Voyages aux Montagnes Rocheuses/20

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Victor Devaux & Cie (p. 380-405).

À
un Père de la Compagnie de Jésus., .
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Nation des Pottowatomies aux Council-Bluffs.
(Sans date.)


Mon Révérend et bien cher Père,

Connaissant le grand intérêt que vous portez aux missions chez les Sauvages, je me propose de vous donner quelques renseignements sur celles que nous venons d’entreprendre, en y ajoutant des détails sur diverses traditions indiennes et des observations sur les mœurs et les coutumes de ces peuples. Nous subissons nécessairement, dans ces pays éloignés, de nombreuses privations ; mais le Seigneur ne se laisse jamais vaincre en générosité, il récompense au centuple le plus léger sacrifice que l’on fait pour lui ; et si nos privations sont grandes, nos consolations le sont bien davantage. Tous les jours je remercie la divine Providence de m’avoir placé dans ces contrées.

Je partis de Saint-Louis le 10 du mois de mai, en compagnie du R. P. Verhaegen[1], notre supérieur, qui devait visiter les Kickapous, et du P. Hélias, qui allait fonder une nouvelle mission parmi les Allemands dans les environs de la ville de Jefferson. J’ai fait tout le voyage sur le bateau à vapeur et je suis arrivé chez les Pottowatomies des prairies le 31 du même mois. Vous raconter toutes nos aventures sur le vieux Père des eaux, le Mississipi, et particulièrement sur le Missouri ou l’eau bourbeuse, que nous avons remonté sur une longueur de plus de huit cents milles ; vous décrire toutes les petites villes et les villages qui naissent comme par enchantement sur ses bords, les rochers à pic de plusieurs centaines de pieds de hauteur, les cavernes, les forêts et les immenses prairies qui se succèdent avec une prodigieuse variété sur ses rives ; son lit parsemé d’îles innombrables, d’une, de deux, de trois et même de quatre lieues, et remplies de toutes sortes de gibier : ce travail me mènerait beaucoup trop loin ; seulement je ferai observer que la navigation à vapeur sur le Missouri est une des plus dangereuses que l’on puisse entreprendre : à mon avis, la mer, malgré ses tempêtes et le tribut qu’elle nous force à lui payer, est bien préférable. Le courant de ce fleuve est des plus rapides, il faut donc une forte pression pour le surmonter, de là le danger continuel où le voyageur se trouve exposé d’être renversé, et même, comme il n’arrive que trop souvent, d’avoir tous ses membres fracassés et lancés çà et là par une explosion de chaudière. Ajoutez les bancs de sable dont le fleuve est rempli, sur lesquels on peut être jeté à toute heure, et les innombrables chicots contre lesquels le vaisseau va souvent se briser ; tout cela nous a mis plusieurs fois à deux doigts de notre perte. Les chicots (en anglais snags) sont des arbres immenses qui, d’abord entraînés par le courant, se sont ensuite fixés par les racines dans la vase au fond du fleuve, et dont les branches s’étendent de tous côtés au-dessous, au-dessus et au niveau de l’eau.

Je me suis arrêté trois jours à notre résidence des Kickapous pour y attendre le P. Verreydt et le F. Mazelli, avec lesquels je devais continuer le voyage. Le grand chef Pashihi paraît nous être très-attaché ; il nous a témoigné beaucoup d’affection. C’est un homme rempli d’esprit et de bon sens, qui n’a besoin que d’un peu de courage pour devenir un excellent chrétien ; il nous a raconté plusieurs fois que dans un songe il a vu les Mache-ta-co-ni-a (Robes-noires) dans le ciel, reprochant à sa nation ses infidélités et ses vices, et lui disant que parce qu’elle n’a pas voulu les écouter dans le temps, le Grand-Esprit l’a rejetée… Les indiens Sanks, qui sont à deux journées vers le nord, étaient rangés sur les bords du fleuve pour nous voir passer ; les chefs, qui avaient souvent visité notre résidence, nous reconnurent à notre robe noire, nous saluèrent très-cordialement par un cri de joie, et nous souhaitèrent un bon et heureux voyage… Les Aouas, que nous avons visités en passant, nous parurent aussi très-favorables, et voulurent nous retenir parmi eux : leur grand chef, le Nuage-Blanc, avait été mon disciple à Saint-Ferdinand, il y a environ douze ans… Avant de nous rendre à notre destination, nous avons traversé les villages des Ottoes. Ils bâtissent leurs cabanes en forme de monticules, et ils les recouvrent de gazon : ces cabanes sont si grandes, que cent cinquante personnes peuvent y loger à leur aise ; l’intérieur ressemble à un temple : les soliveaux qui supportent les mottes de terre s’appuient sur une vingtaine de piliers ou poteaux ; un trou ménagé au sommet reçoit la lumière et donne passage à la fumée. La nation est pauvre et très-adonnée au vol et à la boisson : ce sont les seuls Indiens que je connaisse qui, dans leurs malheurs et leurs revers, s’en prennent au Grand-Esprit et osent blasphémer.

