Les Aventures de Nigel/Chapitre 21

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Traduction par Albert Montémont.
Ménard (Œuvres de Walter Scott, volume 17p. 280-294).


CHAPITRE XXI.

L’INTRIGANTE ET SA DUPE.


N’allez pas chercher d’un pôle à l’autre ; c’est ici que demeure l’homme dont le rasoir n’a de comparable que sa bière : ici le badaud, dans quelque sens qu’on le prenne, se fera couper par le barbier[1].
Inscription sur l’enseigne d’un cabaret tenu par un barbier.


Nous sommes dans la nécessité de transporter nos lecteurs dans la demeure de Benjamin Suddlechop, le mari de l’active et industrieuse dame Ursule, et qui lui-même réunissait plusieurs métiers dans sa personne ; car, outre celui de faire des barbes, de peigner des cheveux et de retrousser une moustache comme doit la porter un militaire ou un tapageur, ou de lui donner la forme pendante qui distinguait les gens employés dans le civil ; outre qu’il tirait de temps en temps du sang, soit au moyen de la lancette, soit au moyen des ventouses, qu’il savait extraire un chicot, et remplissait d’autres petites fonctions chirurgicales presque aussi bien que son voisin Raredrenck l’apothicaire, il pouvait, au besoin, tirer une pinte de bière aussi bien qu’arracher une dent, percer une barrique tout comme une veine, et laver, avec un bon verre d’ale, les moustaches que son art venait d’ajuster. Mais il faisait ces différents métiers séparément.

Sa boutique de barbier étalait dans Fleet-Street une longue et mystérieuse enseigne, peinte de couleurs bigarrées, pour représenter les rubans dont elle avait été garnie. On voyait à la croisée des rangées de dents enfilées comme des chapelets, des bassins avec un chiffon rouge au fond pour imiter le sang. Un avertissement indiquait qu’on pouvait se faire saigner, appliquer les ventouses et les vésicatoires, et recevoir des ordonnances par-dessus le marché ; tandis que les opérations plus lucratives, mais moins honorables, qui avaient rapport à la barbe et aux cheveux, étaient plus brièvement et plus simplement annoncées. Dans l’intérieur, on voyait le fauteuil de cuir bien luisant où toutes les pratiques allaient se poser, et la guitare, alors appelée ghittern ou cittern, qui servait aux habitués à s’amuser eux-mêmes pendant que leur devancier était entre les mains de Benjamin, et obtenait ainsi l’avantage d’avoir les oreilles écorchées, par métaphore, tandis que son menton subissait la scarification réelle du rasoir. Tout, de ce côté, indiquait donc le chirurgien barbier, ou le barbier chirurgien.

Mais il y avait au fond une petite salle, dont on se servait comme d’un cabaret, et qui avait une entrée séparée par une allée sombre et tortueuse, communiquant avec Fleet-Street, après plusieurs circuits à travers divers passages et différentes cours. Ce temple écarté de Bacchus était aussi en communication avec la boutique de Benjamin, par un corridor long et étroit qui conduisait au sanctuaire secret où quelques vieux buveurs avaient coutume de faire leurs libations du matin, et où d’autres timides amateurs du petit verre venaient, d’une manière indirecte, avaler la goutte de liqueur, après être entrés par la boutique du barbier sous prétexte de se faire raser. Cette petite salle obscure avait en outre une issue conduisant à l’appartement de dame Ursule : c’est par là qu’elle passait pour agir dans le cours de ses diverses fonctions, pour faire sortir ou entrer secrètement ceux de ses clients qui ne se souciaient pas de lui rendre visite ouvertement. En conséquence, après midi, heure à laquelle les buveurs honteux, qui étaient les meilleures pratiques de Benjamin, avaient fini de prendre leur petit verre, la petite salle changeait de destination, et le soin d’ouvrir la petite porte de derrière passait d’un des apprentis du barbier à la petite mulâtresse, l’Iris à teint cuivré de dame Suddlechop. Alors arrivait mystère sur mystère ; alors on voyait se glisser dans les sombres détours de l’allée des galants enveloppés dans leurs manteaux, des femmes masquées et se cachant sous différents déguisements ; et tout, jusqu’au léger coup de marteau qui réclamait l’attention de la petite créole, avait quelque chose qui indiquait la crainte d’être découvert.

