus fortes, sont heureusement ceux-là même qui soutiennent de leur engouement les produits les plus abâtardis et les plus frêles de la mode. Au reste, si nous insistons là-dessus, c’est que nous ne savons pas nous peu soucier du résultat final ; c’est qu’en s’en occupant ainsi on arrive à désaffectionner le public pour l’art, surtout dans un temps et dans un pays où le sentiment n’est pas très vif ; car en France, pourquoi ne pas l’avouer ? On a toujours plus senti l’art par la tête et l’examen, que par l’âme et l’entraînement. Le talent particulier de nos maîtres en est une preuve suffisante. Chez nous, on a toujours plutôt abordé les arts avec le calcul et la recherche, qu’avec l’abandon et la confiance, soit que cela tienne au caractère de notre nation, ou à l’époque où nos écoles se sont fondées, c’est-à-dire au siècle des académies, des prescriptions étroites et des règles immuables, quand l’art italien avait déjà couru, sans avertir le nôtre, trois siècles d’abondance et de verve. De façon qu’à partir de Simon Vouet jusqu’à David, tous nos maîtres ne sont, en définitive, que les élèves des Carraches et des académies de la décadence. Si cela est vrai, comme nous n’en doutons point, et si, à cause de la position spéciale de l’école française, nous sommes appelés à faire œuvre de réflexion, dans notre peinture, devant un public qui nous juge en réfléchissant et par comparaison, sachons donc mieux faire respecter les éléments et les données de notre art. Tâchons qu’écrire sur l’art, sur les maîtres, sur les époques, sur les productions, sur les procédés, ne soit plus un thème que le premier venu puisse choisir entre mille autres, et broder à son gré ; car, malgré ce qu’on en peut dire et ce qu’il peut en sembler, c’est ainsi que les choses se passent. Sans doute, plus la facilité est grande, plus la matière est souple, mieux le thème se brode. Cela est clair et va de soi. Souvent de beaux talents s’y font reconnaître, et même peuvent y briller ; mais il n’en est pas moins vrai que l’on comprend, quand on veut y réfléchir, l’inqualifiable et déplorable indifférence que montrent les artistes, pour tout ce qui s’écrit sur l’art. Cette apathie procède de la méfiance et du dégoût.

Quoi qu’il en soit, cette disposition d’esprit dans laquelle se trouvent les artistes est une des plaies les plus honteuses de notre temps. Soit qu’ils la déguisent avec discrétion, soit qu’ils l’affichent avec impudeur, l’ignorance, fruit de la paresse et de la fatuité, ne tarit pas moins toutes les sources de l’art. C’est à elle que notre art doit avant tout l’emphase ridicule ou la plate trivialité qui le déshonorent également. Ces paroles sont dures, mais elles sont consciencieuses. Expliquons-nous. L’artiste, insouciant de sa nature, absorbé par ses travaux difficiles, privé assez généralement des données premières qui facilitent l’étude, aime peu s’occuper de la théorie et des idées difficiles à rassembler et à coudre qui doivent le guider dans la pratique. Quand l’artiste arrive à savoir son métier et à pouvoir se placer par l’exécution manuelle, soit au niveau de ses contemporains, soit à leur tête, il se trouve satisfait. Et il est vrai de dire qu’il lui faut pour cela des muscles et une intelligence dont il peut à bon droit s’enorgueillir ; mais cependant est-ce tout ? et l’orgueil qui aspirerait à se placer plus haut ne serait-il pas encore un noble et utile orgueil ? Quand l’artiste se sent arrivé au point que nous indiquons, il croit, malheureusement pour l’art, sa tâche finie, et se remet pour le reste aux mains des écrivains et des parleurs. Il se jette tête baissée dans toutes les idées creuses, erronées, qui sont de mode, et sur lesquelles il n’entend pas réfléchir par lui-même. Si, sur le terrain de la mode, il trouve une division, un schisme, il se confie au hasard de ses sympathies, de ses relations, il s’active et il ne cesse d’ajouter ses productions irréfléchies quant au fond, méritantes quant à la façon, à la masse immense et confuse des œuvres sans profondeur et sans naïveté que le passé nous a gardées, et que l’avenir nous prépare. L’écrivain ou le parleur, infatué d’idées préconçues, puisées loin du domaine de l’art, en dehors de son intimité et des indications précieuses que sa seule intimité peut donner, pense à relier l’art et l’artiste dans sa théorie toute faite, parce que l’art et l’artiste peuvent servir à orner son système, et à lui conférer cet aspect d’universalité, prétendue preuve de l’excellence des systèmes, qui n’a jamais fait faute même au plus fou. Dans cette position, l’artiste discute, objecte, raille, c’est son premier mouvement ; mais il finit bientôt par se rendre. Le sentiment de son ignorance l’écrase, la difficulté de la lutte l’épuise, il subit l’influence ; et dans ce rôle honteux de succube il est encore content pourvu que l’écrivain, en lui imposant l’idée et la forme, lui laisse au moins manier librement son outil. Et qu’on ne s’y trompe pas, l’outil se gâte quand la dignité de l’artiste et son intelligence ainsi refoulée n’habitent plus que son poignet. À ceux-là seuls qui ont compris l’art dans son unité, dans son but, autant que dans ses moyens, appartient exclusivement la palme de l’exécution manuelle ; car, au-dessus des artistes habiles, les artistes intelligents et studieux trônent encore par l’habileté, parce que les grands génies et les fiers caractères, en méprisant davantage les petites choses, les surmontent plus facilement.