Un jour que le bateau s’était arrêté et que l’équipage était descendu pour couper du bois, je m’écartai du rivage à une assez grande distance ; dans mon excursion, je rencontrai un vieillard nonagénaire qui s’arrêta d’abord à mon approche, me regardant avec un étonnement mêlé de joie. Il avait jugé à mon habit que j’étais prêtre ; et lorsque je l’eus confirmé dans son idée : « Ah ! mon père, s’écria-t-il, je suis catholique ; il y a bien des années que je n’ai pas eu le bonheur de voir un prêtre ; je l’ai désiré avec tant d’ardeur avant de mourir ! Aidez-moi donc à me réconcilier avec Dieu !… » Je satisfis avec empressement à sa demande, nous versions tous deux d’abondantes larmes. Il me reconduisit ensuite vers le bateau, et je me séparai de ce bon vieillard ; mais je ne puis vous dire la consolation que je goûtai dans cette heureuse rencontre.

Lorsque nous arrivions et comme on déchargeait nos effets, on apporta à bord un jeune homme très-dangereusement malade ; il était déjà tard, et, à cause de nos bagages, je ne pouvais me rendre à la cabane que le grand chef de la nation nous avait fait préparer. Le jeune homme souffrait beaucoup pendant la nuit ; quoique inconnu, j’entrai dans sa chambre pour le soulager ou le consoler. J’appris qu’il était catholique et qu’il avait reçu d’un de ses oncles, ecclésiastique zélé, une éducation chrétienne ; de plus, il avait toujours conservé une grande dévotion envers la Mère de Dieu. Depuis six ans il voyageait dans les montagnes, au milieu de différentes nations, et n’avait point vu de prêtre. Je n’eus point de difficulté à l’engager à se confesser, et je lui donnai l’Extrême-Onction. J’ai appris depuis qu’il mourut le lendemain de son arrivée au terme de son voyage.

Il y a de grands obstacles à vaincre pour convertir une nation indienne : les principaux sont l’usage immodéré de la boisson, la polygamie, les préjugés et les pratiques superstitieuses, un langage dont il est très-difficile d’acquérir la connaissance, un penchant à mener une vie errante, et ce penchant est si fort chez les sauvages que, s’ils restent trois mois dans le même endroit, ils deviennent mélancoliques et rêveurs ; leur conversion est donc tout à fait une œuvre de Dieu. Cette portion de la vigne du divin Maître demande, de la part de ceux qui la cultivent, une vie de croix, de privations et de patience ; nous espérons cependant qu’aidés de la grâce et assistés par vos prières et par celles de tous nos frères, nous obtiendrons du Seigneur quelque succès à nos faibles travaux. Le résultat depuis quatre mois a été vraiment consolant ; un bon nombre de sauvages montrent le désir de se faire instruire. Nous avons ouvert une école ; mais, faute d’une plus grande cabane, nous ne pouvons recevoir qu’une trentaine d’enfants ; deux fois par jour, nous faisons une instruction à ceux que nous préparons pour le baptême. Nous en avons déjà admis cent dix-huit, et j’ai eu la consolation d’en baptiser cent cinq. Le jour de la glorieuse Assomption de la très-sainte Vierge Marie ne sera pas de sitôt oublié chez les Pottowatomies ; l’église où le service divin se célébra était peut-être la plus pauvre du monde ; mais douze jeunes néophytes, qui trois mois auparavant n’avaient aucune connaissance de la loi de Dieu, y chantaient la messe d’une manière vraiment édifiante. Le R. P. Verreydt prêcha sur la dévotion à la Mère de Dieu ; je fis ensuite une instruction sur les cérémonies et sur la nécessité du baptême, et je conférai ce sacrement à une vingtaine d’adultes : la femme du grand chef était du nombre. Cette personne est très-charitable, elle a du zèle et jouit d’une grande estime parmi ceux de sa nation ; il est à espérer que sa conversion attirera beaucoup d’autres Indiens à notre sainte Religion. Après la messe, je bénis quatre mariages. Le soir, nous fîmes une visite à l’une de ces familles converties ; toute notre petite congrégation était rassemblée pour rendre grâces à Dieu des insignes bienfaits dont il les avait comblés durant cette fête. Ces braves gens parcourent à présent la campagne en tous sens pour gagner leurs proches parents et ceux de leur connaissance, les engager à se faire instruire et à jouir avec eux du même bonheur. Plusieurs sauvagesses dont les parents, encore païens, ne voulaient pas nous avertir, se sont traînées, toutes malades qu’elles étaient, à la distance de deux à trois lieues, pour venir nous demander le baptême avant de mourir. Je pourrais vous rapporter beaucoup d’autres traits admirables de nos nouveaux convertis, mais ce récit serait trop long.