Ce fut le soir du jour où Marguerite avait eu avec lady Hermione la longue conversation que nous avons rapportée, que dame Suddlechop donna ordre à sa petite portière de tenir la porte fermée aussi exactement que la bourse d’un avare, et si elle faisait cas de sa peau de safran, de ne laisser entrer que la personne dont elle lui dit tout bas le nom en l’accompagnant d’un geste expressif. La petite créature fit un signe d’intelligence et s’en alla à son poste ; un moment après, elle introduisit en présence de la dame ce même bourgeois de la Cité dont nous avons dit que les habits allaient si mal à sa taille, et qui s’était si bravement comporté dans la querelle chez Beaujeu, la première fois que Nigel fut présenté à l’Ordinaire. La jeune mulâtresse l’annonça : « Maîtresse, dit-elle, voilà le beau gentilhomme tout d’or et de velours ; » puis elle murmura entre ses dents en fermant la porte : « Un beau gentilhomme vraiment ! lui être apprenti de celui qui fait le tic-tac. »

C’était en effet, nous le disons à regret, et nous espérons que le lecteur partagera l’intérêt que nous y prenons, c’était en effet l’honnête Jin Vin, qui, livré à sa mauvaise tête et abandonné de son bon ange, s’était émancipé au point de se travestir de temps en temps de la sorte pour visiter, sous le costume d’un galant du jour, ces lieux de plaisir et de dissipation, qu’il n’aurait pu fréquenter sous les habits de sa classe et de sa profession, sans se couvrir à jamais de honte, en supposant toutefois qu’il lui eût été possible de s’y faire admettre de cette manière. Il entra le front couvert d’un sombre nuage ; son riche habit, qui avait été mis à la hâte, était boutonné de travers ; son ceinturon était bouclé si maladroitement, que l’épée s’écartait de son côté, au lieu d’y être suspendue avec grâce et négligence, et son poignard, quoique doré et bien travaillé, était fiché dans sa ceinture comme le couteau d’un boucher dans les plis de son tablier bleu. Nous dirons, en passant, que les gens d’une éducation distinguée avaient autrefois l’avantage d’être beaucoup mieux accueillis du vulgaire qu’ils ne le sont aujourd’hui ; car ce qu’était anciennement le vertugadin et le panier aux dames de la cour, l’épée l’était aux gentilshommes : c’était un article de la toilette qui ne faisait que rendre ridicules ceux qui le portaient par hasard. La rapière de Vincent s’embarrassa dans ses jambes ; et comme elle le fit trébucher, il s’écria : « Morbleu ! c’est la seconde fois qu’elle me joue ce tour… on dirait, ma foi, que ce maudit colifichet sait que je ne suis pas un véritable gentilhomme, et qu’il le fait exprès. — Allons, allons, mon honnête Jin Vin, mon brave garçon, » dit la dame d’un ton caressant, « ne t’inquiète pas de toutes ces babioles ; un franc et joyeux apprenti de Londres vaut tous les muscadins de la cour. — J’étais en effet un franc et joyeux apprenti de Londres avant de vous connaître, dame Suddlechop, dit Vincent ; mais que suis-je devenu par vos conseils ? c’est à vous que je laisse le soin de le dire, car, pour moi, je rougis d’y penser. — Vraiment ! dit la dame, voilà où nous en sommes ?… Allons, je n’y connais qu’un remède… » Et là-dessus allant à un petit buffet sculpté qui occupait un coin de la salle, elle l’ouvrit à l’aide d’une clef qui, avec une demi-douzaine d’autres, pendait à une chaîne d’argent attachée à sa ceinture, et en tira une longue fiole de verre recouverte d’osier, et deux verres de forme flamande, à longue patte et à large ventre. Elle en emplit un jusqu’aux bords pour son hôte, et le second plus modestement jusqu’aux deux tiers environ qu’elle garda pour elle-même. Tout en versant les flots huileux de la précieuse liqueur, elle dit : « C’est de vraie rosa solis, merveilleuse, s’il en fut jamais, pour bannir les humeurs noires. »

Mais quoique Jin Vin eût avalé son verre sans scrupule, tandis que la dame, plus modérément, buvait le sien à petites gorgées, son humeur ne parut pas en éprouver un grand changement. Au contraire, se jetant dans le grand fauteuil de cuir où dame Ursule avait l’habitude de se reposer le soir, il se déclara l’être le plus misérable qui fût dans le quartier de Bow-Bell.

« Et pourquoi seriez-vous assez sot pour vous figurer cela, enfant que vous êtes ? dit dame Suddlechop… Mais c’est ce qui arrive toujours : les fous et les enfants ne savent jamais quand ils sont bien. Comment donc ? il n’y a pas un jeune homme, soit qu’il porte le panache ou le bonnet plat, qui reçoive autant de tendres œillades que vous, Jin Vin, quand vous traversez Fleet-Street, la batte sous le bras et le bonnet sur l’oreille ; et vous savez bien que, depuis madame la Député[2] elle-même, jusqu’aux jeunes filles de la rue, toutes sont à clignoter et à regarder à travers leurs doigts quand vous passez : cependant vous vous appelez un être misérable, et il faut que je vous dise et vous répète la même chose comme je ferais sonner tous les carillons de Londres à un enfant boudeur pour le remettre de bonne humeur. »

La flatterie de dame Ursule parut avoir le même sort que son cordial… Elle fut bien avalée, et non sans quelque plaisir, par le jeune homme, mais elle ne produisit pas l’effet d’un calmant sur son esprit agité. Il sourit un moment, moitié de mépris, moitié de vanité satisfaite ; mais il reprit bientôt son air soucieux, et jeta un regard sombre sur dame Ursule en répondant à ses dernières paroles.

