Les Lettres d’Amabed/Lettre 4a d’Amabed
QUATRIÈME LETTRE
D’AMABED À SHASTASID.
Cher ami, cher père, nous partons, la tendre Adaté et moi, pour te demander ta bénédiction. Notre félicité serait imparfaite si nous ne remplissions pas ce devoir de nos cœurs ; mais, le croirais-tu ? nous passons par Goa, dans la compagnie de Coursom, le célèbre marchand, et de sa femme. Fa tutto dit que Goa est devenue la plus belle ville de l’Inde ; que le grand Albuquerque nous recevra comme des ambassadeurs ; qu’il nous donnera un vaisseau à trois voiles pour nous conduire à Maduré[1]. Il a persuadé ma femme, et j’ai voulu le voyage dès qu’elle l’a voulu. Fa tutto nous assure qu’on parle italien plus que portugais à Goa. Charme des yeux brûle d’envie de faire usage d’une langue qu’elle vient d’apprendre : je partage tous ses goûts. On dit qu’il y a des gens qui ont eu deux volontés ; mais Adaté et moi nous n’en avons qu’une, parce que nous n’avons qu’une âme à nous deux. Enfin nous partons demain avec la douce espérance de verser dans tes bras, avant deux mois, des larmes de tendresse et de joie.
- ↑ Ville située au sud de la presqu’île de l’Inde.