Page:Œuvres complètes de Delphine de Girardin, tome 2.djvu/101

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cun de ses intérêts, et d’animer, par son esprit et la prévenance de ses manières, une réunion de jolies femmes et d’hommes remarquables par leurs talents et leur célébrité. Les conversations étaient brillantes ; on s’amusait. Valentine, qui n’était jamais aimable en présence de sa belle-mère, ne la regrettait nullement pour sa part. Elle sentait tous les avantages que lui donnait cette liberté ; et, fière de la bonne grâce avec laquelle elle s’acquittait de son rôle, elle attendait avec impatience l’arrivée de M. de Lorville pour paraître à ses yeux dans toute sa valeur.

Elle était bien un peu confuse d’avoir à lui parler de l’envoi de ce charmant tableau ; mais elle avait tant de choses à lui dire, tant de questions à lui adresser pour tâcher d’apprendre comment il était parvenu à découvrir qu’elle le désirait, que, dans sa joie et sa curiosité, elle espérait se tirer facilement d’une difficulté si grande.

Si M. de Lorville fût arrivé en ce moment, il aurait été ravi de tout ce qu’elle lui eût dit d’affectueux dans sa reconnaissance. Malheureusement pour Valentine il vint trop tard ; et, circonstance encore plus fâcheuse, ce fut madame de Clairange qui l’amena ; elle l’avait rencontré au moment où elle rentrait.

— Le voilà ! le voilà ! s’écria-t-elle en s’adressant à sa belle-fille ; dites-lui combien vous êtes heureuse de son aimable souvenir. Que ce tableau est enchanteur, et que c’est gracieux à vous d’avoir deviné que Valentine l’avait choisi ! vous ne sauriez vous imaginer tout le plaisir qu’il lui a fait. Elle en pleurait de joie quand je suis arrivée chez elle ; je l’ai trouvée en contemplation devant ce souvenir… En vérité, ajouta-t-elle en regardant Edgar d’un air fin, vous êtes un homme bien séduisant ; et je ne m’étonne plus si l’on pense à vous…

Cette déclaration, faite tout haut par la belle-mère, déplut tellement à Valentine, qu’elle l’interrompit sèchement et dit du ton le plus dédaigneux :

— Ce paysage est charmant, je l’ai beaucoup admiré ; mais je ne croyais pas que ce fût Monsieur…

Rt elle désignait Edgar.