« Vous me traitez en effet comme un enfant quand vous me répétez toujours la même chanson, quoique je ne m’en soucie pas plus que d’une rognure de cuivre. — Ah, ah ! dit dame Ursule : c’est-à-dire que vous vous souciez peu de plaire à toutes, si une seule vous échappe. Vous êtes un véritable amant, je le déclare, et peu vous importent toutes les beautés de la Cité, jusqu’à White-Chapelle, pourvu que vous puissiez gagner les bonnes grâces de la jolie Marguerite Ramsay… Allons, prenez patience, mon garçon, et laissez-vous guider par moi, car c’est moi qui finirai par vous réunir. — Il en serait temps, dit Jin Vin, car jusqu’à présent c’est vous qui nous avez séparés. »

Dame Suddlechop venait de finir sa liqueur… Ce n’était pas le premier verre qu’elle en avait pris dans la journée ; et quoique ce fût une femme douée d’une tête forte, et qui mettait de la prudence, sinon de la sobriété, dans ses libations, on peut toutefois supposer que le régime qu’elle suivait n’était pas fait pour augmenter sa patience.

« Eh quoi ! s’écria-t-elle, méchant petit ingrat, n’ai-je pas fait tout au monde pour te mettre dans les bonnes grâces de ta maîtresse ? Elle aime la noblesse, cette orgueilleuse péronnelle écossaise, autant qu’un Gallois aime le fromage, et elle renferme dans son cœur le souvenir de l’origine de son père, qu’elle dit descendre du duc de Daldevil, ou quelque chose d’approchant, comme un trésor enfermé dans la cassette de l’avare. Elle ne pense, elle ne rêve qu’à épouser un gentilhomme ; ainsi donc j’ai fait de toi un gentilhomme, Jin Vin ; le diable ne peut nier cela. — Vous avez fait un sot de moi, » dit le pauvre Jin Vin, en regardant la manche de son pourpoint.

« On n’en est pas moins bon gentilhomme pour cela, » dit dame Ursule en riant.

« Et ce qu’il y a de pis, » dit-il en se retournant brusquement sur sa chaise, « vous avez fait de moi un fripon. — On n’en est pas moins bon gentilhomme pour cela, » dit dame Ursule du même ton… « Qu’un homme porte ses sottises gaiement, et sa friponnerie hardiment, et nous verrons si la gravité et la probité oseront le regarder en face aujourd’hui. Bon, mon cher ! c’était au temps du roi Arthur qu’un gentilhomme était supposé tenir son écusson en dépassant la ligne de la raison et de la droiture… mais de nos jours, pour faire un gentilhomme, il ne faut que jurer avec grâce, avoir le regard hardi, la main prompte, de riches habits et une tête folle. — Je sais ce que vous avez fait de moi, dit Jin Vin, depuis que j’ai abandonné le ballon et les quilles pour la paume et le jeu de boule, la bonne ale anglaise pour le léger bordeaux et l’aigre vin du Rhin, le bœuf rôti et le pouding pour les faisans et les bécasses, ma batte pour une épée, mon bonnet pour un chapeau, mes exclamations bourgeoises pour les jurons à la mode, mes honnêtes passe-temps pour un cornet à dés, ma religion pour les antiennes du diable, et ma bonne réputation… Femme, je serais capable de t’assommer, quand je songe quels sont les conseils qui m’ont entraîné dans tout ceci ! — Quels conseils, quels conseils donc ? Allons, parle, misérable apprenti, et dis qui t’a donné ces conseils, » répondit la dame Ursule enflammée d’indignation… « Allons, voyons, expliquez-vous, mon camarade, et dites quels sont les conseils qui vous ont rendu joueur, et fripon, qui plus est, comme vos paroles le font entendre… Que le Seigneur nous délivre de tout mal ! » Et ici la dame Ursule se signa dévotement.

« Écoutez, dame Ursule Suddlechop, » s’écria Jin Vin se levant brusquement, ses yeux noirs étincelant de colère, « rappelez-vous que je ne suis pas votre mari ; et si je l’étais, vous feriez bien de vous souvenir de quelle porte on a balayé le seuil à la dernière procession du Skimmington[3], où l’on promena une ménagère acariâtre de votre espèce. — J’espère auparavant vous voir monter à Holborn, » dit la dame Ursule, à qui la colère avait fait oublier toutes ses expressions doucereuses… « avec un bouquet à la boutonnière et un prêtre à votre côté. — Cela pourrait bien arriver, » répondit Jin Vin amèrement, « si je continuais à me diriger par vos conseils ; mais avant que ce jour arrive, vous saurez que Jin Vin a, d’un coup d’œil, à sa disposition, tous les braves apprentis de Fleet-Street… oui, maudite sorcière, vous serez conduite en charrette à Bridewell, comme entremetteuse et magicienne de la première volée, au son de tous les chaudrons et poêles qui sont entre Temple-Bar et Saint-Paul, qu’on frappera devant vous comme si le diable lui-même battait dessus avec son pied fourchu. »