Que veut-on que les artistes deviennent au milieu de cette absence de toute idée nette, de toute vue saine, sur la marche et la mission de l’art ? Faut-il qu’ils se laissent aller au gré de tous les systèmes contraires ? Faut-il qu’ils passent par toutes les séductions de la parole écrite, et toutes les déceptions des expériences provoquées par des gens étrangers à leur esprit, à leurs ressources, à leurs besoins ? Ou faut-il encore, comme un grand nombre d’entre eux le pratiquent, pour échapper à tout danger et à toute hésitation, qu’ils croupissent dans une indifférence abrutissante pour toute notion qui n’a pas pour but immédiat l’enseignement matériel de l’outil ? Non assurément, pour leur dignité, pour leur sûreté, pour leur avancement, il ne faut ni l’un ni l’autre.

C’est donc aux artistes (car de ceux-ci il en est encore bon nombre qui peuvent rendre en ce sens de réels offices à l’art) à s’unir pour que l’histoire soit mise en lumière, la théorie affermie, et la pratique même enseignée avec clarté et conscience.

En attendant, le livre de Vasari échappera peut-être à cette fatalité attachée en France à toutes les autres entreprises sur l’art ; et, s’il y échappe, il pourra assurément rendre service. Ce n’est point ici une élucubration captieuse présentée par un historien systématique ; c’est un simple recueil de faits rassemblés et enregistrés dans un pêle-mêle assez insouciant, par un artiste fort occupé dans son temps. Mais cet artiste, tout passionné qu’on l’ait dépeint, tout étourdi qu’on se le figure, a partout parlé en homme compétent et profondément instruit. Mais tous les faits qu’il relate, quels que soient leur importance et leur ordre, se rapportent à une longue suite d’hommes illustres, parmi lesquels tout véritable artiste peut trouver une autorité à invoquer et un modèle à suivre. Et il ne faut pas oublier de dire ici que la plupart des hommes pour lesquels l’Italie a gardé une grande admiration, et pour la gloire desquels elle se passionne encore, ont toujours été peu connus chez nous. Toutes ces renommées modestes ont été absorbées en France par le bruit de quelques grandes supériorités. C’était bien là le droit de ces dernières, nous le reconnaissons, et nous leur faisons cette part ; mais il y a aussi la part à faire de la distraction des voyageurs, de l’ignorance des écrivains, du zèle mal entendu des amateurs, et du trafic odieux des marchands d’objets d’art. C’est plus qu’il n’en faut certes pour altérer prématurément l’histoire et étouffer ses justes souvenirs. Qu’on se résigne à ne savoir des temps anciens que les grands événements dont le souvenir échappe aux révolutions ; qu’on se résigne à ne jouir maintenant que des grandes sommités épargnées par le ravage des temps, il le faut bien ; mais se résignera-t-on aussi patiemment en présence de qui vient nous dire en France, loin du beau spectacle de la variété et de l’unité de l’école italienne : « J’ai parcouru long temps et je connais parfaitement l’Italie ; je ne me suis cependant arrêté que devant cinq ou six maîtres. » Ignore-t-on donc que chez les Italiens il y a presque toujours des beautés plus intimes, des traits plus originaux, s’il est possible, dans les ouvrages intermédiaires, que dans les réalisations des grands chefs d’école ? Et cela surtout dans les belles époques, parce que les maîtres du second ordre ne sont pas en Italie, comme en France, les élèves et les reflets des plus grands maîtres, mais au contraire leurs émules, et souvent leurs inspirateurs. Aussi y verrons-nous presque toujours l’élève dépasser le maître tout en le continuant, ce qui n’a guère d’analogue chez nous où le premier pas dans la voie du talent doit être nécessairement, à cause de la position de notre école, la renonciation formelle à toute influence et à tout héritage professoral, comme l’ont tour à tour et complètement prouvé le Poussin, Lesueur, le Valentin, le Puget, David, Prud’hon, Géricault, Ingres, etc.