Les Pottowatomies sont divisés en deux tribus : ceux des forêts, parmi lesquels on trouve un bon nombre de catholiques ; et ceux des prairies, qui n’ont jamais eu de prêtres parmi eux. Ces derniers forment une nation mixte, composée de Pottowatomies, Winebagoes, Foxes, Chippevrays, Sanks, Ottaways, Menomenees et Kickapous : ils sont plus de trois mille. C’est parmi eux que nous avons ouvert notre mission, sous la protection de la sainte Vierge et de saint Joseph. Ils se sont séparés de leurs frères des forêts au commencement de la guerre de l’indépendance des États-Unis ; les uns prirent parti pour les Anglais, les autres pour la République. Les Pottowatomies ayant vendu leurs terres dans les États de l’Illinois et de l’Indiana en 1836, ont reçu du gouvernement cinq millions d’arpents en échange, du fleuve Missouri aux Council-Bluffs, vers les 41e et 42e degrés de latitude septentrionale. Le climat du pays est extrêmement variable, et les pluies, accompagnées de coups de tonnerre, très-fréquentes aux mois de juin et de juillet. L’hiver est moins long qu’en Belgique, mais le froid est beaucoup plus perçant, et les chaleurs sont beaucoup plus fortes en été. Le pays en général est entrecoupé de belles plaines et de forêts, le Missouri l’arrose dans toute son étendue. Trois autres rivières, le Necshnebatlana, le Mosquito et le Boyer, traversent toute la contrée. — Les Pottowatomies sont d’un caractère fort doux et fort traitable ; ils ne manquent pas d’esprit, et ne paraissent jamais timides ; ils ne connaissent entre eux ni rang ni dignité : leur chef n’a d’autre revenu fixe que celui qu’il retire de sa propre lance, de ses flèches et de sa carabine ; son coursier, voilà son trône. Il promulgue la loi, et, quand il le peut, il l’exécute. Il doit être plus courageux que ses sujets et ne reçoit jamais plus que chacun d’eux dans les partages qu’ils ont à faire. Le premier dans les combats, le dernier il se retire du champ de bataille. La plupart des sauvages sont capables de soutenir une conversation intéressante sur des matières qui ne sont pas hors de leur portée ; ils aiment à plaisanter, et entendent très-bien raillerie ; jamais ils ne disputent ni ne s’emportent en conversant ; jamais ils n’interrompent qui que ce soit ; ils réfléchissent toujours quelques instants avant de répondre dans les matières importantes, ou bien ils remettent leurs réponses au lendemain. Ils n’ont point d’expression pour blasphémer le nom du Seigneur ; leur terme le plus injurieux est celui de chien. Ils sont distribués par cabanes ; la paix profonde dans laquelle ils vivent provient en grande partie de ce qu’on laisse faire à chacun ce que bon lui semble. Souvent des années se passent sans la moindre querelle ; mais quand la boisson les enivre, et on leur en apporte en ce moment en grande quantité, toutes leurs bonnes qualités disparaissent, ils ne ressemblent plus à des hommes, tout doit fuir autour d’eux ; leurs cris, les hurlements qu’ils poussent sont affreux ; ils se jettent les uns sur les autres, se mordent le nez et les oreilles et s’entre-déchirent d’une manière horrible. Depuis notre arrivée parmi eux, quatre Ottoes et trois Pottowatomies ont été tués au milieu du désordre causé par l’ivresse.

Celui qui a commis un meurtre est mis à mort par les parents de la victime, à moins qu’il ne rachète son propre corps et ne couvre le sang en leur payant des chevaux, des robes (peaux de buffles), etc. S’il se présente à eux pour expier son crime, et que personne n’ait le triste courage de l’immoler, comme il arrive assez souvent, alors il s’est lavé du meurtre, et ne doit rien payer. Un de nos voisins ayant assassiné sa femme en fut quitte en payant un cheval à chacun des frères de celle-ci. Le meurtrier se peint pendant quelque temps le visage en noir et les lèvres en rouge, pour montrer qu’il est avide de sang et qu’il veut s’en rassasier.

Quand le mari ou la femme meurt, celui des époux qui survit paye aux parents du défunt la dette du corps en argent ou en chevaux, et chacun selon ses moyens : celui qui négligerait de payer cette dette serait en danger de voir détruire tout ce qu’il possède. La femme doit porter le deuil pendant une année après la mort de son mari, c’est-à-dire qu’elle ne peut ni se peigner, ni se laver ; seulement quand la vermine la ronge, une parente du défunt peut lui rendre ce service par compassion.