Dame Ursule devint écarlate, saisit le flacon de liqueur à moitié vide, et sembla, d’après son premier mouvement, sur le point de le lancer à la tête de son adversaire. Mais tout à coup, faisant sur elle-même un effort extraordinaire, elle réprima la violence de son ressentiment : rendant à la bouteille son usage légitime, elle remplit les deux verres avec un calme étonnant, en prit un, et dit avec un sourire qui allait mieux à sa figure joviale que l’expression de fureur qui l’animait un moment auparavant :

« À ta santé, Jin Vin, mon garçon, et cordialement, quelque mal que tu me veuilles, à moi qui ai toujours été une mère pour toi. »

La bonhomie anglaise de Jin Vin ne put résister à ce puissant appel. Il prit l’autre verre, et ayant bu amicalement à la santé de la dame, en signe de réconciliation, il entreprit, en murmurant encore un peu, de faire quelques excuses sur son emportement.

« Car vous savez, dit-il, que c’est vous qui m’avez persuadé de me procurer ces beaux habits, d’aller à ce maudit Ordinaire, de me mêler à tous ces grands seigneurs, et de venir vous rapporter les nouvelles… C’est vous qui m’avez répété que moi, le coq de mon village, je deviendrais bientôt le coq de l’Ordinaire. À vous entendre, je devais gagner au gleek et au primero dix fois autant qu’à nos jeux de bourgeois et d’apprentis ; les dés devaient me réussir aussi bien que les quilles… Puis, vous ajoutiez que les nouvelles apprises par moi à l’Ordinaire, d’après le parti que vous en sauriez tirer, feraient notre fortune à tous deux ; et maintenant vous voyez ce qui en est résulté. — Tout ce que tu dis là est vrai, mon garçon, répondit la dame ; mais il faut prendre patience… Rome n’a pas été bâtie en un jour… Vous ne pouvez vous habituer à votre habit de cour en un mois de temps, pas plus que lorsque vous avez échangé les longues robes pour les culottes ; et quant à ce qui est du jeu, on doit s’attendre à y perdre comme à y gagner… c’est le joueur qui se lève le dernier qui fait rafle de tout. — Ce que j’en sais, c’est que j’ai tout perdu, répondit Jin Vin, et je voudrais en être quitte pour cela ; mais je dois encore toute cette belle parure : le jour de rendre mes comptes approche ; mon maître les trouvera en défaut d’une vingtaine de pièces au moins : il s’en prendra à mon vieux père pour les remplacer ; et moi.. je n’aurai d’autre ressource que de me pendre pour en éviter la peine au bourreau, ou de faire le voyage de la Virginie. — Ne parlez pas si haut, mon cher enfant, dit dame Ursule… Mais dites-moi pourquoi vous n’empruntez pas à un ami pour remettre vos comptes en règle ? vous pourriez le lui rendre quand ce serait son tour. — Non, non, j’ai assez de tout cela, dit Jin Vin : Tunstall me prêterait bien cet argent, le pauvre garçon, s’il l’avait lui-même ; mais sa famille, plus pauvre que noble, le dépouille de tout, et le laisse aussi nu qu’un bouleau à Noël… Non, non : mon sort peut s’écrire en cinq lettres, ruine. — Chut ! chut ! poule mouillée que vous êtes ; n’avez-vous jamais entendu dire que c’est quand le malheur est au comble que le secours est le plus proche ? Il est encore possible que nous vous aidions, et plus tôt que vous ne croyez. Je vous assure que je ne vous aurais jamais conseillé un tel genre de vie, si vous ne vous étiez pas obstiné à vous mettre en tête la jolie mistress Marguerite, sans vouloir vous en départir. Et que pouvais-je faire, sinon de vous conseiller de dépouiller votre peau d’artisan, et de tenter la fortune là où tant d’autres la trouvent ? — Oui, oui, je n’ai point oublié vos conseils, dit Jenkin ; c’était vous qui deviez me présenter à elle, quand j’aurais été un galant achevé et aussi riche que le roi, et alors sa surprise aurait été grande de reconnaître le pauvre Jin Vin qui, depuis la cloche des matines jusqu’au couvre-feu, épiait un de ses regards… Et maintenant, au lieu de tout cela, voilà qu’elle s’est entêtée de cet épervier de lord écossais qui m’a gagné jusqu’à mon dernier sou ! puisse-t-il être maudit ! de sorte que me voilà perdu en amour, en fortune et en réputation, avant d’avoir fini mon apprentissage, et tout cela par vos conseils, la mère la Nuit. — Ne me donnez pas un autre nom que le mien, Jenkin, mon bon ami, » dit Ursule d’un ton qu’elle cherchait à rendre flatteur, mais où perçait la colère… « prenez-y garde car je ne suis pas une sainte, mais une pauvre pécheresse qui n’a pas plus de patience qu’il n’en faut pour la soutenir au milieu de mille traverses. Si je vous ai fait du tort par de mauvais conseils, il faut que je tâche de le réparer en vous en donnant de bons… Quant aux vingt pièces qu’il vous faut trouver pour le jour des comptes, tenez, il y a dans cette bourse verte assez d’or pour combler ce déficit. Enfin nous tâcherons que le vieux Crosspatch, le tailleur, nous accorde du temps pour vos habits… et… — Parlez-vous sérieusement, la mère ? » dit Jin Vin, qui n’en pouvait croire ni ses yeux ni ses oreilles.