Ainsi donc, déchirer volontairement la tradition moderne, couvrir d’une rouille factice les ouvrages modernes, c’est faire tout simplement, au milieu de la civilisation la plus avancée, l’acte le plus complet de barbarie. En effet, ne dirait-on pas, quand on lit les auteurs français qui traitent de l’art, que l’Italie moderne est arrivée à l’état de la Grèce antique, et que le voyageur ne peut plus trouver chez elle que des morceaux brisés, que des ruines éparses qui déposent de la gloire de quelques noms ? Mais si l’Italie, lasse après tant de travaux et de gloire, est maintenant déchue et se repose, elle offre au moins à l’étranger qui la visite l’aspect d’un musée bien tenu ; et pour y trouver autre chose que les grandes merveilles qu’elle nous expose, il n’est pas besoin de se livrer à la recherche pénible d’un antiquaire. L’abondance et la richesse de l’art italien seraient, elles cause du dédain de nos auteurs pour les œuvres intermédiaires ? Cela peut être. Mais alors il faut qu’ils consentent à se déclarer superficiels, et s’ils n’ont pas la force d’étudier mieux, qu’ils renoncent à étaler leurs généralisations ignorantes et leur dogmatisme insolent. À ce compte, l’histoire du monde entier serait bientôt faite : ne connaître de l’art italien que Michel-Ange, Raphaël, le Titien et Paul Véronèse, ce n’est pas connaître l’art italien, comme on l’a prétendu. Tous les hommes forts de l’Italie sont unis en faisceau par des liens qu’il n’est pas facile de rompre. Ils ont tous influé les uns sur les autres. Qui ne connaît cette glorieuse famille dans son ensemble n’en peut connaître intimement aucun membre, et qui prétend le contraire s’en fait accroire.

Cette connaissance complète de l’art italien, le Vasari est loin assurément de la pouvoir donner. Son ouvrage n’embrasse pas toute la durée du mouvement artistique de sa nation. Il prend, il est vrai, ce mouvement à sa naissance, et le conduit jusqu’à son apogée. Mais il n’en laisse pas moins en dehors, à cause du temps où il a été publié, une foule d’hommes fort intéressants, tant il y a eu de solides et de brillants talents engagés dans l’époque de la décadence. De plus, l’œuvre du Vasari, prise comme elle est, dans sa marche et dans son cadre, contient encore beaucoup de défauts et de lacunes. Ce n’est pas là certes une chose bien particulière ; mais ce qui distingue ce livre, c’est que, malgré ses opinions et ses erreurs, il ne peut jamais être confondu avec toutes ces compilations chez lesquelles la grâce des formes et la magie du style, lorsqu’elles s’y rencontrent, ne sauraient masquer l’inconsistance des principes et la fausseté des assertions.

Ce sont ces considérations qui nous ont déterminés à traduire le Vasari. Mais si jusqu’ici nous sommes confiants dans l’opportunité de notre entreprise, c’est que nous n’en avons en vue qu’une partie. En effet, notre confiance se perd quand nous pensons aux notes dont nous accompagnons notre traduction.