Pendant une année entière le Pottowatomie nourrit l’âme de son parent mort ; à chaque repas qu’il prend, il jette une partie de sa nourriture au feu, croyant que 1 âme en reçoit du soulagement et de la force. Les Ottoes, nos plus proches voisins, étranglent ordinairement un ou deux de leurs meilleurs chevaux sur le tombeau de leur camarade, afin qu’il monte dessus dans son grand voyage en l’autre monde ; et ils suspendent les queues de ces chevaux au bout de longues perches. Le Ciel, conformément à leurs idées, est une immense prairie, au delà du coucher du soleil, où le printemps est éternel, et qui est remplie d’innombrables espèces d’herbes, de buffles, de cerfs, de chevreuils, d’ours et de toutes sortes d’animaux.

Quand un chef ou un brave de la nation est enterré, tous les guerriers qui ont remporté quelque trophée sur les ennemis, s’assemblent pour lui rendre les derniers devoirs. Ils accompagnent la bière jusqu’au lieu de la sépulture, où l’un des principaux orateurs prononce l’oraison funèbre. Il rappelle toutes les belles qualités du défunt, toutes les actions remarquables de sa vie, les ennemis que sa hache a immolés, les chevelures qu’il a arrachées et les bêtes féroces qu’il a tuées. Ils le placent ensuite dans la tombe, le visage tourné vers le coucher du soleil ; lui remettent sa carabine, sa lance, son arc et ses flèches ; remplissent sa corne à poudre et son sac à plomb ; mettent à côté de lui sa pipe et son sac à tabac bien rempli, avec quelques autres provisions, telles que du sucre, de la viande sèche, du maïs, etc. ; provisions dont il pourrait avoir besoin dans son voyage au pays des âmes. Tous lui souhaitent une heureuse journée, lui prennent la main pour la dernière fois, et la tombe se ferme. Ils plantent ensuite devant le tombeau le poteau des braves ; au sommet on peint en rouge l’animal ou dodême, esprit tutélaire du défunt, et tous les assistants y font une ou plusieurs marques : ce sont des croix rouges, par lesquelles ils veulent représenter tout autant de mânes de leurs ennemis vaincus qu’ils destinent à servir d’esclaves à leur camarade dans l’autre monde. J’en ai vu qui avaient de quatre-vingts à cent de ces croix.

Dans le tombeau d’un enfant, ses parents avaient pratiqué une petite ouverture pour donner passage à l’âme. La mère désolée garda la tombe pendant deux jours, pour découvrir si l’objet de sa tendresse avait rencontré quelque âme généreuse dans l’autre monde, ou bien s’il y était malheureux. Voici à quels signes elle prétendait le reconnaître : si elle voyait un joli oiseau, ou quelque bel insecte, l’augure lui serait favorable ; si au contraire elle rencontrait un reptile dégoûtant ou un oiseau de proie, alors tout était perdu pour son enfant. Heureusement les jours étaient sereins, les papillons et d’autres beaux insectes de toute couleur et de toute espèce voltigeaient de tous côtés. La pauvre mère retourna donc toute consolée chez elle..... Elle est depuis venue me voir pour se faire instruire dans notre sainte Religion et pour faire baptiser ses deux petites filles.

Dès qu’un sauvage désire se marier, il manifeste son inclination en jouant d’une espèce de flûte, le popokwem ; il rôde par tout le village, et donne souvent des sérénades devant la cabane de celle qu’il souhaite pour compagne. Dès que la jeune fille consent à l’épouser, les parents ou les frères fixent le prix : il faut qu’il donne à chacun d’eux un cheval, ou bien quelque autre objet de valeur, et on lui remet la fiancée. La plupart cependant, sans consulter les inclinations de leurs filles, les vendent à qui bon leur semble : elles y sont tellement habituées, qu’il est rare qu’elles murmurent ou qu’elles se plaignent. La femme d’un sauvage est vraiment une esclave. Ils disent que le Grand-Esprit (Kchemmito), dans un conseil qu’il tint avec leurs aïeux, décida « que l’homme protégerait la femme et ferait la chasse aux animaux ; que tout le reste serait à la charge de la femme : » et ils se tiennent scrupuleusement à cette décision. La femme donc est seule chargée de tous les travaux du ménage ; elle lave, raccommode, fait la cuisine, bâtit les cabanes, laboure et ensemence les terres, coupe le bois, etc. ; aussi paraît-elle vieille à l’âge de trente à trente-cinq ans. Pour les hommes, à la réserve des chasses qu’ils font de temps en temps, ils mènent une vie tout à fait oisive ; ils causent en fumant la pipe, jouent aux cartes, ou à quelque autre jeu peu fatigant, et voilà tout.

