Œuvres (Ferrandière)/Fables/Fable 041

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Janet et Cotelle (Première partie : Fables — Seconde partie : Poésiesp. 46-47).

FABLE XLI.

LE CHAT ET LA SOURIS.


Mère souris imprudemment
Entra dans une souricière :
Le lard lui sembloit frais et fort appétissant,
Un gros matou, la voyant prisonnière,
S’en réjouit, s’attend à bien dîner.
Elle étoit rebondie ; il l’admire, il la flaire ;

Jamais aucun parfum n’avoit tant su lui plaire.
Et de sa patte il va donner
Contre la grille trop légère,
Qui l’accroche, s’entr’ouvre ; et souris de sortir,
Et de courir, et de courir,
Pour revenir tout au plus vîte
À ce trou qui faisoit son gîte.
Alors de ce réduit qui, pour elle, est un fort,
Elle crie au matou : Tu m’évites la mort ;
Je revois mes enfans, juge quelle est ma joie !
De ton impatience il faut te repentir :
Apprends, mon beau minet, qu’on perd souvent sa proie,
Si l’on est, comme toi, trop pressé d’en jouir.