« Oui, sur ma foi, répondit la dame… Eh bien, m’appellerez-vous maintenant la mère la Nuit, Jin Vin ? — La mère la Nuit ! » s’écria Jin Vin en serrant la dame dans ses bras avec transport, et appliquant sur sa joue encore fraîche un baiser retentissant qui ne lui fut pas désagréable. « La mère le Jour plutôt, qui vient de se lever pour me faire sortir des ténèbres… une mère plus chère que celle qui m’a porté, car celle-là, la pauvre femme ! n’a fait que m’amener dans un monde de péchés et de chagrins, et votre secours opportun vient de me tirer de l’un et de l’autre. » En disant ces mots, le bon garçon se rejeta sur sa chaise et passa la main devant ses yeux.

« Vous ne voulez donc plus me faire courir le Skimmington, dit la dame, ni m’envoyer en charrette à Bridewell, au bruit de tous les chaudrons du quartier ? — J’aimerais mieux être conduit moi-même à Tyburn, » répondit l’apprenti repentant.

« Eh bien donc, essuyez vos yeux, et montrez que vous êtes un homme ; et si vous êtes content de ce que je viens de faire, je vous apprendrai comment vous pouvez le reconnaître. — Comment ! » dit Jenkin en se relevant sur sa chaise, « vous attendez de moi quelque service pour le plaisir que vous venez de me faire ?

— Oui vraiment, dit dame Ursule ; car vous le saurez, quoique je sois charmée de vous rendre service au moyen de cet or, il ne m’appartient pas, et fut placé entre mes mains à la charge de trouver un agent fidèle pour un certain but… Mais qu’avez-vous donc ? êtes-vous assez fou pour vous fâcher de ne pas avoir une bourse d’or pour rien ? Je voudrais savoir où on les rencontre… je n’en ai jamais trouvé sur ma route, je vous jure. — Non, non, dit le pauvre Jenkin, ce n’est pas cela ; car, voyez-vous, j’aimerais mieux au contraire travailler aux ouvrages les plus durs, et vivre de mon travail, mais… — Mais… quoi ? mon garçon ! interrompit Ursule… vous êtes disposé à travailler pour vos besoins, et cependant, quand je vous propose de gagner de l’or, vous me regardez comme le diable regarde Lincoln. — Il ne fait pas bon parler du diable, la mère, dit Jenkin ; c’est tout justement à lui que je pensais ; car, voyez-vous, je suis dans cette position où l’on dit qu’il se montre aux pauvres désespérés, et leur offre de l’or en échange de leur salut. Mais il y a deux jours que je travaille à m’armer de résolution, et à me résigner à souffrir la honte et le malheur auxquels je dois m’attendre, plutôt que de prendre quelque mauvaise route pour sortir des difficultés où je suis plongé. Ainsi, faites attention, dame Ursule, à ne pas me tenter. — Je ne vous tente en rien, jeune homme, répondit Ursule, et comme je m’aperçois que vous êtes trop obstiné pour prendre un parti sage, je m’en vais remettre ma bourse dans ma poche, et chercher quelqu’un mieux disposé à me témoigner sa reconnaissance par le service que je lui demanderai. Quant à vous, continuez comme vous avez commencé ; rompez vos engagements, ruinez votre père, perdez-vous de réputation, et faites vos adieux à la jolie Marguerite ; c’est tout comme vous voudrez.