Lorsqu’il s’agit de donner un nom à un enfant, les parents font une grande fête ; ils envoient à tous les convives un petit morceau de feuille de tabac, ou une petite baguette : c’est là leur manière d’inviter. Après le repas, le plus ancien de la famille proclame le nom, qui a généralement rapport soit à quelque marque distinctive, soit à quelque songe de l’enfant, ou bien à quelque beau ou quelque vilain trait par lequel il se serait fait connaître. Cette cérémonie a lieu, pour les garçons, quand ils ont atteint dix-sept ans. Ils doivent subir auparavant un jeûne très-rigoureux de sept à huit jours, pendant lesquels les parents recommandent à leur enfant de faire une grande attention aux rêves que le Grand-Esprit lui envoie, et qui lui révéleront ses destinées futures : par exemple, s’il sera chef ou grand guerrier, par le nombre d’animaux que sa hache immolera, ou des chevelures qu’il remportera sur ses ennemis dans ses songes. L’animal qui se sera présenté à lui va devenir son dodême, et pendant toute sa vie il doit en porter une marque sur lui : griffe, dent, queue ou plume, n’importe.

La caste des faux ministres de la religion chez les sauvages est connue sous le nom de grande médecine ; ceux qui en sont font bande à part. Chacun d’eux est muni d’un sac qui contient quelques racines et des plantes médicinales, auxquelles ils rendent une espèce de culte. Ils tiennent leurs croyances dans le plus grand secret, et se montrent très-difficiles à admettre des adeptes. Ils dansent et chantent beaucoup dans leurs réunions, et se donnent de fortes secousses les uns aux autres, en pressant leurs sacs à médecine sous le bras. Une chose très-remarquable, et que je tiens de témoins oculaires, c’est qu’ils s’avouent vaincus et cessent leurs opérations superstitieuses lorsqu’une personne baptisée, portant une marque de sa religion, comme une croix ou une médaille bénite, s’approche du lieu de leurs assemblées. Une vieille femme sauvage que j’instruis en ce moment, et qui a appartenu longtemps à la grande médecine, a été menacée de mort par les jongleurs, si elle se faisait chrétienne ; elle paraît bien ferme cependant dans ses bonnes résolutions. L’exemple de son mari et de ses six enfants, que j’ai baptisés, sert beaucoup à l’encourager. Les chefs de cette secte sont craints parmi les sauvages, et en imposent beaucoup à leur crédulité : ils font accroire aux pauvres Indiens qu’ils peuvent prendre à volonté la forme d’un serpent, d’un ours, d’un loup ou de tout autre animal ; qu’ils peuvent prédire l’avenir et découvrir le meurtre et le vol. La connaissance des simples leur fait opérer souvent des cures extraordinaires. Après avoir administré la médecine aux malades, ils poussent des cris, des hurlements ; prétendent sucer la maladie du corps par de longs tuyaux, dansent autour de l’infirme, et font devant lui les grimaces les plus burlesques.

Leurs chants ont presque toujours rapport à leurs opinions religieuses, et souvent ils s’adressent à Na-na-bush, ou l’ami de l’homme, le neveu du genre humain. Ils le supplient de vouloir être leur interprète, en présentant leurs prières au Maître de la vie. Souvent ils sont consacrés à Mesuk-kum-mik-okwi, c’est-à-dire à la terre, la grand’mère du genre humain. Ils racontent dans ces chants comment Na-na-bush a créé la terre par l’ordre du Grand-Esprit, et comment la grand’mère a reçu le commandement de pourvoir à tous les besoins des oncles et des tantes de Na-na-bush. Par ces expressions ils entendent les hommes et les femmes. Na-na-bush, toujours le bienveillant intercesseur du genre humain auprès du Grand-Esprit, obtint la création des animaux ; leur chair devait servir de nourriture, et leur peau de vêtement. Il procura aussi aux hommes des racines et des herbes médicinales d’un pouvoir souverain, pour guérir leurs maladies et les rendre capables de tuer les animaux à la chasse. Toutes ces choses furent confiées à Me-suk-kum-mik-okwi ; et afin que les oncles et les tantes de Na-na-bush ne l’invoquassent jamais en vain, celui-ci pria Me-suk-kum-mik-okwi de se tenir toujours dans sa cabane. De là vient que quand un sauvage déterre des racines médicinales, il dépose en même temps dans la terre sa petite offrande à Me-suk-kummik-okwi.

Tous ces chants sont marqués sur l’écorce du bouleau, ou sur de petits morceaux de bois plats ; les idées y sont exprimées par des figures emblématiques.

C’est une tradition parmi les Pottowatomies qu’il y a dans la lune une vieille femme, toujours occupée à faire un grand panier. Si elle réussit à finir son ouvrage, le monde doit périr ; mais un gros chien l’observe sans relâche, et détruit son ouvrage quand il est sur le point d’être achevé. Le combat entre le chien et la femme a lieu à chaque éclipse de lune. Le gros chien est la tache noire que l’on voit au sud de cet astre.

Ils croient que le tonnerre est la voix de certains êtres vivants. Quelques-uns pensent que ces êtres ressemblent à des hommes, d’autres qu’ils ont la forme d’oiseaux. Toutes les fois qu’il tonne, ils brûlent du tabac qu’ils offrent en sacrifice au tonnerre. Il est douteux qu’ils connaissent la liaison du tonnerre avec l’éclair qui le précède.

