Zoloé et ses deux acolythes/Adresse

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De l’imprimerie de l’auteur (p. v-vii).

L’AUTEUR
À DEUX LIBRAIRES.



Bonjour, monsieur. Avez-vous lu mon manuscrit ? excellent ! délicieux ! n’est-ce pas ? — Le manuscrit de qui ? de quoi ? monsieur, je ne vous comprens pas. — Parbleu, le trait est neuf ! Vous me demandez, avant hier, trois jours pour lire ma Zoloé, et vous… — Parbleu, monsieur, j’ai bien le tems de lire vos productions ! Tenez, le voilà ce répertoire de sornettes ; le ciel vous conduise.

Monsieur, votre physionomie m’inspire de la confiance ; je ne doute pas que je ne trouve chez vous de quoi oublier le procédé indécent d’un de vos confrères. — Peut-être, De quoi s’agit-il en deux mots ? je n’ai qu’une minute. — Voici, monsieur, un manuscrit intéressant. Veuillez, je vous prie, en prendre lecture. Quant au prix qu’il mérite, c’est à votre délicatesse que je m’en rapporterai pour le fixer. Seulement, je stipulerai qu’il soit imprimé sur le champ. — Moi que j’achète, que j’imprime un manuscrit ! si je faisais ce commerce, ma boutique ne serait bientôt plus qu’une loge banale de foire. Non, monsieur, non. Je n’achète point de manuscrits ; on me les donne, je prens mon tems pour les lire ; et moyennant mes corrections et améliorations, je consens quelquefois à leur accorder l’honneur de les faire imprimer.

Je vous remercie, monsieur, de votre esprit ; et quant à l’honneur dont vous parlez, je me le procurerai moi-même, et n’en aurai d’obligation à personne.