C’est sur ce point que nous voulons nous expliquer.

En Italie, en Allemagne, en Angleterre, le texte original du Vasari et sa version ne marchent guère qu’escortés d’une masse compacte de commentaires, d’interprétations ou d’additions. On les a crus indispensables pour rectifier, éclaircir ou rafraîchir un auteur qui date de bientôt trois cents ans. On est loin, ce nous semble, d’y être arrivé. Nous le posons en fait ici ; plus tard nous tâcherons de le démontrer. On aurait, suivant nous, très bien fait de laisser le Vasari tranquille dans son incorrection, dans sa naïveté, dans son désordre, dans sa partialité, dans tous les défauts enfin qu’on lui reproche. Son livre était né viable, ou ne l’était pas. S’il l’était, on n’avait pas besoin de lui tendre ainsi la main pour qu’il fît son chemin ; et s’il ne l’était pas, on devait en faire son deuil, en extraire le peu qu’on pouvait en extraire, et le laisser. Mais, loin de là, le recueil du Vasari était regardé comme une œuvre importante, comme le document principal, comme la base et la clef de toute saine intelligence de l’art en Italie. Il fallait donc absolument reproduire souvent ce livre, et naturellement il se trouva plus d’un écrivain satisfait d’y pouvoir attacher son nom. De plus, il y avait trop de charme à pouvoir défendre ou attaquer un homme comme Vasari, pour que beaucoup de personnes renonçassent à l’entreprendre, d’une manière ou d’une autre, en longs traités ou en simples notices, dédaigneusement et en se jouant, ou sérieusement et en creusant la matière. Pas un savant, pas un connaisseur, de ceux qui écrivent sur les arts, qui fût capable de s’en priver. Jugez quel besoin durent en avoir les gens ignorants et sans goût qui ne veulent pas, comme il est juste, paraître tels. Le Vasari, chez lui-même et de toutes parts, fut donc minutieusement contrôlé, chaudement défendu, et surtout fréquemment invectivé.

Quel parti devions-nous prendre dans la situation tout à fait exceptionnelle de notre auteur ?

Devions-nous nous borner à n’en produire qu’une simple traduction ? Nous ne l’avons pas cru. Une glose en appelle une autre, c’est l’ordinaire. Nous n’eussions pas voulu commettre la première, ni attacher ce grelot au livre du Vasari, mais nous ne devions pas éviter d’entrer dans la voie ouverte. En ne donnant que la traduction du texte de notre auteur, nous n’eussions paru fournir qu’un livre tronqué, aride, dangereux même ; tant on s’était habitué à regarder la glose, sa compagne fidèle, comme une de ses parties intégrantes et vitales. C’est qu’en effet, comme une plante grimpante, et comme elle sans racine, la critique quelquefois parvient, dans sa jalousie et dans son besoin de vivre aux dépens de quelque chose, à se cramponner tellement à une œuvre, qu’il est impossible de l’en séparer. Si nous eussions reculé devant la tâche de commenter nous-mêmes le Vasari, nous eussions dû traduire les commentaires en question, puisqu’on s’était habitué jusqu’ici à les regarder comme un indispensable complément, et même comme un efficace contre-poison de l’erreur et des mauvaises passions du livre. Nous ne nous en sommes pas senti le courage. On ne se résigne pas, au moins sciemment, à un tel résultat. Nous avons donc pris notre parti. Qu’il nous ait coûté beaucoup ou peu, il est inutile de le dire ici. Nous allons seulement résumer, le plus succinctement possible, ce qu’il nous importe d’exposer aux lecteurs, pour nous faire approuver.

Nous n’avons point voulu publier le Vasari dans notre langue, et le laisser sous le coup des plus singulières préventions ; chose qui lui serait arrivée, suivant nous, si nous n’eussions donné que son texte ; parce qu’il n’est pas dans la nature de ce livre de pouvoir se débarrasser facilement par lui-même du renom injuste que depuis si long-temps on a travaillé avec tant d’obstination à lui faire, de même qu’il n’est pas dans sa nature de pouvoir légitimer vite les éloges nombreux qu’on lui a prodigués en bien des occasions. Il se prête mal à une lecture continue, et semble plutôt fait pour être consulté, pris et laissé tour à tour ; de façon qu’à moins d’une grande contention d’esprit et d’une application pénible, on ne pourrait en embrasser l’ensemble, ce qui facilite peu une prompte détermination dans la controverse dont il a été jusqu’à présent le constant objet.