Voici une tradition très-singulière que je tiens du premier chef de la nation ; elle est répandue parmi toutes les tribus de l’Illini, ou des États de l’Illinois, de l’Indiana et de l’Ohio. En remontant le Mississipi, après Saint-Louis, entre Alton et l’embouchure de la rivière des Illinois, le voyageur observe, entre deux grandes côtes, un étroit passage, où un petit ruisseau se décharge dans le fleuve. Ce ruisseau s’appelle le Piasa, c’est-à-dire en langue sauvage l’oiseau qui dévore l’homme. Dans ce même endroit on remarque sur un rocher uni et perpendiculaire, au-dessus de la portée de la main, la figure d’un énorme oiseau ciselé dans le roc, les ailes déployées. L’oiseau que cette figure représente, et qui a donné le nom au petit ruisseau, a été appelé par les Indiens le Piasa. Ils disent que plusieurs mille lunes (mois) avant l’arrivée des blancs, quand le grand mammouth ou mastodonte que Na-na-bush a détruit, et dont on retrouve encore aujourd’hui les ossements, dévorait l’herbe de leurs immenses et vertes prairies, il y avait un oiseau d’une grandeur si démesurée, qu’il enlevait sans peine un cerf entre ses griffes. Cet oiseau, ayant goûté un jour la chair humaine, ne voulut plus depuis se rassasier d’autre mets. Sa ruse ne le cédait pas à sa force ; il s’élançait subitement sur un Indien, l’emportait dans une des cavernes du rocher et le dévorait. Plusieurs centaines de guerriers avaient essayé de le détruire, mais sans succès. Pendant plusieurs années, des villages entiers furent dévastés, et la terreur s’était répandue parmi toutes les tribus de l’Illini. Enfin, Outaga, chef guerrier dont la renommée s’étendait au delà des grands lacs, se sépara du reste de sa tribu, jeûna l’espace d’une lune dans la solitude, et pria le Grand-Esprit, le Maître de la vie, de vouloir délivrer ses enfants des griffes du Piasa. La dernière nuit de ce jeûne, le Grand-Esprit apparut en songe à Outaga, l’avertit de choisir vingt guerriers, chacun armé d’un arc et d’une flèche empoisonnée, et de les cacher dans un endroit désigné. Un seul guerrier devait se montrer à découvert, pour servir de victime à Piasa, sur lequel tous les autres décocheraient leurs flèches au moment où l’oiseau s’élancerait sur sa proie. À son réveil, le chef remercia le Grand-Esprit, et retourna raconter son songe à sa tribu. Les guerriers furent choisis, armés sans délai et placés en embuscade. Outaga s’offrit lui-même pour servir de victime : il était prêt à mourir pour sa nation. Debout sur une éminence, il vit le Piasa perché sur le roc ; il se dressa de toute sa hauteur, appuya ses pieds fortement sur la terre, la main droite sur son cœur qui ne battait pas, et entonna d’une voix ferme le chant de mort d’un guerrier. Aussitôt le Piasa prit son essor, et comme un éclair il s’élança sur le chef. Tous les arcs étaient tendus, et chaque flèche lui entra dans le corps, jusqu’aux pennes. Le Piasa jeta un cri effrayant et sauvage, et expira aux pieds d’Outaga. Ni les flèches, ni les griffes de l’oiseau n’avaient touché le guerrier. Le Maître de la vie, pour récompenser le dévouement généreux d’Outaga, avait suspendu un bouclier invisible au-dessus de sa tête. En mémoire de cet événement, l’image du Piasa a été ciselée dans le roc. Telle est la tradition indienne, et je la donne comme je l’ai reçue. En tous cas, ce qu’il y a de certain, c’est que l’on voit dans le roc, à une hauteur inaccessible, la figure d’un énorme oiseau qui paraît ciselée. Jamais un sauvage ne passe par cet endroit, dans son canot, sans tirer un coup de fusil sur la figure de l’oiseau. Les marques que les balles ont laissées sur le roc sont presque innombrables. Les ossements de plusieurs milliers d’hommes sont entassés dans les cavernes tout autour du Piasa comment, par qui, et pourquoi ? Il n’est pas aisé de le deviner.

Trois des grands chefs de la nation Pawnee sont venus nous visiter, et ont logé dans notre cabane. Ils avaient remarqué le signe de la croix que nous faisions avant et après nos prières et après les repas : de retour chez eux, ils ont appris à toutes les personnes de leur village à former le même signe, comme quelque chose d’agréable au Grand-Esprit ; ils nous ont priés, par leur interprète, de venir les visiter. Le gouvernement leur avait envoyé un ministre protestant, ils n’ont point voulu le garder chez eux. « Ils savaient, lui dirent-ils, que le démon l’accompagnait ; et comme ils ne voulaient pas de cet hôte dans leurs villages, ils ne pouvaient pas l’y admettre lui-même… » L’usage des liqueurs est interdit chez eux, et quand on veut leur en apporter, ils répondent qu’ils sont déjà assez fous sans la boisson… Ils ont aussi une coutume singulière : ils se mangent la vermine les uns aux autres, et ils rendent le même service à ceux qui vont les visiter. Les Pawnees sont au nombre de dix mille.

