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Julie Lavergne, Minou-Minette dans Fleurs de France 1880


Minou-Minette


CHRONIQUE NORMANDE



    Je vois encore sa démarche discrète xxx
Sa grâce, sa blancheur et ses yeux caressants :
Sa mort nous fit pleurer ; pourtant Minou-Minette
Était un simple chat.. xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx
                (Chants d’autrefois.)


I


LES CHATS D’ALGUEVILLE


Dans une des plus fraîches vallées de Normandie, en vue de la mer, mais abritée du vent du nord-ouest par une haute falaise, s’élève le vieux château d’Algueville. Ses possesseurs ne l’habitent pas, mais le font garder et entretenir avec soin ; et les rares voyageurs qui passent sur la route départementale, en admirant les tourelles reflétées dans l’eau des fossés, la ferme, le parc et les prairies d’Algueville, envient souvent le sort des châtelains absents.

Un vieux régisseur et quelques domestiques jouissent seuls des agrestes beautés de ce domaine ; encore voudraient-ils, s’il existait des fées, prier l’une d’elles de le changer de place, et de le mettre aux portes de quelque gros bourg, loin des brouillards marins, plus près de l’église et du marché. Personne, parmi eux, ne songe à se promener dans le parc au clair de la lune, ni à monter sur la plate-forme de la tour ; encore moins à regarder les anciens portraits qui décorent les appartements fermés, et à lire les volumes poudreux de la bibliothèque. Les hirondelles nichent sous les mâchicoulis, les corbeaux dans les cheminées, et çà et là, dans les interstices des pierres, sur la poussière imprégnée d’humidité par les brouillards du Cotentin, la mousse pose ses petits coussins de velours, et des graines enlevées par le vent s’arrêtent et germent au soleil de mars.

Les maîtres du logis séjournent