D’un autre côté, nous avons trouvé inutile de reproduire les commentaires existants. Nous nous expliquerons ailleurs sur le sens, la portée, le caractère, l’influence que nous leur attribuons. Nous les avons remplacés dans notre publication par un travail personnel. C’est donc encore un Vasari annoté que le nôtre. Il l’a bien fallu. Les quelques personnes qui se sont rendu compte par elles-mêmes du mérite des annotations faites avant nous, tireront un mauvais augure des nôtres, nous le savons bien. Mais les personnes beaucoup plus nombreuses qui, n’ayant pas pu en juger par elles-mêmes, auraient cru que le Vasari ne pouvait se présenter convenablement sans ce fatras, trouveront leur compte chez nous. Elles n’auront point un Vasari abandonné à lui-même, sans frein et sans bride, sans précision et sans loyauté. Nous sommes là tout à fait désintéressés dans les querelles et les préjugés dans lesquels tant de gens ont dit que le Vasari s’était vautré, à ce point que son livre était devenu une sorte d’épouvantail. Nous sommes là, ayant, comme beaucoup d’autres, acquis quelques nouveaux et utiles enseignements manquant à son texte. Tout le monde, en outre, voudra croire que nous n’avons négligé de joindre à notre édition rien de réellement essentiel de ce qui se peut trouver dans les meilleures éditions italiennes.

Maintenant, si l’on a pu comprendre dans quel but nous avons voulu donner un Vasari annoté, si l’on a pu pressentir dans quelle vue nous n’avons point voulu reproduire les annotations anciennes, il reste à dire pourquoi nous avons trouvé bon d’introduire les nôtres, et quelle valeur elles peuvent avoir au fond et dans notre idée.