Le ministre protestant des Omahas a dû déloger. Cette tribu compte près de deux mille âmes. Deux de leurs chefs, Kaiggechinke et Ohio, avec une quarantaine de guerriers, sont venus nous danser le calumet ou leur danse d’amitié. Une telle danse vaut vraiment la peine d’être vue, mais il n’est pas facile d’en donner une idée, car tout paraît confusion ; ils jettent des cris en se frappant la bouche ; en même temps ils font des sauts de toutes les façons, tantôt sur un pied, tantôt sur l’autre, toujours au son du tambour et en parfaite cadence, pêle-mêle, sans ordre, tournant à droite et à gauche, de tous côtés et de toute manière à la fois. Tous nous montrèrent la plus grande affection, et nous prièrent de fumer le calumet avec eux. J’ai montré notre chapelle aux chefs, qui paraissaient prendre un grand intérêt à l’explication que je leur fis de la croix de l’autel, et des images de la passion de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Ils me prièrent ensuite avec instance de venir les visiter pour baptiser leurs enfants, et me firent présent d’une belle peau de castor pour me servir de sac à tabac. Je leur donnai à mon tour quelques chapelets pour leurs enfants, et à chacun une belle croix en cuivre ; ils la reçurent avec grande reconnaissance, la baisèrent avec respect, et se la mirent au cou. En partant ils m’embrassèrent de la manière la plus cordiale. Ils ne sont guère qu’à une centaine de milles des Council-Bluffs

Le nouveau territoire indien, d’après une disposition récente du gouvernement, aura pour limite la rivière Rouge au sud, et à l’est, l’Etat de l’Arkansas, celui du Missouri et la rivière du même nom : nous en avons donc déjà une grande partie, ce territoire contient maintenant les nations suivantes : Punchas, Dourvas, Ottoes, Kansas, Osages, Kickapous, Pottowatomies, Delawares, Shawanons, Weas, Piankashaws, Peorias, Kaskaskias, Ottawas, Senecas, Sanks, Quapaws, Crées, Cherokees et les Choctaws[2]. Ils sont environ cent mille, tristes restes de nations autrefois puissantes ! Quand les Européens visitèrent le nouveau monde pour la première fois, ils trouvèrent ses îles et ses côtes extrêmement peuplées ; mais plusieurs tribus alors florissantes ont disparu de la surface de la terre ; on ignore le nom même d’un grand nombre. À mesure que les blancs étendaient leur domination dans l’est, les sauvages se retirèrent vers l’ouest, laissant après eux, à chaque pas qu’ils faisaient, de déplorables monuments de leurs malheurs et de leur décadence. En voilà aujourd’hui cent mille poussés sur les bords de la vaste et inhabitable prairie ; la chasse ne peut pas suffire à leur subsistance, ils ne sont point accoutumés au travail ; on peut donc concevoir des craintes sérieuses sur leur sort. Ah ! si notre nombre était plus grand, et que nos ressources y correspondissent, ce serait peut-être le moyen de faire un bien durable parmi eux, et d’empêcher leur extinction totale. Presque toutes les nations du nord de l’Amérique montrent une grande prédilection pour les missionnaires catholiques, et semblent nous tendre les bras de préférence, nonobstant les millions de piastres que les sociétés protestantes dépensent pour s’attacher ces pauvres gens ; en réalité ces piastres ne servent qu’à enrichir les soi-disant ministres de l’Évangile avec leurs femmes et les enfants qu’ils traînent après eux. En attendant ils viennent occuper la place, et partout où ils sont il faudrait cependant former un établissement catholique.

Il n’est pas rare de rencontrer des ours dans notre voisinage ; mais cet animal attaque rarement l’homme le premier, seulement il se défend quand on le blesse. Les loups se présentent très-souvent jusque sur notre porte ; récemment ils nous ont enlevé toutes nos poules Ils sont de deux sortes : les loups des prairies, timides et petits ; et les loups noirs des montagnes, qui sont grands et dangereux. Nous devons toujours nous tenir en garde contre ces mauvais voisins : je ne sors par conséquent jamais sans un bon couteau, un casse-tête ou une canne à épée. On trouve aussi des serpents, parmi lesquels je nommerai la tête de cuivre, la couleuvre, le serpent noir et le serpent à sonnettes[3]. La campagne, les forêts, les cabanes fourmillent de souris, qui rongent et dévorent le peu de fruits que nous possédons. Les insectes, les papillons surtout, sont ici très-nombreux, très-variés et très-grands. Le paon de nuit est de toutes les couleurs et d’une grandeur prodigieuse ; il n’a pas moins de huit pouces en longueur. — Nous vivons aussi au milieu des moucherons et des maringouins ; on les rencontre par milliers, et ils ne nous laissent de repos ni le jour ni la nuit.