— Arrêtez, arrêtez, vous êtes aussi pressée qu’un boulanger dont le four est trop chaud. Apprenez-moi du moins ce que vous vouliez me proposer. — Eh bien ! il s’agit seulement de rendre un service à un gentilhomme de haut rang, qui se trouve maintenant dans l’embarras, et de lui faire redescendre la rivière jusqu’à l’île des Chiens, ou quelque autre de ce côté, où il reste en sûreté jusqu’au moment de passer à l’étranger. Je sais que tu connais les bords de la rivière, aussi bien que le diable connaît un usurier, et le mendiant son écuelle. — Peste soit de vos comparaisons, dame Ursule ! répondit l’apprenti ; car c’est le diable qui me donna cette connaissance, et la mendicité peut être le résultat… Mais qu’a donc fait ce gentilhomme pour avoir besoin de se cacher ?… Ce n’est pas un papiste, j’espère ? ni un complice de l’affaire Caterby et Piercy ?… rien qui ressemble au complot des poudres ? — Fi, fi donc !… pour qui me prenez-vous ?… Je suis aussi bonne protestante que la femme du ministre, seulement mes affaires ne me permettent d’aller à l’église que le jour de Noël… Non, non, il ne s’agit pas de papisme : ce gentilhomme en a tout simplement frappé un autre dans le parc. — Ah ! quoi ? » dit Vincent, qui l’interrompit en tressaillant.

« Oui, oui… je vois que vous devinez qui je veux dire… c’est cela même, c’est celui dont nous avons parlé si souvent, lord Glenvarloch en personne. » Vincent s’élança de son siège et se mit à parcourir la chambre d’un pas rapide et brusque.

