Page:Œuvres complètes de Delphine de Girardin, tome 2.djvu/415

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
409
DE PONTANGES.

Et, malgré elle, Laurence retira la main que Lionel tenait encore.

— Adieu, dit-elle froidement, il faut que vous partiez.

— Oh ! non.

— Je le veux.

— Non, je resterai pour me justifier, pour vous expliquer ma conduite, vous empêcher de me maudire.

— Vous ne pouvez rester ici.

— Ma voiture est cassée.

— La mienne va venir tout à l’heure, dit Ferdinand. J’ai tout prévu, j’ai pris un cheval à la dernière poste pour vous prévenir, et vous donner le temps…

— C’est trop de soins, interrompit Lionel ; j’espère vous en témoigner bientôt ma reconnaissance.

— J’y compte bien ! reprit Ferdinand avec dédain.

— Nous partirons ensemble, monsieur.

Les yeux de Lionel étincelaient de colère.

— Non ; je vais de ce pas à Champigny. La duchesse m’a écrit : elle m’attend.

— Monsieur, il faut absolument que vous veniez avec moi.

— Je serai à vos ordres demain ; mais aujourd’hui je ne puis vous accompagner.

Cependant l’air furieux de M. de Marny commençait à inquiéter Laurence. Elle comprenait le ressentiment de Lionel, et elle voulut rendre sa vengeance impossible en la retardant.

— Lionel, je vous ai dit adieu… Vous ne pouvez rester ici plus longtemps ; on est inquiet de vous… Allez revoir ceux qui ont le droit de vous aimer.

Sa voix s’affaiblit à ces mots… Elle pleura. — Il le faut… Adieu… partez.

— Quand vous reverrai-je ?

— Hélas ! jamais…

Lionel partit en faisant signe à M. Dulac de le suivre.

— Monsieur, dit madame de Pontanges à ce dernier, j’ai un service à vous demander… Je vous verrai tout à l’heure, n’est-ce pas ?

Elle resta seule… seule avec son malheur ! et la plus horrible des pensées : Je viens de le voir pour la dernière fois !…