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DE PONTANGES.

son enfant pour moi… pour fuir avec, moi !… Oh ! je me fais horreur ! — Ma résolution est prise… il n’y a pas d’autre moyen… Je l’aime trop, je suis trop faible !… À moi seule je ne pourrais me défendre.

Elle se mit à une table et écrivit :

« Mon cher cousin, je vous garde une place ce soir dans ma loge à l’Opéra. J’espère que vous ne m’en voulez plus. Trois jours de rancune… c’est assez.

Laurence. »

— Oh ! dit-elle après avoir écrit, Lionel, que nous sommes coupables ! mais je vous empêcherai de commettre une infamie. J’aurai le courage de mettre entre nous deux un obstacle invincible. Dieu ! que je l’aime encore !… C’est affreux !…

Et elle sonna sa femme de chambre, et mit une très-belle robe de satin blanc.


XXV.

UNE SCÈNE DE MÉNAGE.


— Comme vous rentrez tard !…

— Il y a longtemps que je voulais revenir, mais madame de Pontanges me retenait toujours… Elle demeure si loin… et puis j’avais dit à Frédéric de ne pas presser les chevaux… je suis souffrante…

— Quel besoin aviez-vous de sortir aujourd’hui, si vous êtes malade ?

— Je croyais vous faire plaisir en faisant cette visite.

— Vous m’avez fait le plus grand plaisir, sans doute…

Lionel accompagna ces mots d’un abominable sourire ; sa pauvre femme étouffait, elle avait peur de pleurer.

— Je croyais, dit-elle, en allant voir madame de Pontanges, vous prouver que je n’étais plus jalouse ; il me semblait que c’était vous promettre de ne plus vous tourmenter, vous, dire enfin que j’avais confiance en vous.

— Je vous remercie de votre intention ; mais vous ne faites rien à propos, vous manquez de mesure en tout !… Autant il