« Là ! voilà ce que c’est maintenant… vous êtes toujours comme de la glace ou comme de la poudre à canon… Vous restez assis sur ce grand fauteuil de cuir aussi tranquille qu’une fusée sur son cadre dans une nuit de réjouissance, jusqu’à ce que la mèche ait été allumée, et puis, psit… vous voilà parti au troisième ciel, hors de la portée des yeux, de la voix et de la pensée. Quand vous vous serez fatigué à parcourir cette chambre, me ferez-vous la grâce de m’apprendre votre résolution ? car le temps presse. Voulez-vous m’aider dans cette affaire, oui ou non ? — Non, non, non, mille fois non ; ne m’avez-vous pas avoué que Marguerite l’aimait ? — C’est vrai : c’est-à-dire elle le croit ; mais cela ne durera pas long-temps. — Et ne vous ai-je pas dit, il n’y a qu’un moment, que c’était ce même Glenvarloch qui m’avait dépouillé de mon dernier sou à l’Ordinaire, et qui, de plus, avait fait de moi un fripon, en me gagnant ce qui n’était pas à moi… ce maudit or que Shortyar le mercier me remit ce matin-là pour le raccommodage de l’horloge de Saint-Étienne ? Si je ne l’avais pas eu sur moi, je n’aurais fait que vider ma bourse sans manquer à la probité… mais après avoir été plumé de tout le reste par les autres, n’a-t-il pas fallu que je risquasse ces cinq dernières pièces avec ce requin avaleur de goujons ? — D’accord, je sais tout cela ; et comme c’est contre lord Glenvarloch que vous jouâtes en dernier, vous avez lieu de l’accuser de votre ruine. Je conviens de plus que Marguerite l’a fait votre rival… Et cependant lorsqu’il court le risque de perdre la main, ce n’est assurément pas le moment de se rappeler tout cela. — Par ma foi, peu m’importe !… Perdre la main… vraiment il pourrait bien encore perdre sa tête que je ne m’en soucierais pas davantage… l’une et l’autre ont fait de moi un misérable. — Et maintenant ne vaudrait-il pas mieux, mon petit prince des apprentis, pour que la balance se rétablît entre vous, vous servir de ce même lord écossais, qui vous a, comme vous le dites, privé de votre maîtresse et de votre argent, pour les recouvrer bientôt tous deux ? — Et comment votre sagesse réussira-t-elle à amener cette conclusion, mère Ursule ?.. Pour mon argent, je puis le concevoir, c’est-à-dire si je consens à votre proposition ; mais ma gentille Marguerite, comment, en servant ce lord dont elle s’est follement entêtée, cela peut-il favoriser mon amour ?… c’est au-dessus de ma conception. — C’est tout simplement parce que tu ne connais pas plus le cœur d’une femme qu’un véritable oison. Écoute-moi, mon garçon : si je vais dire à miss Marguerite qu’il est arrivé malheur au jeune lord parce que tu as refusé de lui prêter secours, tu lui deviendras odieux à jamais ; elle te haïra comme le bourreau qui doit trancher la main de lord Glenvarloch, et n’en sera que plus ferme dans son amour pour lui. Pendant trois semaines, au moins, il ne sera bruit à Londres que de lui, on ne parlera, on ne s’occupera d’autre chose ; et toute cette rumeur servira à le rendre l’objet constant de ses pensées : car rien ne plaît tant à une jeune fille que de tenir à quelqu’un dont le nom est dans toutes les bouches. S’il subit le châtiment de la loi, il y a fort à parier qu’elle ne l’oubliera jamais. J’ai vu moi-même, du temps de la reine, périr sur l’échafaud ce pauvre Babington, qui était un gentilhomme distingué et un jeune et joli garçon, et quoique je ne fusse alors qu’une enfant, il me resta dans la tête plus d’un an après avoir été pendu… Mais par-dessus tout, qu’il ait sa grâce ou qu’il soit puni, lord Glenvarloch restera probablement à Londres, et sa présence entretiendra la ridicule fantaisie de cette petite folle, au lieu que s’il s’échappe… — Oui, montrez-moi ce qui m’en reviendra, dit Jenkin. — S’il s’échappe, » dit la dame, continuant son raisonnement, « il faut qu’il renonce à la cour pour des années, sinon pour toute sa vie, et vous connaissez le vieux proverbe… « Les absents ont toujours tort. » — C’est vrai, très-vrai ; vous parlez comme un oracle, très-sage Ursule. — Oui, oui, je savais bien que vous finiriez par entendre raison, » dit l’artificieuse commère. « Ainsi donc, quand le lord en question sera bien loin et parti une fois pour toutes, quel est celui, je vous prie, qui doit être le confident de notre jolie capricieuse, et remplir le vide de ses affections ? Qui ? si ce n’est toi, la perle des apprentis ! D’ailleurs, vous aurez fait violence à vos inclinations pour vous soumettre aux siennes, et il n’y a pas de femme qui ne soit sensible à cela… Vous aurez aussi couru quelque risque pour accomplir ses désirs ; et qu’est-ce qui plaît plus à une femme que le courage et le dévouement à sa volonté ! Ensuite vous posséderez son secret, ce qui l’obligera à vous traiter avec égard et déférence, à mettre sa confiance en vous, à vous parler en particulier, jusqu’à ce qu’enfin elle en vienne à ne plus pleurer que d’un œil l’amant absent qu’elle ne doit jamais revoir, et à sourire tendrement de l’autre à celui qui sera près d’elle. Alors, si vous ne savez pas profiter des circonstances où vous vous trouverez, vous n’êtes pas le jeune gaillard leste et adroit pour lequel on vous prend dans le monde… Ai-je bien dit ? — Vous avez parlé comme une impératrice, éloquente Ursule, dit Jenkin Vincent, et votre volonté sera faite. — Vous connaissez bien l’Alsace ? — Pas mal, pas mal, » répondit-il en secouant la tête, « j’y ai entendu rouler les dés autrefois, avant de faire le gentilhomme et de me mêler aux muscadins qui vont chez le chevalier Beaujeu, comme on l’appelle ; et des deux, le dernier est assurément le pire guet-apens, quoique l’apparence en soit plus brillante. — Et l’on a sans doute de la considération pour toi dans cet endroit ? — Oui, oui ; quand j’aurai repris mon pourpoint de gros drap et ma batte, je suis en état de me promener dans l’Alsace à minuit comme dans Fleet-Street en plein jour… Il n’y en a pas un qui ose faire le tapageur avec le prince des apprentis et le roi des bâtons… Ils savent que d’un mot je pourrais leur faire tomber sur les bras tous les grands garçons du quartier. — Et vous connaissez bien les bateliers ? — Je puis converser avec chacun d’eux dans son jargon, depuis Richmond jusqu’à Gravesend, et je connais tous les matadors de la rivière, à compter de John Taylor le poète jusqu’au petit Grigg le grimacier, qui ne donne jamais un coup de rame sans ouvrir la bouche jusqu’aux oreilles. — Et vous pouvez prendre le déguisement et jouer le rôle qu’il vous plaira, tel, par exemple, que celui de batelier, de boucher ou de soldat ? — Il n’y a pas de mime qui me vaille dans tout Londres, et tu ne l’ignores pas, la mère. Je puis délier les acteurs du théâtre de la Fortune eux-mêmes, pour toute espèce de rôle, excepté celui de gentilhomme ; ôtez-moi cette maudite friperie où il semble que le diable m’a enfermé lui-même, et vous ne me mettrez aucun costume qui ne m’aille comme si j’étais né pour le porter. — Eh bien ! nous parlerons tout-à-l’heure de votre métamorphose, et nous vous trouverons des habits, et qui plus est de l’argent, car il en faudra beaucoup pour mener à bien la chose. — Mais d’où cet argent doit-il venir ? c’est une question que je voudrais bien vous faire avant d’y toucher. — Bon Dieu ! êtes-vous fou de me faire cette question ? Supposez que c’est moi qui veux bien l’avancer pour obliger notre jeune maîtresse, quel mal y a-t-il à cela ? — Je ne puis rien supposer de semblable, » dit vivement Jenkin ; « je sais que vous, dame Ursule, n’avez jamais d’argent de trop, et que même vous ne vous soucieriez peut-être pas de l’avancer si vous l’aviez. Ainsi cela ne passera pas comme cela ; il faut qu’il vienne de Marguerite elle-même. — Eh bien ! animal soupçonneux, quand cela serait ? dit Ursule. — En ce cas, j’irai la trouver tout à l’heure, et je saurai d’elle si c’est d’une manière honorable qu’elle possède tant d’argent comptant ; car plutôt que de consentir à ce qu’elle se le procurât par quelque mauvaise voie, j’aimerais mieux tout d’un coup m’aller pendre… c’est déjà bien assez de ce que j’ai fait moi-même, sans que la pauvre Marguerite se perde aussi de son côté. Je vais la trouver, lui représenter le danger qu’elle court ; j’y vais, de par le ciel ! — Êtes-vous fou d’y penser ! » dit la dame Suddlechop fort alarmée. « Écoutez-moi un instant. Je ne sais pas précisément de qui elle a eu cet argent, mais je sais qu’elle l’a rapporté de chez son parrain. — Mais comment ! maître George n’est pas de retour de France ? — Non, mais dame Judith est à la maison, et il va aussi une dame étrangère qu’on appelle le Spectre de maître Heriot… Elle ne sort jamais. — C’est vrai, dame Suddlechop, et je crois que vous avez deviné juste… On dit que cette dame a de l’argent à volonté ; et si Marguerite peut avoir une poignée de l’or des fées, elle est libre de le prodiguer comme il lui plaît. — Ah ! Jin Vin, » dit la dame en baissant la voix d’un air mystérieux, « l’or ne nous manquerait pas non plus, si nous pouvions deviner seulement l’énigme de cette dame. — La devine qui voudra : je ne me mêle jamais de ce qui ne me regarde point. Maître Heriot est un brave et digne marchand, l’honneur de la ville de Londres, et il a le droit de faire chez lui ce qu’il veut. On parlait un jour (c’était le 5 novembre de l’année dernière) d’assembler la populace devant sa maison, parce qu’il y tenait un couvent, disait-on, comme lady Foljambe ; mais maître George est fort aimé des apprentis, et nous reçûmes le renfort d’un si grand nombre de vigoureux gaillards, que nous aurions eu bientôt dissipé la populace si elle avait osé se soulever. — Eh bien ! laissez cela, et dites-moi maintenant quel moyen vous trouverez pour vous absenter de la boutique un jour ou deux, car il faut bien ce temps pour exécuter cette entreprise. — Ma foi, quant à cela, je ne puis vous répondre ; jusqu’à présent j’ai toujours fait mon devoir exactement, et je n’ai pas le cœur de faire l’école buissonnière et de frustrer le maître de mon temps comme de son argent. — Le point important est qu’il rattrape son argent ; car sans cette affaire il risque de ne le revoir jamais. Ne pourriez-vous pas demander la permission d’aller voir votre oncle dans le comté d’Essex pendant deux ou trois jours ; il pourrait être malade, vous savez… — Allons, s’il le faut, j’en passerai par là, » dit Jenkin en poussant un profond soupir ; « mais on ne me reprendra plus à suivre ces voies sombres et tortueuses. — Chut ! n’en parlons plus, interrompit Ursule ; allez demander la permission pour ce soir même ; quand vous reviendrez, je vous dirai ce que vous avez à faire… Arrêtez, arrêtez ! le pauvre garçon est fou ! Est-ce que vous voudriez rentrer sous ce costume dans la boutique de votre maître ? Votre malle est dans la chambre d’à côté avec vos habits d’apprenti, allez vite les revêtir. — Il faut que je sois ensorcelé, dit Jenkin, ou que ces livrées de la folie aient fait de moi un aussi grand âne que certains personnages à qui je les vois porter. Mais une fois débarrassé de ces harnais, si vous me rattrapez à les reprendre, je vous permets de me vendre à une bande d’Égyptiens pour porter des pots, des marmites et les marmots de la troupe tout le reste de ma vie. »