Les dilettanti de tous les pays se sont parfaitement entendus, comme nous l’avons déjà dit, pour piller, mutiler, contredire et calomnier notre auteur. Mais chaque nation y a apporté son procédé distinct, tout à fait en rapport avec son genre d’esprit et la manière dont elle prend les choses. Les Italiens, qui se passionnent facilement et à qui la passion donne tant de force, ont tout sacrifié pour arriver à une complète rectification du Vasari : courses et expéditions de tous genres, études et investigations de tout ordre, ils n’ont rien négligé. Or, comme voilà à peu près trois cents ans que cela dure chez eux, on peut s’en rapporter à nous, et croire que rien en France ne saurait donner l’idée de cette masse d’histoires de traités, de discours, de raisonnements, de notices et de simples observations, entreprise et recueillie par eux à ce sujet, le tout dans l’intérêt de la vérité, et plus particulièrement encore dans l’intérêt de la justice distributive. Le malheur est que, dans cet intérêt pris trop à cœur, on se trompe soi-même quelquefois, et que l’on arrive à tromper souvent les autres ; de façon que les erreurs et les mauvaises dispositions du Vasari ne deviennent plus que de très pardonnables et très insignifiantes peccadilles, à côté des sottises et des fraudes qu’un zèle mal entendu et qu’une folle prétention à briller font commettre. Mais en revanche, il faut le dire, les critiques italiens, même en suivant cette voie mauvaise, ont rendu de réels services à l’art, surtout dans ses rapports avec leur antiquité nationale et leur origine. Les plus niaises susceptibilités, les plus puériles recherches ont pu avoir de bons et notables résultats. Ainsi, la querelle ridicule et si envenimée qu’on a faite à notre auteur pour avoir nommé le Florentin Cimabue le premier en date parmi les peintres de la renaissance, a eu elle-même quelques suites heureuses. D’abord, le bruit que firent certaines découvertes propres à opposer au Vasari donna plus de valeur aux anciennes choses ; une utile réaction en leur faveur apprit à les respecter et à les conserver avec le même soin et le même orgueil qu’on mettait autrefois à les replâtrer ou à les remplacer. On les colligea avec enthousiasme, on les décrivit avec emphase, ce qui sans doute n’était pas sans inconvénient ; mais enfin le voyageur put les voir, et, loin de l’Italie, la gravure put en donner une idée. Ces deux derniers résultats valent mieux, pour l’histoire de l’art et pour ses progrès, que tout ce qu’ont pu imaginer d’ailleurs les écrivains spéciaux de l’Italie. Il faut néanmoins remarquer combien les voyageurs sont exposés, malgré tout le goût et toute l’attention qu’on leur peut accorder, à poser quelquefois les jugements les plus erronés. Écrivains, antiquaires, directeurs de musées, possesseurs de galeries, ou artistes, rivalisent entre eux pour exiger une admiration sans restriction, pour ce qu’ils décrivent ou ce qu’ils montrent. Leur enthousiasme emprunte les mêmes expressions en présence d’un Carlo Dolci ou d’un Raphaël, d’un Albane ou d’un Corrége, d’un Carrache ou d’un Michel-Ange Tout pour eux est beau, admirable, sublime, divin ! Les plus fortes productions des maîtres et celles de leurs derniers élèves reçoivent également l’apothéose du superlatif. Et ce qu’il y a d’étrange, c’est que, dans cette langue italienne si suave et si harmonieuse, les expressions les plus emphatiques vous séduisent plus qu’elles ne vous choquent. Ces adorateurs du beau se trompent assurément dans leurs banales adorations pour tout ce qui est sorti de leur école ; mais leur culte est si sincère, leur béatitude, leurs extases sont si vraies, que l’émotion vous gagne et fait taire votre jugement. C’est ainsi qu’après avoir admiré sur parole, on se persuade n’avoir vu en Italie que des chefs-d’œuvre : erreur aussi grave que l’erreur contraire que nous avons déjà signalée et qui consiste à n’y en vouloir trouver que quelques-uns. Puis, rentré chez soi, on écrit à froid les chaudes impressions du voyage, et l’on égare ainsi tout le troupeau de ceux qui ont besoin d’écouter les exagérations d’un guide, pour savoir ce qu’ils doivent non seulement admirer, mais encore regarder. Nous réagirons contre cette disposition laudative si naturelle aux Italiens, qu’on peut la combattre même chez un homme comme le Vasari, né dans un siècle où l’admiration avait tant d’objets pour s’éprendre, et pouvait moins que dans tout autre se prodiguer à la médiocrité.

Les Allemands ne se sont pas épuisés en démarches aussi actives que les Italiens. Ils ne se sont pas répandus en recueils aussi volumineux et aussi complaisamment illustrés ; mais, suivant leur usage, ils ont concentré des recherches énormes dans des publications moins importantes en apparence, et cependant plus prétentieuses au fond. On sait que c’est affaire à eux de s’envelopper dans les plus petits détails, comme dans un monde, et de prétendre s’y trouver à l’abri des exigences de l’ensemble et des principes de la généralité ; comme si la ténacité et la patience, si efficaces qu’on veuille les faire, avaient été données à l’homme pour remplacer l’inspiration et cette espèce d’intuition qui le plus souvent le servent si bien. Les pèlerins allemands, à force de remuer, de fouiller les archives et les manuscrits, les bibliothèques et les collections de l’Italie, sont parvenus à prouver que les Italiens eux-mêmes, qui cependant se targuaient d’avoir bien travaillé la matière, n’y connaissaient rien. Le savant Lanzi a été battu par les compilateurs allemands dans toutes ses têtes de chapitres, c’est-à-dire précisément dans ces pages où il expose avec tant de modération, de sens et de clarté, les commencements de chaque école. Jugez si le Vasari a dû l’être dans tout le cours de sa marche, lui qui n’avait pas passé trente ans à mettre en ordre son manuscrit, qui ne l’avait pas revu et purgé avec l’attentive assiduité d’un moine savant comme Lanzi, mais qui, au contraire, s’était en quelque sorte félicité d’avoir mené jusqu’au bout son œuvre, avec tout l’abandon d’un artiste, au milieu des occupations et des loisirs de son atelier. Du moment que non seulement Lanzi, mais encore Collucci, Lami, Malvasia, Tiraboschi, Zaist, Ridolfi, Volta et tant d’autres, étaient traités par-dessous jambes, et comme des observateurs éventés qui n’avaient rien su démêler ni rien pu préciser dans les questions incertaines évoquées par la toute-puissante patience des Allemands, jugez combien le Vasari dut faire pauvre figure devant leur sévère tribunal. Il n’est pas d’énormités et d’hérésies, en fait de goût et d’érudition, d’archéologie et d’estétique dont on ne l’ait atteint et convaincu. Enfin, de petits détails en petits détails, d’erreurs contestées en erreurs reconnues, les Allemands en sont arrivés à établir que l’art italien venait d’eux, qu’eux seuls ont su conserver ce divin art primitif auquel ils convient maintenant toute l’Europe artistique à retourner. Nous nous risquerons jusqu’à nous expliquer sur ces prétentions.

