Eugène de Mirecourt, George Sand 1859
GEORGE SAND
Nous sommes trop fils de nos pères, et, par conséquent, trop chevaleresques, pour enlever du drapeau de la galanterie française cette vieille devise : « Honneur aux dames ! » qu’on y a inscrite à toutes les époques. Nous dirons donc à George Sand, malgré son pseudonyme masculin :
Venez, madame, entrez à notre bras dans cette galerie des illustrations contemporaines, où vous méritez une des premières places !
Ne craignez pas de trouver en nous un de ces biographes indiscrets qui lèvent brutalement les voiles défendus. Nous appartenons moins encore à cette troupe de critiques sans vergogne, dont vous avez eu tant à vous plaindre, et qui s’embusquent dans les carrefours les plus ténébreux de la presse pour jeter de la boue au génie qui passe.
Obligés de reconnaître en vous un écrivain supérieur, tous ces aristarques de mauvais lieu, tous ces calomniateurs à tant la ligne, n’ont pas eu honte d’outrager la femme.
C’est une guerre déloyale, une guerre de lâches.
Vous pouvez en être certaine, ces gens-là n’appartiennent ni à l’art, ni à la France ; l’art est un soleil qui n’éclaire point leurs ténèbres, et la France répudie tout ce qui insulte ses gloires.
Autrefois Ninon de Lenclos disait : « Je suis honnête homme, le reste ne vous regarde pas. »
Vous pouvez, madame, dire à votre tour : « Je suis honnête homme et grand artiste, que demandez-vous de plus ? »
On doit flageller rudement et sans miséricorde cette outrecuidance du sexe fort, dont peut-être on se bornerait à rire, si elle n’avait pas des conséquences si funestes. Il faut arracher le masque de