En parlant ainsi, il alla changer de vêtements.



  1. Il y a dans le texte un jeu de mots sur l’expression cut ou couper : comme barbier, celui-ci peut couper le menton de sa pratique avec son rasoir ; et si sa pratique boit trop de bière, elle peut s’enivrer, ce qu’en anglais on exprime aussi par le verbe cut. a. m.
  2. Mistress Deputy’self, madame Député elle-même, la femme de l’échevin ou magistrat du quartier. a. m.
  3. Le Skimmington, d’après l’auteur anglais, est une espèce de procession triomphale en l’honneur de la suprématie du sexe, lorsqu’elle parvenait assez haut pour attirer l’attention du voisinage. Elle est décrite au long dans Hudibras (partie II, chant ii). Au passage de la procession, ceux qui en faisaient partie balayaient le seuil des maisons où la renommée affirmait que la femme du logis avait la suprême autorité : on lui accordait une pareille déférence, comme un avertissement pour elle de se préparer à son tour à l’ovation complète. Le Skimmington, qui avait quelque analogie avec le Mumbo-Jumbo d’un village africain, a, depuis long-temps, cessé d’avoir lieu en Angleterre. Apparemment, ajoute Walter Scott, parce que la domination féminine est devenue plus douce ou moins fréquente que chez nos ancêtres. a. m.