Je voudrais pouvoir vous donner une idée de l’architecture d’un village indien ; elle est aussi bizarre que leur danse. — Imaginez-vous donc un grand nombre de cabanes et de tentes, faites en écorces d’arbre, en peaux de buffles, en toiles grossières, en nattes, en gazons, toutes d’un aspect triste et funèbre, de toutes les grandeurs, de toutes les façons, dont quelques-unes n’ont pour soutien qu’une seule perche, d’autres six ; figurez-vous-les encore tendues de toutes les manières possibles et de tous les dessins imaginables, éparses çà et là, dans la plus grande confusion, et vous aurez un village indien.

Nous avons une belle petite chapelle de vingt-quatre pieds carrés, et surmontée d’un élégant petit clocher ; de plus, quatre petites et pauvres cabanes d’arbres bruts : elles ont quatorze pieds en tous sens ; leur toiture se compose de soliveaux grossiers, qui ne nous garantissent ni de la pluie, ni de la grêle, et assurément nous préserveront bien moins encore de la neige en hiver.

Le bon frère Mazelli et moi, nous nous recommandons instamment à vos saintes prières.

Votre très-humble serviteur
en J. C.
P. J. De Smet, S. J.
  1. Le R. P. Pierre J. Verhaegen, né en Belgique, est mort à la résidence de Saint-Charles (Missouri — États-Unis) le 21 juillet 1868, à l’âge de 68 ans, dont il avait passé 47 en religion. Il était proche parent de M.  Pierre-Théodore Verhaegen, avocat, ancien président de la chambre des Représentants, décédé à Bruxelles le 8 décembre 1862.
    (Note de l’Éditeur.)
  2. Il résulte des plus récentes investigations de la science et notamment des travaux de M.  de Paravey, que les Peaux-Rouges ou sauvages sont venus de l’Asie par le détroit de Behring et les îles Aléoutiennes, ou Aléoutes, à une époque immémoriale, et qu’ils peuplèrent le continent américain.
    (Note de l’Éditeur.)
  3. Serpent à sonnettes ou crotale (en anglais rattle-snake), genre de grands serpents, longs de 1 m 50 à 2 mètres, dont la queue est terminée par une série de pièces cornées plus ou moins nombreuses, sorte d’anneaux mobiles les uns à la suite des autres, qui, lorsque l’animal agite sa queue, produisent le même effet qu’un bruissement ou qu’une agitation d’une suite de grelots, bien qu’on n’entende pas de son qui puisse être appelé métallique. Ces pièces cornées résultent de la chute incomplète du dé écailleux dont l’extrémité de la queue de ces serpents est armée. Ils ont des formes trapues, une tête grosse, à museau court, et des écailles épaisses. Ils habitent les lieux marécageux de l’Amérique, et se nourrissent de petits animaux. Ils sont vivipares. Le serpent à sonnettes est très-venimeux : la violence du venin inoculé par sa morsure est telle, qu’elle suffit pour faire mourir en quelques heures un homme, un animal de forte taille ; la subtilité de ce venin se conserve, dit-on, même après la dessiccation de l’animal. Ce venin paraissant agir en vertu d’une grande puissance sédative et stupéfiante qui est en lui, on a proposé de le combattre par des stimulants, notamment par l’eau-de-vie. La prénanthe passe aussi pour un excellent antidote de ce poison.

    Voici un cas d’empoisonnement suivi de la mort en cinq heures :

    Le Commonwealth de Leavenworth (États-Unis) raconte que le 25 avril 1872, dans le comté de Pottowatomie, un nommé Jacques Vieux, beau-père de George L. Young, habitant près de Belleville, alla prendre dans une grange du maïs pour le planter. Il aperçut quelques épis plus longs et plus gros que les autres et y porta la main. Aussitôt un serpent caché derrière une planche se montre et dresse la tête. Le fermier, pensant avoir le temps d’achever sa besogne avant que l’animal pût l’atteindre, tint bon et s’empara des épis ; au même moment il fut mordu à la main par le serpent. Une lutte s’engagea et le brave homme finit par étendre le reptile mort à ses pieds. Épuise par l’attaque dont il venait de triompher, M.  J. Vieux fut porté dans une maison voisine et mis sur un lit ; au bout de quelques heures, il se trouva fort bien. Il se leva et voulut fumer une pipe, disant qu’il allait bien. Mais après quelques instants il cesse de fumer, dépose sa pipe, et expire en quelques minutes. Cinq heures s’étaient écoulées depuis le moment où il avait été mordu par le serpent. Cet animal hideux crotalus horridus) mesurait sept pieds de long, et portait sept anneaux à l’extrémité de la queue.

    (Note de l’Éditeur.)