Les Français ont beaucoup écrit sur les arts ; mais quels livres ? De pauvres abrégés, d’insuffisantes et obscures compilations ; le tout plein d’une science controuvée, d’aperçus sans portée et sans liens, de renseignements sans autorité et sans crédit. Nous avons bien quelques critiques ingénieux, pénétrants et forts, la France pouvait-elle en manquer ? mais il faut reconnaître que ces critiques ont souvent remplacé l’examen consciencieux et la connaissance intime des moyens, de l’essence et du but de l’art, par les saillies de l’esprit et les hardiesses de l’ignorance. La facilité, la verve, la pénétration des hommes les plus ingénieux, ne suffisent pas pour asseoir une doctrine ; et c’est sur une doctrine cependant que toute critique bien faite doit se fonder. Néanmoins on peut dire que les écrivains français se sont en général montrés moins passionnés, moins partiaux, moins systématiques que les Allemands ; mais il est fort à croire que le manque de conviction les a un peu aidés dans leur modération. Ils ont à peine effleuré la matière, et ils paraissent avoir trop compté sur l’éternel incognito de plusieurs livres fort intéressants, assez rares, et en tous cas non traduits. Quant à notre Vasari, que de gros volumes sont sortis de ses flancs, et qu’on a donnés comme tout à fait neufs et excellents ! Nous ne les citerons pas, pour éviter le scandale. Ce qu’il y a de plus surprenant dans cette manœuvre, c’est que l’on s’aperçoit, par une étude approfondie de notre auteur, que les savants et les académiciens qui l’ont mis le plus impudemment à contribution n’ont pas même pris la peine de le lire, et se sont contentés de le feuilleter avec des ciseaux à la main, craignant sans doute la fatigue et la perte de temps que leur aurait causées la lecture attentive de dix volumes. Il en est même parmi eux qui, désirant s’éviter la peine de penser pour leur compte, et voulant paraître maîtres de leur sujet, ont trouvé assez commode de profiter de l’abandon peu réfléchi, de la surabondance et des divagations contradictoires du Vasari, de telle sorte qu’ils puisent à la fois chez lui et l’énonciation d’une erreur, et les arguments qui la combattent. Parés ainsi d’une sagacité usurpée, affectant ainsi une grande profondeur, ils ornent le tout d’un cliquetis de paroles brillantes et de phrases alambiquées, tout à fait en dehors de l’art ; et pourtant ces œuvres superficielles et boursouflées n’en ont pas moins des prôneurs et des admirateurs. Stimulés par l’amour de la vérité, nous tâcherons de faire ressortir leur inconsistance et leurs écarts.

Voilà dans quel sens et pourquoi nous nous sommes permis d’ajouter aux vies des artistes les plus célèbres nos annotations ou commentaires. Après avoir mûrement réfléchi par où avaient péché les autres, nous tâcherons de nous surveiller nous-mêmes. Nous sommes sûrs au moins de pouvoir laisser de côté ce qu’il peut y avoir d’étroit et d’exclusif dans les affections de l’atelier, de ne point exalter ou dénigrer les hommes au gré de nos goûts particuliers ; de ne point viser enfin à accabler sous son ignorance dans l’estétique un écrivain qui parle d’art de la façon dont en ont parlé le Ghiberti, Leon-Battista Alberti, le Vinci, Bramante, Raphaël, Michel-Ange et Palladio, quand nos arts florissaient, long-temps avant que l’estétique fût inventée.